Directive du Cabinet sur
l'activité législative
Mars 1999
Bureau du Conseil privé
Gouvernement du Canada
Table des matières
I. Introduction
2.
L'activité législative du gouvernement : principes fondamentaux
3.
Élaboration du programme législatif du gouvernement
4.
Élaboration des projets et objectifs par le Cabinet
5.
Débats parlementaires et amendements
6. Entrée en vigueur
7. Prise de règlements
8. Conclusion
1. Introduction
L'élaboration des règles de droit est vraisemblablement l'activité la
plus importante du gouvernement et doit s'exercer dans le cadre et selon les principes
définis dans la présente directive. Il est de la première importance que le ministère
qui met en branle le processus d'élaboration d'une mesure législative planifie et gère
celle-ci en conformité avec cette directive et les documents complémentaires établis
par le greffier du Conseil privé.
La présente directive remplace celle intitulée La filière
législative, qui a été approuvée par le Cabinet le 16 avril 1981. Ses principaux
objectifs sont les suivants :
veiller à ce que le Cabinet dispose de l'information et de toute autre
forme de soutien dont il a besoin pour prendre des décisions éclairées sur les mesures
législatives proposées;
donner un aperçu des rapports entre l'élaboration de la législation
et celle de la réglementation, et veiller à ce que les deux soient considérées comme
constituant un seul et même processus continu;
veiller à ce que les textes législatifs soient rédigés selon les
règles de l'art dans le respect des deux langues officielles et des deux systèmes de
droit qui coexistent au Canada : le droit civil et la common law;
montrer que l'élaboration d'une mesure législative est une activité
souvent complexe qui exige une planification et une gestion adéquates;
veiller à ce que les fonctionnaires intervenant dans l'activité
législative comprennent bien leur rôle et possèdent les connaissances et compétences
nécessaires pour l'exercer efficacement.
La présente directive donne des instructions générales sur la façon
d'atteindre ces objectifs et énonce les principes à respecter.
2. L'activité
législative du gouvernement : principes fondamentaux
Points d'ordre constitutionnel
La Loi constitutionnelle de 1867 répartit les compétences
législatives entre le Parlement et les législatures des provinces (partie VI,
articles 91 à 95). Dans les territoires, les pouvoirs qu'exercent les législatures
leur sont délégués par le Parlement.
Le régime politique canadien, dit de "gouvernement
responsable", se fonde sur le principe de la primauté du droit. Cela signifie que
les règles du droit canadien doivent s'élaborer en conformité avec la Constitution. Sa
Majesté ne dispose de nos jours que de très peu de pouvoirs législatifs qui ne soient
pas assujettis au processus parlementaire : les règlements régissant la délivrance
des passeports, qui sont pris en vertu de la "prérogative royale", constituent
l'un des rares exemples.
Le Parlement peut déléguer des pouvoirs législatifs au Cabinet (le
gouverneur en conseil), à une personne (tel un ministre) ou à un organisme (la
Commission de contrôle de l'énergie atomique, par exemple). L'exercice de ces pouvoirs
reste assujetti à l'autorité du Parlement, d'où l'emploi des termes "législation
déléguée" et "législation subordonnée" pour désigner les règlements
qui en résultent.
L'élaboration de la législation canadienne obéit à un certain nombre
de contraintes, la première étant évidemment le partage constitutionnel des pouvoirs
entre le Parlement et les législatures provinciales. À celle-ci s'ajoutent les
dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés, les droits des
peuples autochtones reconnus et confirmés par l'article 35 de la Loi constitutionnelle
de 1982, ainsi que les droits et obligations constitutionnels qui s'appliquent en
matière linguistique au Québec et au Manitoba.
Les lois au sens strict du terme sont adoptées par le Parlement, qui est
composé de Sa Majesté la reine, du Sénat et de la Chambre des communes. Un projet de
loi ne devient loi que s'il reçoit l'agrément de chacun d'eux. La sanction royale
constitue dans tous les cas l'ultime étape du processus législatif.
