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Le guide de la détermination de l'admissibilité - Chapitre 9


CHAPITRE 9

REFUS D'EMPLOI 


9.4.0     EMPLOI CONVENABLE

9.4.1     Comparaison des tâches
9.4.2     Occupation ordinaire
9.4.3     Emploi d'un genre différent
9.4.4     Période de chômage raisonnable
9.4.5     Bons employeurs
9.4.6     Taux courant de rémunération
9.4.7     Conflit collectif


9.4.0 EMPLOI CONVENABLE

Comme deuxième question à se poser, il faut se demander si l'emploi refusé était convenable. Que le motif de refus invoqué soit valable ou non, l'exclusion ne doit être prononcée que si l'emploi proposé était convenable1.

Dans la pratique, les expressions « emploi non convenable » et « motif valable » sont souvent équivalentes. Même la jurisprudence ne fait pas de distinction. Par exemple, dans un cas donné, on dira que la grande distance qui sépare le lieu de travail proposé du domicile de l'assuré rend l'emploi non convenable ou on dira qu'elle constitue un motif valable de refuser l'emploi. Suivant l'un ou l'autre raisonnement, l'assuré n'est pas exclu du bénéfice des prestations. C'est pour cette raison que les motifs le plus souvent invoqués à l'appui du refus d'emploi figurent tous sur une même liste sous le sceau du motif valable2.

Il reste que ce qui ne constitue pas un emploi convenable est défini dans la Loi de façon explicite3. Il l'est par rapport au marché du travail avant de l'être par rapport à l'individu. On pourrait dire que tout emploi est convenable à moins qu'il ne tombe sous le coup de la définition de l'emploi non convenable.

Afin de décider si l'emploi est convenable, il faut d'abord faire une comparaison entre les tâches que comporte l'occupation ordinaire et celles que comporte l'emploi proposé. Il se peut aussi que l'emploi ne soit pas convenable du fait qu'un conflit collectif sévit au lieu de travail proposé. Enfin, le texte de Loi ne fait aucune distinction entre l'emploi temporaire et l'emploi permanent4.
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  1. Index de jurisprudence/refus d'emploi/convenable/définition/;
  2. voir 9.5.4, « Application »;
  3. LAE 27(2);
  4. Index de jurisprudence/refus d'emploi/temps plein/.

9.4.1 Comparaison des tâches

Le genre de travail pour lequel une personne s'est inscrite n'est pas un facteur décisif quand il s'agit de décider si l'emploi proposé est convenable1.

Afin de décider si un emploi se situe ou non dans le cadre de l'occupation ordinaire, on peut faire appel aux règles dont on se sert pour déterminer l'occupation habituelle dans le cas d'un emploi exercé pendant un arrêt de travail dû à un conflit collectif2.

C'est surtout des tâches mêmes dont il faut tenir compte plutôt que du genre de commerce. Ainsi, il a été décidé que les tâches suivantes faisaient partie d'une même occupation : sténo dans la vente ou au service d'un avocat, blanchisseuse au service d'un hôtel ou d'une buanderie, hôtesse d'hôtel ou de restaurant.

Même lorsque quelques tâches sont ajoutées ou lorsqu'elles ne sont pas tout à fait identiques, on peut parler d'un même genre d'occupation. Il en a été décidé ainsi dans les cas suivants : repasseuse d'uniformes ou de chemises, bûcheron affecté à la coupe du bois en longueur de quatre pieds ou en longueur de huit ou seize pieds. La spécialisation dans un domaine peut suffire pour dire que deux occupations, par ailleurs semblables, sont différentes, par exemple la menuiserie en finition et la menuiserie en gros travaux. Il en est de même des degrés à l'intérieur d'une profession, par exemple fille de table en charge et simple serveuse, ou lorsqu'une personne possède des qualifications exceptionnelles.
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  1. Index de jurisprudence/refus d'emploi/convenable/définition/;
  2. Index de jurisprudence/refus d'emploi/genre différent/. voir de 8.11.1, « Situation normale » à 8.11.4, « Cessation des affaires, restructuration permanente, cas de force majeure ».

