Lutte antiterroriste: la communauté internationale doit tirer des leçons de l'expérience péruvienne, déclare la commissaire Sofia Macher

MONTRÉAL, 21 OCTOBRE 2002 - À l'heure où les Canadiens s'inqui'tent encore de l'impact de la Loi antiterroriste (C-36) sur leurs libertés civiles, Mme Sofia Macher, péruvienne et membre du conseil d'administration de Droits et Démocratie, sera en visite à Montréal les 24 et 25 octobre pour parler des leçons que les citoyens de son pays ont tirées de vingt années de lutte contre le terrorisme.

Madame Macher, membre de la Commission de la vérité et de la réconciliation, que le gouvernement péruvien a chargée d'enquêter sur les violences perpétrées par les groupes de guérilla et l'État entre 1980 et 2000, demandera également aux Canadiens d'intervenir et de faire pression sur le gouvernement péruvien pour qu'il octroie à la Commission les ressources qu'il a promises et qu'il s'engage à donner suite aux recommandations qu'elle émettra à la fin de son mandat, l'an prochain.

Durant la période couverte par la Commission de la vérité et de la réconciliation, 30 000 personnes, selon les estimations, ont perdu la vie dans des actes de violence politique imputables aux forces armées gouvernementales et aux mouvements de guérilla du Sentier Lumineux et du Mouvement révolutionnaire Tupac Amaru (MRTA). Plus de 4 000 personnes ont disparu aprês leur arrestation par les forces de sécurité, et plus de 600 000 ont d? fuir leurs villages à cause de la violence politique. En outre, en 2001, une commission ad hoc composée de représentants du gouvernement et de la société civile a établi l'innocence de plus de 500 personnes arr'tées et emprisonnées sans proc's en vertu de la loi antiterroriste draconienne adoptée en 1992 sous la présidence d'Alberto Fujimori.

À la lumi're de ce qui s'est passé au Pérou, Mme Macher estime que la communauté internationale doit assujettir les politiques de sécurité qu'elle adopte pour lutter contre le terrorisme aux normes des droits humains, qui constituent la pierre angulaire de la démocratie. "Nous ne pouvons pas défendre nos démocraties si nous ne respectons plus le droit à un proc's équitable, a déclaré le président de la Commission péruvienne, M. Salomon Lerner Febres. Quand une société fait passer la sécurité avant les droits de la personne, ou lorsque l'ordre public a préséance sur les libertés civiles des citoyens, c'est que la démocratie a adopté les tactiques et les principes - ou l'absence de principes - de ses adversaires, et qu'elle a en partie perdu la bataille."

La Commission péruvienne de la vérité et de la réconciliation recueille actuellement des témoignages sur la violence politique générée par une répression aveugle, et notamment la détention sans proc's, en vertu de la loi antiterroriste, de quelque 2 500 personnes. Bon nombre de celles-ci, considérées comme des prisonniers politiques par les organismes de défense des droits humains, ont été torturées durant leur détention et condamnées par des juges militaires qui dissimulaient leur visage sous une cagoule.

Contrairement à d'autres commissions analogues comme celles du Salvador, du Guatemala et d'Haïti, qui entendaient les témoignages exclusivement à huis clos, la Commission péruvienne, à l'exemple de celle d'Afrique du Sud, a tenu un certain nombre d'audiences publiques en vue de favoriser le processus de réconciliation. La Commission péruvienne tient aussi, dans des régions particulièrement touchées par le conflit armé, des audiences publiques où viennent témoigner des victimes et les membres de leurs familles. À partir de janvier 2003, les audiences porteront sur le rïle des organes et agents de l'État dans les actes de violence.

Sofia Macher prendra la parole lors d'une réunion publique le 24 octobre à Montréal (voir affiche ci-jointe) et pourra également donner des entrevues aux représentants des médias. Madame Macher parle espagnol et anglais. Madeleine Desnoyers, agente régionale de Droits et Démocratie pour les Amériques, qui a assisté aux audiences de la Commission péruvienne à Lima en septembre dernier, pourra elle aussi donner des entrevues. On peut aussi se procurer des vidéocassettes et des transcriptions des audiences de la Commission, en espagnol, auprês de Droits et Démocratie.

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