Examen sommaire du secteur de l'investissement
communautaire au Canada
Coro Strandberg
Strandberg Consulting
Brenda Plant
Brenda Plant Consulting
Septembre 2004
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3. Description et analyse
du secteur de l’IC au Canada
3.1 Le secteur de l’IC
au Canada
Selon la définition qu’en donne la Social
Investment Organization (SIO), l’investissement communautaire
est un investissement visant à financer les besoins bien
ancrés des collectivités locales auxquels ne répondent
pas les instruments financiers traditionnels : la lutte contre la
pauvreté, le développement communautaire et coopératif
et la régénération de l’environnement.
La SIO ne présente pas de statistiques précises sur
les placements dans le capital de risque durable ou sur les investissements
ciblés économiquement en raison de la difficulté
inhérente à l’évaluation de l’actif
dans ces catégories d’investissement. L’édition
2004 de la Canadian Social Investment Review, qui sera publiée
en novembre 2004, dévoilera des chiffres sur les catégories
d’IC suivantes : 1) le microfinancement; 2) le financement
par actions et par emprunt des coopératives et des organismes
sans but lucratif; 3) le capital de risque communautaire et 4) les
investissements dans des entreprises durables actives sur les marchés
locaux et régionaux.
La SIO exclut de sa définition de l’IC
l’actif provenant de dons d’administrations publiques
et de dons de charité comme ceux qui sont offerts par les
programmes fédéraux des sociétés d’aide
au développement des collectivités et des institutions
financières autochtones, car ces programmes ne visent pas
à produire un rendement sur le capital investi 3.
Au Canada, le secteur de l’IC est modeste à
tous points de vue. Il se limite à une poignée de
perspectives d’investissement de bonne qualité pour
l’épargnant et les sociétés de placement.
Il faudrait que les investisseurs sociaux à haut niveau d’impact
soient très motivés pour trouver acceptables les perspectives
d’IC offrant un rendement comparable à celui du marché
ou proche de celui du marché, vu la précarité
du secteur de l’IC au Canada. Ce secteur est marqué
par l’entrée de deux fonds communs de placement –
le Social Values Global Equity Fund d’Acuity, et les Fonds
communs de placement Meritas inc. – qui consacrent respectivement
3 % et 2 % de l’actif de leurs fonds à l’investissement
communautaire 4.
Ces deux maisons précisent dans leur prospectus que, si le
rendement financier entre en ligne de compte dans le processus de
sélection, il constitue un facteur secondaire comparativement
aux critères sociaux. D’après leur expérience
au Canada, les véhicules d’investissement communautaire
admissibles et susceptibles de satisfaire leurs responsabilités
fiduciaires sont rares. Certaines coopératives de crédit,
notamment la VanCity Savings Credit Union, offrent des dépôts
à terme avec rendement modeste qui canalisent les investissements
communautaires dans des entreprises environnementales et sociales.
Un investisseur institutionnel a placé 1 M$ dans l’International
Community Investment Deposit de VanCity, qui offre un rendement
pouvant atteindre 2 % (le rendement est choisi par l’investisseur)
sur des investissements qui soutiennent les programmes de microcrédit
dans des collectivités du Tiers-Monde. Cependant, comme l’illustrent
quelques-uns des exemples qui suivent, il s’établit
une feuille de route d’IC à rendement modeste de qualité
comparable à celle du marché au Canada. Il n’existe
cependant pas de données cumulatives sur le rendement financier
de l’IC au Canada.