9.4.2 Occupation ordinaire

Un emploi dans le cadre de l'occupation ordinaire est convenable pourvu que les conditions de travail, y compris le taux de rémunération, ne soient pas moins favorables que celles « appliquées par convention entre employeurs et employés ou, à défaut de convention, admises par les bons employeurs »1. À cette fin, la durée prévue de l'emploi n'entre pas dans la définition de « conditions de travail »2.

Donc, si une convention collective est en cours au lieu de travail proposé, les conditions de travail doivent être celles qui y sont stipulées3. S'il n'y en a pas, on se demandera ce qu'on doit entendre par bons employeurs.

Il faut noter qu'un taux inférieur de rémunération, par rapport au taux dont jouissait une personne au cours de son dernier emploi, n'est pas un facteur qui puisse rendre l'emploi non convenable quand il s'agit de l'occupation ordinaire4. Toutefois, on y attachera une certaine importance lors de l'étude du motif valable.
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  1. LAE 27(2)b);
  2. Index de jurisprudence/refus d'emploi/durée de l'emploi/;
  3. Index de jurisprudence/refus d'emploi/conditions de travail/; Index de jurisprudence/refus d'emploi/droits syndicaux/protection d'emploi exception/;
  4. Index de jurisprudence/refus d'emploi/salaire/.

9.4.3 Emploi d'un genre différent

Un emploi d'un genre différent de celui qu'exerce une personne dans le cadre de son occupation ordinaire est convenable pourvu que les conditions de travail, y compris le taux de rémunération, ne soient pas moins favorables que celles qu'elle peut raisonnablement s'attendre à obtenir, tenant compte des conditions dont elle jouissait dans l'exercice de son occupation ordinaire et qui lui auraient été accordées si elle avait continué dans cette voie1.

Donc, l'emploi d'un genre différent est convenable s'il comporte un taux de rémunération et d'autres conditions de travail comparables à ceux dont jouit une personne dans le domaine qui est le sien. Quoiqu'en principe le changement d'occupation est en soi insuffisant pour dire qu'un emploi n'est pas convenable, on y accorde en pratique une certaine importance; il en sera question lors de l'étude du motif valable.

Une fois écoulée une période de chômage raisonnable, l'emploi d'un genre différent est convenable même s'il n'est pas tel que précisé ci-dessus pourvu que les conditions de travail, y compris le taux de rémunération, ne soient pas moins favorables que celles « appliquées par convention entre employeurs et employés ou, à défaut de convention, admises par les bons employeurs »2. On est ainsi ramené aux facteurs dont il faut tenir compte quand il s'agit de l'occupation ordinaire. Donc, toute occasion d'emploi doit être traitée sur le même pied après un délai raisonnable à partir de la date à laquelle l'assuré s'est trouvé en chômage3.
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  1. LAE 27(2)c);
  2. LAE 27(3);
  3. Index de jurisprudence/refus d'emploi/délai raisonnable/.

9.4.4 Période de chômage raisonnable

Lorsque l'emploi offert se situe hors de l'occupation ordinaire, pourvu qu'il comporte aussi des conditions de travail moins favorables que celles rattachées à l'occupation ordinaire, la période de chômage devient un facteur important. L'expression exacte que renferme la Loi est celle d'un « délai raisonnable à partir de la date à laquelle un assuré s'est trouvé en chômage »1. Elle n'a aucune application lorsque l'emploi offert se situe dans le cadre de l'occupation ordinaire2.

Ce qu'il faut évaluer, c'est bien la période écoulée à partir de la date à laquelle l'assuré s'est trouvé en chômage, et non à partir du jour où il a formulé sa demande de prestations. Par contre, l'expression « s'est trouvé en chômage » exclut les périodes d'incapacité physique3. C'est la période dite de maternité qui, en cas de grossesse, constitue la période d'incapacité à cette fin, à l'exception bien entendu de toute semaine où l'assurée a touché des prestations ordinaires4.

