Tribunal canadien des 
relations professionnelles artistes-producteurs / Canadian Artists and Producers Professional Relations Tribunal
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Décision no 037

Décisions du Tribunal

Ottawa, le 4 janvier 2002 Dossiers : 1310-95-0021-A
1310-95-0007-A

Dans l'affaire de la demande d'accréditation présentée par l'Association des professionnels des arts de la scène du Québec (APASQ-CSN) et dans l'affaire de la demande d'accréditation présentée par l'Associated Designers of Canada


Décisions du Tribunal :

Le Tribunal accorde l'accréditation à l'Association des professionnels des arts de la scène du Québec (APASQ-CSN) dans une forme modifiée.

Le Tribunal accorde l'accréditation à l'Associated Designers of Canada dans une forme modifiée.

Lieux de l'audience : Montréal (Québec); Toronto (Ontario).

Dates de l'audience : Les 20 et 21 mars 2001; 27, 28 et 29 juin 2001; 1er novembre 2001.

Quorum : Me Robert Bouchard, président de séance
  M. David P. Silcox, membre
  Mme Moka Case, membre


Ont comparu :

Me Éric Lévesque et M. David Gaucher, pour l'Association des professionnels des arts de la scène du Québec
Mme Sherri Helwig et M. Dennis Horn, pour l'Associated Designers of Canada
Me Chantal Poirier et Mme Francine Bertrand-Venne, pour la Société professionnelle des auteurs et des compositeurs du Québec
Me Louise Cadieux, pour l'Union des artistes
M. James Wood, M. Sean McGee et M. Sylvain Bisaillon, pour l'International Alliance of Theatrical Stage Employees, Moving Picture Technicians, Artists and Allied Crafts of the United States and Canada
Me Jacques Béland, M. Pierre Rousseau et M. Alexandre Gazalé, pour le Centre national des Arts et Théâtres Associés Inc.
Mme Pat Bradley, pour la Professional Association of Canadian Theatres


Table of Contents:


Motifs de décision

1310-95-0021-A : Dans l'affaire de la demande d'accréditation présentée par l'Association des professionnels des arts de la scène du Québec (APASQ-CSN)
310-95-0007-A : Dans l'affaire de la demande d'accréditation présentée par l'Associated Designers of Canada


Contexte

[1] Cette décision porte sur deux demandes d'accréditation entendues par le Tribunal canadien des relations professionnelles artistes-producteurs (le « Tribunal ») en vertu de l'article 25 de la Loi sur le statut de l'artiste (L.C. 1992, ch. 33, ci-après « la Loi »). Le Tribunal devait initialement étudier la demande de l'Association des professionnels des arts de la scène du Québec (APASQ-CSN) (l'« APASQ ») et étudier la demande de l'Associated Designers of Canada (l'« ADC ») à une date ultérieure. Après l'audience tenue à Montréal les 20 et 21 mars, le Tribunal a jugé qu'il serait plus efficace d'entendre les demandes conjointement puisqu'elles sont concurrentielles en partie. L'examen de ces deux dossiers s'est donc poursuivi à Montréal les 27, 28 et 29 juin et à Toronto le 1er novembre 2001.

[2] Le Tribunal a reçu la demande d'accréditation de l'APASQ le 14 mars 1996. La demande originale visait un secteur de négociation composé de :

Tous les concepteurs de décors, de costumes, d'éclairage, de son, d'accessoires, de marionnettes, les metteurs en scène, les régisseurs, les peintres de décors, les directeurs techniques, les directeurs de production et tous les assistants aux costumes, aux décors et aux metteurs en scène oeuvrant sur le territoire du Québec ou au Centre national des Arts dans les domaines suivants : arts de la scène, danse et variétés.

[3] Un avis public de cette demande a été publié dans la Gazette du Canada du samedi 6 avril 1996 ainsi que dans La Presse et The Globe and Mail le mardi 9 avril 1996. L'avis public fixait au 17 mai 1996 la date limite avant laquelle les artistes, les associations d'artistes, les producteurs et les autres intéressés devaient faire connaître au Tribunal la nature de leur intérêt.

[4] Les associations d'artistes suivantes ont signifié leur intérêt à l'égard de la demande de l'APASQ :

  • l'Union des artistes (« UDA »),
  • la Canadian Actors' Equity Association (« CAEA »),
  • l'Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec (« ARRQ »),
  • la Société professionnelle des auteurs et des compositeurs du Québec (« SPACQ »),
  • l'Associated Designers of Canada (« ADC »);

les producteurs suivants :

  • la Professional Association of Canadian Theatres (« PACT »),
  • les Théâtres Associés Inc. (« TAI »),
  • le Centre national des Arts (« CNA »);

ainsi que l'artiste, Tibor Egervari.

[5] En septembre 1996, le Tribunal a accueilli la demande d'intervention de l'International Alliance of Theatrical Stage Employees, Moving Picture Technicians, Artists and Allied Crafts of the United States and Canada (« IATSE ») et lui a accordé un statut limité.

[6] La demande d'accréditation de l'APASQ a été traitée en partie en 1997 et 1998, quand le Tribunal a défini un secteur de négociation distinct pour les metteurs en scène et a ordonné la tenue d'un scrutin de représentation [voir Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec et al., 1997 TCRPAP 024]. L'UDA a emporté le scrutin et le Tribunal l'a accréditée le 24 juillet 1998 pour représenter un secteur comprenant les « metteurs en scène lors d'une production sur scène, en français, d'une oeuvre littéraire, musicale ou dramatique ou d'un numéro de mime, de variétés, de cirque ou de marionnettes » [voir Union des Artistes et Association des professionnels des arts de la scène du Québec, 1998 TCRPAP 027].

[7] Le secteur proposé par l'APASQ a subséquemment été amendé le 19 février 2001 pour faire suite à la décision du Tribunal accréditant l'UDA pour représenter les metteurs en scène et pour y exclure les directeurs techniques et les directeurs de production. Le secteur amendé se lit ainsi :

Tous les concepteurs de décors, de costumes, d'éclairage, de son, d'accessoires, de marionnettes, les régisseurs, les peintres de décors et tous les assistants aux costumes, aux décors et aux metteurs en scène oeuvrant sur le territoire du Québec ou au Centre national des Arts dans les domaines suivants : arts de la scène, danse et variétés.

[8] L'ARRQ s'est désistée de son intervention le 8 mars 2001. Tibor Egervari n'est pas intervenu lors des audiences publiques.

[9] Le Tribunal a reçu la demande d'accréditation de l'ADC le 14 septembre 1995. L'ADC désire être accréditée pour représenter « un secteur comprenant tous les concepteurs de décors, de costumes, d'éclairage et de son travaillant dans le domaine des arts de la scène lorsque la production est présentée en direct. »

[10] Un avis public de cette demande a été publié dans la Gazette du Canada du samedi 20 janvier 1996, dans The Globe and Mail et La Presse le 31 janvier 1996 ainsi que dans l'édition de février du bulletin Info-fax de la Conférence canadienne des arts et l'édition hivernale du Qui-Vive. L'avis public fixait au 8 mars 1996 la date limite avant laquelle les artistes, les associations d'artistes, les producteurs et les autres intéressés devaient faire connaître au Tribunal la nature de leur intérêt.

[11] À la date d'échéance, l'APASQ et la PACT avaient signifié leur intérêt à l'égard de la demande de l'ADC.

La preuve

L'APASQ

[12] Le premier témoin entendu est David Gaucher, président de l'APASQ depuis un an. M.  Gaucher oeuvre dans le domaine théâtral à titre de scénographe depuis environ 1987. Outre le théâtre, M. Gaucher a travaillé à la télévision, au cirque et au cinéma où il a fait la conception de décors et de costumes. Il a également travaillé comme assistant aux décors.

[13] Il a témoigné qu'après les États généraux du théâtre en 1981, le milieu théâtral québécois a commencé à se regrouper en associations et, en 1983, l'APASQ a vu le jour. L'association a voulu inclure tous les métiers de la scène qui n'étaient pas couverts par l'UDA. Les membres de l'APASQ travaillent surtout au Québec mais certains travaillent au CNA à Ottawa.

[14] Le 6 juillet 1993, la Commission de reconnaissance des associations d'artistes et des associations de producteurs du Québec a accrédité l'APASQ pour représenter :

Toutes les personnes conceptrices de décors, de costumes, d'éclairage et de son dans les domaines de production artistique suivants: la scène, y compris le théâtre, le théâtre lyrique, la musique, la danse et les variétés. Toutefois lorsqu'une personne physique est utilisée pour exécuter une telle production et que, dans le cadre celle-ci, elle est autrement un salarié au sens du Code du travail, visé ou non par une convention ou un contrat collectif de travail, elle est alors exclue du secteur de négociation visé par la présente reconnaissance.

[15] L'APASQ a déposé auprès du Tribunal copie des quatre ententes collectives négociées avec des associations de producteurs conformément à la loi québécoise sur le statut de l'artiste. En voici la liste :

a) APASQ - Théâtres unis enfance jeunesse inc. (« TUEJ »)
b) APASQ - Association des compagnies de théâtre (« ACT » )
c) APASQ - Théâtres associés Inc. (« TAI »)
d) APASQ - Association des producteurs de théâtre privé (« APTP ») (une copie de la sentence arbitrale a été déposée.)

[16] M. Gaucher a expliqué que depuis son accréditation provinciale, l'APASQ s'est surtout consacrée à la négociation avec les associations de producteurs de théâtre francophone. Plus récemment, elle a signifié des avis de négociation à des théâtres indépendants anglophones et francophones. Au Québec, il n'existe pas d'association de producteurs qui regroupent des théâtres anglophones et, par conséquent, la négociation doit se faire avec chaque théâtre individuellement. Il n'y a pas encore eu de négociation dans le secteur de la danse, des arts lyriques et des variétés faute de ressources et de temps, car de quatre à sept ans ont été nécessaire pour négocier chacune des ententes mentionnées ci-dessus.

[17] L'APASQ offre de nombreux services à ses membres. Notamment, un coffre d'outils qui est défini comme étant une grille des cachets versés par les producteurs depuis les dix dernières années aux concepteurs et autres professionnels des arts de la scène du Québec. Cet outil a été créé pour aider les membres dans leur négociation individuelle de contrats. L'APASQ offre aussi des services de consultation et conseils pour la négociation de contrats ainsi que pour la « vulgarisation » des différentes lois s'appliquant aux membres. De plus, la caisse de sécurité des arts de la scène offre un REER et un service de remboursement de facture pour soins médicaux.

[18] L'APASQ gère un service d'information, de publication et de diffusion. Des cours de formation continue et de perfectionnement sont aussi disponibles pour les membres intéressés. L'APASQ a par ailleurs participé à la réalisation de deux analyses de métiers et de professions, l'une sur la profession d'assistant metteur en scène et l'autre sur la profession de régisseur.

[19] L'APASQ s'implique dans de nombreuses activités culturelles et artistiques, telles le projet du Centre d'archives scénographiques, la Fondation Jean-Paul Mousseau et la Quadriennale de Prague. Pour ce dernier projet qui aura lieu en 2003, l'objectif de l'APASQ est de mettre en valeur les oeuvres qui reflètent la diversité et la spécificité de la création scénographique québécoise.

[20] Le mandat de l'APASQ, tel qu'énoncé dans le rapport annuel, est de valoriser et reconnaître les concepteurs et l'ensemble des professionnels des arts de la scène du Québec afin qu'ils puissent améliorer leurs conditions de travail. Ainsi, l'APASQ leur offre un service de soutien dans leur cheminement professionnel et personnel.

[21] Le secteur proposé vise le territoire du Québec et le CNA qui est membre de TAI. L'APASQ a négocié une entente collective avec TAI pour le théâtre français. Il ressort du témoignage que le secteur vise toutes les activités artistiques au CNA à l'exception de celles au département de théâtre anglais.

[22] Le deuxième témoin, Monique Corbeil, régisseur et assistant metteur en scène, est la directrice générale de l'APASQ depuis 1993. Elle a témoigné que l'APASQ compte 110 membres actifs et quatre membres stagiaires. Il y a également une centaine de permissionnaires qui peuvent être, par exemple, les concepteurs étrangers qui viennent travailler au Québec pour un producteur avec qui l'APASQ a conclu une entente. Par catégorie, l'APASQ compte environ 50 concepteurs de décors, 30 concepteurs de costumes, 10 concepteurs de son, 20 concepteurs d'éclairage, 10 assistants metteurs en scène, 10 régisseurs, 10 directeurs de production technique et un nombre de concepteurs d'accessoires qui n'a pas été spécifié. Il faut noter que plusieurs membres exercent plus d'une profession. En contre-interrogatoire, Mme Corbeil a déclaré qu'il n'y avait aucun peintre de décors inscrit à ce titre et que les peintres de décors ne sont habituellement pas mentionnés dans les publicités annonçant les spectacles.

[23] Mme Corbeil a témoigné que plusieurs membres de l'APASQ ont participé au Sommet des Amériques, à la Fête du Canada et aux Jeux de la Francophonie. Elle a également identifié 17 membres de l'APASQ sur la liste des concepteurs, déposée par l'ADC, qui ont travaillé au CNA. Un contrat APASQ est intervenu que pour une seule de ces productions, notamment la coproduction qui a eu lieu entre le Théâtre de l'Île de Hull et le CNA. Mme Corbeil explique l'absence de contrats APASQ conclus entre ses membres et le CNA du fait qu'actuellement le département de théâtre français n'embauche pas directement de concepteurs.

[24] Cependant, Fernand Déry, administrateur au théâtre français du CNA, a témoigné que l'objectif du CNA est de relancer la production dans le département de théâtre français dans un avenir rapproché. Il s'agit de l'objectif proposé par M. Denis Marleau, directeur artistique du CNA.

[25] Mme Corbeil a affirmé que la demande de l'APASQ vise les arts de la scène, la danse et les variétés. Selon les témoins de l'APASQ, les variétés incluent l'art lyrique, la danse, l'opéra, l'humour, la musique populaire, le cirque et l'événement. Mme Corbeil a expliqué qu'il y a peu de concepteurs, entrepreneurs indépendants, qui travaillent dans le domaine de l'opéra parce que les compagnies d'opéra engagent des concepteurs à titre de salariés et que, dans bien des cas, les décors et les costumes existent déjà et sont transportés d'un endroit à un autre.

Les concepteurs d'accessoires

[26] Patricia Ruel et David Gaucher ont témoigné au nom l'APASQ au sujet de la fonction du concepteur d'accessoires et de sa contribution à la production. Quatre autres témoins, Fernand Déry, Dennis Horn, Pierre Rousseau et Alexandre Gazalé, ont relaté au Tribunal leur expérience dans ce domaine.

[27] Patricia Ruel travaille à titre de conceptrice d'accessoires depuis 1998, mais elle a également travaillé à titre de chef accessoiriste, d'assistante aux accessoires, de conceptrice de décors (scénographe) et d'assistante aux costumes dans une trentaine de productions.

[28] Elle affirme que les services du concepteur d'accessoires sont retenus par le producteur en consultation avec le scénographe. Les contrats que Mme Ruel signe comme conceptrice d'accessoires sont identiques à ceux qu'elle signe comme scénographe, à l'exception de la définition des tâches. Les contrats prévoient que les accessoires utilisés dans une production demeurent la propriété du producteur et qu'il ne peut les réutiliser dans leur intégralité sans le consentement de Mme Ruel. Cependant, les maquettes qu'elle prépare demeurent sa propriété.

[29] Il ressort du témoignage que les productions « réalistes », comme les pièces d'époque, exigent de la recherche à la bibliothèque en raison de la reconstitution et des précisions à respecter pour les meubles, la vaisselle, la peinture, etc. Il faut adapter et parfois créer des objets lorsqu'il s'avère trop difficile de trouver les accessoires requis. Dans les productions qu'elle qualifie de « création » (par ex., la science fiction), Mme Ruel affirme que le concepteur d'accessoires peut être appelé à créer des accessoires complètement nouveaux. Ces objets créés sont presque des sculptures. Le concepteur doit également préparer des maquettes, des échantillons ou des prototypes pour les accessoires. Il arrive aussi que les accessoires soient achetés ou loués.

[30] Le concepteur d'accessoires doit lire le texte pour déterminer le travail qu'il aura à accomplir. Il doit connaître le budget de la production avant de négocier le contrat avec le producteur. Dans les productions à gros budget, le concepteur doit faire la supervision des contractuels en atelier. Il arrive que le concepteur travaille avec un assistant. Selon Mme Ruel, le concepteur d'accessoires doit travailler de près avec le metteur en scène et l'assistant metteur en scène. Il doit faire preuve de créativité pour interpréter la vision du metteur en scène. Le travail du concepteur peut se continuer jusqu'à la première.

