Tribunal canadien des 
relations professionnelles artistes-producteurs / Canadian Artists and Producers Professional Relations Tribunal
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Décision no 035

Décisions du Tribunal

Ottawa, le 15 août 2001 Dossier : 1310-96-0026A

Dans l'affaire de la demande d'accréditation présentée par le regroupement de l'Association des professionnelles et des professionnels de la vidéo du Québec (APVQ) et le Syndicat des techniciens du cinéma et de la vidéo du Québec (STCVQ)

Décision partielle du Tribunal :

L'objection préliminaire des producteurs fédéraux est rejetée.
La demande du regroupement d'obtenir le paiement de leurs dépens est rejetée.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario)

Date : Le 8 juin 2001

Quorum : Me Robert Bouchard, président de séance
  M. David P. Silcox, membre
  Mme Moka Case, membre


MOTIFS DE DÉCISION

1310-96-0026A : Dans l'affaire de la demande d'accréditation présentée par le regroupement de l'Association des professionnelles et des professionnels de la vidéo du Québec (APVQ) et le Syndicat des techniciens du cinéma et de la vidéo du Québec (STCVQ)


Contexte

[1] La présente décision porte sur une objection préliminaire soulevée dans le cadre de la demande d'accréditation déposée par le regroupement de l'Association des professionnelles et des professionnels de la vidéo du Québec et du Syndicat des techniciens du cinéma et de la vidéo du Québec (ci-après « le regroupement ») par l'Office National du Film (« ONF »), la Société Radio-Canada (« SRC »), Cogeco Radio-Télévison Inc. (« CRTI ») (ci après les « producteurs fédéraux ») et le Syndicat général du cinéma et de la télévision (« SGCT »).

[2] Le regroupement a demandé à être accrédité pour représenter au Québec un secteur qui comprend :

tous les entrepreneurs indépendants professionnels engagés par un producteur assujetti à la Loi sur le statut de l'artiste, qui exercent des professions contribuant directement à la conception de la production, en toutes langues, dans toutes les productions audiovisuelles, par tout moyen et sur tout support, incluant le film, la télévision, l'enregistrement vidéo, le multimédia et les réclames publicitaires. Les activités visées incluent :

(1) conception de l'image, de l'éclairage et du son, notamment dans les fonctions suivantes : assistant-réalisateur, premier assistant à la réalisation, second assistant à la réalisation, troisième assistant à la réalisation, directeur de la photographie, cadreur, caméraman (incluant steady-cam, baby-boom et caméra opérée via un système spécialisé [C.O.S.S.]), assistant-caméraman, premier assistant à la caméra, deuxième assistant à la caméra, opérateur de vidéo assist, photographe de plateau, directeur d'éclairage, chef éclairagiste, chef électricien, électricien, opérateur de console d'éclairage, opérateur de projecteurs motorisés, preneur de son, perchiste, assistant au son, sonorisateur, bruiteur, chef machiniste, machiniste, gréeur, infographiste, technicien aux effets spéciaux en infographie;

(2) conception de costumes, coiffures et maquillages, notamment dans les fonctions suivantes : concepteur de maquillages, chef maquilleur, maquilleur, assistant-maquilleur, maquilleur d'effets spéciaux, prothésiste, assistant-prothésiste, concepteur de coiffures, chef coiffeur, coiffeur, assistant-coiffeur, perruquier, assistant-perruquier, préposé aux rallonges capillaires, créateur de costume, costumier, assistant costumier, technicien spécialisé aux costumes, technicien aux costumes, chef habilleur, habilleur, assistant habilleur, styliste, ensemblier, coupeur, couturier, concepteur de marionnettes, préposé aux marionnettes, coordonnateur de véhicules; mais à l'exclusion des directeurs artistiques et concepteurs artistiques;

(3) scénographie, notamment dans les fonctions suivantes : coordonnateur artistique, assistant directeur artistique, chef décorateur, assistant-décorateur, coordonnateur aux décors, technicien aux décors, préposé aux décors, ensemblier, concepteur d'accessoires, chef accessoiriste, accessoiriste de plateau, accessoiriste d'extérieurs, assistant accessoiriste, chef machiniste aux décors, machiniste aux décors, chef peintre, peintre, peintre scénique, assistant peintre, sculpteur-mouleur, dessinateur, chef menuisier, menuisier, assistant-menuisier, technicien d'effets spéciaux de plateau, assistant technicien d'effets spéciaux de plateau, armurier, coordonnateur de véhicules;