Suivant la Loi constitutionnelle de 1867, tout projet de loi
portant affectation de crédits doit prendre naissance à la Chambre des communes:
53. Tout bill ayant pour but l'appropriation d'une
portion quelconque du revenu public, ou la création de taxes ou d'impôts, devra originer
dans la Chambre des Communes.
De plus, un tel projet de loi ne peut être déposé que par un ministre.
Les autres projets de loi peuvent indifféremment être déposés au Sénat ou à la
Chambre des communes.
Le Cabinet, constitué du premier ministre et des autres ministres de Sa
Majesté, joue aussi un rôle important dans l'activité législative du Parlement. Les
membres du Cabinet donnent collectivement leur assentiment au dépôt des projets de loi
du gouvernement devant le Parlement. Sur le plan individuel, ils parrainent les projets de
loi relevant de leur portefeuille et assurent leur cheminement tout au long du processus
parlementaire avec l'aide des fonctionnaires de leur ministère.
Opportunité de l'action législative
Le gouvernement dispose de plusieurs moyens pour atteindre ses objectifs.
Certes, il peut soumettre un projet de loi à l'assentiment du Parlement ou prendre
lui-même un règlement. Mais il peut aussi procéder par la conclusion d'accords,
l'émission de directives ou la mise sur pied de programmes en vue d'offrir des services,
des prestations ou de l'information. Par ailleurs, un texte législatif peut comporter
toute sorte de dispositions allant de la simple prohibition aux mécanismes de régulation
les plus complexes, en passant par la délivrance de permis et les contrôles de
conformité. Il n'en reste pas moins que la voie législative devrait être strictement
réservée aux cas où elle constitue la meilleure solution possible. Il appartient au
ministre responsable de démontrer au Cabinet que ce principe a été respecté et qu'il y
va de la réalisation des objectifs du gouvernement.
La décision de procéder par projet de loi ou de règlement revient au
Cabinet, sur la foi de l'information que les fonctionnaires du ministère intéressé
mettent à sa disposition. Cette information doit être exacte, à jour et complète. Pour
bien s'acquitter de cette obligation, les fonctionnaires responsables doivent, au nom de
leur ministre :
analyser la question et considérer les solutions de rechange;
consulter toutes les parties intéressées, y compris les autres
ministères qui peuvent être touchés par la solution proposée;
analyser les effets de cette solution;
déterminer les ressources nécessaires à celle-ci, notamment pour sa
mise en oeuvre et le contrôle de son application.
Dans le cas d'un projet de loi, le principal moyen de communiquer cette
information est la note au Cabinet, dans laquelle le ministre demande au Cabinet
l'autorisation de faire rédiger le projet de loi par la Section de la législation du
ministère de la Justice.
Il importe de veiller, dans toute la mesure du possible compte tenu des
principes de rédaction législative, à ce que toutes les mesures législatives
apparentées soient regroupées en un seul projet de loi. La multiplication des projets de
loi sur des questions connexes constitue en effet une perte de temps pour les
parlementaires, tant lors des débats que lors de l'étude en comité.
Enfin, il y a lieu de faire preuve de circonspection au moment d'ajouter
au projet une clause de temporarisation ou de cessation d'effet, ou de prévoir l'examen
d'un texte dans un délai précis ou par tel ou tel comité. On ne devrait recourir à de
tels mécanismes qu'en dernier ressort, lorsque les solutions de rechange ont été
soigneusement examinées.
Rapports entre la loi et le règlement
Bien que les lois et les règlements soient soumis à des processus
distincts, ils sont liés à plusieurs égards :
Le Parlement édicte les lois et par leur truchement autorise la prise
des règlements.
Le règlement doit respecter fidèlement le cadre juridique fixé par sa
loi habilitante.
Comme la plupart des plans législatifs sont mis en oeuvre au moyen de
règlements, il convient d'élaborer la loi et les règlements parallèlement afin
d'assurer leur cohérence et leur concordance.