3.2 Exemples d’IC
au Canada
3.2.1 Ecotrust Canada
Ecotrust Canada s’est donné pour mission
de soutenir l’émergence d’une économie
de la conservation dans la région des forêts pluviales
côtières à climat tempéré de la
Colombie-Britannique. En 1999, elle a mis sur pied le Natural Capital
Fund afin d’offrir des prêts non bancaires à
haut niveau de risque; ce fonds réunit aujourd’hui
un actif de 3,8 M$. Jusqu’ici, elle a consenti plus de 40
prêts à des entrepreneurs qui intègrent des
pratiques sociales et environnementales responsables à leurs
activités : une entreprise d’aliments biologiques,
une scierie appartenant à des membres d’une Première
Nation, une usine de transformation de poisson appartenant aux employés,
une entreprise de fournitures de bureau écologiques et un
jardin botanique comptent parmi les bénéficiaires
de ces prêts. Plus des trois quarts des prêts ont été
consentis à des entreprises de l’île de Vancouver.
Au total, ces investissements soutiennent environ 500 emplois saisonniers,
à temps partiel ou à plein temps. Le Natural Capital
Fund a reçu plus de 520 000 $ en investissements communautaires
qui procurent actuellement aux investisseurs un rendement de 2 à
3 %.
3.2.2 La Community Futures
Development Association of B.C. (CFDABC)
Fondée en 1992, la CFDABC représente
33 sociétés d’aide au développement des
collectivités (SADC) réparties dans toutes les régions
rurales de la Colombie-Britannique. Les SADC offrent un éventail
de programmes d’entrepreneuriat, de services de planification
d’entreprise, de programmes de prêts et de renseignements
commerciaux aux membres des collectivités intéressés
à faire croître ou à démarrer leur propre
entreprise. Depuis sa création, la CFDABC a servi d’intermédiaire
aux SADC en administrant pour plus de 23 M$ en titres de créance
d’une compagnie d’assurances, d’une firme de capital
de risque et de coopératives de crédit de la Colombie-Britannique.
Ces investissements ont produit des rendements respectifs de 6 %,
de 2 à 3 % et de 1 à 1,5 % de moins que le taux de
base. En appliquant le coefficient d’emploi des SADC, soit
21 entreprises financées et 326 emplois soutenus par million
de dollars investi (Weicker and Co., 2002, p. 10), ces investissements
se traduisent par un RSCI d’environ 483 entreprises financées
et 7 498 emplois soutenus.
3.2.3 Les fonds d’investissement
pour le développement économique des collectivités
(FIDEC)
En Nouvelle-Écosse, le programme de crédit
d’impôt aux FIDEC a permis la création de plusieurs
nouvelles initiatives d’investissement communautaire.
La BCA Investment Co-operative Ltd. établie
à Sydney (Nouvelle-Écosse), a pour mission de mettre
en valeur la collectivité par la création d’emplois
gratifiants et bien rémunérés, ce qu’elle
doit accomplir par une participation au capital d’entreprises
locales. La mobilisation de fonds a débuté en 2000
dans le cadre du programme de FIDEC; à ce jour, la coopérative
d’investissement a réuni plus de 1,5 M$ venant de près
de 400 actionnaires. Les principaux secteurs d’investissement
sont les industries de ressources terrestres, la fabrication, le
pétrole et le gaz, le tourisme et la culture, et le secteur
du savoir. Jusqu’ici, ces investissements ont permis la création
ou la sauvegarde de plus de 200 emplois à plein temps au
profit des Cap-Bretonnais.
Les fonds de Scotian Windfields ont également
été mis sur pied aux termes du régime des FIDEC
afin de générer des investissements dans des actifs
d’énergie renouvelable, surtout dans le secteur de
l’énergie éolienne. Une dizaine de fonds établis
en partenariat avec Renewable Energy Services Limited sont actuellement
en activité; collectivement, ils forment un réseau
multicommunautaire de projets de développement de l’énergie
renouvelable.