[31] En contre-interrogatoire, Mme Ruel a expliqué que le scénographe conçoit et imagine les éléments scénographiques alors que le concepteur d'accessoires doit imaginer, créer et réaliser les accessoires. Elle a confirmé qu'il arrive parfois que la même personne soit chargée de la conception des décors et des accessoires. Elle note cependant que le contrat reflète cette situation et que le concepteur est rémunéré en conséquence. À sa connaissance, le concepteur de costumes ne cumulera pas la fonction de concepteur d'accessoires. Selon Mme Ruel, la personne qui s'occupe des accessoires au cours d'une représentation s'appelle l'accessoiriste de plateau et qu'il s'agit d'une tâche complètement différente de celle du concepteur. De plus, elle note qu'il y a une distinction à faire entre la conception des accessoires de costumes tels les souliers, les gants, les chapeaux, et la conception d'accessoires.

[32] Mme Ruel a témoigné que le concepteur d'accessoires fait un travail de recherche, réalise des dessins et des plans et doit être à l'écoute du metteur en scène. La personne qui fabrique les accessoires sera plutôt un ébéniste ou un peintre. Selon son expérience, le concepteur d'accessoires relève du metteur en scène et non pas du concepteur de décors. C'est toujours le metteur en scène qui a le dernier mot.

[33] Le témoignage de M. Gaucher confirme généralement celui de Mme Ruel quant à la participation et le travail du concepteur d'accessoires.

[34] Fernand Déry a témoigné au nom du CNA et de TAI. Selon M. Déry, il existe une différence entre un concepteur d'accessoires et un accessoiriste. Être concepteur fait appel à une notion de création alors qu'être accessoiriste se limite à un rôle de magasinier ou d'exécutant. Il a donné l'exemple du concepteur de décors qui dessine une lampe qui est ensuite exécutée par l'accessoiriste. En contre-interrogatoire, M. Déry a admis qu'il travaille surtout sous le volet administratif depuis les 20 dernières années et qu'il témoigne en fonction de son expérience générale au théâtre.

[35] Dennis Horn, concepteur de costumes et de décors depuis 20 ans, a témoigné au nom de l'ADC. M. Horn a affirmé que toute chose ou objet qui est manipulé par un comédien sur scène est un accessoire, y inclus tout objet sur lequel le comédien peut s'asseoir. Il a également témoigné avoir eu à concevoir des accessoires mais toujours dans le cadre de son travail à titre de concepteur de décors. Selon lui, la conception d'accessoires relève du travail du concepteur de décors et n'existe pas comme fonction distincte.

[36] Pierre Rousseau, directeur artistique au Théâtre Denise Pelletier (« TDP ») à Montréal, a témoigné au nom de TAI. M. Rousseau a affirmé qu'au TDP, il n'y a pas toujours une personne attitrée pour les accessoires et, s'il y en a une, son travail débute après celui des concepteurs de décors et de costumes. Lors de la mise sur pied d'une production, le metteur en scène est choisi, ensuite le scénographe et le concepteur de costumes. Habituellement le metteur en scène demande de travailler avec un assistant qui ensuite devient régisseur. Les assistants aux costumes et aux décors sont choisis si cela s'avère nécessaire. C'est alors que la décision quant aux accessoires est prise. Un individu peut être chargé de trouver des accessoires à l'extérieur ou il peut simplement s'en remettre à la banque du théâtre. Au TDP, il ne souvient pas d'avoir retenu les services de quelqu'un pour faire un « concept d'accessoires ».

[37] Selon M. Rousseau, c'est le scénographe qui est responsable de tout ce qui se voit sur la scène et la personne qui fait les accessoires est d'abord en lien avec lui. Le concepteur d'accessoires ne participe pas à la création de la production.

[38] Alexandre Gazalé, qui a témoigné pour TAI et le CNA, a relaté au Tribunal son expérience avec les concepteurs d'accessoires. M. Gazalé est le directeur de production au CNA où il travaille depuis 1989. M. Gazalé a expliqué que, tant au théâtre français qu'anglais du CNA, le concepteur de décors aura sa maquette avec les directives pour les accessoires. Il peut y avoir une discussion entre le concepteur et l'accessoiriste; une liste est dressée et les accessoires sont choisis dans l'entrepôt du CNA ou ailleurs.

[39] En contre-interrogatoire, M. Gazalé affirme n'avoir jamais travaillé directement avec un concepteur d'accessoires mais confirme avoir déjà travaillé pour des compagnies où une personne était attitrée à cette fonction. Il admet toutefois ne pas être en mesure de commenter la relation particulière que peut avoir le concepteur d'accessoires avec les autres concepteurs. Selon lui, le travail du concepteur d'accessoires ressemble à ce que fait le chef d'atelier d'accessoires au CNA.

Les concepteurs de marionnettes

[40] Richard Lacroix a témoigné pour l'APASQ sur la fonction de concepteur de marionnettes. M. Lacroix est concepteur/scénographe depuis 1984. Sa principale activité est la scénographie, mais il se considère également concepteur de marionnettes. Il oeuvre principalement dans les domaines du théâtre et de la danse contemporaine.

[41] À titre de concepteur de marionnettes, M. Lacroix est engagé à contrat, de la même manière que les autres concepteurs. Ses tâches sont la conception de l'environnement pour la marionnette, appelé le castelet, et la conception de la marionnette, ce qui se compare à la conception de costumes. M. Lacroix précise que le concepteur de marionnettes se distingue du concepteur de costumes parce qu'il crée le personnage de la marionnette au niveau de son image.

[42] Selon lui, la source de création pour le concepteur de marionnettes est la même que pour tout autre concepteur : l'intuition. La conception de marionnettes peut se faire à partir de textes déjà écrits ou peut être une création, c'est-à-dire une idée qui est développée. Le processus de création comprend généralement une étape de recherche (intuitive, factuelle ou historique), d'analyse et d'échange avec les autres intervenants. Cette étape procure au concepteur l'inspiration nécessaire pour dessiner la marionnette, ses mouvements et sa gestuelle. M. Lacroix caractérise ce travail comme le concepteur investissant l'objet -- la marionnette -- d'une âme.

[43] Le travail du concepteur de marionnettes se réalise sous forme de dessins, mais il peut aussi prendre la forme de sculptures. Généralement, un contrat prévoit la conception de personnages, ce qui inclut le dessin de chaque personnage et de ses mouvements. Lorsque le contrat prévoit aussi le castelet, cette conception prend la forme de dessins et de maquettes en trois dimensions. Le contrat prévoit également le suivi de la conception.

[44] Le concepteur de marionnettes assiste aux réunions de production, de la même manière que les autres concepteurs. Il prépare des esquisses préliminaires qui servent de référence en atelier. comme pour la scénographie, le castelet est souvent construit en atelier. Pour la fabrication de la marionnette, M. Lacroix choisit son équipe qui est engagée par le producteur. Cette équipe comprend le chef d'atelier, le sculpteur et les peintres. De plus, il précise les costumes, les matières molles, les cheveux et la finition de la marionnette. Pour arriver au choix de la matière qui sera utilisée dans la fabrication, M. Lacroix engage un assistant qui fait la recherche nécessaire. Il indique que ce travail de recherche nécessite parfois jusqu'à un mois.

[45] M.  Lacroix a par ailleurs précisé que ses contrats avec les producteurs sont rédigés de sorte qu'il puisse conserver les droits de conception, les droits d'auteurs et les droits de suite pour les marionnettes qu'il conçoit. Il explique qu'il reçoit une redevance après chaque spectacle tout comme les autres concepteurs au théâtre.

[46] M.  Lacroix a travaillé au CNA à plusieurs reprises où tous les spectacles de marionnettes ont été présentés dans leur section jeunesse. De plus, il a travaillé au CNA lors d'une production de danse contemporaine.

[47] En réponse aux questions de TAI, M. Lacroix a précisé qu'un concepteur de marionnettes n'est pas nécessairement un concepteur de costumes ou un scénographe. Selon lui, la conception de marionnettes est une activité très spécifique qui demande une recherche spécifique, mais s'il y avait un rapprochement à faire, ce serait avec le concepteur de costumes. Dans la plupart des cas, lorsque les services de M. Lacroix ont été retenus pour exécuter plus d'une fonction, le contrat le mentionnait et la rémunération était en conséquence.

[48] En réponse aux questions de l'ADC, M. Lacroix a indiqué qu'il a agi à titre de concepteur de marionnettes, sans que ses services ne soient retenus à titre de concepteur de costumes. Selon lui, les producteurs engagent maintenant des concepteurs pour chaque médium.  Cette nouvelle réalité existe depuis que des organismes représentant les concepteurs tentent de définir les tâches de chaque concepteur et que les exigences des concepteurs se sont précisées.

Les assistants concepteurs de décors et de costumes

[49] Trois témoins ont témoigné pour l'APASQ concernant les fonctions d'assistants aux décors et aux costumes : David Gaucher, Patricia Ruel et Daniel Fortin. Deux autres témoins ont également présenté une preuve sur ces fonctions : Dennis Horn et Pierre Rousseau. Afin de ne pas alourdir le texte, les fonctions d'assistant concepteur de costumes et d'assistant concepteur de décors sont rendues dans les présents motifs par les expressions « assistant aux costumes et assistant aux décors ».

[50] M. Gaucher a expliqué au Tribunal le processus créatif de la mise sur pied d'une production. De façon générale, le producteur embauche un metteur en scène qui construit une équipe de concepteurs. Le producteur et le metteur en scène se réunissent pour discuter de la vision artistique de ce dernier et du budget. Une fois l'équipe formée, le concepteur de costumes, de décors, d'éclairage et de son ainsi que l'assistant metteur en scène, l'assistant aux costumes et, quelques fois, l'assistant aux décors participent aux réunions de préproduction. La preuve révèle que la plupart des productions ont un assistant metteur en scène mais seules les productions plus importantes ont des assistants aux costumes et aux décors. Les assistants sont habituellement embauchés par le producteur.

[51] Selon M. Gaucher, l'assistant aux costumes concrétise, donne vie à l'idée générale établie par le concepteur. Ainsi, il interprète le texte et les maquettes pour pouvoir choisir les tissus et les couleurs qui rendent la vision du concepteur, ce qui nécessite de larges compétences artistiques. Le travail de l'assistant dépend du style du concepteur. Certains concepteurs sont très directifs avec leurs assistants, d'autres le sont moins, ce qui donne plus de place à la créativité. Le travail de l'assistant est beaucoup plus dans le développement de la maquette ou la recherche d'un prototype; il peut même fabriquer la maquette. Le suivi en atelier est souvent fait par l'assistant. Il peut avoir un rôle de coordination. Il peut communiquer avec le directeur de production. Dans certains cas, il peut partager une idée ou faire une suggestion qui pourra être reçue. Dans d'autres cas, il va devoir trouver la solution à un problème.

[52] Lors des répétitions, l'assistant aux costumes exécute le même rôle que le concepteur en prenant soin de remarquer les imperfections des costumes que portent les comédiens. M. Gaucher a précisé que le rôle de l'assistant n'est pas la fabrication des costumes en atelier, mais la direction de l'atelier. Les fonctions de l'assistant aux décors se situent plus au niveau de la recherche, du développement et de la fabrication de la maquette (ce qui inclut les matériaux à être utilisés) pour ensuite présenter celle-ci au metteur en scène ou au producteur. Par contre, il existe inévitablement un côté administratif qui est relié aux fonctions des assistants.

[53] M. Gaucher a témoigné que plusieurs membres de l'APASQ exécutent les fonctions d'assistants aux décors et aux costumes à titre d'entrepreneurs indépendants bien que ces fonctions soient à l'occasion remplies par des salariés. Généralement, comme assistant aux costumes, M. Fortin recevait un cachet du producteur à titre d'entrepreneur indépendant, qui était rarement négociable.

[54] M. Fortin a précisé que les concepteurs pour qui il a travaillé à titre d'assistant aux costumes ont réalisé leurs maquettes à partir de la recherche qu'il a faite. Il a précisé cependant que les décisions finales artistiques sont prises par le concepteur. Néanmoins, les choix initiaux en ce qui concerne les tissus, les boutons et les broderies sont faits par l'assistant et les décisions du concepteur sont largement influencées par ces décisions initiales. L'assistant ne peut revendiquer de droits d'auteur. M. Fortin a quitté la profession d'assistant aux costumes car, nonobstant le fait que son côté créatif était comblé, il ne recevait jamais la reconnaissance de ses pairs pour le travail qu'il effectuait. Selon M. Fortin, l'assistant doit écouter le metteur en scène pour tenter de comprendre ce que celui-ci veut lors des réunions de production. L'assistant tente ensuite de comprendre la volonté du concepteur ce qui a pour effet de créer une symbiose entre le concepteur et l'assistant.

[55] Mme Ruel a témoigné qu'en fonction de son expérience, les assistants contribuent directement à la création d'une production. Selon elle, le niveau de contribution dépend de la taille de la production et le moment où les assistants débutent leur travail dans la production. Mme Ruel a témoigné qu'en fonction de son expérience, les assistants contribuent directement à la création d'une production. Selon elle, le niveau de contribution dépend de la taille de la production et le moment où les assistants débutent leur travail dans la production.

[56] Pour l'ADC, Dennis Horn a témoigné sur l'aspect créatif des fonctions d'assistants. Il a travaillé à titre d'assistant pendant une saison au Festival de Stratford. Il a cependant affirmé que ce travail devait être calculé en terme d'heures et non de semaines. À titre d'assistant, M. Horn a essentiellement exécuté des fonctions administratives, ayant fait très peu de travail artistique. Il a ajouté qu'aucun choix artistique n'est fait par l'assistant sans avoir obtenu au préalable l'approbation du concepteur. Il n'a aucun doute que certains assistants sont des artistes, mais qu'ils n'effectuent pas un travail d'« artiste » lorsqu'ils sont assistants. Selon lui, un secteur de négociation qui reconnaît les assistants à titre d'artiste aurait pour effet de rendre nuls la responsabilité et le professionnalisme des concepteurs.

[57] Finalement, Pierre Rousseau a témoigné sur les fonctions d'assistants aux costumes et aux décors pour TAI. Selon lui, les assistants effectuent uniquement un travail de recherche, un travail de soutien. Il a précisé qu'un concepteur a souvent des préférences en ce qui concerne l'assistant à être engagé. Ainsi, le théâtre tente de respecter ces choix car ceux-ci contribuent à la qualité artistique du travail des concepteurs. Cependant, pour le théâtre, le répondant est le concepteur et l'assistant relève de ce dernier et non du producteur.

Les peintres de décors

[58] M. Gaucher a témoigné que le travail du peintre de décors est un art qui demande une grande maîtrise. Le peintre de décors doit interpréter la maquette que lui donne le scénographe. Il est souvent choisi pour sa touche artistique ou son domaine de spécialisation. Les peintres de décors relèvent du scénographe et du directeur de production. En contre-interrogatoire, M. Gaucher a expliqué que le «peintre scénique ou artiste scénique » (le mot utilisé dans l'avis public est « peintre de décors/set painter ») fera des retouches aux décors alors que le « peintre en bâtiment » appliquera une couche de peinture sur une surface dont la couleur et le lustre seront prédéterminés. Il a précisé que l'APASQ ne veut représenter que les peintres scéniques -- ceux qui interprètent la maquette, créent les patines, font le vieillissement, donnent l'allure de marbre au bois, etc. Le secteur ne vise pas les individus qu'on pourrait qualifier de « peintres en bâtiments ». Au Québec, lorsqu'un décor est installé au théâtre, la pratique veut que l'on fasse appel aux services d'un artiste scénique pour exécuter les retouches. Il admet que des murs entiers peuvent être peints par des « techniciens ».

[59] C'est le producteur qui retient les services du peintre de décors, mais il est choisi de concert avec le scénographe. Les peintres peuvent travailler en atelier et être des salariés. Selon M. Gaucher, dans les productions de moins grande envergure le scénographe peut agir également à titre de peintre de décors. Au début de leur carrière, la plupart des scénographes sont appelés à peindre leurs décors, mais ce phénomène se retrouve moins fréquemment chez les scénographes qui ont acquis une certaine expérience.

[60] Pierre Rousseau a témoigné pour TAI. Il a confirmé que le TDP n'engage pas des peintres de décors, faisant plutôt appel à des ateliers pour accomplir ces tâches. Cependant, en pratique, l'atelier doit soumettre le nom des personnes qu'il propose pour exécuter le décor. Le théâtre doit ensuite donner son approbation. En contre-interrogatoire, M. Rousseau a confirmé que certains peintres de décors sont reconnus pour leurs compétences spécifiques. En réponse à une question d'IATSE, M. Rousseau a précisé que le peintre de décors doit respecter les exigences du théâtre, c'est-à-dire qu'il ne peut choisir de peindre un décor rose si les forces créatives de l'équipe ont décidé que le décor devait être sombre, sinon le décor sera refusé.