(4) montage et enchaînement, notamment dans les fonctions suivantes : coordonnateur de production, directeur de plateau -- à l'exclusion des directeurs de plateau dans le doublage -, régisseur, régisseur de plateau, régisseur d'extérieurs, régisseur logistique, assistant-régisseur logistique, scripte, assistant-scripte, secrétaire de production, assistant de production, assistante coordonnatrice, coordonnateur de sécurité, coordonnateur de transport, chauffeur, cantinier, directeur technique, assistant directeur technique, aiguilleur, aiguilleur ISO, contrôleur d'images (CCU), opérateur de magnétoscopie, opérateur de ralenti, opérateur de télésouffleur, vidéographe en régie, projectionniste vidéo (y compris écran géant, vidéowall), chef machiniste vidéo, machiniste vidéo, monteur, monteur d'images hors-ligne, monteur d'images en ligne, monteur sonore, mixeur de son, assistant monteur, vidéographiste, opérateur de mise en ondes, opérateur de transmission satellites, opérateur de transmission micro-ondes.

[3] À la demande du regroupement, une conférence préparatoire a été tenue à Montréal le 2 avril 2001. Les producteurs fédéraux ont alors formulé certaines objections préliminaires concernant la demande d'accréditation. L'objection principale, qui est appuyée par le SGCT, est à l'effet qu'aucune des 123 professions énumérées dans le secteur proposé par le regroupement n'est pratiquée par des entrepreneurs indépendants, mais que celles-ci sont pratiquées uniquement par des personnes oeuvrant dans une relation employeur-employé.

[4] Il a été convenu que les producteurs fédéraux et le SGCT présenteraient leurs objections préliminaires par écrit, que le regroupement présenterait ses arguments sur l'objection, que les producteurs pourraient y répondre et que la fédération aurait un droit de réplique. En se fondant sur ces représentations écrites, le Tribunal rendrait une décision sur la recevabilité de l'objection.

[5] Dans leurs représentations écrites, les producteurs fédéraux ont soulevé des objections subsidiaires qui, selon le Tribunal, devraient être débattues au moment de l'étude du fond de la demande d'accréditation du regroupement. Ainsi la présente décision ne traitera que de l'objection principale.

Prétentions des parties

Les producteurs fédéraux

[6] Les producteurs fédéraux allèguent que les membres du regroupement ne sont pas des artistes au sens de la Loi sur le statut de l'artiste (la « Loi ») parce qu'ils n'exercent pas leur profession à titre d'entrepreneurs indépendants. Selon eux, toutes les professions énumérées dans la demande d'accréditation sont exercées dans le cadre d'une relation de subordination juridique employeur-employé et non pas dans le cadre d'une relation d'entreprise. La Loi ne visant que l'accréditation d'entrepreneurs indépendants, ils soutiennent que le Tribunal n'est pas en mesure d'accréditer le regroupement. Par conséquent, les producteurs fédéraux sont d'avis que le Tribunal doit déterminer la nature de la relation habituelle existant entre le producteur et le membre du regroupement lorsqu'il exerce sa profession et ce, pour chaque profession énumérée dans le secteur recherché par le regroupement.

Le SGCT

[7] Le SGCT soutient que toutes les fonctions décrites dans la demande d'accréditation du regroupement sont exercées à l'ONF par des personnes ayant le statut d'employé et non d'entrepreneur indépendant, nonobstant la forme du contrat qui les lie à l'ONF. Selon le SGCT, cette question a déjà été décidée par la Cour fédérale d'appel dans l'affaire SGCT c. La Reine, [1978] 1 C.F. 346 (C.A.). Puisque rien à l'ONF n'a changé depuis cette décision, le SGCT allègue qu'il y a chose jugée sur la matière et la demande d'accréditation est irrecevable en droit.

Arguments du regroupement

[8] Le regroupement soutient que l'objection préliminaire soulève une question prématurée à l'étape de l'étude de la demande d'accréditation. À ce stade, la compétence du Tribunal est limitée aux deux questions suivantes : la définition du secteur de négociation et la représentativité de l'association d'artistes.