3.3 Effets de l’IC
Bien qu’on ait rarement tenté de mesurer
les effets sociaux et environnementaux de l’investissement
communautaire au Canada, le Community Futures Program in Western
Canada a établi que chaque tranche de financement de 3 059
$ soutient la création d’un emploi. En appliquant cette
mesure aux 69 M$ d’IC, on obtient une estimation équivalente
à 22 556 emplois soutenus ou aidés par les véhicules
financiers communautaires au Canada. Ecotrust Canada propose une
mesure plus prudente de 10 000 $ par emploi, ce qui correspond à
6 900 emplois soutenus par les 69 M$ investis. Si l’on applique
la mesure du RSCI établie par la Calvert Foundation aux États-Unis
5,
soit 522 emplois dans de petites entreprises pour chaque million
de dollars américains investi pendant cinq ans, on obtient
36 018 emplois dans de petites entreprises soutenus par l’IC
au Canada. Chacun de ces coefficients multiplicateurs de la création
d’emplois indique que l’IC contribue de façon
importante à la création d’emplois, mais la
fourchette des estimations obtenues confirme la nécessité
d’élaborer des RSCI normalisés pour le secteur
de l’IC.
3.4 L’investissement
ciblé économiquement au Canada
Comme les ICE sont des placements qui comblent le
manque d’investissements (par les marchés de placement
où le secteur privé prédomine) dans les secteurs
sous-financés tout en produisant des taux de rendement équivalents
à ceux du marché, rajustés en fonction des
risques, nous les considérons, aux fins des présentes,
comme un type d’investissement communautaire. La principale
distinction entre l’IC et l’ICE est que les investissements
communautaires peuvent produire un rendement inférieur à
celui du marché, tandis que les ICE excluent les investissements
qui donnent des rendements inférieurs à ceux du marché,
conformément aux obligations fiduciaires. Pour l’essentiel,
les ICE sont un phénomène américain qui a évolué
depuis une quarantaine d’années. Ils ont gagné
en vigueur aux États-Unis depuis les années 90, quand
les organismes de réglementation ont officialisé leur
approbation des ICE en reconnaissant l’accent qu’ils
mettent sur les bénéfices accessoires (sociaux), ce
qui a hâté l’entrée des grands régimes
de retraite publics dans le secteur des ICE. Les investisseurs institutionnels
(régimes de retraite, fondations, fonds communs de placement,
institutions religieuses, compagnies d’assurances et autres)
qui poursuivent une stratégie d’ICE investissent généralement
dans le logement abordable ou dans d’autres projets immobiliers,
dans le démarrage d’entreprises de technologie, dans
les petites entreprises ou les microentreprises, dans les placements
qui donnent la préférence aux entreprises syndiquées
ou dirigées par des membres de minorités ou par des
femmes, dans la restructuration des usines et des infrastructures
ou dans le développement communautaire, selon les priorités
sociales de l’investisseur, entre autres facteurs. Les partisans
des ICE affirment que ceux-ci produisent un taux de rendement concurrentiel
compte tenu du risque tout en procurant des bénéfices
accessoires au secteur géographique, au groupe de personnes
ou au secteur de l’économie qu’ils ciblent (Harrigan,
2003, p. 241).
Au Canada, il n’y a ni définition reconnue
des ICE, ni cadre réglementaire qui sanctionne leur existence.
Les régimes de retraite et autres fiduciaires canadiens se
tournent nécessairement vers les États-Unis pour obtenir
cette justification. Faute de définition et de méthode
de mesure, les études de suivi, de tendances et d’impact
sur les ICE au Canada sont peu nombreuses. Les spécialistes
canadiens de ce domaine supposent qu’il y a au tout au plus
moins de 20 ICE, ce qui comprend les sept fonds d’investissement
des travailleurs (FIT) ayant adopté un ensemble de normes
sociales. Cela dit, l’actif des ICE n’est pas négligeable
si l’on tient compte de l’actif des sept FIT (5,62 G$)
et de la Caisse de dépôt et placement du Québec
(4,5 G$), pour un total d’environ 11 G$ d’ICE connus
en 2002. Le gouvernement fédéral, par le biais du
programme du Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH),
a accordé une subvention de 1 M$ à l’Institut
d’études pédagogiques de l’Ontario (IEPO)
de l’Université de Toronto pour la réalisation
d’une étude sur la transformation des régimes
de retraite qui comprend une enquête sur l’ICE au Canada,
dans le but de combler cette lacune sur le plan de la recherche.