Au moment d'élaborer une proposition législative autorisant la prise de
règlements, le ministère doit porter une attention particulière :
au choix du titulaire du pouvoir réglementaire;
aux questions à traiter dans le projet de loi lui-même;
aux points qui seront réglés par les règlements.
C'est habituellement au gouverneur en conseil qu'est attribué le pouvoir
de prendre les règlements d'application d'un texte de loi; toute dérogation à cet usage
devrait être motivée dans la note au Cabinet. Par ailleurs, les éléments fondamentaux
de la mesure doivent figurer dans le projet de loi, afin que les parlementaires puissent
en prendre connaissance et en débattre. Le projet de loi doit fixer le cadre juridique du
pouvoir réglementaire, lequel se limite aux matières qu'il est préférable de laisser
aux délégataires et aux processus de législation déléguée. À cet égard, les
principes suivants doivent être respectés :
Il faut veiller à ne pas exprimer en termes trop larges la disposition
législative qui donne le pouvoir de prendre des règlements.
Dans certains domaines, l'autorisation d'insérer dans un projet de loi
une disposition conférant un pouvoir réglementaire doit être demandée expressément
dans la note au Cabinet, avec motifs à l'appui. Il s'agit notamment des pouvoirs qui :
ont des effets sensibles sur les droits et libertés civiques;
mettent en jeu d'importantes questions de principe ou d'orientation;
autorisent la modification de la loi habilitante ou d'autres lois par
voie de règlement;
écartent la compétence normale des tribunaux;
autorisent la prise de règlements à effet rétroactif;
subdélèguent un pouvoir réglementaire;
imposent à l'État ou à la population des charges financières autres
que les droits payables pour la prestation de services;
fixent les peines sanctionnant les infractions graves.
Les lois et les règlements sont interdépendants et leur
élaboration devrait être coordonnée. Les règlement peuvent être rédigés en même
temps que le projet de loi ou par la suite, selon le cas. Toutefois, lorsque les
règlements constituent une composante majeure d'une nouvelle mesure législative, il peut
être avantageux d'en amorcer dès que possible l'élaboration, afin d'assurer leur
concordance par rapport au cadre juridique fixé par la loi. Lorsque les règlements sont
élaborés sous le régime d'une loi existante, il faut bien s'assurer qu'ils ne
débordent pas les limites juridiques prévues par celle-ci.
Importance de la rédaction bilingue et bijuridique
Aux termes de la Loi constitutionnelle de 1867, les lois
fédérales doivent être rédigées dans les deux langues officielles, les deux versions
faisant également foi. L'une ne saurait donc être une simple traduction de l'autre. Pour
cette raison, les administrations - ministères et organismes - qui les parrainent doivent
s'assurer qu'elles sont en mesure d'élaborer les orientations et objectifs, de consulter
et de donner aux légistes des instructions dans les deux langues officielles. Les deux
versions doivent avoir le même sens, celui qu'on entend leur donner, exprimé en termes
clairs et précis.
Il est tout aussi important que les projets de loi et de règlement
respectent les deux traditions juridiques canadiennes - le droit civil et la common law -,
puisque les lois fédérales s'appliquent en principe à l'ensemble du pays. Les notions
propres à chaque système juridique doivent être exprimées dans les deux langues d'une
façon qui tienne compte des deux réalités.
Planification et gestion de l'activité législative
Il y a trois niveaux de planification et de gestion de l'activité
législative gouvernementale :
Pour ce qui est du premier de ces niveaux, il existe, à l'échelle du
gouvernement, un processus de coordination et d'établissement de l'ordre de priorité des
diverses propositions législatives émanant des ministères. C'est le leader du
gouvernement à la Chambre des comunes - qui est aussi ministre d'État - qui est
responsable du programme législatif du gouvernement. Il est appuyé dans cette tâche par
le Bureau du conseil privé. Par ailleurs, un comité du Cabinet, le Comité spécial du
Conseil, et, dans certains cas, le Cabinet en séance plénière se penchent sur les
questions qui requièrent une décision du Cabinet plénier. Il en est ainsi, par exemple,
lorsque le leader du gouvernement à la Chambre des communes demande que lui soit
délégué le pouvoir de prendre les dispositions nécessaires en vue du dépôt d'un
projet de loi.