Dans le même sens, ne font pas partie de la période de chômage le temps requis pour se marier et déménager, le séjour en prison ou dans un couvent ainsi que le temps perdu à cause d'un conflit collectif. Par contre, on tient compte de toute autre période d'indisponibilité faisant suite à un choix personnel; il peut s'agir, par exemple, d'un voyage outre-mer, de travaux ménagers, d'une décision de prolonger son indisponibilité au delà du temps nécessaire au mariage et au déménagement ou au delà de la période dite de maternité5.

Lorsque la période de chômage est entrecoupée d'une courte période d'emploi, on tiendra compte non d'une partie mais de toute la période de chômage. On ne saurait évidemment qualifier de chômage une période où l'assuré est occupé à plein temps aux travaux de la ferme.

La notion de « période de chômage raisonnable » est valable pour tous les assurés, même ceux qui exercent des occupations hautement spécialisées6. Ce qui représente un délai raisonnable n'est pas une période fixe et varie suivant chaque cas. On ne doit pas l'interpréter de façon à verser des prestations pendant de longs mois. Une période de trois semaines, augmentée suivant les années d'expérience s'il s'agit d'un travailleur spécialisé, servira de point de départ. Cette période sera rallongée ou raccourcie suivant la présence ainsi que l'importance de facteurs qui suivent, ou suivant l'absence de ceux-ci. Une fois écoulée la période ainsi calculée, on s'attendra à ce que l'assuré soit disposé à accepter du travail d'un genre différent comportant des conditions moins favorables.

Les facteurs qui suivent ont pour effet de rallonger la période : une recherche d'emploi intensive7, une diminution considérable de salaire que comporte l'offre d'un emploi permanent, le contraste frappant entre les deux genres d'occupation8, l'ouverture prochaine de la saison en regard de l'occupation ordinaire9, les aptitudes exceptionnelles d'une personne, le fait d'habiter une région où abondent les possibilités d'emploi ou d'être prêt à aller travailler au loin.

Les facteurs qui suivent ont pour effet de raccourcir la période : un changement nécessité par l'état de santé ou l'âge avancé, la morte-saison ou une pénurie d'emplois dans une région ou en regard de l'occupation ordinaire, le retour prochain aux études, un séjour temporaire dans une région, le peu d'efforts faits afin de trouver du travail et de fortes exigences quant à sa disponibilité, la courte durée de l'emploi proposé, un changement permanent au sein d'un secteur d'activités.
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  1. LAE 27(3);
  2. Index de jurisprudence/refus d'emploi/convenable/définition/;
  3. Index de jurisprudence/refus d'emploi/état de santé/;
  4. LAE 22;
  5. Index de jurisprudence/disponibilité/champ d'application/vs refus d'emploi/;
  6. Index de jurisprudence/refus d'emploi/délai raisonnable/;
  7. Index de jurisprudence/refus d'emploi/recherche d'emploi/;
  8. Index de jurisprudence/refus d'emploi/genre différent et baisse de salaire/;
  9. Index de jurisprudence/refus d'emploi/emploi en perspective/.

9.4.5 Bons employeurs

Ce qu'il faut entendre par « bons employeurs »1 n'a jamais été énoncé. Au sens que le qualificatif revêt dans le dictionnaire, un bon employeur est celui « qui fait bien son métier ou son travail, tient bien son rôle ».

A moins d'une indication précise du contraire, tout employeur est présumé être un bon employeur2. Il s'ensuit que les conditions de travail, y compris les taux de rémunération, qu'on trouve à son établissement sont censées être celles admises par les bons employeurs.

Lorsqu'on se trouve en présence d'affirmations sérieuses voulant que l'employeur proposé ne soit pas un bon employeur, il revient à la Commission de faire enquête. Un roulement élevé de main-d'oeuvre, la formulation répétée de griefs3, des taux de rémunération largement inférieurs à ceux payés dans les environs4, des locaux délabrés5 ou l'insatisfaction qui règne à un établissement sont des indices dont on peut tenir compte. Suivant que ces données pèsent plus pour ou contre l'employeur, on dira que les conditions de travail qu'il offre sont autant ou moins favorables que celles admises par les bons employeurs.
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  1. LAE 27(2)b); LAE 27(3);
  2. Index de jurisprudence/refus d'emploi/employeur/définition/;
  3. Index de jurisprudence/refus d'emploi/objections contre l'employeur/;
  4. Index de jurisprudence/refus d'emploi/salaire/;
  5. Index de jurisprudence/refus d'emploi/conditions dangereuses/; Index de jurisprudence/refus d'emploi/conditions de travail/.