Les régisseurs et assistants metteurs en scène

[61] Monique Corbeil et David Gaucher ont témoigné sur les fonctions de régisseur et d'assistant metteur en scène. Alexandre Gazalé a relaté son expérience en ce qui concerne ces fonctions au CNA.

[62] L'APASQ a versé en preuve un document rédigé par le Conseil québécois des ressources humaines en culture (« CQRHC ») intitulé Les faits saillants du résultat de l'analyse de la profession - régisseur. Mme Corbeil a expliqué au Tribunal que l'APASQ a été le maître d'oeuvre de cette étude. Elle a participé à toutes les étapes de l'élaboration du projet au nom de l'APASQ. De plus, elle a agi à titre de membre du comité d'experts pour la fonction de régisseur. L'étude a été complétée selon les normes d'Emploi Québec.

[63] Spécifiquement, le CQRHC traite des régisseurs qui exercent leur profession dans les « arts de la scène » ou les « arts vivants ». Le document définit les fonctions du régisseur comme suit :

Le régisseur est responsable du déroulement d'un spectacle, de son entrée en salle jusqu'à la dernière représentation, conformément aux indications du metteur en scène (chorégraphe, metteur en piste, etc.) de son assistant et des concepteurs. Il vérifie et fait appliquer ou applique avec exactitude toutes les composantes d'une représentation.

Le régisseur est la personne qui élabore un cahier de régie et qui dirige la représentation en s'assurant que l'équipe du spectacle accomplit avec précision les effets de la conduite ou en donnant directement les top (« go ») de ses effets (« cues »).

[64] Le CQRHC conclut que le régisseur doit, entre autres, avoir une connaissance du langage utilisé dans le milieu, la connaissance et la maîtrise du déroulement du spectacle et une connaissance du travail de chacun des membres de l'équipe. Il constitue le lien entre le metteur en scène et l'équipe en place. Le CQRHC note que dans le domaine du théâtre francophone, une même personne cumule souvent les postes d'assistant metteur en scène et de régisseur. Dans ces cas, il peut exister une véritable complicité et complémentarité entre le metteur en scène et le régisseur. Finalement, l'étude confirme que le travail de régisseur est généralement exécuté par des entrepreneurs indépendants.

[65] Un document semblable a été complété par le CQRHC pour les fonctions de metteur en scène et d'assistant metteur en scène. Il est intitulé Les faits saillants du résultat de l'analyse de la profession - metteur en scène et assistant-metteur en scène. Ce document a également été versé en preuve. Les fonctions de l'assistant metteur en scène sont décrites comme suit :

L'assistant-metteur en scène assiste le metteur en scène du début du projet jusqu'à la fin de la production (préproduction, production, postproduction). Par ses compétences et ses connaissances techniques, artistiques et générales, il contribue à l'élaboration et à la mise au point de la mise en scène. Pour certaines productions du théâtre francophone, il cumule parfois les postes d'assistant et de régisseur.

[66] David Gaucher a témoigné que le régisseur doit interpréter le texte et, à un autre niveau, doit interpréter le jeu du comédien. Le régisseur apparaît lors de la présentation des productions devant le public comme un chef d'orchestre qui met ensemble toutes les composantes et éléments de la partition. Le régisseur contrôle les effets d'éclairage et les effets sonores. Il exécute ces fonctions en se fiant au jeu du comédien ou encore, sur les tensions qui sont présentes dans la salle. Le rôle du régisseur est de lancer les cues, mais aussi de percevoir la relation entre les comédiens et la salle pour comprendre exactement à quel moment un cue d'éclairage ou de son doit être donné pour avoir un effet maximal avec le public.

[67] L'assistant metteur en scène doit aussi interpréter le texte. Pour accomplir sa tâche, il doit en plus avoir une excellente connaissance du texte. Son travail se situe davantage avec le metteur en scène dans la salle. L'assistant metteur en scène agit à titre de conseiller auprès du metteur en scène. Il est comme un « oeil en retrait » tout en prenant des notes très précises et techniques. M. Gaucher admet que le travail de l'assistant metteur en scène comprend aussi un côté administratif, tel l'organisation des horaires de répétition.

[68] Alexandre Gazalé a expliqué qu'il existe une grande différence au niveau des tâches du régisseur et de l'assistant metteur en scène entre le théâtre anglais et le théâtre français. En fonction de ce qu'il a observé au CNA et dans les théâtres anglais à Montréal, il n'a jamais vu un régisseur donner des notes ponctuelles aux comédiens dans le théâtre français. Le régisseur agit à titre de technicien, et non d'artiste, lorsque qu'il prend note d'un geste d'un comédien que les techniciens n'arrivent plus à suivre.

L'ADC

[69] Sherri Helwig a témoigné au nom de l'ADC. Mme Helwig est une administratrice d'activités artistiques qui travaille dans le domaine des arts depuis plus de 14 ans. Elle occupe le poste de directrice exécutive de l'ADC depuis septembre 1999. Mme Helwig admet n'avoir jamais travaillé comme comédienne ou metteur en scène, mais elle affirme avoir collaboré étroitement avec de nombreuses associations de producteurs de théâtre partout au Canada.

[70] Selon Mme Helwig, l'ADC est un organisme sans but lucratif qui a été créé au départ pour défendre les droits et les intérêts des concepteurs de décors, de costumes et d'éclairage oeuvrant dans le domaine du théâtre. Plusieurs années se sont écoulées avant que cette association ne représente aussi les concepteurs de son. Elle accorde la priorité à la préparation et à la négociation de contrats pour ses membres. La majorité des contrats de l'ADC sont conclus avec la PACT, mais elle rédige aussi des contrats au nom de ses membres qui travaillent de concert avec des théâtres indépendants (non membres de la PACT) et des producteurs oeuvrant dans les autres secteurs des arts de la scène tels que la danse et les productions d'envergure industrielle. En outre, l'ADC offre à ses membres des services de médiation, certains services juridiques, la gestion de REER et une police d'assurance contre les accidents. En ce qui concerne les contrats conclus avec des théâtres non membres de la PACT, l'ADC offre également à son effectif un service de cautionnement.

[71] Au cours des deux dernières années, Mme Helwig a reçu des copies de presque 700 contrats visant les quatre catégories de conception. Elle a souligné que même si les contrats rédigés par l'ADC proposent des tarifs minimaux, ils ne sont pas de véritables accords-cadres. Elle affirme néanmoins que les concepteurs et les producteurs de théâtre connaissent la tarification et qu'ils ont, à son avis, l'habitude de s'y conformer.

[72] Une autre composante des activités de l'ADC est la promotion de ses membres et de la conception, que ce soit en tant que moyen d'expression artistique ou en tant que profession. Par exemple, Mme Helwig a porté à l'attention du Tribunal le projet que cette association a entrepris en collaboration avec la Toronto Public Library. Ce projet consiste à réunir les collections d'oeuvres conceptuelles de cette bibliothèque et des oeuvres de conception théâtrale de partout au pays.

[73] L'ADC compte 155 membres professionnels, 13 membres apprentis et 11 membres honoraires. Cet effectif se compose de 92 concepteurs de costumes, de 76 concepteurs d'éclairage, 103 concepteurs de décors et de quatre concepteurs de son, qui provient de la plupart des provinces canadiennes. Mme Helwig a aussi mentionné que des concepteurs étrangers se joignent à l'ADC pour être en mesure de participer à des productions canadiennes.

[74] Mme Helwig a affirmé que la conception de son n'a pas été reconnue comme une catégorie de conception au moment où l'ADC a été créée. Cependant, son effectif dans ce domaine augmente progressivement depuis que cette catégorie est reconnue par le milieu artistique. Même si l'ADC n'a pas officiellement de contrat-type à l'intention des concepteurs de son, elle négocie et conclut, la plupart du temps, des contrats au nom de ceux-ci en se servant des contrats-types existants visant les concepteurs d'éclairage et en substituant le terme « son » au terme « éclairage ».

[75] Les membres de l'ADC sont reconnus au Canada et à l'étranger. Mme Helwig a affirmé qu'en 1999, neuf membres de cette association ont participé à la Quadriennale de Prague, une prestigieuse exposition de scénographie et d'architecture théâtrale d'envergure internationale. De plus, ils ont été retenus comme candidats ou été récipiendaires de prix nationaux et internationaux.

[76] L'ADC négocie des ententes avec la PACT depuis de nombreuses années. En mars 2001, cette dernière représentait 108 compagnies théâtrales de partout au Canada, y compris six compagnies au Québec. Le département de théâtre anglais du CNA est membre de la PACT. Mme Helwig a mentionné que le quart de l'effectif de l'ADC a travaillé au CNA à au moins une occasion quoique plusieurs de ses concepteurs y aient travaillé à plus d'une reprise. Depuis le milieu des années 1990, l'ADC a reçu des copies de presque 100 contrats conclus avec le CNA, que ce soit à titre de producteur ou à titre de coproducteur. Les membres de l'ADC ont aussi eu des contacts avec le gouvernement fédéral puisqu'ils ont travaillé à une occasion au Musée canadien des civilisations, un producteur fédéral situé au Québec.

[77] L'ADC compte 12 membres au Québec. Mme Helwig a souligné que certains membres de l'association adhèrent aussi à l'APASQ , car ils travaillent pour des théâtres anglophones et francophones. Mme Helwig a affirmé que même si seulement 7 % de l'effectif de l'ADC habite au Québec, 15 % a travaillé dans cette province. Lors du contre-interrogatoire, elle a indiqué qu'en l'an 2000, cinq membres de l'ADC ont négocié des contrats avec des théâtres anglophones sous compétence provinciale au Québec.

[78] M.  Alexandre Gazalé, qui a témoigné pour le CNA et qui travaille comme concepteur d'éclairage, est aussi un membre de l'ADC. Il a indiqué qu'il est au fait de la présence de l'ADC au Québec depuis le milieu des années 1970, époque où il était étudiant. Il a ajouté que les membres de cette association ont toujours oeuvré dans les théâtres anglophones du Québec.

[79] L'ADC représente également des concepteurs qui travaillent dans des productions francophones, principalement à l'extérieur du Québec, les deux théâtres les plus importants étant le Cercle de Molière au Manitoba et le Théâtre français de Toronto. Mme Helwig a toutefois mentionné que les contrats de conception liés à ces productions sont rédigés en anglais.

[80] Au moment où l'ADC a été créée, ses fondateurs voulaient en faire un organisme national et bilingue, selon les besoins. L'association a toujours eu un mandat national. Mais dans les faits, il est évident que l'ADC a travaillé plus étroitement avec les théâtres anglophones. Elle se prépare maintenant à mieux servir ses concepteurs francophones.

[81] Selon Mme Helwig, l'ADC sait que son effectif est très peu nombreux dans certaines régions du Canada. Cette faible participation serait causée en partie par le fait que, par exemple, la plupart des concepteurs des Maritimes travaillent dans l'industrie du cinéma ou par le fait que la majorité des compagnies de théâtre n'engagent pas de concepteurs habitant dans les environs. En Saskatchewan, de nombreuses compagnies de théâtre engagent des étudiants qui viennent d'obtenir leur diplôme afin de réduire leurs coûts. L'ADC reconnaît qu'elle doit augmenter le nombre de ses membres étudiants, et elle a mis sur pied une initiative de mentorat accru. Mme Helwig a affirmé, en guise de conclusion, que les concepteurs se joignent souvent à l'ADC en raison des difficultés qu'ils éprouvent avec un producteur. Ces derniers estiment qu'il n'est pas nécessaire d'adhérer à cette association avant que ces problèmes ne surviennent.

[82] Durant le contre-interrogatoire, Mme Helwig a mentionné que la majorité des contrats de l'ADC sont conclus avec des compagnies de théâtre. Selon elle, les concepteurs savent que cette association s'implique dans les arts de la scène, notamment le théâtre, l'opéra, la danse et les aspects industriels. Mme Helwig estime que le champ d'activités de cette association englobe la catégorie des « variétés » qu'elle définit comme étant des concerts, des spectacles de musique en direct et des spectacles pour la famille. À son avis, la plupart des membres de l'ADC travaillent dans des théâtres puisqu'il n'y a pas beaucoup de production en danse et encore moins dans l'opéra. Elle a précisé que la majorité des opéras engagent des employés pour effectuer le travail des concepteurs.

[83] Le deuxième témoin pour l'ADC, Dennis Horn, est concepteur de décors et de costumes depuis 20 ans. Il en est à sa douzième année comme membre du Conseil de cette association et il occupe le poste de président depuis les trois dernières années. M. Horn constate que les concepteurs partagent, d'abord et avant tout, le désir de travailler dans de bonnes conditions, d'obtenir la reconnaissance de leur contribution artistique au théâtre et de produire des oeuvres de grande qualité. À son avis, l'ADC contribue à l'atteinte de ces objectifs communs en exigeant de ses membres la production d'oeuvres de qualité.

[84] Mme Helwig et M. Horn ont tous deux mis l'accent sur l'importance de la mobilité dans le travail de concepteur. Par exemple, M. Horn a travaillé dans six provinces au cours de ses 20 ans de carrière. Il estime qu'un concepteur doit accepter de se rendre là où les débouchés existent afin de gagner sa vie.

[85] En outre, Mme Helwig et M. Horn ont affirmé qu'à première vue, la communication ne semble pas être un aspect important de la conception, mais que les apparences sont trompeuses. Pour être plus précis, ils ont mentionné des fonctions comme l'étiquetage des costumes, la capacité de comprendre et d'interpréter le texte et la communication avec les autres participants de la production. M. Horn a affirmé qu'il passe la majorité de son temps avec les personnes qui transforment sa vision en réalité, et non à sa table de dessin. Il a souligné que la langue est un critère important de la conception même si la production n'est pas de langue anglaise ou française. C'est le cas, entre autres, des opéras et des productions en danse.

[86] Le troisième témoin pour l'ADC, Jane Needles, est une spécialiste du domaine des arts qui a 45 ans d'expérience dans ce champ d'activités. Elle est la présidente de la Fédération d'art dramatique du Québec (« QDF »). La QDF a pour mandat de représenter les professionnels du théâtre anglais au Québec. Mme Needles a mentionné que le théâtre anglophone du Québec a besoin d'une représentation distincte puisque les méthodes de travail du théâtre francophone et du théâtre francophone diffèrent. Elle a expliqué ces différences de manière très détaillée, en particulier celles qui touchent les répétitions.

[87] D'après Mme Needles, il y a près de 55 compagnies de théâtre anglophone au Québec et six d'entre elles font partie de la PACT. Environ dix de ces 55 compagnies sont aussi des membres d'associations de théâtres francophones telles TAI et ACT.

[88] Mme Needles a aussi parlé de la cérémonie protocolaire de l'Académie québécoise du théâtre intitulée La soirée des masques. Elle est d'ailleurs la vice-présidente et la trésorière de l'Académie. Elle a souligné que les seules catégories officielles liées à la conception pour lesquelles on remet des prix pendant cette cérémonie sont celles de la conception de décors, de costumes, d'éclairage et de son. Elle a ajouté que ces catégories sont les seules qui sont reconnues par d'autres cérémonies protocolaires au Canada dans le domaine de la conception.

[89] Susan Wallace, directrice exécutive de la CAEA, a parlé de l'accord de réciprocité conclu entre la CAEA et l'UDA. Mme Wallace a souligné que cet accord ne s'applique qu'aux professions représentées par les deux associations. L'accord de réciprocité illustre l'historique de leurs pratiques en vertu desquelles la CAEA représente les professionnels qui travaillent pour des théâtres anglophones alors que l'UDA représente les membres qui travaillent pour des théâtres francophones, et ce, partout au Canada. La représentation dans le cadre d'opéras et de productions en danse est divisée selon des limites territoriales. La sphère de l'UDA englobe toutes les représentations données au Québec tandis que la CAEA est compétente dans le reste du Canada. Si un spectacle est donné en anglais ou en français au cours d'une tournée, c'est la langue de la première représentation publique qui détermine la compétence. S'il s'agit d'un spectacle bilingue, c'est habituellement la langue de l'auditoire auquel le spectacle s'adresse qui détermine celle-ci. Dans ce genre de situation, les deux associations entameraient des négociations et la compétence serait généralement déterminée en fonction du territoire. Une autre exception à l'accord de réciprocité a récemment fait l'objet de négociations relativement au CNA. En ce qui concerne les départements autres que le théâtre anglais ou français, qui sont représentés respectivement par la CAEA et l'UDA, les associations s'en échangent la compétence à chaque année.

