Wing Sung

Monsieur Wing Sung résout des problèmes à l’aide de protéines. À la tête de sa propre équipe de recherche de l’Institut des sciences biologiques du Conseil national de recherches du Canada (CNRC-ISB), Monsieur Sung a produit des hormones pour traiter des maladies et créé des enzymes qui permettent d’utiliser moins de chlore dans le traitement du papier. Il cherche actuellement à améliorer la qualité des fibres de chanvre.

Les enzymes, des protéines naturelles créées par les organismes vivants pour accomplir certaines tâches, sont ses outils. Mais les protéines naturelles n’agissent pas toujours comme on le désire et ont peine à résister aux conditions du milieu industriel. La xylanase, par exemple, une enzyme qu’on peut utiliser pour réduire la quantité de dioxyde de chlore (un agent de blanchiment de la pâte à papier), cesse d’être active aux températures élevées qui sont courantes dans les usines de pâte à papier.

Structure d’une molécule de l’enzyme Biobrite.

Grâce à son expertise en biologie moléculaire, et en collaboration avec l’entreprise canadienne de biotechnologie Iogen, Monsieur Sung a créé une version modifiée de la xylanase, commercialisée sous la marque de commerce BioBrite, que les usines peuvent utiliser pour blanchir la pâte à papier. BioBrite aide à réduire la pollution par le chlore organique, ce qui préserve l’environnement tout en permettant aux usines d’économiser.

Le chanvre est une plante qui peut pousser presque partout au Canada; on peut utiliser ses fibres tant pour des vêtements que pour des pièces d’automobile. Cependant, la production de fibres de haute qualité de façon abordable et écologique échappe encore aux experts du monde entier. Les méthodes actuelles d’extraction produisent des fibres de chanvre moins blanches et moins douces que le coton. C’est pourquoi les vêtements qui les utilisent sont en fait constitués d’un mélange de coton et de chanvre, ce qui entraîne la consommation d’un plus grand nombre de ressources que si on n’utilisait que le chanvre.

Le chanvre industriel est de la même espèce que la marijuana, mais contient seulement des traces de la drogue qu’est le THC. Partout au Canada, des agriculteurs le cultivent après l’octroi d’un permis du gouvernement fédéral.

En partenariat avec un fabricant canadien de ce type de produits, Monsieur Sung et son équipe cherchent à modifier une enzyme commerciale pour produire des fibres de chanvre plus fortes, plus durables, plus chaudes et plus absorbantes que le coton, tout en étant aussi douces et aussi brillantes.

Influences de l’enfance

Au cours de son enfance aux environs de Hong Kong, Wing Sung était fasciné par le monde de la nature, comme la plupart des enfants. Il a capturé des grenouilles, recueilli des œufs de mantes religieuses et chassé les grillons. Il a également élevé des vers à soie, et leur cycle de vie l’a émerveillé. Les autos et trains miniatures attiraient également son intérêt : « J’aimais beaucoup démonter leurs moteurs puis essayer de les remonter pour qu’ils fonctionnent à nouveau. »

Son intérêt pour les sciences ne s’est toutefois pas traduit par de bons résultats scolaires. À l’école primaire et secondaire, il a eu beaucoup de mal dans les domaines qui sont normalement les plus faciles pour les futurs chercheurs, soit les mathématiques, la physique et la biologie. Son père, un vérificateur, n’a jamais cessé de prendre sa défense, même lorsque ses professeurs suggéraient que les arts ou les sciences sociales conviendraient mieux au petit Wing Sung, et il insistait sur l’importance de ne jamais limiter ses choix, quelles que soient les difficultés.

Jalons sur la route

À sa sortie du collège, les notes de Wing Sung lui ont interdit l’admission à l’une des universités de Hong Kong. Après avoir décroché un poste de professeur de sciences, il s’est découvert une grande facilité à cerner les problèmes de ses élèves et à les aider à les surmonter. Selon lui, ce sont ses propres difficultés scolaires qui l’ont aidé à développer cette aptitude. Monsieur Sung a finalement réussi à obtenir une bourse d’études, et il est entré en 2e année de biologie à l’Université de l’Oregon. Cependant, ses problèmes scolaires étaient loin d’être réglés. Ses notes ont chuté, et sa bourse d’études était menacée. L’année suivante, il est passé à la chimie. Il a été inscrit au tableau des distinctions, et a obtenu son baccalauréat et sa maîtrise en moins de cinq ans. Au cours de sa maîtrise, Monsieur Sung a pris des cours d’océanographie, mais « mes projets de devenir océanographe ont été anéantis, avoue-t-il, lorsque j’ai découvert que je souffrais gravement du mal de mer. » Il a obtenu son doctorat à l’Université de Colombie-Britannique, et a ensuite travaillé à l’Université de l’Alberta pendant 11 mois. Il s’est joint à l’équipe du CNRC en 1978.

Pour Monsieur Sung, c’était un retour aux sources. Le poste qu’on lui a offert au CNRC exigeait à ses yeux des capacités de biologiste, une carrière qu’il caressait initialement, mais dont l’étude lui avait donné tant de fil à retordre à l’école. Il en était si convaincu qu’il a écrit une lettre au CNRC pour demander s’il y avait une erreur. Il a fini par travailler dans un nouveau domaine, le génie génétique, où son expertise en chimie lui a été bien utile : il a été un des premiers chercheurs à synthétiser le gène humain qui produit l’insuline.

Conseils pour réussir

Monsieur Sung suggère à tous ceux qui envisagent une carrière en sciences de se concentrer sur un domaine qui les passionne, et d’y persévérer malgré les inévitables revers. « Une carrière en sciences doit être plus qu’une simple occupation : non seulement doit-elle vous donner un sentiment de réussite et de découverte, mais vous devez également vous y amuser. » Cependant, il importe aussi de laisser ouvertes autant d’avenues que possible, afin d’être assez souple pour vous réorienter lorsqu’une belle occasion se présente.

Pourquoi avoir choisi une carrière au gouvernement?

Monsieur Sung croit que mieux comprendre la science nous permettra de vivre en plus grande harmonie avec la nature, plutôt que d’être toujours en guerre contre elle ou de s’efforcer de la dominer. À titre de chercheur au sein du gouvernement, il est fier de savoir que ses travaux améliorent la vie des Canadiens et qu’ils peuvent aider des gens d’autres pays. Les brevets issus de ses nombreuses percées technologiques fournissent des revenus au CNRC, qui les utilise pour financer d’autres recherches de pointe.