Le delta Paix-Athabasca a besoin d'eau

Le delta Paix-Athabasca au nord de l'Alberta est l'un des deltas d'eau douce intérieurs les plus grands du monde et une zone humide d'importance internationale aux termes de la Convention de Ramsar. Accueillant quelques-uns des prés de graminées et des carex les plus importants et mieux conservés en Amérique du Nord, le delta offre un habitat à de grandes populations d'oiseaux aquatiques, de rats musqués, de castors et de bisons des bois en liberté.

Au cours des vingt-cinq dernières années, toutefois, cette région complexe et dynamique a subi plusieurs sécheresses prolongées, d'où la transformation en écosystème terrestre de certains bassins à écosystème aquatique. " La première sécheresse est survenue après les années 1968 à 1971 ", période de la construction et du premier remblayage du barrage hydroélectrique W.A.C. Bennett en amont de la rivière de la Paix. La deuxième est survenue après le retrait de l'eau d'une importante inondation au printemps 1974. Les scientifiques de l'Institut national de recherche sur les eaux d'Environnement Canada ont étudié ces tendances et ont découvert que les effets de la régularisation du débit, jumelés aux variations climatiques, ont réduit le nombre d'embâcles massifs qui sont la cause d'inondations.

Contrairement aux milieux urbains du sud, où la crue des eaux du printemps causée par les embâcles bouleverse souvent les propriétés et l'économie, les inondations dans cette région nordique éloignée du Canada favorisent la grande productivité biologique qui fait la renommée du delta. Les inondations sont vitales, en particulier pour les étangs et les lacs perchés qui sont séparés du système de canaux d'eau libre. En leur absence, bon nombre de bouleversements se produisent dans l'écosystème, depuis des changements dans la végétation dominante à une chute importante des habitats et des populations de petits mammifères.

La connaissance des causes de ces sécheresses a permis aux scientifiques d'élaborer une stratégie qui optimise le potentiel d'inondation en faisant coïncider le moment d'écoulement de l'eau du barrage avec les conditions naturelles propices comme la taille du manteau neigeux. Au printemps 1996, les conditions hydrologiques et climatiques étaient appropriées, et un écoulement de l'eau au moment propice provoqué par les gestionnaires du barrage a permis d'augmenter l'ampleur d'une inondation causée par des embâcles, d'où la présence d'eau à des endroits où la sécheresse avait sévi pendant plus de deux décennies.

Ces images – prises au même endroit dans un intervalle d'un mois – montrent les écarts extrêmes des niveaux d'eau du delta Paix-Athabasca avant et après l'inondation.

Il reste beaucoup à apprendre sur l'hydroclimatologie et l'écologie du delta si l'on veut assurer la productivité ainsi que la biodiversité de la région. Cependant, la cueillette de renseignements sur une région si grande et éloignée suscite de nombreux problèmes pour les chercheurs. Afin de surmonter ces difficultés, les scientifiques d'Environnement Canada élaborent des outils innovateurs afin d'en connaître davantage sur la dimension spatiale des inondations, les niveaux d'eau et le changement des régimes d'écoulement dans la région.

Parmi ces outils, mentionnons l'imagerie par satellite. Au cours des années de sécheresse du delta, les saules se sont considérablement répandus, créant une épaisse couche de végétation que les méthodes de détection à distance traditionnelles ne pouvaient pas pénétrer. Grâce à une combinaison de technologie traditionnelle par satellite et du plus récent système à hyperfréquence RADARSAT , les scientifiques ont été en mesure de percer cette couche de végétation et de repérer les limites de l'inondation de 1996.

L'étude de l'imagerie par satellite montrant les anciennes fluctuations du niveau d'eau, permettra d'améliorer les connaissances sur l'évapotranspiration et d'autres processus hydrologiques et de présenter des données sur les modèles d'équilibre de l'eau qui permettent de prévoir les changements à venir. Outre une maquette hydraulique de la région, ces modèles servent maintenant à la recherche continue sur les impacts possibles du changement climatique sur les ressources aquatiques de cette importante région unique du pays.

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