Questions soulevées

[90] La demande d'accréditation de l'APASQ soulève les questions suivantes :

e) Le secteur proposé par l'APASQ est-il approprié aux fins de la négociation, et en particulier :

i) les concepteurs de décors, de costumes, d'éclairage et de son exercent-ils des professions qui sont visées par la Loi?
vi) les concepteurs d'accessoires exercent-ils une profession qui est visée par la Loi?
vii) les concepteurs de marionnettes exercent-ils une profession qui est visée par la Loi?
viii) les assistants concepteurs de décors et de costumes exercent-ils des professions qui sont visées par la Loi?
ix) les peintres de décors exercent-ils une profession qui est visée par la Loi?
x) les régisseurs et les assistants metteurs en scène exercent-ils des professions qui sont visées par la Loi?

b) L'APASQ est-elle représentative des artistes du secteur?

[91] La demande d'accréditation de l'ADC soulève les questions suivantes :

a) Le secteur proposé par l'ADC est-il approprié aux fins de la négociation?

b) L'ADC est-elle représentative des artistes du secteur?

Loi sur le statut de l'artiste

[92] Les dispositions pertinentes de la Loi sur le statut de l'artiste sont les suivantes :

5. Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente partie.

[...]

« artiste »

     « artiste » Entrepreneur indépendant visé à l'alinéa 6(2)b).

[...]

6. (2) La présente partie s'applique:
[...]
b) aux entrepreneurs indépendants professionnels - déterminés conformément à l'alinéa 18b) :

(i) qui sont des auteurs d'oeuvres artistiques, littéraires, dramatiques ou musicales au sens de la Loi sur le droit d'auteur, ou des réalisateurs d'oeuvres audiovisuelles,
(ii) qui représentent, chantent, récitent, déclament, jouent, dirigent ou exécutent de quelque manière que ce soit une oeuvre littéraire, musicale ou dramatique ou un numéro de mime, de variétés, de cirque ou de marionnettes,
(iii) qui, faisant partie de catégories professionnelles établies par règlement, participent à la création dans les domaines suivants: arts de la scène, musique, danse et variétés, cinéma, radio et télévision, enregistrements sonores, vidéo et doublage, réclame publicitaire, métiers d'art et arts visuels.

9. (1) Le fait qu'un artiste s'oblige par l'intermédiaire d'une organisation n'a pas pour effet de le soustraire à l'application de la présente partie.

[...]

18. Le Tribunal tient compte, pour toute question liée :

[...]
b) à la détermination du caractère professionnel de l'activité d'un entrepreneur indépendant -- pour l'application de l'alinéa 6(2)b) -- du fait que ses prestations sont communiquées au public contre rémunération et qu'il a reçu d'autres artistes des témoignages de reconnaissance de son statut, qu'il est en voie de devenir un artiste selon les usages du milieu ou qu'il est membre d'une association d'artistes.

[...]

25. (1) Toute association d'artistes dûment autorisée par ses membres peut demander au Tribunal de l'accréditer pour un ou plusieurs secteurs :
a) à tout moment, si la demande vise un ou des secteurs pour lesquels aucune association n'est accréditée et si le Tribunal n'a été saisi d'aucune autre demande;
b) dans les trois mois précédant la date d'expiration d'une accréditation ou de son renouvellement, s'il y a au moins un accord-cadre en vigueur pour le secteur visé;
c) sinon, un an après la date de l'accréditation ou de son renouvellement, ou dans le délai inférieur fixé, sur demande, par le Tribunal.

[...]

26. (1) Une fois expiré le délai mentionné au paragraphe 25(3), le Tribunal définit le ou les secteurs de négociation visés et tient compte notamment de la communauté d'intérêts des artistes en cause et de l'historique des relations professionnelles entre les artistes, leurs associations et les producteurs concernés en matière de négociations, d'accords-cadres et de toutes autres ententes portant sur des conditions d'engagement d'artistes, ainsi que des critères linguistiques et géographiques qu'il estime pertinents.

(2) Les artistes visés par une demande, les associations d'artistes et les producteurs peuvent intervenir devant le Tribunal, sans l'autorisation visée au paragraphe 19(3), sur toute question liée à la définition du secteur de négociation.

[...]

27. (1) Une fois le secteur défini, le Tribunal détermine, à la date du dépôt de la demande ou à toute autre date qu'il estime indiquée, la représentativité de l'association d'artistes.

(2) Les artistes visés par la demande et les associations d'artistes peuvent intervenir devant le Tribunal, sans l'autorisation visée au paragraphe 19(3), sur toute question liée à la détermination de la représentativité.

28. (1) Le Tribunal délivre l'accréditation s'il est convaincu que l'association est la plus représentative du secteur visé.

[93] Également, l'article 2 du Règlement sur les catégories professionnelles, SOR/99-191 (le « Règlement »), qui est entré en vigueur le 22 avril 1999, est pertinent :

2. (1) Sous réserve du paragraphe (2), pour l'application du sous-alinéa 6(2)b)(iii) de la Loi sont établies à l'égard de la création d'une production les catégories professionnelles visées aux alinéas a) à e), qui comprennent les professions dont l'exercice contribue directement à la conception de la production et consiste à effectuer une ou plusieurs des activités décrites aux alinéas respectifs :
a) catégorie 1 : conception de l'image, de l'éclairage et du son;
b) catégorie 2 : conception de costumes, coiffures et maquillage;
c) catégorie 3 : scénographie
d) catégorie 4 : arrangements et orchestration
e) catégorie 5 : recherche aux fins de productions audiovisuelles, montage et enchaînement.

(2) Sont exclues des catégories professionnelles visées au paragraphe (1) :
a) les professions qui consistent à effectuer, dans le cadre de toute activité visée au paragraphe (1), la comptabilité, la vérification ou le travail juridique, publicitaire, de représentation, de gestion, administratif ou d'écriture, ou autre travail de soutien;
b) les professions qu'exercent les personnes visées au sous-alinéa 6(2)b)(i) de la Loi ou qui consistent à effectuer une activité visée au sous-alinéa 6(2)b)(ii) de la Loi.

Prétention des parties

L'APASQ

[94] L'APASQ soutient que les personnes qui oeuvrent dans le secteur recherché par l'APASQ forment un groupe homogène partageant nécessairement une communauté d'intérêts puisqu'elles participent d'une manière directe au soutien et à la création de l'oeuvre scénique globale en produisant, tous et chacun, une oeuvre ou une partie d'oeuvre identifiable. Ces personnes revendiquent, ou peuvent revendiquer, l'existence de droits d'auteur ou d'un droit de suite sur leur partie de la création. Ce groupe constitue un groupe distinct de celui des interprètes. Tous les artistes identifiés dans le groupe participent d'une manière créative à l'existence, la production et la réalisation d'une oeuvre scénique en danse, à l'opéra, au théâtre ou en variétés.

[95] L'APASQ prétend que le statut des concepteurs de son, d'éclairage, de décors et de costumes n'est pas en litige puisque ces fonctions sont visées par la réglementation adoptée en vertu du sous-alinéa 6(2)b)(iii) de la Loi. Par ailleurs, le statut des régisseurs et des assistants metteurs en scène n'est pas contesté en raison de l'entente intervenue avec la CAEA et le fait que le Tribunal a déjà jugé, dans l'affaire CAEA 1996 TCRPAP 010, que ces personnes « dirigent » l'oeuvre au sens du sous-alinéa 6(2)b)(ii) de la Loi. L'APASQ s'en remet également aux deux études du CQRHC qui font état de l'implication et de la participation des personnes qui exercent ces fonctions.

[96] Quant aux concepteurs d'accessoires, l'APASQ fait valoir que son témoin, Patricia Ruel, bénéficie d'une large expérience à titre de conceptrice d'accessoires et aussi, de façon plus large, comme scénographe. À titre de conceptrice d'accessoires, les services de Mme Ruel sont retenus exclusivement par le producteur ou le metteur en scène, de la même manière que toute autre personne qui participe à la production. Son témoignage démontre qu'elle n'est pas une « exécutante », mais qu'elle participe au même titre que les autres concepteurs à la création de l'oeuvre globale, sous la gouverne du metteur en scène. Elle doit interpréter le texte afin de concevoir. Elle transforme, adapte et crée.

[97] Le témoignage de M. Lacroix confirme généralement celui de Mme Ruel : les concepteurs d'accessoires se distinguent des concepteurs de décors bien que la même personne puisse parfois accomplir les deux fonctions. M. Lacroix a témoigné que s'il est engagé à titre de concepteur de décors et d'accessoires dans une même production, sa rémunération reflète ce fait.

[98] L'APASQ soutient donc que le groupe des concepteurs d'accessoires est distinct de celui des concepteurs de décors et que la personne conceptrice d'accessoires est un artiste au sens de la Loi soit parce qu'elle peut être auteur au sens de la Loi sur le droit d'auteur ou être visée par le Règlement du fait qu'elle participe à la création d'une oeuvre scénique et que cette fonction s'incorpore ainsi dans la catégorie scénographie.

[99] Sur la question des concepteurs de marionnettes, le témoignage de M. Lacroix démontre que le concepteur crée non seulement l'environnement de la marionnette, mais aussi le personnage. Le concepteur interprète nécessairement l'oeuvre et participe au processus de production, de création et de réalisation. L'APASQ rejette l'argument voulant que la marionnette ne soit qu'un accessoire.

[100] Les assistants aux décors et aux costumes participent au processus de production et, d'une façon plus importante, au processus créatif. Ils relèvent généralement du metteur en scène comme tous les autres intervenants à la production. Dans certains cas, ils relèvent du concepteur. Les témoignages de M. Fortin et de Mme Ruel appuient la prétention que les assistants insèrent dans l'oeuvre globale des parties identifiables de leur création qui peuvent être détachées de celle-ci. Les assistants doivent avoir une bonne connaissance de l'oeuvre et des indications artistiques fournies par le metteur en scène. Les assistants font de la recherche, adaptent, mettent en oeuvre et, par conséquent, créent.

[101] L'APASQ note le témoignage de Fernand Déry, témoin de TAI et du CNA, pour démontrer que même l'artiste-interprète se retrouve sous la gouverne du metteur en scène et ne fait que réaliser l'idée conçue par ce dernier, au même titre que les concepteurs et les assistants. Ainsi, les assistants participent au processus de création et sont également visés par le Règlement sous la catégorie scénographie.

[102] Le témoignage de M. Gaucher démontre qu'il y a une différence entre le peintre de décors et le peintre en bâtiment. Le peintre de décors apporte un élément créateur tout en considérant nécessairement les paramètres fixés. Il interprète la maquette et intervient avec un souci artistique. Les peintres de décors sont choisis pour leurs qualités particulières. Ils doivent travailler en étroite relation avec le concepteur et le metteur en scène. Ils sont plus que de simples exécutants.

[103] Le fait que l'APASQ soit le seul regroupement à revendiquer la représentation de tous ces artistes, et ce, sur le territoire du Québec démontre la distinction fondamentale entre la réalité au Québec et celle dans le reste du Canada. L'APASQ demande au Tribunal de consacrer la réalité, de prendre acte des distinctions importantes qui s'exercent dans le milieu théâtral et dans le milieu scénique de façon générale au Québec. L'APASQ représente la quasi-totalité, sinon la totalité, des concepteurs visés par sa demande au Québec et elle est l'association reconnue légalement au Québec pour agir au nom de l'ensemble des concepteurs sans aucune distinction linguistique. Ces facteurs constituent un élément historique de l'association. L'APASQ est la seule association qui s'intéresse à la vie professionnelle des concepteurs de même qu'à leur développement socio-économique.

[104] L'APASQ reconnaît que l'ADC est l'association qui revêt une structure nationale mais au Québec sa présence est clairement limitée en raison de l'existence de l'APASQ. Le Tribunal doit considérer ces faits pour déterminer non seulement la communauté d'intérêts des artistes dans le secteur recherché, mais aussi la représentativité de l'APASQ pour ce secteur.

[105] L'APASQ souligne que le critère linguistique prévu à l'article 26 de la Loi n'est qu'un des critères que le Tribunal doit examiner, contrairement à ce que prétend l'ADC. L'APASQ demande au Tribunal de considérer l'historique des relations professionnelles, la réalité consacrée, c'est-à-dire la réalité géographique sans distinction linguistique, et les activités que chacune des associations mène dans leur domaine respectif. À l'appui de son argument, l'APASQ fait référence à deux décisions du Conseil canadien des relations du travail impliquant la Société Radio-Canada [(1991) 84 di 1; (1994) 96 di 1] où le Conseil a pris acte de cette réalité lorsqu'il a accrédité des unités de négociation pour le Québec et à Moncton au Nouveau-Brunswick, et a accrédité des unités de négociation séparées pour le reste du Canada.

L'ADC

[106] L'ADC prétend que le secteur proposé est un secteur approprié aux fins de la négociation. L'historique des relations professionnelles au sein de cette association montre que les concepteurs partagent une communauté d'intérêts. La PACT reconnaît que l'ADC est l'agent négociateur des concepteurs partout au Canada. Dans les autres domaines des arts de la scène, c'est-à-dire autre que le théâtre anglophone où la PACT a compétence, l'ADC négocie des ententes distinctes. L'ADC allègue que selon ses données, son effectif est composé de nombreux concepteurs de décors, de costumes et d'éclairage ainsi que d'un nombre accru de concepteurs de son. Étant donné que la conception du son est plus récente, cette association continuera de travailler avec les artistes pour veiller à ce que ces derniers reçoivent la même rémunération et les mêmes avantages que ceux dont bénéficient les autres concepteurs du domaine théâtral.

[107] L'ADC prétend que même si les peintres de décors, les directeurs techniques, les directeurs de production ainsi que les assistants aux décors et aux costumes et les assistants à la production sont des techniciens qualifiés et des artisans très talentueux, l'APASQ n'a pas démontré qu'ils sont des artistes. Premièrement, ils ne sont pas habituellement considérés comme des artistes lors de la réalisation des productions anglophones même si l'APASQ les représente depuis de nombreuses années. Les témoins de TAI et du CNA qui ont parlé des productions francophones appuient cette allégation. Selon l'ADC, les peintres de décors réalisent la vision d'un autre artiste. Ils ne font pas d'interprétation artistique ni ne créent une oeuvre eux-mêmes. Un peintre de décors peut faire des suggestions, mais le concepteur conserve le pouvoir de les approuver ou de les rejeter.

[108] En ce qui a trait aux concepteurs d'accessoires, l'ADC prétend que les documents déposés en preuve par l'APASQ ne démontrent pas l'existence d'une communauté d'intérêts distincte ou encore de pratiques différentes entre les concepteurs de marionnettes et les concepteurs de décors et de costumes. L'ADC allègue que la pratique courante et reconnue en ce qui concerne les productions en français et en anglais au Canada consiste à inclure les concepteurs d'accessoires et de marionnettes dans une sous-catégorie de concepteurs de décors et de costumes. Par exemple, les seules catégories reconnues lorsque des prix sont remis sont celles des décors, des costumes, de l'éclairage et du son.

[109] Même si elle est d'accord avec l'APASQ en ce qui concerne la communauté d'intérêts dans le domaine de la conception théâtrale, l'ADC prétend qu'il n'y a pas, au Québec, de communauté d'intérêts distincte de celle qui existe dans le reste du Canada. Toute différence qu'il pourrait y avoir dans les méthodes de travail et les circonstances propres au Québec sont comparables à tous points de vue aux autres différences régionales que l'on trouve au Canada. L'ADC respecte ces différences régionales et en a tenu compte avec succès dans le passé. En outre, l'ADC a démontré que s'il y a une séparation à faire en pratique, elle doit être faite entre les concepteurs qui travaillent pour des théâtres anglophones et ceux qui travaillent pour les théâtres francophones. L'ADC prétend de plus qu'elle et l'APASQ ont présenté des preuves démontrant que des concepteurs habitant à l'extérieur du Québec travaillent au Québec dans de le domaine des arts de la scène et que les concepteurs du Québec travaillent dans le reste du Canada. Cela signifie que les concepteurs de partout au pays partagent une communauté d'intérêts.

[110] Quant à sa représentativité pour le secteur proposé, l'ADC allègue avoir démontré son intention de défendre les intérêts économiques et juridiques des concepteurs des quatre coins du Canada. En raison du précédent établi par d'autres secteurs, de l'expérience des autres organisations et de la mobilité des artistes, y compris les concepteurs, l'ADC prétend, de plus, que les frontières géographiques sont dénuées de sens. Elle croit fermement que la communication est au coeur de la conception, tout comme elle est au coeur du travail des comédiens. D'ailleurs, la majeure partie du processus de création est consacrée à la communication interpersonnelle. Par conséquent, toute distinction devant être faite doit être fondée sur la langue et non sur la géographie. En outre, l'ADC ajoute qu'un secteur fondé sur la géographie est illogique et n'est pas conforme à la pratique ayant cours dans le domaine du théâtre au Canada.