Dans le cas des règlements, les administrations doivent planifier leur
calendrier réglementaire pour les années à venir et faire rapport au sujet de leur
planification et de l'ordre de priorité fixé. À l'automne, il leur faut aussi rédiger
des rapports de rendement. Ceux-ci sont déposés à la Chambre des communes en annexe du
Budget des dépenses, puis remis aux comités compétents de la chambre.
Au second niveau, il incombe à chaque ministère de gérer les
propositions législatives qui relèvent de son champ de compétence. Il doit veiller à
affecter les crédits nécessaires à toutes les étapes du processus législatif -
notamment les consultations - et s'assurer qu'il est à même d'établir les orientations
et objectifs et fournir les instructions aux légistes dans les deux langues officielles.
Enfin, il lui faut planifier la mise en application de la loi après son adoption et
prévoir les ressources requises à cette fin.
Au troisième niveau, celui du projet, le ministère doit planifier ses
activités en fonction des différentes mesures législatives et réglementaires. Il doit
gérer celles-ci comme s'il s'agissait d'autant de projets distincts, chacun exigeant la
détermination des besoins sur le plan des ressources, la définition des tâches à
accomplir et l'établissement d'un échéancier.
3. Élaboration
du programme législatif du gouvernement
Planification
La planification du programme législatif global du gouvernement peut
commencer plus d'un an avant le début de la session du Parlement au cours de laquelle est
prévu le dépôt des divers projets de loi. L'expérience démontre qu'il vaut mieux
étaler le processus de planification et de préparation sur l'année qui précède
l'ouverture de la session plutôt que d'attendre à la veille de celle-ci. Ce délai se
justifie, d'une part, par la nécessité d'une planification à long terme de l'activité
législative d'ensemble et, d'autre part, par les trois grandes étapes du processus
menant à l'approbation du projet avant son dépôt, à savoir :
présentation des orientations et de l'objectif au Cabinet pour
approbation;
le cas échéant, rédaction du projet, phase souvent longue et
difficile;
présentation du projet au ministre d'État et leader du gouvernement à
la Chambre des communes pour approbation, en vue de son dépôt.
Dans le cadre des modifications apportées au processus décisionnel du
Cabinet par le premier ministre en juin 1997, le Comité spécial du Conseil s'est vu
confier, à titre d'organe collégial de niveau ministériel, de nouvelles attributions
relativement à la planification législative d'ensemble et à la résolution de questions
d'ordre législatif exigeant l'intervention du Cabinet.
C'est par ailleurs au ministre d'État et leader du gouvernement à la
Chambre des communes qu'il incombe de suivre de près l'évolution du programme
législatif du gouvernement aux Communes et de procéder à l'examen approfondi de tous
les avant-projets de loi.
Les administrations dont le ministre doit présenter des propositions
législatives sont donc fortement encouragées à rester en rapport étroit avec le
Secrétariat de la législation et de la planification parlementaire du Bureau du Conseil
privé, qui a pour mission d'appuyer tant ce comité que le leader du gouvernement à la
Chambre des communes. Plus particulièrement, il est très important qu'elles l'informent
de toute modification importante apportée à l'échéancier du ministre pour le dépôt
du projet de loi.
Appel de propositions législatives
Dès que le discours du Trône a été prononcé au début de la session
parlementaire, le secrétaire adjoint du Cabinet pour la législation et la planification
parlementaire demande par écrit à tous les sous-ministres et aux premiers dirigeants de
certains organismes de lui présenter la liste des propositions législatives que leur
ministre compte soumettre au Cabinet en vue du dépôt de projets de loi au cours de la
session suivante. Par la suite, "la lettre d'appel" est envoyée deux fois au
cours de l'année, en juin et en novembre, pour permettre les ajustements qu'impose tout
changement au programme ou dans l'ordre de priorité.