Malgré l’absence de statistiques détaillées
sur les effets de l’ICE, certains FIT tiennent un registre
de leurs effets sur l’emploi dans les entreprises où
ils investissent. Des études indépendantes prouvent
que ces fonds ont des effets remarquables sur la création
et la sauvegarde d’emplois (Perrin, Thorau and Assoc., 1998;
SECOR, 1996). La direction du Crocus Fund évalue le coût
moyen de chaque emploi créé par ce fonds d’investissement
à 23 000 $, soit bien moins que la moyenne de 40 000 $ obtenue
par la plupart des placements dans du capital de risque (Hebb et
McKenzie, 2001, p. 146). Le Crocus Fund a récemment lancé
un fonds immobilier de 25 M$, le Manitoba Property Fund, conjointement
avec des co-investisseurs, la Commission des accidents du travail
et la Caisse de retraite des enseignants. Ce fonds a pour but d’investir
dans des projets immobiliers axés principalement sur la partie
historique du centre ville de Winnipeg.
3.5 Exemples d’ICE
Voici deux autres exemples d’ICE canadiens ayant
une feuille de route particulièrement bien remplie.
3.5.1 Concert Properties
Vingt et un régimes de retraite de syndicats
et de cadres de la Colombie Britannique ont mis en commun 27 M$
afin de former Concert Properties (d’abord appelé VLC)
en 1989 dans le but de financer des logements locatifs abordables
dans cette province et de créer des emplois dans le secteur
syndiqué de la construction. Aujourd’hui, cette société
immobilière appartenant à 100 % à des régimes
de retraite possède un actif de 800 M$; sa feuille de route
comprend la création de 10 millions d’heures d’emploi
de travailleurs syndiqués dans les chantiers de construction.
3.5.2 Fondaction
Fondaction, le fonds de développement de la
CSN pour la coopération et l’emploi, a été
créé en 1966 par la Confédération des
syndicats nationaux (CSN), deuxième centrale syndicale en
importance au Québec. Bien qu’elle s’apparente
au Fonds de solidarité et à d’autres FIT, Fondaction
s’est principalement engagée à investir dans
l’économie sociale 6au
Québec.
Filaction, le Fonds pour l’investissement local
et l’approvisionnement des fonds communautaires, est une filiale
de Fondaction ayant pour mandat de financer des entreprises d’économie
sociale, notamment par des fonds à l’intention de collectivités
locales et par des fonds de microcrédit (prêts de 50
000 $ à 150 000 $). Filaction a notamment contribué
à la création de cinq fonds d’investissement
régionaux pour les femmes chefs d’entreprise au Québec.
Fondaction a également mis sur pied le Fonds de financement
coopératif, qui a pour mission d’investir de 100 000
$ à 250 000 $ dans des coopératives ou des entreprises
sans but lucratif.
En collaboration avec le Fonds d’action québécois
pour le développement durable (FAQDD), Fondaction a mis sur
pied le Fonds d’investissement en développement durable
(FIDD), qui soutient les entreprises mettant au point des technologies
ou des produits susceptibles d’optimiser l’utilisation
des ressources naturelles ou d’avoir des effets importants
sur la réduction de la production de déchets, de la
pollution ou de la consommation d’énergie.
Fondaction participe à divers fonds spécialisés,
dont le Fonds Waskahegen, qui vise à créer et préserver
des emplois pour les Autochtones vivant à l’extérieur
des réserves, et le Fonds d’emprunt économique
communautaire de Québec (FEÉCQ), qui soutient les
projets de création d’emplois par des personnes marginalisées.