[111] L'ADC soutient que l'argument contraire avancé par l'APASQ porte à confusion. Pour appuyer son allégation, elle mentionne que le secteur proposé par l'APASQ n'est pas strictement limité au Québec, car cette organisation veut représenter les concepteurs au CNA autres que ceux qui travaillent au département de théâtre anglais du CNA.

[112] L'ADC s'efforce depuis de nombreuses années, et continuera de s'efforcer, de devenir un véritable organisme national. Il sera difficile d'atteindre cet objectif si les secteurs sont séparés en fonction des frontières interprovinciales. Selon l'ADC, cette division est incompatible avec les pratiques de conception dans le domaine du théâtre.

[113] L'ADC prétend que ses concepteurs oeuvrent depuis longtemps dans tous les domaines des arts de la scène lors de productions anglophones et francophones au CNA. Bien que l'ADC reconnaisse que les membres de l'APASQ travaillent de façon autonome au CNA, elle estime que l'APASQ n'a pas démontré l'existence d'un historique de négociations entre celle-ci et le CNA. L'ADC ajoute que l'APASQ ne représente d'aucune façon les concepteurs qui participent à des productions en français au CNA, y compris son département de théâtre français, puisque ce département n'a rien produit depuis de nombreuses années.

[114] En guise de conclusion, l'ADC affirme que l'APASQ n'a pas les ressources nécessaires pour appuyer les concepteurs anglophones ou ceux qui collaborent à des productions anglophones. Puisqu'elle a le matériel et le personnel requis pour représenter tous les concepteurs du Canada ainsi que l'intention, le mandat et peut-être même la responsabilité de le faire, l'ADC se dit prête à représenter tous les concepteurs travaillant avec des producteurs fédéraux, tant dans les productions anglophones que francophones.

TAI et le CNA

[115] TAI et le CNA (ci-après appelées « les intervenantes ») ont rappelé au Tribunal que TAI regroupent 11 théâtres au Québec ainsi que le département de théâtre français du CNA. Le CNA compte cinq départements : le théâtre français, le théâtre anglais, la danse, la musique et le département communautaire. Les intervenantes ne s'objectent pas à ce que la demande de l'APASQ vise le théâtre français, mais s'opposent à la partie de la demande qui vise le reste des activités au CNA.

[116] Les intervenantes notent que l'APASQ détient une accréditation provinciale pour les fonctions de concepteurs de décors, de costumes, de son et d'éclairage. Il y a un historique de négociation entre l'APASQ et le CNA pour le département de théâtre français qui tient compte de cette accréditation provinciale.

[117] L'article 18 de la Loi prévoit que le Tribunal doit tenir compte, pour toutes questions liées, des principes applicables en droit du travail. Ainsi, les intervenantes affirment que l'historique des négociations est révélateur puisque l'entente collective APASQ-TAI précise que les accessoires relèvent des concepteurs de décors ou de costumes.

[118] En adoptant le Règlement en vertu du sous-alinéa 6(2)b)(iii) de la Loi, le législateur a prévu diverses catégories de conception, notamment la conception d'éclairage, de son, de costumes ainsi que la scénographie. Les parties s'entendent pour dire que ces individus sont des « artistes ». La conception d'accessoires n'étant pas incluse dans le Règlement, les intervenantes soutiennent qu'il n'existe pas une preuve suffisante ou probante au dossier pour permettre au Tribunal de conclure que cette catégorie de concepteurs est distincte.

[119] Quant aux concepteurs de marionnettes, les intervenantes soulignent que les témoins du CNA et TAI, MM. Rousseau, Gazalé et Déry, ont tous témoigné que la conception de marionnettes est souvent faite par les concepteurs de décors. De plus, le Règlement ne prévoit pas une catégorie distincte pour la conception de marionnettes. Certains témoins ont souligné que la fabrication de marionnettes peut impliquer la manipulation de celles-ci. L'entente conclue entre l'APASQ et l'UDA à ce titre prévoit que la juridiction de l'APASQ se limite à la fabrication de la marionnette, la fonction de manipulateur étant couverte par l'accréditation de l'UDA. Or, l'APASQ et l'UDA reconnaissent qu'en vertu de cette entente, une même personne pourrait être assujettie à deux accords-cadres ce qui poserait un problème pour le producteur.

[120] Selon les intervenantes, les peintres de décors sont sans conteste des individus talentueux, mais ils ne sont pas des artistes parce qu'ils ne font que reproduire des concepts, ce qui constitue un travail de soutien. Ainsi, ces individus sont clairement visés par l'alinéa 2(2)a) du Règlement qui prévoit que les personnes qui effectuent un travail de soutien ne sont pas des artistes au sens de la Loi. Selon ce même raisonnement, les intervenantes soutiennent que les fonctions d'assistants aux costumes et aux décors sont également exclues de l'application de la Loi puisque les titulaires de ces fonctions exercent clairement des tâches de soutien. Les intervenantes soutiennent de plus que l'expérience vécue par M. Fortin, qui a été assistant aux costumes pour François Barbeau, n'est pas représentative des personnes qui agissent à titre d'assistants aux costumes. De plus, le fait que M. Fortin est devenu concepteur de costumes pour obtenir la reconnaissance du milieu est une preuve implicite qu'il ne se voyait pas comme un artiste lorsqu'il était assistant.

[121] Par ailleurs, les intervenantes soutiennent que l'inclusion des assistants dans le même secteur que les concepteurs de décors et de costumes irait à l'encontre du principe en droit du travail qui veut qu'on ne doit pas inclure dans une même unité de négociation le contremaître et le salarié. Ce principe a déjà été reconnu par le Tribunal lorsqu'il a créé un secteur distinct pour les metteurs en scène pour les productions de langue française, en raison de la supervision que ceux-ci avaient sur le travail des interprètes [voir Union des artistes, 1997 TCRPAP 024]. De plus, accorder le statut d'« artiste » aux assistants aux décors et costumes posera un problème pratique important pour le producteur au niveau de la reconnaissance des droits de suite.

[122] Plusieurs témoins, dont M. Gazalé et Mme Needles, ont expliqué au Tribunal qu'il existe d'importantes distinctions culturelles de fonctionnement quant aux régisseurs et aux assistants metteurs en scène dans l'industrie du théâtre anglophone et francophone. Ainsi, les intervenantes soutiennent que le Tribunal ne peut pas se fonder sur les conclusions qu'il a formulées dans la décision concernant la CAEA 1996 TCRPAP 010 pour déterminer si les régisseurs et les assistants metteurs en scène sont des « artistes » dans le présent dossier. De plus, les intervenantes notent que l'APASQ n'a déposé aucune preuve de négociation avec des producteurs pour les fonctions de régisseur et d'assistant metteur en scène.

[123] Au niveau de la représentativité, la preuve révèle que l'APASQ est présente au sein du département de théâtre français au CNA depuis 1993. L'entente APASQ-TAI s'applique uniquement au théâtre. Par conséquent, les intervenantes demandent au Tribunal de limiter l'accréditation de l'APASQ à ce département.

[124] Les intervenantes font valoir que lorsque la langue ne fait pas partie de l'expression artistique, le Tribunal a, dans le passé, conclu qu'un secteur national est plus approprié. D'autre part, si la langue constitue un élément intégral de l'expression artistique, le critère linguistique revêt une plus grande importance et le Tribunal en tient compte au moment de la définition du secteur [voir 1997 TCRPAP 024 et 1996 TCRPAP 020]. Selon les intervenantes, la langue est un facteur important pour les concepteurs, non seulement au niveau de la communication mais aussi pour le partage de la culture.

IATSE

[125] IATSE a souligné qu'elle est présente dans le milieu théâtral au Canada depuis 1896 et au CNA depuis 1969. IATSE se compose d'individus salariés qui, bien qu'étant des individus talentueux, ne prétendent pas être des artistes. Selon IATSE, le produit final, le spectacle, est le fruit de la collaboration à différents niveaux, ce qui implique différents échelons de responsabilité. Les concepteurs conçoivent, créent une idée et, par conséquent, IATSE soutient que ce sont les véritables artistes. Pour réaliser leur idée, les concepteurs font appel à des techniciens habiles et expérimentés, tels les peintres de décors. C'est ainsi que les membres d'IATSE participent à l'élaboration d'une production théâtrale. IATSE note que ses membres ne sont pas reconnus comme artistes, et ne cherchent pas cette reconnaissance du milieu artistique. Si le Tribunal accréditait l'APASQ pour représenter cette fonction, ce serait un empiétement sur le travail réservé aux membres d'IATSE.

Réplique de l'APASQ

[126] L'APASQ précise que les concepteurs d'accessoires ont été inclus sous le chapeau de concepteurs de décors ou costumes en raison de l'accréditation au niveau provincial uniquement. Quant à la question de la double juridiction soulevée par les intervenantes pour les concepteurs de marionnettes, l'APASQ soutient que l'on retrouve ce problème dans tous les domaines propre du droit du travail, non pas seulement en vertu de la Loi.

Réplique de l'ADC

[127] En premier lieu, l'ADC souligne que contrairement à ce qu'affirme l'APASQ, on doit distinguer le cas des assistants et des peintres de décors de celui des comédiens qui suivent les directives du metteur en scène, car ces derniers ajoutent leur propre création artistique à la production. En deuxième lieu, l'ADC réitère son désaccord en ce qui a trait à la place importante qu'occupe la langue dans la conception. D'après l'ADC, l'APASQ prétend à tort que la langue est sans importance dans les domaines comme la danse, l'opéra et les variétés, car celle-ci est un élément essentiel du processus de conception et de l'expression artistique tirée de la conception.

Analyse et conclusions

Les ententes intervenues entre les parties

[128] La SPACQ est intervenue en raison d'un chevauchement possible entre la fonction de concepteur de son visée par la demande de l'APASQ et la fonction de compositeur d'une oeuvre musicale visée par son accréditation. Selon la SPACQ, le concepteur de son est une personne qui crée l'environnement sonore d'une production artistique à l'aide de moyens électroniques ou acoustiques sans qu'il y ait composition musicale, mélodie ou harmonie ou combinaison de l'une et l'autre. Le concepteur de son visé par la demande d'accréditation de l'APASQ n'est pas le compositeur d'une oeuvre musicale.

[129] Les parties n'ont pas présenté d'entente écrite au Tribunal, mais à la suite d'une discussion entre les procureurs, la SPACQ et l'APASQ ont demandé au Tribunal de noter dans ses motifs de décision que le secteur demandé par l'APASQ n'empiète pas sur l'accréditation accordée à la SPACQ [voir 1996 TCRPAP 007]. Le Tribunal accueille la demande de la SPACQ et l'APASQ, reconnaît qu'il n'y a pas de chevauchement entre les secteurs et que la fonction du concepteur de son est distincte de celle du compositeur d'une oeuvre musicale.

[130] L'APASQ a conclu trois ententes dont copies ont été déposées afin que le Tribunal en prenne acte. La première est intervenue entre l'UDA et l'APASQ. La demande initiale de l'APASQ visait « les concepteurs (...) de marionnettes, les metteurs en scène (...) ». En 1996, l'UDA a été accréditée pour représenter les manipulateurs de marionnettes à titre d'artistes-interprètes [voir 1996 TCRPAP 017] et, en 1998, a été accréditée pour représenter un secteur composé de metteurs en scène [voir 1997 TCRPAP 024 et 1998 TCRPAP 027].

[131] Conformément à l'entente, l'APASQ a amendé sa demande pour y exclure les metteurs en scène et reconnaît que la fonction de concepteurs de marionnettes dans le secteur qu'elle propose se limite à la conception et à la fabrication de marionnettes et ne s'étend pas à la manipulation de marionnettes avec ou sans voix. L'APASQ reconnaît que la fonction de manipulation de marionnettes est visée par l'accréditation de l'UDA.

[132] La deuxième entente, conclue avec le CNA et la PACT, reconnaît que toutes les productions, coproductions et/ou diffusions au département de théâtre anglais du CNA ne sont pas visées par le secteur proposé dans la demande de l'APASQ. L'entente a uniquement pour but de clarifier la portée intentionnelle de l'accréditation recherchée.

[133] Le Tribunal prend acte des deux ententes susmentionnées, dont copie est jointe aux présents motifs.

[134] La dernière entente, conclue avec la CAEA, vise les fonctions de régisseur et d'assistant metteur en scène. La CAEA a été accréditée afin de représenter, entre autres, les régisseurs et les assistants metteurs en scène « qui participent à une oeuvre théâtrale, d'opéra, de ballet, de danse, un salon industriel, cabaret ou concert que la représentation ait lieu dans un théâtre ou ailleurs ». La CAEA a fait valoir qu'il y avait un chevauchement entre le secteur pour lequel elle a été accréditée et le secteur recherché par l'APASQ.

[135] Il s'agit de préciser la portée du secteur accordé à la CAEA puisque l'accréditation de cette dernière ne spécifie pas si la juridiction est limitée selon la langue de la production relativement aux fonctions de régisseur et d'assistant metteur en scène. L'entente conclue entre la CAEA et l'APASQ prévoit que l'APASQ représentera les régisseurs généraux, les régisseurs, les assistants régisseurs, les régisseurs apprentis, les assistants metteurs en scène et les assistants chorégraphes dans les productions exclusivement de langue française lorsque celles-ci sont exécutées dans la province de Québec ou au département de théâtre français du CNA. De plus, l'entente prévoit que si l'APASQ est accréditée par le Tribunal, la CAEA déposera une requête au Tribunal pour obtenir un amendement au secteur pour lequel elle a été accréditée et le secteur de l'APASQ sera assujetti à l'accréditation accordée à la CAEA.

[136] Il y a lieu de noter que seules les fonctions de régisseur et d'assistant metteur en scène sont à la fois visées par la demande d'accréditation de l'APASQ et incluses dans le secteur de la CAEA. Le Tribunal n'étant pas en mesure d'élargir le secteur de négociation recherché par l'APASQ, il prend acte de cette entente en ce qui concerne la définition du secteur par rapport à ces deux fonctions. Tel que demandé par les deux parties, tout secteur de négociation octroyé à l'APASQ sera assujetti à l'accréditation de la CAEA. Une copie de cette entente est jointe aux présents motifs.

[137] Le Tribunal reconnaît cependant que les parties sont libres de négocier toute entente qu'elles estiment appropriée. Ainsi, les conclusions du Tribunal au sujet de cette entente n'invalident pas les obligations des parties envers elles-mêmes.

Les concepteurs de décors, de costumes, d'éclairage et de son exercent-ils des professions visées par la Loi?

[138] Le Tribunal a entendu une preuve générale quant à l'apport créatif et à la participation des diverses personnes exerçant les fonctions de concepteur de décors, de costumes, d'éclairage et de son dans le cadre d'une production. Les parties et les intervenantes ont fait valoir que ces quatre professions répondent aux critères pour être considérés comme des artistes au sens de la Loi, et ce, en vertu du Règlement en application du sous-alinéa 6(2)b)(iii) de la Loi.

[139] Les alinéas a) à e) de l'article 2 du Règlement prévoit certaines catégories professionnelles qui comprennent des professions dont l'exercice contribue directement à la conception de la production et consiste à effectuer une ou plusieurs activités qui y sont décrites. Notamment, à l'alinéa 2(1)a) du Règlement on y mentionne la conception du son et de l'éclairage; à l'alinéa 2(1)b), la conception de costumes; et à l'alinéa 2(1)c), la scénographie. Il n'a pas été contesté par les parties que la scénographie comprend la conception de décors.

[140] Le Tribunal juge que les concepteurs de décors, de costumes, d'éclairage et de son contribuent directement à la conception de la production et que, par conséquent, les personnes qui exercent ces professions sont des artistes en vertu du sous-alinéa 6(2)b)(iii) de la Loi.

Les concepteurs d'accessoires exercent-ils une profession qui est visée par la Loi?

[141] Essentiellement les positions des parties se résument ainsi. L'APASQ revendique cette fonction pour son secteur et soutient qu'il s'agit d'une fonction à part entière tout comme les autres concepteurs. L'ADC fait valoir que la fonction de concepteur d'accessoires n'existe pas comme telle, qu'il s'agit d'une tâche comprise dans les fonctions générales du concepteur de décors. Par ailleurs, les intervenantes, TAI et le CNA, contestent l'inclusion de cette profession dans le secteur parce qu'elles sont d'avis que le travail de l'« accessoiriste » s'apparente à celle d'un magasinier et qu'il n'y a aucun apport créatif à la production. De plus, elles soulignent que la fonction n'est pas expressément nommée dans le Règlement.