La réponse est adressée au secrétaire adjoint du Cabinet dans le mois
qui suit la réception de la lettre d'appel ou dans tel autre délai qui y est précisé.
Examen par le Cabinet
Le leader du gouvernement à la Chambre des communes établit un premier
ordre de priorité parmi les propositions législatives. Le programme législatif de la
session suivante est alors établi dans les grandes lignes et passé en revue, avec
l'ordre de priorité, par le Comité spécial du Conseil. Normalement, le leader informe
deux fois l'an le Comité spécial du Conseil et le Cabinet en séance plénière des
mises à jour du programme législatif.
4. Élaboration
des projets de loi du gouvernement
Approbation des orientations et objectifs par le Cabinet
Dès que le Cabinet a décidé d'inscrire une mesure au programme
législatif, l'administration concernée devrait présenter une note au Cabinet en vue
d'en faire approuver les orientations et les objectifs, et d'obtenir l'autorisation de
faire rédiger un projet de loi par la Section de la législation du ministère de la
Justice. La note au Cabinet est rédigée selon les modalités précisées dans les textes
complémentaires établis par le greffier du Conseil privé et est présentée au comité
d'orientation compétent du Cabinet, puis au Cabinet lui-même. On devrait prévoir, entre
la présentation de la note et la date envisagée pour le dépôt du projet, un délai
suffisant pour la rédaction de celui-ci.
La note doit préciser, le cas échéant, le genre de consultations
publiques que le ministre a menées ou envisage de mener dans le cadre de la mesure, et
s'il souhaite que le projet de loi fasse lui-même l'objet de consultations. La tradition
veut que les avant-projets de loi soient tenus pour strictement confidentiels jusqu'à
leur dépôt au Parlement. Mais étant donné l'engagement pris par le gouvernement en
faveur de la transparence et de la consultation, il est bien possible que les ministres
souhaitent solliciter l'opinion des intéressés. Il ne doit toutefois pas en résulter
d'entrave au pouvoir législatif du Parlement, ni d'avantages économiques indus pour une
partie consultée. Par conséquent, lorsque l'on envisage de soumettre un projet de loi à
des consultations avant son dépôt, il y a lieu d'en faire mention au préalable dans la
note au Cabinet, afin de permettre à celui-ci d'examiner le bien-fondé des décisions
prises à cet égard. Et si le projet de loi a pour effet de modifier l'appareil
administratif, l'autorisation de consulter devrait être demandée au moyen d'une lettre
adressée au premier ministre par le ministre parrain.
Les instructions de rédaction devraient être annexées à la note au
Cabinet. Elles ne doivent cependant pas prendre la forme d'un avant-projet de loi. Leur
objet est de faciliter l'étude de la proposition législative du point de vue des
orientations et des objectifs, et d'encadrer la rédaction du projet. Sauf dans de très
rares cas, les instructions de rédaction sous forme d'avant-projet de loi ne sont pas
utiles. Il se peut que la tâche de réunir l'information à inclure dans les instructions
de rédaction prenne beaucoup de temps. Mais le sérieux des discussions à cette étape
permettra d'en arriver à une meilleure estimation du temps nécessaire à la rédaction
du projet de loi, ce qui est essentiel à la planification et à la gestion du programme
législatif du gouvernement.
Rédaction du projet de loi
Il est essentiel que le ministère parrain informe le Secrétariat de la
législation et de la planification parlementaire, ainsi que le secrétariat du comité
d'orientation compétent du Cabinet, de tout changement notable par rapport aux
orientations et objectifs déjà approuvés par le Cabinet.
Comme il a été dit précédemment, les versions française et anglaise
font également foi et doivent être à l'image de la nature bijuridique du système de
droit canadien. Elles doivent donc être établies ensemble et l'administration
responsable doit veiller à mettre en place les moyens voulus pour être en mesure :
de donner des instructions dans les deux langues officielles;
de répondre aux questions substantielles des légistes dans les deux
langues officielles et relativement à chacun des systèmes juridiques en place;
de procéder à l'appréciation critique des deux textes.