Au 31 mai 2003, Fondaction avait réalisé
ou projeté des investissements ciblés économiquement
d’une valeur de 144 M$, finançant ainsi près
de 100 entreprises créant des milliers d’emplois directs
ou indirects et offrant à ses actionnaires un rendement annuel
moyen de 2,29 % (en plus du crédit d’impôt).
3.6 Le capital de risque
durable
La Social Investment Organization au Canada et le
Social Investment Forum aux États Unis n’assurant pas
le suivi du secteur du capital de risque durable (CRD), nous proposons
notre propre définition : on entend par capital de risque
durable le sous-secteur du secteur du capital de risque qui investit
de façon proactive dans des technologies, processus et entreprises
à caractère social et environnemental, dans le cadre
de portefeuilles de capital de risque gérés par des
professionnels. Comme le secteur de l’investissement responsable
n’en assure pas le suivi, il est impossible de produire des
chiffres sur l’actif consacré au secteur du capital
de risque social et environnemental. Dans le domaine du capital
de risque traditionnel, Macdonald and Associates, dans son survol
du secteur du CR en 2003, évalue les investissements canadiens
dans le secteur du capital de risque durable (nommément les
technologies de l’énergie et de l’environnement)
à 45,46 M$ en 2003 (26 entreprises), comparativement à
un investissement total en CR de 1,49 G$ et 616 entreprises. Cleantech
Venture Network (2003, p. 3) estime pour sa part les investissements
à 78 M$ en 2003, contre 150 M$ en 2002. Les déclarations
d’intérêt reçues à chaque ronde
de financement par Technologies du développement durable
Canada 7(TDDC)
nous éclairent sur la situation du marché du CRD au
Canada : au cours des cinq rondes de financement menées depuis
avril 2002, TDDC a reçu 806 déclarations d’intérêt
représentant un potentiel de projets de technologies propres
totalisant 5,2 G$. La taille moyenne des projets est de 6,4 M$;
95 projets sont passés au stade de la proposition et 37 ont
fait l’objet d’une approbation du financement. Si ces
37 à 95 projets sont menés à terme et entraînent
la levée de capital de risque supplémentaire, cela
constituera un grand pas en avant pour le secteur des technologies
de l’environnement au Canada.
Aux États-Unis et au Canada, selon le Cleantech
Venture Network (2003), le secteur des technologies propres est
passé au sixième rang en importance des catégories
d’investissement en capital de risque, derrière les
technologies de l’information, les logiciels, les biotechnologies,
les soins de santé et les télécommunications.
En 2002, les investissements dans les technologies propres liées
à l’énergie représentaient près
de la moitié (45,5 %) de tous les investissements dans les
technologies propres. Les autres investissements dans les technologies
propres portaient sur les technologies-clés mises au point
par des scientifiques et ingénieurs en biologie, en informatique
et en physique afin de favoriser une meilleure utilisation des ressources
naturelles et de réduire considérablement l’impact
écologique (14 %); sur les matériaux et la nanotechnologie
(13,8 %); sur la récupération et le recyclage de matériaux
(8 %); et sur les technologies de l’eau (4 %). Selon le Cleantech
Venture Network (2004), au premier trimestre de 2004, la valeur
moyenne des transactions d’investissement dans ce secteur
était en hausse de 15 % sur l’exercice précédent,
juste sous les 7,1 M$US par transaction, comparativement à
7,5 M$US par transaction en moyenne pour l’ensemble des transactions
d’investissement en capital de risque.
D’après un observateur de l’industrie,
les technologies propres et environnementales ne constituent pas
un secteur, mais bien un thème ou une catégorie d’investissement
ayant des applications dans tous les secteurs du capital de risque.
Cet observateur prévoit l’émergence de perspectives
importantes et fortement perturbatrices sur le marché dans
les secteurs de l’agriculture, de la fabrication et des transports,
qui mobilisent des milliards de dollars, de même que dans
les secteurs clés et porteurs de l’énergie et
de l’eau (Parker, 2004). Les régimes de retraite et
les banques sont davantage reconnus pour leurs investissements dans
le capital de risque traditionnel, tandis que des particuliers disposant
d’un avoir net généralement élevé
alimentent les investissements dans le capital de risque durable.