9.4.6 Taux courant de rémunération

L'expression « taux courant » ne figure pas dans la loi. En langage pratique, elle est souvent utilisée pour désigner « le taux de rémunération admis par les bons employeurs »1. Il paraît évident que le taux courant ou un taux supérieur est nécessairement l'un de ceux admis par les bons employeurs; de là à dire que l'emploi est de ce fait convenable, il n'y a qu'un pas2.

En une occasion, le taux courant a été défini comme étant le taux moyen versé en regard d'une occupation donnée. Il a même parfois été décidé qu'un emploi n'était pas convenable parce que le taux de rémunération offert était inférieur au taux courant. Il reste que ces deux expressions ne sont pas nécessairement équivalentes. Dire qu'elles le sont, ce serait dire que la grande proportion des employeurs qui versent des taux de rémunération en deçà d'une moyenne, calculée plus ou moins arbitrairement et on ne sait trop comment, ne sont pas, pour cette unique raison, de bons employeurs.

Il est évident qu'un emploi n'est pas convenable s'il comporte un taux de rémunération inférieur à celui que prévoit un décret, une ordonnance ou autre loi en cours. Par contre, un taux n'est pas inacceptable simplement parce qu'il est inférieur à ce que versent les grandes compagnies ou inférieur au taux reconnu par les syndicats.

De nos jours, pour ce qui est de la plupart des emplois, les taux de rémunération ainsi que les autres conditions de travail sont régis soit par convention collective, soit par décret, soit par une législation fédérale ou provinciale quelconque. Un employeur qui reconnaît ses obligations et s'en acquitte volontiers ne saurait être exclu du rang des bons employeurs uniquement parce que d'autres, peut-être des meilleurs, offrent des conditions plus avantageuses.

De nombreux métiers et professions commandent des taux de rémunération fondés sur les aptitudes et l'expérience de l'employé. Il se peut qu'un employeur ne soit pas tenu légalement de reconnaître de tels atouts mais, s'il ne le fait pas, il ne saurait être vu comme étant un bon employeur. Ainsi, l'emploi offert à un ouvrier qualifié n'est pas convenable si le taux de rémunération s'y rattachant est celui d'un débutant.
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  1. Index de jurisprudence/refus d'emploi/salaire/;
  2. LAE 27(2); Index de jurisprudence/refus d'emploi/convenable/définition/.

9.4.7 Conflit collectif

Un emploi n'est pas convenable s'il s'agit « d'un emploi inoccupé du fait d'un arrêt de travail dû à un conflit collectif »1.

Au chapitre traitant des conflits collectifs, on trouve la définition des expressions « arrêt de travail » et « conflit collectif »2.

En somme, personne n'est tenu d'agir comme briseur de grève. S'il n'est pas survenu d'arrêt de travail au lieu de travail proposé, l'emploi est convenable3. De même, lorsque le poste offert n'est pas l'un de ceux ordinairement occupés par les travailleurs prenant part au conflit, l'emploi est convenable même s'il existe un conflit et un arrêt de travail sur les lieux4. Par ailleurs, selon la jurisprudence, on doit conclure que l'assuré a un motif valable de refuser l'emploi lorsqu'on sait qu'un arrêt de travail est imminent5.

Dans un cas donné, l'emploi temporaire offert aux grévistes par l'employeur après qu'il eut fermé définitivement ses locaux a été jugé non convenable6.
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  1. LAE 27(2)a);
  2. voir 8.2.1, « Définition »; voir 8.4.1 « Définition »;
  3. Index de jurisprudence/refus d'emploi/conflit collectif/;
  4. Index de jurisprudence/refus d'emploi/motif valable/;
  5. Index de jurisprudence/refus d'emploi/conflit collectif/;
  6. Index de jurisprudence/refus d'emploi/convenable/définition/.