Les deux versions doivent absolument revêtir la même qualité
substantielle aux yeux des spécialistes aptes à en juger, et doivent être susceptibles
d'application dans l'ensemble du pays, quel que soit le régime de droit provincial ou
territorial applicable. Certes, cette obligation peut être particulièrement astreignante
quand la source d'inspiration d'un projet provient d'une autre autorité législative -
canadienne ou non -, et que les textes et l'information - souvent très techniques -
utilisés n'existent que dans une seule langue. Il faudra alors prévoir au besoin, dans
les délais de planification et de rédaction, le temps nécessaire à la recherche, à la
vérification et à la mise au point de la terminologie à employer dans les deux
versions.
L'opportunité d'inclure un préambule ou un énoncé d'objectifs dans un
projet de loi doit aussi être examinée soigneusement. Le préambule expose
généralement des renseignements contextuels importants pour la compréhension du texte
ou la démonstration de sa validité constitutionnelle. Or, s'agissant d'une loi
modificative, toutefois, son préambule ne sera pas ajouté au texte de la loi modifiée.
Afin de porter ces renseignements contextuels à la connaissance du public, on peut
recourir en pareil cas à un énoncé d'objectifs qui, faisant partie des dispositions du
texte, sera intégré à la loi modifiée. En tout état de cause, le texte du préambule
ou de l'énoncé d'objectifs est examiné soigneusement par le ministère de la Justice
quant à sa rédaction et à son contenu.
Examen du projet de loi par le leader du gouvernement à la Chambre des
communes
Dès qu'un projet de loi a été rédigé et approuvé par le ministre
responsable, la Section de la législation du ministère de la Justice prend les
dispositions nécessaires pour son impression et l'envoi d'exemplaires au Secrétariat de
la législation et de la planification parlementaire avant l'examen par le leader du
gouvernement à la Chambre des communes.
À cette étape, l'administration responsable :
rédige la documentation destinée à expliquer le projet de loi aux
parlementaires et au grand public ou devant leur être distribuée;
établit une version provisoire de la déclaration que fera le ministre
lors du renvoi au comité;
présente un plan de communication révisé et actualisé si l'original
figurant dans la note au Cabinet n'est plus à jour.
Le leader du gouvernement à la Chambre des communes examine alors le
texte du projet, notamment du point de vue de sa conformité avec la décision du Cabinet.
Il rend compte de ses conclusions au Cabinet et demande à celui-ci de lui déléguer le
pouvoir de prendre les dispositions nécessaires en vue du dépôt du projet à la Chambre
des communes ou au Sénat.
Une fois que le Cabinet a donné son aval, le Secrétariat de la
législation et de la planification parlementaire présente au premier ministre ou au
leader du gouvernement à la Chambre des communes pour signature le projet dans sa version
définitive, assorti de la recommandation royale s'il porte affectation de crédits. Le
secrétariat se charge des formalités afférentes à la recommandation royale, après
consultation du ministère de la Justice et du bureau du gouverneur général.
5. Débats
parlementaires et amendements
Dépôt et lectures
Les projets de loi du gouvernement sont habituellement déposés par les
ministres parrains. Ils subissent trois lectures au Sénat et à la Chambre des communes,
et font l'objet d'une étude en comité dans chacune des chambres. Le détail de ces
étapes est exposé dans diverses publications telles que le Précis de procédure
de la Chambre des communes, ainsi que Le Sénat aujourd'hui et le Règlement
du Sénat du Canada.
C'est soit le Cabinet, sur la recommandation du leader du gouvernement à
la Chambre des communes, soit ce dernier en vertu du pouvoir délégué par le Cabinet,
qui décide de la date et du lieu du dépôt d'un projet de loi.