[142] Le témoin de l'APASQ, Patricia Ruel, oeuvre dans le monde théâtral depuis 1998, mais elle a déjà participé à une trentaine de productions. Elle travaille à titre de conceptrice d'accessoires ainsi qu'à titre de scénographe dans des productions de plus ou moins grande envergure. Le témoignage de Mme Ruel a été clair et sans équivoque. La personne conceptrice d'accessoires contribue aux aspects créatifs d'une production. Elle relève du metteur en scène tout comme les autres concepteurs, non pas du concepteur de décors. Même si la même personne cumule deux fonctions, conception d'accessoires et conception des décors, dans une même production, la rémunération et le contrat reflètent ce fait. Plusieurs témoins ont d'ailleurs affirmé qu'une personne peut cumuler plus d'une fonction pour des raisons artistiques ou budgétaires.

[143] Selon la preuve présentée par les intervenantes, TAI et le CNA, le Tribunal comprend qu'il existe une profession appelée « accessoiriste » ou, selon Mme Ruel, « accessoiriste de plateau » et que ces personnes sont souvent des salariés, donc exclues de l'application de la Loi. Le Tribunal comprend également que dans certaines productions, le concepteur de décors peut assumer la conception des accessoires et reléguer à une autre personne la tâche de rassembler ou de choisir les accessoires. Dans ce cas, il est clair que la contribution de l'accessoiriste « ne contribue pas directement à la conception de la production » puisque les choix artistiques auront été faits par le concepteur de décors. Le Tribunal note que les témoins des intervenantes sont des personnes bien qualifiées et crédibles, ayant une expérience pertinente. Toutefois, la preuve relève qu'ils sont pour la plupart impliqués surtout au niveau administratif depuis les dernières années, et ce, dans une institution en particulier.

[144] L'ADC avance plusieurs arguments pour appuyer sa prétention qu'il n'existe pas de fonction appelée « concepteur d'accessoires ». Si la fonction existe, l'ADC fait valoir qu'elle n'est pas visée par la Loi. L'ADC a démontré qu'on ne remet pas de prix pour cette fonction lors des galas dans le monde du théâtre. Dennis Horn a également témoigné que la conception des accessoires est une tâche qui est toujours assumée par le concepteur de décors.

[145] Selon le Tribunal, l'absence de prix n'est pas un élément de preuve déterminant pour conclure que la fonction n'existe pas en tant que telle. Selon l'ADC, la fonction du concepteur de son n'est reconnue que depuis récemment, ce qui illustre qu'il y a une évolution des tâches. Le fait qu'une même personne accepte de cumuler deux fonctions ne veut pas dire que dans une autre situation ces tâches ne pourraient être attribuées à deux personnes. Le Tribunal est d'avis qu'il existe effectivement une activité distincte que l'on peut appeler la conception d'accessoires. Il faut toutefois comprendre que la personne qui exerce cette fonction doit relever du metteur en scène au même titre que les autres concepteurs de la production et que son travail inclut la création ou la transformation d'objets de même qu'une recherche dans le but de développer tout un concept qui traduira la vision du metteur en scène. Il faut maintenant examiner le Règlement pour voir si cette fonction est incluse dans les catégories prévues.

[146] Les activités décrites aux alinéas a) à e) du Règlement s'exercent en fonction d'un domaine artistique et non pas en rapport à des professions spécifiques. Par exemple, l'alinéa 2(1)b) réfère à la « conception de costumes, coiffures et maquillage » et non au « concepteur de costumes (...) » indiquant la volonté du législateur de ne pas restreindre l'application de ces catégories à des fonctions déterminées. Le Tribunal juge que la conception d'accessoires est une activité qui s'apparente à la scénographie et que par conséquent la fonction est visée à l'alinéa 2(1)c) du Règlement et que le concepteur d'accessoires est un artiste en vertu du sous-alinéa 6(2)b)(iii) de la Loi.

Les concepteurs de marionnettes exercent-ils une profession qui est visée par la Loi?

[147] La fonction « concepteur de marionnettes » est également contestée par l'ADC et les intervenantes TAI et le CNA. L'argument principal est à l'effet que la conception de marionnettes est une fonction qui relève du concepteur de décors ou de costumes. Par ailleurs, les intervenantes soutiennent que la fonction est exclue de l'application de la Loi parce que le législateur ne l'a pas spécifiquement nommée dans le Règlement.

[148] Il ressort du témoignage de Richard Lacroix que le concepteur de marionnettes est embauché à contrat et que sa tâche est habituellement double puisqu'il doit concevoir le castelet, qui est l'environnement de la marionnette, de même que la marionnette elle-même. Dans certains cas, le concepteur s'inspire de textes déjà écrits et, dans d'autres cas, le tout est une création. Un atelier spécialisé entreprendra la fabrication de la marionnette et du castelet, mais le travail se fait sous la supervision du concepteur. Par ailleurs, la preuve démontre que le concepteur de marionnettes est impliqué dans le processus créatif à toutes les étapes.

[149] Le Tribunal est d'avis qu'il existe une preuve suffisante pour conclure que la fonction de concepteur de marionnettes existe comme telle et qu'il ne s'agit pas d'une fonction qui relève du concepteur de décors ou de costumes. Par contre, il n'y a rien qui empêche un concepteur de marionnettes de travailler également à titre de concepteur de décors ou de costumes. Il faut maintenant examiner le Règlement pour voir si la fonction est incluse dans une des catégories énoncées.

[150] D'une part, la conception du castelet s'apparente à la conception des décors au théâtre. Par ailleurs, comme l'a témoigné M. Lacroix, lorsque le concepteur dessine la marionnette, crée son image et imagine ses vêtements, le travail s'apparente davantage à ce que fait le concepteur de costumes. Puisque ces deux fonctions sont clairement visées par le Règlement aux alinéas 2(1)b) : conception de costumes, coiffures et maquillage et 2(1)c) : scénographie, le Tribunal conclut que la conception de marionnettes est une fonction visée au Règlement et que le concepteur de marionnettes est un artiste en vertu du sous-alinéa 6(2)b)(iii) de la Loi.

Les assistants concepteurs de décors et de costumes exercent-ils des professions qui sont visées par la Loi?

[151] L'APASQ réclame la représentation des individus exerçant les fonctions d'assistants concepteurs de décors et de costumes car, selon elle, ce sont des artistes professionnels au sens de la Loi. Ces individus réalisent la vision artistique du metteur en scène et du concepteur. Ils peuvent identifier leur apport créatif dans la production globale et ainsi participent au processus de création. Le producteur retient leurs services à titre d'entrepreneur indépendant, de la même manière que les autres membres de l'équipe de production.

[152] L'ADC s'oppose à l'inclusion de ces individus dans le secteur recherché par l'APASQ au motif qu'ils n'exercent aucune fonction artistique. De leur côté, les intervenantes, TAI et le CNA, soutiennent que les assistants aux décors et aux costumes effectuent uniquement un travail de soutien pour les concepteurs de sorte qu'ils ne sont pas des « artistes » au sens de la Loi.

[153] L'expérience du témoin de l'APASQ, Daniel Fortin, démontre qu'en tant qu'assistant, les possibilités de contribution artistique sont vastes. Dans sa carrière, M. Fortin a oeuvré à titre d'assistant principalement pour François Barbeau qui, selon la preuve, détient un statut exceptionnel dans le domaine de la conception. Bien que M. Fortin soit un témoin crédible, le Tribunal est d'avis que son expérience ne représente pas le travail exécuté par la majorité des assistants concepteurs de costumes.

[154] Le témoignage de M. Horn, pour l'ADC, illustre l'expérience opposée du travail d'un assistant, celui qui exécute presqu'exclusivement des tâches administratives. Il faut cependant se rappeler que l'ensemble de l'expérience de M. Horn se limite à une seule saison au Festival de Stratford, qui, tel qu'il a lui-même admis, se calcule en fonction d'heures et non de semaines. L'expérience de M. Horn étant ainsi limitée, le Tribunal estime qu'elle n'est pas représentative du milieu des assistants non plus.

[155] Il appert au Tribunal que l'ensemble des tâches des assistants concepteurs de décors et de costumes se situent vraisemblablement entre ces deux extrêmes. La preuve présentée par David Gaucher à ce sujet confirme cette conclusion. M. Gaucher possède une grande expérience dans le milieu des arts de la scène au Québec. De plus, il a agi à titre d'assistant pendant trois ans au début de sa carrière et, depuis, il travaille avec des assistants. Selon lui, être assistant concepteur de décors ou de costumes requiert des compétences artistiques car ces derniers doivent concrétiser, « donner vie », à l'idée générale du concepteur, tout comme le concepteur réalise la vision artistique du metteur en scène. Pierre Rousseau appuie, lui aussi, cette conclusion lorsqu'il a témoigné que le choix des assistants concepteurs de décors et de costumes contribue à la qualité artistique du travail des concepteurs. Toutefois, la preuve révèle que ces fonctions comprennent nécessairement un volet administratif et que le temps consacré par les assistants aux tâches administratives varie selon la méthode de travail du concepteur ainsi que la taille de la production.

[156] À la lumière de ces faits, le Tribunal doit déterminer si les assistants concepteurs de décors et de costumes sont des « artistes » au sens de la Loi. Le sous-alinéa 6(2)b)(iii) de la Loi veut que l'entrepreneur indépendant qui participe à la création d'une oeuvre, entre autres, dans le domaine des arts de la scène, de la danse et des variétés soit un artiste au sens de la Loi. Le Règlement est venu préciser la portée de cette disposition. Ainsi, le paragraphe 2(1) du Règlement prévoit que le professionnel qui participe à la création d'une production en contribuant directement à la conception de celle-ci sera visé par la Loi. Le Règlement précise également que la contribution du professionnel doit avoir lieu dans l'une ou plusieurs des catégories énumérées aux alinéas 2(1)a) à e).

[157] Les intervenantes, TAI et le CNA, prétendent que les assistants sont visés au paragraphe 2(2) du Règlement parce qu'ils font du « travail de soutien ». Or, le paragraphe 2(2) exclut ceux et celles qui exercent des fonctions non créatives, notamment la comptabilité, la vérification ou le travail juridique, publicitaire, de représentation, de gestion, administratif ou d'écriture, ou autre travail de soutien.

[158] Le Tribunal pourrait disposer de l'argument des intervenantes immédiatement car, à ses yeux, il y a un apport créatif dans le travail des assistants. Néanmoins, le Tribunal tient à noter que dans le contexte immédiat de la disposition, où les mots « la comptabilité, la vérification ou le travail juridique, publicitaire, de représentation, de gestion, administratif ou d'écriture, ou autre travail de soutien » sont grammaticalement et logiquement liés, l'interprétation des intervenantes ne saurait tenir. La portée à attribuer à un élément d'un ensemble de mots liés au plan grammatical et logique peut être établie par l'examen des caractéristiques communes de tous les éléments de l'ensemble (Sullivan, Driedger on the Construction of Statutes, 3e éd., Toronto, Butterworths, 1994, à la p. 200). Dans le cas des mots « la comptabilité, la vérification ou le travail juridique, publicitaire, de représentation, de gestion, administratif ou d'écriture, ou autre travail de soutien » les mots renvoient tous à une forme de « travail de bureau ou de travail administratif ». Le «travail de soutien» ne réfère pas aux tâches exécutées par les assistants concepteurs de costumes et de décors même si certaines de leurs tâches peuvent être administratives.

[159] L'énumération des activités des catégories professionnelles aux alinéas 2(1) a) à e) est explicitement liée à l'exigence de contribuer à la conception d'une production. Tel que susmentionné, ces catégories sont décrites en fonction du domaine artistique visé, et non pas par rapport à des professions spécifiques.

[160] La preuve démontre, qu'en général, ce sont des entrepreneurs indépendants qui oeuvrent à titre d'assistants concepteurs de décors et de costumes. Ces professionnels répondent au critère de la participation à la création d'une production énoncé au sous-alinéa 6(2)b)(iii) puisque le secteur proposé vise les arts de la scène, la danse et les variétés. Les compétences artistiques décrites par M. Gaucher illustrent la contribution directe de ces assistants à la conception d'une production. Le Tribunal considère, en fonction de cette preuve, que cet apport créatif est suffisant pour que ces fonctions soient visées par les alinéas 2(1)b) et 2(1)c) du Règlement et que les assistants concepteurs de costumes et de décors sont des artistes en vertu du sous-alinéa 6(2)b)(iii) de la Loi.

Les peintres de décors exercent-ils une profession qui est visée par la Loi?

[161] L'APASQ revendique cette fonction au motif qu'elle est exécutée par des individus qui possèdent des qualités artistiques particulières, leur apport créatif à la production se réalisant à l'intérieur des paramètres fixés par le scénographe et le metteur en scène. L'ADC considère que ces individus sont des techniciens très talentueux, mais ne sont pas des « artistes » puisqu'ils ne font que réaliser la vision d'un autre. Selon les intervenantes, TAI et le CNA, ces individus exercent un travail de soutien et sont ainsi exclus de l'application de la Loi en vertu de l'alinéa 2(2)a) du Règlement.

[162] La preuve déposée par David Gaucher, pour l'APASQ, démontre que les peintres de décors travaillent sur une production en raison de leurs compétences artistiques. Beaucoup de peintres de décors oeuvrent à titre de salariés dans des ateliers. Il arrive que les scénographes agissent aussi à titre de peintres de décors. Pierre Rousseau, témoin de l'intervenante TAI, confirme que ce sont généralement des ateliers qui sont engagés pour accomplir les tâches des peintres de décors, mais que l'atelier doit obtenir l'approbation du théâtre en ce qui concerne le peintre qui effectuera le travail. Lors de l'audience, l'APASQ n'avait aucun membre inscrit sous la catégorie « peintres de décors » dans leur liste de membres, mais Monique Corbeil, témoin de l'APASQ, a indiqué au Tribunal qu'un membre peut exercer trois, parfois quatre, professions à la fois et qu'il s'inscrit habituellement dans la catégorie où il est le plus reconnu.

[163] L'article 9 de la Loi prévoit qu'un artiste offrant ses services par l'intermédiaire d'une organisation demeure assujetti à la Loi. Ainsi, les peintres de décors qui s'incorporent peuvent bénéficier du régime de relations de travail établi par la Loi. Par ailleurs, au stade d'une demande d'accréditation, le Tribunal ne détermine pas la relation habituelle existante entre les producteurs et chaque membre de l'association d'artistes lorsqu'il ou elle exerce sa profession : APVQ-STCVQ, 2001 TCRPAP 035, au para. 18. Lorsque le Tribunal accrédite une association d'artistes, cela ne signifie pas que toutes les personnes oeuvrant dans un domaine artistique donné seront visées par l'accréditation. Il va de soi que les artistes engagés dans une relation employeur-employé sont exclus. D'autre part, il est important de retenir que rien n'empêche qu'une même personne puisse à la fois être une employée et oeuvrer dans le monde artistique comme entrepreneur indépendant : Union des Artistes, 1996 TCRPAP 017, au para. 24.

[164] En fonction de ce raisonnement, le Tribunal estime qu'un peintre de décors peut exercer ses fonctions dans le domaine des arts de la scène, de la danse ou des variétés à titre d'entrepreneur indépendant professionnel. Il reste à déterminer si ces professionnels sont visés par le Règlement. Le Tribunal accepte la preuve de l'APASQ voulant que les peintres de décors interviennent avec un souci artistique important, même s'ils doivent suivre les consignes des concepteurs. Cet apport créatif permet au Tribunal de conclure que les peintres de décors contribuent directement à la conception d'une production, répondant ainsi aux critères prévus au paragraphe 2(1) du Règlement. Le Tribunal rejette l'argument des intervenantes, TAI et le CNA, selon lequel les peintres de décors n'exécutent que des tâches « de soutien », pour la raison énoncée au paragraphe 158 des présents motifs. Le travail des peintres de décors servant à compléter celui du scénographe, le Tribunal conclut que ce travail est visé par l'alinéa 2(1)c) du Règlement et que les peintres de décors sont des artistes en vertu du sous-alinéa 6(2)b)(iii) de la Loi.

Les régisseurs et les assistants metteurs en scène exercent-ils des professions qui sont visées par la Loi?

[165] Puisque le Tribunal s'est déjà prononcé sur la question de savoir si les régisseurs et les assistants metteurs en scène sont des « artistes »CAEA 1996 TCRPAP 010, l'APASQ prétend que le Tribunal n'a pas à trancher cette question de nouveau. Les intervenantes, TAI et le CNA, soutiennent que la différence culturelle qui existe entre le fonctionnement du théâtre anglais et celui du théâtre français, telle qu'expliqué par leur témoin ainsi que les témoins de l'ADC, justifie une nouvelle analyse de la part du Tribunal à l'égard de ces fonctions.