[9] Selon le regroupement, leur demande d'accréditation n'intéresserait les producteurs fédéraux que dans la mesure où ils retiennent les services d'entrepreneurs indépendants pour exécuter les fonctions énumérées dans le secteur proposé. Si les producteurs fédéraux n'utilisent que les services d'employés pour remplir ces fonctions, cette demande d'accréditation ne les affecterait aucunement.

Réponse des producteurs fédéraux

[10] Dans leur réponse, les producteurs soutiennent que le Tribunal a le pouvoir et le devoir de s'assurer que le secteur recherché compte des « artistes » entrepreneurs indépendants, au sens de la Loi, avant d'accréditer une association requérante. Selon eux, cette question relève de la compétence même du Tribunal.

Réplique du regroupement

[11] Dans sa réplique, le regroupement affirme de nouveau sa position selon laquelle l'objection des producteurs fédéraux est prématurée. Il soutient, entre autres, que le moment approprié dans le processus d'accréditation pour trancher la question du statut de chaque membre de l'association d'artistes afin de déterminer s'il est inclus dans le secteur de négociation est celui de la détermination de la représentativité de l'association d'artistes, lorsque cette représentativité est contestée. Puisque les producteurs fédéraux sont exclus de ce débat en vertu du paragraphe 27(2) de la Loi, le regroupement demande au Tribunal de rejeter l'objection.

[12] En plus d'affirmer que l'objection en question est prématurée, le regroupement allègue que la question soulevée par les producteurs fédéraux est dilatoire. Selon eux, le but de l'objection est de retarder le processus d'accréditation. Par conséquent, il demande au Tribunal de se prévaloir de son pouvoir en vertu de l'alinéa 17o) de la Loi et rendre une ordonnance accordant des dépens en faveur du regroupement.

Questions soulevées

[13] La présente affaire soulève les questions suivantes :

a) Avant d'accréditer une association d'artistes pour un secteur donné, le Tribunal doit-il étudier la relation habituelle existante entre chaque membre de l'association et le producteur et ce, pour chaque profession énumérée, afin de s'assurer qu'il y a des « artistes » dans le secteur recherché?

b) Le Tribunal devrait-il accorder des dépens au regroupement?

La Loi sur le statut de l'artiste

[14] La réponse à la première question mentionnée au paragraphe précédent ressort du régime législatif créé par la Loi. Les dispositions pertinentes sont les suivantes :

5. Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente partie.
[...]

« artiste » Entrepreneur indépendant visé à l'alinéa 6(2)b).

« association d'artistes » Groupement - y compris toute division ou section locale de celui-ci - ayant parmi ses objets la promotion ou la gestion des intérêts professionnels et socio-économiques des artistes qui en sont membres; la présente définition vise également les regroupements d'associations.

[...]

25. (1) Toute association d'artistes dûment autorisée par ses membres peut demander au Tribunal de l'accréditer pour un ou plusieurs secteurs [...]

(2) Les artistes visés par une demande, les associations d'artistes et les producteurs peuvent intervenir devant le Tribunal, sans l'autorisation visée au paragraphe 19(3), sur toute question liée à la définition du secteur de négociation.

(3) Le Tribunal communique sans délai sa décision à l'association intéressée et aux intervenants; cette décision est réputée, par dérogation à l'article 21, interlocutoire.

(4) La demande d'accréditation est toutefois, sauf autorisation du Tribunal, irrecevable une fois expiré le délai mentionné au paragraphe (3).

26. (1) Une fois expiré le délai mentionné au paragraphe 25(3), le Tribunal définit le ou les secteurs de négociation visés et tient compte notamment de la communauté d'intérêts des artistes en cause et de l'historique des relations professionnelles entre les artistes, leurs associations et les producteurs concernés en matière de négociations, d'accords-cadres et de toutes autres ententes portant sur des conditions d'engagement d'artistes, ainsi que des critères linguistiques et géographiques qu'il estime pertinents.

(2) Les artistes visés par une demande, les associations d'artistes et les producteurs peuvent intervenir devant le Tribunal, sans l'autorisation visée au paragraphe 19(3), sur toute question liée à la définition du secteur de négociation.

(3) Le Tribunal communique sans délai sa décision à l'association intéressée et aux intervenants; cette décision est réputée, par dérogation à l'article 21, interlocutoire.