Sur instruction du leader du gouvernement à la Chambre des communes, le
secrétaire adjoint du Cabinet pour la législation et la planification parlementaire
donne avis de dépôt au greffier de la Chambre des communes. Si le dépôt doit se faire
au Sénat, la détermination de la date revient également au leader du gouvernement à la
Chambre des communes, mais après consultation du leader du gouvernement au Sénat. Dans
tous les cas, le secrétaire adjoint en informe le ministre responsable.
À la Chambre des communes, la fixation de la date et de l'heure du débat
de deuxième lecture, de l'étape du rapport et de la troisième lecture revient au leader
du gouvernement à la Chambre des communes. Au Sénat, le déroulement des différentes
étapes est réglé par le leader du gouvernement au Sénat.
Au cours de l'étude en comité, que ce soit au Sénat ou à la Chambre
des communes, le ministre responsable ou le secrétaire parlementaire assiste aux
audiences du comité afin de faciliter les délibérations en s'assurant que la position
du gouvernement est bien exposée. Cela est particulièrement important dans les cas où
il est proposé d'apporter des amendements au projet de loi.
Amendements
Les règles suivantes s'appliquent lorsque le ministre responsable veut
proposer ou accepter des amendements après le dépôt d'un projet de loi :
L'agrément du ministre suffit pour les amendements de pure forme, le
Cabinet n'ayant pas à être consulté.
S'agissant d'amendements qui ont des répercussions sur les orientations
et objectifs approuvés par le Cabinet ou qui soulèvent des questions d'orientation
générale dont celui-ci n'a pas été saisi, il y a lieu de reprendre les étapes suivies
pour le projet de loi original : présentation d'une note au Cabinet, étude par le
comité d'orientation initialement saisi et agrément du Cabinet.
Les amendements importants peuvent toutefois, en cas d'urgence, être
directement soumis à l'approbation du premier ministre et du président du comité
d'orientation compétent du Cabinet, ainsi qu'à celle des autres ministres intéressés.
Les amendements proposés ou acceptés par le gouvernement doivent être
rédigés ou à tout le moins passés en revue par la Section de la législation du
ministère de la Justice.
Sanction royale
La sanction royale constitue l'ultime étape du processus d'édiction des
lois. La date de la cérémonie de sanction royale est fixée par le leader du
gouvernement à la Chambre des communes après consultation du leader du gouvernement au
Sénat.
6. Entrée en vigueur
Sauf disposition contraire, la loi entre en vigueur à la date de sa
sanction. Le plus souvent, toutefois, le texte prévoit que ses dispositions ou telles
d'entre elles entrent en vigueur à la date ou aux dates fixées par décret du gouverneur
en conseil. Les décrets de ce type sont rédigés par les fonctionnaires du ministère
chargé de l'application de la loi et soumis à l'examen du Comité spécial du Cabinet
par le ministre responsable. Une fois approuvé par le comité, le décret est transmis au
gouverneur général pour signature, puis publié dans la Gazette du Canada. Le
décret devrait être soumis à l'approbation du Cabinet assez longtemps avant la date
prévue pour l'>entrée en vigueur.
7. Prise de règlements
Les principales étapes du processus réglementaire sont prévues par la Loi
sur les textes réglementaires. On y trouve notamment les règles suivantes :
les projets de règlement sont examinés par le greffier du Conseil
privé après consultation du sous-ministre de la Justice;
les règlements sont transmis au greffier du Conseil privé pour
enregistrement et publication dans la Gazette du Canada;
le Comité mixte permanent d'examen de la réglementation est saisi
d'office de tous les règlements.
S'ajoutent à ces éléments les formalités d'analyse et de procédure
que prévoit la Politique de réglementation fédérale.
8. Conclusion
La présente directive énonce les objectifs et les attentes du Cabinet
relativement à l'activité législative du gouvernement. Ses dispositions, de même que
celles des documents complémentaires établis par le greffier du Conseil privé
relativement à la planification et à la gestion de cette activité, s'imposent à tous
les fonctionnaires qui prennent part à celle-ci.
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