[166] Le Tribunal concède qu'il existe certaines différences entre le fonctionnement du théâtre anglophone et celui du théâtre francophone et que ces différences peuvent avoir une incidence sur l'envergure des tâches exercées par les régisseurs et les assistants metteurs en scène. Cependant, ces différences n'ont pas pour effet de soustraire à ces fonctions leur apport artistique dans le monde du théâtre francophone. Les deux études complétées par le CQRHC pour ces professions attestent clairement de la contribution créative de ces deux fonctions à l'oeuvre scénique globale.

[167] L'étude complétée sur la profession de régisseur indique que le régisseur « dirige la représentation en s'assurant que l'équipe du spectacle accomplit avec précision les effets ... » du spectacle. D'autre part, l'étude sur la profession d'assistant metteur en scène démontre que l'assistant metteur en scène contribue à l'élaboration et à la mise au point de la mise en scène d'une production, sous la guise du metteur en scène. En s'inspirant du raisonnement articulé dans la décision de la CAEA, le Tribunal conclut que les régisseurs et les assistants metteurs en scène « dirigent ... de quelque manière que ce soit » une oeuvre et sont ainsi des « artistes » en vertu du sous alinéa 6(2)b)ii) de la Loi, même si cette direction s'effectue sous la supervision du metteur en scène. [voir 1996 TCRPAP 010, aux para. 31, 32 et 39].

Le secteur proposé par l'APASQ est-il approprié aux fins de la négociation?

[168] Le paragraphe 26(1) de la Loi prévoit que, lorsqu'il étudie une demande d'accréditation, le Tribunal doit tenir compte, notamment, de la communauté d'intérêts des artistes en cause et de l'historique des relations professionnelles entre les artistes, leurs associations et les producteurs en ce qui concerne les négociations, les accords-cadres et toutes autres ententes portant sur des conditions d'engagement d'artistes, ainsi que des critères linguistiques et géographiques qu'il estime pertinents.

[169] Il ressort de la preuve qu'il peut y avoir des différences de fonctionnement au niveau du théâtre anglais et du théâtre français et que l'envergure de la production peut affecter la façon dont les tâches sont réparties et, même, si certains postes seront comblés. De plus, la majorité de la preuve entendue, de part et d'autre, reflète la pratique dans des productions qui sont de compétence provinciale. Le secteur de production qui vraisemblablement relève d'un producteur fédéral est très limitée. C'est donc dans ce contexte que le Tribunal doit définir le secteur approprié aux fins de la négociation collective.

La communauté d'intérêts

[170] La demande d'accréditation de l'APASQ mentionne que toutes les personnes exerçant les fonctions énumérées dans le secteur proposé sont des « artistes » au sens de la Loi parce que ces personnes sont « considérées auteurs ou créateurs de l'oeuvre ou d'une partie de l'oeuvre scénique et à ce titre elles revendiquent toutes à divers degrés des droits de suite sur leurs oeuvres et non des droits voisins comme les artistes-interprètes ». De plus, l'APASQ soutient que tous les artistes visés sont des personnes qui participent à la création d'une oeuvre, à l'exclusion des artistes-interprètes. Ces personnes ont une communauté d'intérêts du fait de la disposition géographique des artistes en question.

[171] Les concepteurs de décors, de costumes, d'éclairage, de son, d'accessoires, de marionnettes et les peintres de décors constituent l'assise du groupe créatif hors scène qui participe à l'existence, à la production et à la réalisation de l'oeuvre scénique. Il est certes approprié de les inclure dans un même secteur de négociation.

[172] Les assistants concepteurs de décors et de costumes font aussi partie de ce groupe de professionnels hors scène. Toutefois les intervenantes, TAI et le CNA, ont exprimé des préoccupations quant à l'inclusion de ces professionnels dans la même unité de négociation que les personnes de qui ils relèvent, soit les concepteurs de décors et de costumes. À l'appui de cet argument, elles citent la décision du Tribunal dans le dossier impliquant les metteurs en scène [voir Union des Artistes, 1998 TCRPAP 024]. À l'encontre de cet argument, l'APASQ fait valoir que les assistants aux décors et aux costumes relèvent généralement du metteur en scène, de la même manière que tous les autres intervenants à la production.

[173] L'alinéa 18a) de la Loi prévoit que le Tribunal doit tenir compte des principes applicables en droit du travail. comme l'ont soulevé les intervenantes, un de ces principes veut que les personnes qui occupent des postes de direction ne soient pas dans la même unité de négociation que les personnes qu'ils supervisent. Dans l'affaire Union des Artistes, précitée, le Tribunal devait déterminer si les metteurs en scène partageaient une communauté d'intérêts avec les artistes interprètes ou avec les concepteurs. Dans cette affaire, le Tribunal a conclu que les metteurs en scène n'avaient pas de responsabilité de gérance telles qu'on le comprend normalement en relations industrielles. Néanmoins, le Tribunal a jugé que les metteurs en scène détiennent un pouvoir important à l'égard des concepteurs et des artistes-interprètes et qu'il était probable que les metteurs en scène ont des intérêts différents de chacun de ces deux groupes. Par conséquent, un secteur distinct a été créé pour eux.

[174] Le Tribunal a traité d'une question semblable lorsqu'il a étudié la demande d'accréditation de la Guilde des musiciens 1997 TCRPAP 020. Dans cette affaire, le Tribunal devait déterminer si les chefs d'orchestre pouvaient être inclus dans le même secteur de négociation que les musiciens interprètes. La preuve a démontré que le chef d'orchestre agit plutôt à titre de leader pour les musiciens et exerce peu ou pas de fonctions administratives. Le Tribunal a donc conclu qu'il était approprié d'inclure les chefs d'orchestre dans le même secteur de négociation que les musiciens.

[175] En l'espèce, la relation qui existe entre les concepteurs de décors et de costumes et leurs assistants respectifs ressemble davantage à la relation qui existe entre le chef d'orchestre et ses musiciens que celle qui existe entre le metteur en scène et les artistes interprètes ou les concepteurs. Le metteur en scène est le maître d'oeuvre alors que le concepteur ne l'est pas. Les fonctions administratives relèvent principalement du producteur et non du concepteur. Les concepteurs de décors et de costumes et leurs assistants collaborent à la conception d'une production et relèvent, dans la plupart des cas, de la même personne. Ainsi, le Tribunal conclut qu'ils ont une communauté d'intérêts et qu'il est approprié de les inclure dans le même secteur de négociation.

[176] L'APASQ soutient que les fonctions de régisseur et d'assistant metteur en scène font également partie de cette équipe hors scène qui participe au processus de création de l'oeuvre scénique. Par ailleurs, l'APASQ est la seule association qui revendique la représentation de ces deux fonctions au Québec.

[177] Il ressort de la preuve que le régisseur doit avoir une connaissance du travail de chacun des membres de l'équipe de production pouvant ainsi faire le lien entre le metteur en scène et cette équipe. L'assistant metteur en scène assiste le metteur en scène dès le début du projet jusqu'à la première et contribue à l'élaboration et à la mise au point de la mise en scène. En pratique, il arrive souvent que l'assistant metteur en scène devienne ensuite le régisseur de la production.

[178] Le Tribunal est satisfait que les individus qui exercent les fonctions de régisseur et d'assistant metteur en scène partagent une communauté d'intérêts suffisante avec les concepteurs pour être inclus dans un même secteur de négociation.

L'historique des relations professionnelles

[179] L'APASQ a été fondée dans le but de représenter et de défendre les droits des artistes qui n'étaient, et ne pouvaient pas être, membres de l'UDA. En 1993, l'APASQ a obtenu une accréditation provinciale pour un secteur composé de concepteurs de décors, de costumes, d'éclairage et de son. Ainsi au chapitre des relations professionnelles, l'activité de l'APASQ est relativement récente. Quatre ententes collectives visant le théâtre ont été versées en preuve. Des avis de négociation ont été signifiés à des producteurs indépendants tant au théâtre anglophone que francophone au début de l'an 2001. L'APASQ admet que c'est en raison d'un manque de ressources qu'aucune négociation n'a été entreprise avec les producteurs indépendants dans les domaines de la danse, des arts lyriques et des variétés. Le Tribunal note que le département de théâtre français du CNA est membre de l'association de producteurs TAI et qu'il respecte les dispositions prévues dans l'entente conclue entre l'APASQ et TAI.

[180] La preuve démontre que l'APASQ s'intéresse à la vie professionnelle et au développement socio-économique de ses membres. Par exemple, elle a été le maître d'oeuvre de la réalisation des études complétées par le CQRHC pour les professions d'assistant metteur en scène et de régisseur. Le Tribunal comprend que ces études visent à identifier les tâches exécutées par ces professionnels afin de pouvoir établir et améliorer leurs conditions de travail. De plus, l'APASQ participe à de nombreuses activités culturelles et artistiques afin de promouvoir et mettre en valeur les oeuvres artistiques de ses membres. Les membres disposent de plusieurs services offerts par l'association, notamment un « coffre d'outils », des services de consultation, des conseils pour la négociation de contrats et une caisse de sécurité des arts de la scène.

[181] Les intervenantes, TAI et le CNA, voudraient que le Tribunal ne tienne compte que de l'historique des relations professionnelles en rapport avec l'accréditation provinciale de l'APASQ. Le Tribunal ne peut retenir cet argument. Dans le passé, le Tribunal a accrédité des associations même lorsque celles-ci n'avaient conclu aucun accord-cadre au moment de la demande d'accréditation [voir Association québécoise des auteurs dramatiques, 1996 TCRPAP 011; Société professionnelle des auteurs et des compositeurs du Québec, 1996 TCRPAP 013].

[182] Lors de l'analyse de ce critère, le Tribunal regarde les activités des associations globalement pour déterminer l'ensemble de l'historique des relations professionnelles et ne se fie pas uniquement à l'existence d'accords-cadres. De plus, l'historique des relations professionnelles se situe non seulement au niveau de la relation entre les associations d'artistes et les producteurs, mais aussi entre les artistes et les associations, ainsi que les artistes eux-mêmes. La preuve démontre que les compétences artistiques requises à titre de concepteurs ou autres intervenants hors scène sont les mêmes et que ces artistes oeuvrent dans le domaine du théâtre, de l'opéra, de la danse ou des variétés.

[183] Le Tribunal est d'avis qu'il existe un historique de relations professionnelles entre l'APASQ, ses membres et les producteurs dans le domaine du théâtre au Québec. Puisque le département de théâtre français du CNA est membre de TAI, le Tribunal conclut qu'il existe un historique de relations professionnelles aussi avec ce département et l'inclut dans le secteur de négociation.

[184] En ce qui concerne les autres domaines de production visés par la demande de l'APASQ, le Tribunal note, et les parties l'admettent, que les productions qui tomberaient dans la sphère de compétence fédérale au Québec dans ces domaines sont peu nombreuses. Par conséquent, même si aucun accord-cadre n'a encore été négocié dans les domaines de la danse et des variétés, le Tribunal conclut qu'il est approprié de les inclure dans le secteur de négociation.

Les critères linguistiques et géographiques pertinents

[185] Le Tribunal a entendu considérablement de preuve et d'arguments à l'égard des différences qui existent d'une part, selon l'APASQ, entre le Québec et le reste du Canada et, d'autre part, selon l'ADC et les intervenantes, entre le fonctionnement du théâtre français et du théâtre anglais, et ce, sans distinction géographique. L'APASQ demande au Tribunal de « consacrer une réalité » en prenant acte des différences qui existent entre le milieu scénique du Québec et le reste du Canada. À l'appui de cet argument, l'APASQ souligne qu'elle représente presque tous les concepteurs au Québec et qu'elle est la seule association reconnue légalement au Québec pour négocier au nom des concepteurs, sans distinction linguistique.

[186] L'ADC et les intervenantes font valoir l'argument opposé. Selon elles, les distinctions qui existent se retrouvent non pas au niveau de la géographie, mais au niveau de la langue de fonctionnement de la production. Selon l'ADC, les divisions géographiques sont presque sans conséquence puisque c'est la communication qui est au coeur de la conception. Ainsi, toute division devrait se faire selon des critères linguistiques.

[187] Les intervenantes ont cité quelques décisions du Tribunal pour souligner l'approche qu'il a adoptée à l'égard des critères linguistiques et géographiques, notamment les décisions concernant les demandes d'accréditation de l'Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec et al. et la Guilde des Musiciens du Québec 1997 TCRPAP 024 et 1996 TCRPAP 020 respectivement].

[188] Compte tenu des arguments présentés par les parties et les intervenantes, un examen de la position du Tribunal à l'égard des critères linguistiques et géographiques peut s'avérer utile. Voici ce que le Tribunal a écrit dans l'affaire l'Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec et al., précitée :

[48] Dans la décision concernant La Guilde des musiciens du Québec (décision n° 020), le Tribunal a énoncé sa position touchant l'application des critères linguistiques et géographiques dans la définition d'un secteur. En résumé, le Tribunal croit qu'il est préférable de limiter le nombre de secteurs pour éviter les possibilités de chevauchements ou de conflits. Lorsque la langue n'est pas partie de l'expression artistique comme dans la musique, la danse et les arts visuels, le Tribunal croit qu'un secteur national est plus approprié pour les négociations avec les producteurs qui relèvent de la compétence fédérale, en autant qu'il existe une association nationale d'artistes capable de fournir les services à ses membres dans les deux langues officielles. D'autre part, lorsque la langue est partie de l'expression artistique tel que dans le cas des auteurs, le critère linguistique revêt une plus grande importance et le Tribunal en tient compte au moment de définir le secteur.

[189] Cependant, au paragraphe 53 de cette même décision, le Tribunal a tempéré ses conclusions en indiquant que les critères linguistiques et géographiques ne sont pas les seuls critères qui doivent être évalués au moment de l'examen d'une demande d'accréditation, les relations professionnelles existantes devant elles aussi être considérées. En l'espèce, le Tribunal reconnaît qu'une situation particulière existe.

[190] Il faut également se rappeler qu'en vertu de l'alinéa 18a) de la Loi, les principes applicables en relations de travail sont eux aussi pertinents. L'APASQ a porté à l'attention du Tribunal deux décisions du Conseil canadien des relations du travail ( le « Conseil »), à l'égard de certaines accréditations d'unités de négociation à Radio-Canada. L'APASQ prétend que ces décisions consacrent une réalité géographique plutôt que linguistique dans la reconnaissance de l'existence de deux réseaux séparés au Canada, un réseau français au Québec et à Moncton, Nouveau-Brunswick et un réseau anglais pour le reste du Canada [Société Radio Canada, [1991] 84 di 1 et [1994] 96 di 1].

[191] Il appert de ces deux décisions que la division juridictionnelle entre les réseaux français et anglais de Radio-Canada, telle qu'elle existe aujourd'hui, a été établie suite aux conclusions du Conseil dans sa Lettre Décision 849, en date du 7 juin 1990. À ce titre, le Conseil a dit :

Le Conseil constate qu'il existe dans la structure actuelle des unités de négociation à Radio-Canada certaines anomalies apparentes quant à la portée territoriale de certaines unités de négociation. Il appert en effet qu'en général les centres de production ont été inclus pour les fins de la négociation collective, soit dans l'un, soit dans l'autre des soi-disant réseaux. Il est toutefois des cas, à Moncton et à Montréal, où, suivant leur unité de négociation, des personnes travaillant côte à côte dans un même centre de production sont représentées pour les fins de négociations collectives, par des agents négociateurs rattachés à des réseaux différents. Cette situation paraît anormale vue la situation prévalant dans l'ensemble des centres de production.

Le Conseil juge qu'à moins de raisons convaincantes reliées aux relations de travail, toutes les personnes travaillant dans un même centre de production devront globalement pour les fins de leurs relations du travail appartenir à des unités de négociation elles-mêmes rattachées à un même réseau. Précisément, le Conseil entend que tous les agents négociateurs soient rattachés à l'un ou l'autre soi-disant réseau et que, sauf exception, la division entre les réseaux soit la même pour tous.

[192] Ainsi, tel que souligné par les intervenantes, ces passages démontrent, dans un premier temps, que la distinction initiale établie par le Conseil à l'égard des unités de négociation à Radio-Canada est fondée sur des critères linguistiques : le réseau français pour le Québec et Moncton, et le réseau anglais pour le reste du Canada. Cependant, dans sa Lettre décision, le Conseil précise que la situation qui prévalait avant le 7 juin 1990 créait « certaines anomalies apparentes quant à la portée territoriale de certaines unités de négociation » et a ainsi regroupé les productions qui se faisaient dans un même centre ensemble, peu importe la langue dans laquelle la production était diffusée. Ainsi, l'exemple donné par le Conseil dans sa décision à l'égard du réseau anglais de Radio Canada (précitée, [1991] 84 di 1) est expliqué à la p.9 :

Toronto, par exemple, au plan administratif est un centre du réseau anglais. Toutefois, la production faite à Toronto en français est identifiée pour les fins de son rattachement à un réseau non pas par sa langue de diffusion, mais par la langue dominante de l'endroit où elle est produite, en l'occurrence, l'anglais. Il en va de même pour les productions anglaises réalisées à Montréal qui sont donc identifiées à un centre de production français.