27. (1) Une fois le secteur défini, le Tribunal détermine, à la date du dépôt de la demande ou à toute autre date qu'il estime indiquée, la représentativité de l'association d'artistes.

(2) Les artistes visés par la demande et les associations d'artistes peuvent intervenir devant le Tribunal, sans l'autorisation visée au paragraphe 19(3), sur toute question liée à la détermination de la représentativité.

Analyse et conclusions

L'objection principale

[15] Aux termes de la Loi, seules les associations d'artistes peuvent être accréditées. L'article 5 de la Loi prévoit qu'une entité est considérée une « association d'artistes » si elle est constituée d'un « groupement [...] ayant parmi ses objets la promotion ou la gestion des intérêts professionnels et socio-économiques des artistes qui en sont membres ». La définition d'« artiste » est limitée aux entrepreneurs indépendants professionnels oeuvrant dans les milieux artistiques identifiés à l'alinéa 6(2)b) de la Loi.

[16] La Loi prévoit un mécanisme permettant au Tribunal de s'assurer que la requérante, c'est-à-dire l'entité qui demande à être accréditée, constitue une « association d'artistes » pouvant faire une demande d'accréditation : selon le paragraphe 25(2) de la Loi, toute demande d'accréditation doit être accompagnée d'une copie certifiée conforme des règlements de l'association, la liste de ses membres et tout autre renseignement requis par le Tribunal. La pratique du Tribunal est d'exiger le dépôt des règlements de la requérante. De plus, selon le paragraphe 25(1) de la Loi, la requérante doit avoir été autorisée par ses membres à demander au Tribunal de l'accréditer pour le (ou les) secteur(s) recherché(s). Le Tribunal examine ces documents pour déterminer si la requérante constitue une association d'artistes; si elle a parmi ses objets la promotion ou la gestion des intérêts professionnels et socio-économiques des artistes qui en sont membres; si ses statuts et règlements rencontrent les exigences de l'article 23, entre autres, en établissant des conditions d'adhésion pour les artistes les intérêts desquels elle promut; le nombre de membres qu'elle compte; et si ses membres l'ont autorisée à faire une demande d'accréditation.

[17] Ce régime n'exige pas qu'au stade d'une demande d'accréditation, le Tribunal détermine la relation habituelle existante entre le(s) producteur(s) et chaque membre de la requérante lorsqu'il ou elle exerce sa profession. Si l'objection avait été que la requérante n'avait pas rencontré une ou plusieurs des exigences décrites ci-haut, ou que ses documents étaient faux ou frauduleux, l'objection aurait été pertinente. Cependant, une objection selon laquelle le Tribunal a l'obligation de déterminer la relation habituelle existante entre le(s) producteur(s) et chaque membre de la requérante lorsqu'il exerce sa profession ne l'est pas, compte tenu du régime créé par la Loi.

[18] En fait, une telle exigence semble aller complètement à l'encontre des principes fondamentaux qui sous-tendent la Loi. Lorsque le Tribunal accrédite une association d'artistes, cela ne signifie pas que toutes les personnes oeuvrant dans un domaine artistique donné seront visées par l'accréditation. Il va de soi que les artistes engagés dans une relation employeur-employé sont exclus. D'autre part, il est important de retenir que rien n'empêche qu'une même personne puisse à la fois être une employée et oeuvrer dans le monde artistique comme entrepreneur indépendant : Union des artistes, 1996 TCRPAP 017, au para. 24. Il faut reconnaître que le statut d'une personne - soit employée ou entrepreneur indépendant - peut changer. Il semble ressortir de la jurisprudence que le Tribunal reconnaît ce fait et que c'est pour cette raison qu'il a développé une pratique de définir les secteurs comme étant composés d'« entrepreneurs indépendants » exerçant une (ou plusieurs) profession(s) artistiques donnée(s). De cette façon, le secteur est limité aux « artistes » au sens de la Loi, tout en étant assez souple pour reconnaître qu'une personne peut exercer son métier de différentes manières.

[19] Cependant, si une question était soulevée à savoir si un accord-cadre éventuel entre le regroupement et un producteur s'appliquait à un individu en particulier, la question pourrait être réglée conformément à l'article 41 de la Loi. Voir Union des Artistes et Télé-Métropole Inc., 1997 TCRPAP 022.