On constate l’existence d’un nombre limité
de fonds d’épargne solidaires (FES) de capital de risque
au Canada comme aux États-Unis (voir la description des FES
à l’annexe A, « Analyse documentaire »).
Pour le moment, il n’existe pas de statistiques disponibles
sur ce groupe. Au Québec, la SOCARIAQ est un exemple de FES
comprenant un investisseur en ICE.
3.6.1 La SOCARIAQ
La Société de capital de risque autochtone
du Québec (SOCARIAQ), un fonds de placement en actions de
6 M$, offre du financement à des entreprises nouvelles ou
existantes contrôlées par des membres des Premières
Nations du Québec. Cet organisme sans but lucratif sous le
contrôle des Premières Nations est régi par
cinq investisseurs : deux sociétés autochtones de
financement sans but lucratif, le Fonds du Régime des bénéfices
autochtone, le Mouvement des caisses populaires et d’économie
Desjardins et le Fonds de solidarité, un FIT. Fondée
en mars 2002, la SOCARIAQ devrait investir dans 40 entreprises au
cours de ses cinq premières années d’activité;
on prévoit des investissements d’une valeur de 75 000
$ à 500 000 $ et un taux de rendement cible de 15 %.
Les entreprises autochtones sont d’importants
bénéficiaires potentiels du CRD, de l’ICE et
de l’investissement communautaire. Cependant, pour la plupart,
ni les sociétés autochtones de financement (SAF) ni
les sociétés d’aide au développement
des collectivités autochtones (SADCA) ne reçoivent
d’investissements extérieurs pour leurs fonds d’emprunt
et d’actions, dont le capital provient principalement du gouvernement
fédéral. Au Canada, à peine quelques sociétés
autochtones de capital de risque non affiliées, dont la SOCARIAQ,
bénéficient d’investissements extérieurs
au taux du marché, mais il n’existe pas de données
détaillées sur celles ci, de sorte qu’on sait
peu de choses de ce secteur. On attribue notamment aux facteurs
suivants le manque d’investissements extérieurs dans
les véhicules financiers autochtones :
- la complexité du cadre réglementaire
des activités financières dans les réserves
indiennes (la Loi sur les Indiens, la législation sur le
pétrole et le gaz dans les réserves indiennes, de
même que les politiques d’Affaires indiennes et du
Nord Canada concernant les titres fonciers, l’enregistrement
de l’actif, la sécurité, l’imposition,
le zonage,);
- l’absence de cotation standard des éléments
du capital autochtone.
Selon les conclusions d’une étude menée
en 2000 pour le compte d’Industrie Canada :
Aux yeux des principaux répondants, les IFA
(comme les SAF et les SADCA) se distinguent du secteur financier
traditionnel. Leurs portefeuilles de prêts sont plus modestes
et comptent moins d’actif sous forme de prêts à
terme et de liquidités; les clients sont éloignés,
plus susceptibles de vivre à l’écart et un peu
moins solvables; les IFA ont des frais plus conséquents,
et l’intérêt net sur leurs prêts s’avère
un peu plus élevé; un pourcentage supérieur
du total de leurs revenus provient d’intérêts
sur les prêts; le pourcentage de leur portefeuille placé
dans des prêts de développement dépasse celui
des banques. Tous les principaux répondants estiment que
les IFA comblent un vide dans les produits ou services que le secteur
financier traditionnel offre aux entreprises autochtones (Vodden
et Cook, 2002, p. 1).
Comme les IFA visent à consentir des
prêts de développement (à haut niveau de risque)
aux entreprises autochtones, elles seraient des candidates idéales
aux programmes d’IC, si ce n’était des importants
problèmes de réglementation, de perception et de normalisation
précités.
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