Ainsi, un deuxième regroupement a été établi, cette fois sur la base de critères géographiques et ce, de l'avis du Tribunal, pour faciliter la négociation de relations professionnelles au sein de ces centres de production à Radio-Canada.

[193] Selon la preuve entendue, le Tribunal doute qu'un producteur choisisse un concepteur en fonction de l'association à laquelle il s'identifie. Les parties reconnaissent que les services d'un artiste sont retenus en raison de ses compétences artistiques. La question devant le Tribunal est donc de déterminer quelle association pourra négocier au nom de ces artistes.

[194] Conformément à la position avancée par l'ADC ci-dessus, le Tribunal devrait définir les secteurs de négociation en fonction de critères linguistiques plutôt que géographiques. À l'appui de son argument, l'ADC note la pratique qui existe entre la CAEA et l'UDA en ce qui concerne les arts de la scène à travers le Canada, pratique essentiellement fondée sur la langue de la production. En l'espèce, le Tribunal ne peut retenir la position de l'ADC. Tout d'abord, cette pratique est le résultat d'une entente intervenue entre la CAEA et l'UDA. En deuxième lieu, la demande de l'APASQ ne vise que le Québec et le CNA, et non pas tout le Canada. En dernier lieu, une telle division, en l'espèce, serait difficilement applicable dans les cas où une production est bilingue ou qu'il s'agisse d'un opéra en l'absence d'une entente juridictionnelle entre les deux associations.

[195] Le Tribunal accepte que dans le cas de la conception, la langue est un élément important de l'expression artistique et qu'il aurait été préférable que le secteur proposé vise tous les concepteurs travaillant sur une production en langue française au Canada. Même si aux yeux du Tribunal un secteur regroupant tous les concepteurs qui oeuvrent sur des productions en langue française au Canada paraît plus « fonctionnel », le secteur proposé par l'APASQ n'est pas aussi large et cette dernière n'est pas disposée à rendre une telle proposition viable.

[196] Le Tribunal comprend que l'ADC a une présence dans le domaine du théâtre anglophone au Québec. Mais l'APASQ représente approximativement 110 concepteurs et autres artistes au Québec sur un nombre approximatif de 200 dans le secteur en total. La preuve démontre que seulement cinq contrats ADC ont été signés au cours de l'an 2000 avec des compagnies de théâtre anglophone dans cette province. Des quelque 50 compagnies de théâtre anglophones au Québec, six sont membres de PACT, avec qui ADC détient un historique considérable de relations professionnelles. ADC compte parmi ses membres 12 personnes au Québec dont trois sont également membres de l'APASQ. Bien que l'ADC revendique la représentation des concepteurs au niveau fédéral à travers le Canada, le Tribunal ne peut nier la présence de l'APASQ au Québec.

[197] Par conséquent, le Tribunal estime qu'un secteur établi sur une base géographique, en ce qui concerne la négociation collective avec les producteurs assujettis à la Loi pour des productions dans le domaine des arts de la scène, de la danse et des variétés est approprié. Cependant, le Tribunal est d'avis qu'en raison de l'historique de relations professionnelles existant entre l'APASQ et TAI, il est également approprié d'inclure le département de théâtre français dans le secteur de l'APASQ même si cette institution est située à l'extérieur du Québec.

Conclusion à l'égard du secteur de l'APASQ

[198] Après avoir pris en considération toutes les observations orales et écrites que l'APASQ et les intervenantes ont présentées, le Tribunal juge que le secteur approprié aux fins de la négociation collective est un secteur qui comprend tous les concepteurs de décors, de costumes, d'éclairage, de son, d'accessoires, de marionnettes, les régisseurs, les peintres de décors, les assistants concepteurs de costumes et de décors et les assistants metteurs en scène qui sont des entrepreneurs indépendants engagés par un producteur assujetti à la Loi sur le statut de l'artiste :

a) pour toute production dans le domaine des arts de la scène, la danse et les variétés présentée dans la province de Québec;
b) pour toute production au département de théâtre français du Centre national des Arts à Ottawa.

À l'exception des régisseurs et des assistants metteurs en scène visés par l'accréditation accordée par le Tribunal à la Canadian Actors' Equity Association le 25 avril 1996 et sous réserve de l'entente intervenue entre l'Association des professionnels des arts de la scène du Québec (APASQ-CSN) et la Canadian Actors' Equity Association le 28 juin 2001.

L'APASQ est-elle représentative des artistes du secteur?

[199] Lorsque deux associations revendiquent un même secteur artistique, soit en tout ou en partie, le Tribunal doit accorder une attention particulière aux facteurs dont il tiendra compte pour déterminer quelle association est la « plus représentative » des artistes du secteur défini.

[200] Dans sa demande d'accréditation, l'APASQ a indiqué qu'elle représente 120 professionnels dans le secteur proposé et qu'il pourrait y avoir approximativement 200 personnes travaillant dans ce secteur. À l'audience, elle a précisé qu'elle représente 110 membres actifs et quatre stagiaires, tous oeuvrant dans le domaine des arts de la scène, la danse et les variétés. Outre ses membres, l'APASQ compte approximativement 100 permissionnaires. L'APASQ affirme représenter la quasi-totalité, sinon la totalité des artistes du secteur au Québec.

[201] Le Tribunal note qu'aucune autre association n'a demandé à représenter les intérêts de tous les artistes inclus dans le secteur que le Tribunal a jugé approprié aux fins de la négociation collective. Par conséquent, le Tribunal accepte la prétention de l'APASQ qu'elle est la plus représentative des artistes dans le secteur.

Décision à l'égard de la demande d'accréditation de l'APASQ

[202] Par ces motifs et attendu que le règlement de l'APASQ répond aux exigences prévues au paragraphe 23(1) de la Loi sur le statut de l'artiste, le Tribunal :

       Déclare que le secteur approprié aux fins de la négociation est un secteur qui comprend tous les concepteurs de décors, de costumes, d'éclairage, de son, d'accessoires, de marionnettes, les régisseurs, les peintres de décors, les assistants concepteurs de costumes et de décors et les assistants metteurs en scène qui sont des entrepreneurs indépendants engagés par un producteur assujetti à la Loi sur le statut de l'artiste :

a) pour toute production dans le domaine des arts de la scène, la danse et les variétés présentée dans la province de Québec;
b) pour toute production au département de théâtre français du Centre national des Arts à Ottawa.

À l'exception des régisseurs et des assistants metteurs en scène visés par l'accréditation accordée par le Tribunal à la Canadian Actors' Equity Association le 25 avril 1996 et sous réserve de l'entente intervenue entre l'Association des professionnels des arts de la scène du Québec (APASQ-CSN) et la Canadian Actors' Equity Association le 28 juin 2001.

       Déclare que l'Association des professionnels des arts de la scène du Québec (APASQ-CSN) est l'association la plus représentative des artistes du secteur.

Une ordonnance sera émise pour confirmer l'accréditation de l'Association des professionnels des arts de la scène du Québec (APASQ-CSN) pour ce secteur.

Le secteur proposé par l'ADC est-il approprié aux fins de la négociation?

[203] Le secteur proposé par l'ADC est composé des concepteurs de décors, de costumes, d'éclairage et de son qui travaillent dans le domaine des arts de la scène. Plusieurs questions liées à la demande d'accréditation de l'ADC ont déjà été tranchées dans d'autres parties des présents motifs, notamment celles qui traitent de la définition du secteur approprié aux fins de la négociation figurant dans la demande d'accréditation de l'APASQ. Le Tribunal ne se penchera donc pas à nouveau sur ces questions.

La communauté d'intérêts et l'historique des relations professionnelles

[204] L'ADC a été créée pour défendre les droits et les intérêts des concepteurs de décors, de costumes, d'éclairage et, plus tard, des concepteurs de son. Selon le Tribunal, la preuve présentée par l'ADC montre que cette association est l'agent négociateur officiel reconnu par l'association des théâtres anglophones du Canada, la PACT, et que l'ADC négocie donc au nom des concepteurs de partout au Canada. En outre, l'ADC négocie des contrats avec des théâtres indépendants et des producteurs de productions industrielles et de spectacles de danse. L'ADC a démontré à la satisfaction du Tribunal que l'historique de ses relations professionnelles, notamment avec la PACT, au nom des concepteurs de décors, de costumes, d'éclairage et de son, prouve l'existence d'une communauté d'intérêts parmi les concepteurs.

[205] Lorsqu'il examine l'historique des relations professionnelles d'une association, le Tribunal doit non seulement déterminer s'il existe des accords-cadres, mais aussi se pencher sur toutes les ententes que l'association a conclues au nom des artistes qu'elle désire représenter. L'ADC reconnaît que son entente avec la PACT, ainsi que tous les autres contrats qu'elle a conclus au nom des concepteurs, ne sont pas de véritables accords-cadres, car ils ne proposent pas de tarifs minimaux. Toutefois, ces ententes prouvent de manière irréfutable que l'ADC est la seule association dont le mandat est de représenter les concepteurs travaillant au Canada.

[206] L'ADC admet qu'elle négocie surtout au nom des concepteurs travaillant pour des compagnies de théâtre anglophones. On a signalé qu'il existe moins de débouchés pour les concepteurs indépendants qui travaillent dans d'autres domaines. Par exemple, dans le cas des concerts présentés en direct, un grand nombre d'artistes voyagent avec tout leur entourage et le montage de la scène où se déroule leur spectacle est habituellement terminé avant l'arrivée des artistes dans une ville canadienne. En ce qui concerne les opéras, la preuve présentée devant le Tribunal indique que de nombreux concepteurs sont engagés comme employés d'une compagnie d'opéra.

[207] La demande d'accréditation déposée par l'ADC pour représenter les concepteurs travaillant dans le domaine des « arts de la scène » est plus convaincante dans le cas du théâtre anglophone qu'elle l'est dans le cas d'autres types de production. Toutefois, le Tribunal accepte la preuve selon laquelle les mêmes compétences artistiques sont requises dans tous les secteurs des arts de la scène. Par conséquent, le Tribunal conclut qu'il est approprié de définir un secteur composé de concepteurs qui englobe tous les secteurs des arts de la scène au Canada, à l'exception du Québec et du département de théâtre français du CNA, pour les motifs susmentionnés dans l'analyse portant sur la demande d'accréditation de l'APASQ.

[208] Cette conclusion est aussi valable à l'égard des autres départements du CNA. Cependant, il importe d'apporter des précisions supplémentaires au sujet du CNA puisque le Tribunal a entendu de nombreux arguments à l'égard de ce producteur en particulier.

[209] Le département de théâtre anglais du CNA est membre de la PACT. L'ADC a donc un historique de relations professionnelles avec ce département. L'ADC a présenté des preuves indiquant que le quart de son effectif a travaillé au CNA à au moins une occasion. En outre, elle a mentionné que ses membres ont conclu environ 100 contrats avec cet établissement depuis le début des années 1990. La preuve qu'elle a déposée relativement aux autres départements du CNA, notamment ceux de la danse, de la musique et des activités communautaires, n'est pas aussi abondante que la preuve à l'égard du département de théâtre anglais. Toutefois, Alexandre Gazalé, témoin du CNA, a dit savoir que des membres de l'ADC ont travaillé au CNA dans des départements autres que celui du théâtre anglais. Le Tribunal accepte cette preuve.

[210] Par conséquent, le Tribunal juge que l'ADC a montré qu'en fonction de l'historique de ses relations professionnelles avec le CNA, elle est habilitée à représenter tous les départements à l'exception du département de théâtre français, dans tout secteur pour lequel l'ADC sera accréditée.

Les critères géographiques et linguistiques pertinents

[211] L'ADC désire représenter un secteur national composé de concepteurs. La demande d'accréditation de cette association ne fait pas de distinction fondée sur la langue. Cependant, étant donné la position de l'APASQ, l'ADC a prétendu à l'audience que la langue, et non la géographie, était le critère le plus important. comme l'ADC a dit : « la communication est au coeur de la conception ». Cependant, en raison de l'analyse faite sous cette rubrique aux paragraphes précédents des présents motifs, le Tribunal juge que cette question a déjà été tranchée. Nonobstant la préférence du Tribunal envers les secteurs d'envergure nationale, celui-ci conclut, dans la présente affaire, que le secteur approprié est composé de concepteurs qui travaillent partout au Canada dans le cadre de productions dans les arts de la scène, sauf ceux qui sont engagés pour des productions présentées au Québec ou par le département de théâtre français du CNA.

Conclusion à l'égard du secteur de l'ADC

[212] Après avoir pris en considération toutes les observations orales et écrites que l'ADC et les intervenantes ont présentées, le Tribunal juge que le secteur approprié aux fins de la négociation collective est un secteur qui comprend tous les concepteurs de décors, de costumes, d'éclairage et de son au Canada, qui sont des entrepreneurs indépendants engagés par un producteur assujetti à la Loi sur le statut de l'artiste, dans le domaine des arts de la scène lorsque la production est présentée en direct, à l'exception :

a) des concepteurs de décors, de costumes, d'éclairage et de son engagés par un producteur assujetti à la Loi sur le statut de l'artiste dans le cadre d'une production présentée dans la province du Québec;
b) des concepteurs de décors, de costumes, d'éclairage et de son engagés par le département de théâtre français du Centre national des Arts.

L'ADC est-elle représentative des artistes du secteur?

[213] L'ADC a signalé au Tribunal qu'elle est une association dont le mandat est de représenter des artistes à l'échelle nationale. Cet objectif est clairement énoncé dans le règlement de l'association. Elle a récemment accru sa capacité d'exercer ce mandat national, en partie, en raison de la présente instance.

[214] En plus de négocier des contrats, l'ADC offre de nombreux services à ses membres dont la médiation, des services juridiques, la gestion de REER, une police d'assurance contre les accidents ainsi qu'un service de cautionnement pour certains d'entre eux. Elle déploie aussi beaucoup d'efforts pour promouvoir son effectif et la conception en tant que moyen d'expression artistique, tant au Canada qu'à l'étranger. Par exemple, le Tribunal signale le projet que l'ADC a entrepris en collaboration avec la Toronto Public Library.

[215] La demande d'accréditation de l'ADC indique qu'elle représente environ 155 concepteurs sur près de 200 entrepreneurs indépendants dans le secteur. À l'audience, l'ADC a mentionné que son effectif se compose de 155 membres professionnels, de 13 membres apprentis et de 11 membres honoraires. Ses membres travaillent dans tous les aspects des arts de la scène même si la majorité d'entre eux travaillent dans le domaine du théâtre. Les concepteurs étrangers se joignent souvent à l'ADC lorsqu'ils sont engagés dans le cadre d'une production canadienne.

[216] Lors de ses conclusions finales, l'ADC a mentionné qu'elle a l'intention et le mandat de promouvoir les intérêts économiques des concepteurs partout au Canada. Aucune autre association d'artistes n'a fait part de sa volonté de représenter les intérêts des concepteurs travaillant dans le secteur que le Tribunal a jugé approprié aux fins de la négociation. Le Tribunal conclut donc que l'Associated Designers of Canada est l'association d'artistes la plus représentative des artistes qui travaillent dans le secteur..

Décision à l'égard de la demande d'accréditation de l'ADC

[217] Par ces motifs, et attendu que le règlement de l'ADC répond aux exigences prévues au paragraphe 23(1) de la Loi sur le statut de l'artiste, le Tribunal

       Déclare que le secteur approprié aux fins de la négociation collective est un secteur qui comprend tous les concepteurs de décors, de costumes, d'éclairage et de son au Canada, qui sont des entrepreneurs indépendants engagés par un producteur assujetti à la Loi sur le statut de l'artiste, dans le domaine des arts de la scène lorsque la production est présentée en direct, à l'exception :

a) des concepteurs de décors, de costumes, d'éclairage et de son engagés par un producteur assujetti à la Loi sur le statut de l'artiste dans le cadre d'une production présentée dans la province du Québec;
b) des concepteurs de décors, de costumes, d'éclairage et de son engagés par le département de théâtre français du Centre national des Arts.

       Déclare que l'Associated Designers of Canada est l'association la plus représentative des artistes du secteur.

Une ordonnance sera émise pour confirmer l'accréditation de l'Associated Designers of Canada pour ce secteur.

Ottawa, le 4 janvier 2002

Robert Bouchard David P. Silcox


 
Moka Case  


ANNEXE 1

Ce qui suit est une version non-officielle de l'entente conclue entre les parties.

ENTENTE


Création : 2005-07-27
Révision : 2005-12-01
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