[20] De plus, en procédant de la façon demandée par les producteurs fédéraux, le Tribunal risque de miner les objectifs de la Loi étant donné que leur objection vise uniquement les membres du regroupement. Cependant, le regroupement n'a pas demandé à être accrédité seulement pour les artistes inclus dans le secteur proposé, qui en sont membres; il demande l'accréditation pour tous les artistes oeuvrant dans le secteur recherché, qu'ils soient membres ou pas. La pratique du Tribunal demeure « d'accréditer les associations d'artistes qu'il juge les plus représentatives pour chaque secteur disciplinaire, en accordant à cette association le droit exclusif de négocier au nom de tous les artistes du secteur, qu'ils soient membres ou non de l'association » : Conseil des métiers d'art du Québec, 1998 TCRPAP 026, au para. 23.

[21] En traitant d'une objection limitée aux membres du regroupement et dans l'hypothèse où il déterminerait que certains membres sont des « artistes » au sens de la Loi, le Tribunal permettrait aux producteurs de connaître la volonté d'artistes d'être représentés par une association d'artistes. Cela irait à l'encontre du principe fondamental applicable en droit du travail qu'il est primordiale de garder confidentielle la volonté des employés (ou artistes) d'être ou de ne pas être représentés par un syndicat (ou association d'artistes). En l'espèce, les producteurs ont le droit d'intervenir sur la question de la définition du secteur mais ils ne peuvent intervenir sur la question de la représentativité, en l'absence de la permission du Tribunal. Le Tribunal est d'avis qu'il ne devrait pas permettre aux producteurs de faire indirectement ce qu'ils ne peuvent pas faire directement.

[22] Quant à l'objection du SGCT qu'il y a chose jugée, il faut noter, premièrement, que la décision de la Cour fédérale d'appel, sur laquelle le SGCT s'appuie, date de 1978; deuxièmement, que la décision ne visait pas le Tribunal; et finalement, que lorsque la décision a été rendue, il n'y avait aucune loi au Canada permettant aux artistes d'accéder à la négociation collective (ni au fédérale, ni au Québec). De plus, le juge Le Dain a écrit au paragraphe 14 de cette décision :

(...) Il ne fait aucun doute que l'Office a le pouvoir, aux termes de l'alinéa 10(1)d) de la Loi nationale sur le film, de conclure des contrats de services personnels avec des entrepreneurs indépendants, ou "pigistes" (...) comme ils semblent être désignés; mais, nonobstant la forme que revêt un tel contrat, il peut être établi, dans un cas particulier et à la lumière de toutes les circonstances, qu'il s'agit effectivement d'un emploi. (...)

Les dépens

[23] Il ne fait aucun doute que l'alinéa 17o) de la Loi donne le pouvoir exprès au Tribunal d'accorder des dépens. Cependant, la Loi prévoit aussi, à l'alinéa 18a), que le Tribunal doit s'inspirer de l'approche qui s'applique en matière de relations de travail.

[24] Historiquement, les conseils de relations de travail se sont montrés réticents à accorder des dépens. Cette pratique constitue normalement une mesure de punition qui de plus, crée souvent l'impression que certaines parties sont gagnantes et d'autres perdantes. Ainsi, une telle approche pourrait s'avérer nuisible aux bonnes relations de travail et endommager les relations futures des parties.

[25] Ainsi, le Tribunal préfère adopter la pratique en relations de travail voulant que l'attribution de dépens est une mesure exceptionnelle. De telles circonstances se présenteraient par exemple lorsqu'il y a violation à une ou à plusieurs dispositions de la Loi, lorsque des dommages irréparables sont causés à l'une des parties ou encore lorsque la conduite d'une ou plusieurs parties à une audience est déraisonnable, frivole ou vexatoire compte tenu de l'ensemble des circonstances.

[26] En l'espèce, le Tribunal conclut que de telles circonstances ne sont pas présentes.

Décision

Pour ces motifs, l'objection préliminaire des producteurs fédéraux est rejetée. La demande du regroupement d'obtenir le paiement de leurs dépens est également rejetée.

Ottawa, le 15 août 2001

Robert Bouchard David P. Silcox
Moka Case  


Création : 2005-07-27
Révision : 2005-12-01
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