Végétaux > Biotechnologie / VCN > Dissémination en milieu non confiné > Documents sur la biologie Document de biologie BIO1994-09 :
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Partie A - | Généralités | |
A1. | Contexte | |
A2. | Portée | |
Partie B - | Biologie du B. napus | |
B1. | Description générale, utilisation agricole et origine de l'espèce | |
B2. | Aperçu des méthodes culturales utilisées pour le B. napus oléagineux | |
B3. | Biologie de la reproduction du B. napus | |
B4. | Centres d'origine de l'espèce¹ | |
B4.1 Origine géographique du B. oleracea | ||
B4.2 Origine géographique du B. rapa | ||
B4.3 Origine géographique du B. montana | ||
B4.4 Origine géographique du B. napus | ||
B5. | Le B. napus cultivé, comme mauvaise herbe spontanée | |
B6. | Résumé de l'écologie du B. napus et de ses espèces ancestrales | |
Partie C - | Espèces voisines du B. napus | |
C1. | Hybridation interspécifique et intergénérique | |
C2. | Risque d'introgression génétique du B. napus vers les espèces voisines | |
C3. | Répartition du B. napus et des espèces voisines au Canada | |
C4. | Agroécologie des mauvaises herbes voisines du B. napus | |
Partie D - | Interactions possibles entre le B. napus et d'autres organismes | |
Tableau 1. | Interactions possibles de B. napus avec d'autres formes de vie pendant son cycle de vie | |
Partie E - | Bibliographie |
L'Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA) réglementé les essais au champ, au Canada, de végétaux à caractères nouveaux (VCN). Le VCN est une variété ou un génotype de végétal possédant des caractéristiques ni familières ni essentiellement équivalentes à celles présentes dans une population distincte et stable d'une espèce cultivée au Canada, et qui ont été volontairement sélectionnées, créées ou introduites dans une population de cette espèce par une modification génétique particulière. La « familiarité » équivaut à la connaissance des caractéristiques d'une espèce végétale et à l'expérience des utilisations de cette espèce au Canada. L' « équivalence essentielle » est l'équivalence d'un caractère nouveau, à l'intérieur d'une espèce particulière, quant à son utilisation particulière et à sa sûreté pour l'environnement et la santé humaine, aux caractères de cette même espèce déjà utilisée et jugée sûre au Canada sur la base d'arguments scientifiques solides.
Les VCN comprennent à la fois les produits de la technologie de l'ADN recombinant et les végétaux obtenus par les méthodes classiques de sélection. Les VCN doivent être soumis à des essais au champ réglementés si leurs caractères nouveaux risquent de soulever des préoccupations. Il arrive en effet que ces caractères, leur utilisation ou leur présence dans certaines espèces végétales soient jugés : (1) peu familiers par rapport aux produits déjà sur le marché; (2) essentiellement différents des types végétaux semblables familiers, déjà utilisés et considérés comme sûrs.
Avant que la dissémination d'un VCN en milieu ouvert soit autorisée, une évaluation du risque environnemental doit être effectuée. Les lignes directrices réglementaires intitulées Critères d'évaluation du risque environnemental associé aux végétaux à caractères nouveaux définissent les critères et les renseignements sur lesquels doit être fondée cette évaluation, pour que la sécurité de l'environnement soit garantie même si la dissémination se fait en milieu ouvert.
Le présent document est un cahier parallèle à la Directive 94-08 (Dir94-08), intitulée « Critères d'évaluation du risque environnemental associé aux végétaux à caractères nouveaux ». Il fournit des renseignements de base sur la biologie du Brassica napus L., sur ses centres d'origine, sur les espèces voisines et sur le risque d'introgression génétique du B. napus vers ces espèces. Le présent document fournit également des précisions sur les organismes avec lesquels le B. napus a des interactions.
Le présent cahier, portant sur une seule espèce, servira de guide pour l'obtention de certains renseignements exigés dans la partie D de la Dir94-08. Il permettra notamment de déterminer si les nouveaux produits géniques du VCN induisent chez celui-ci des interactions différentes ou modifiées avec d'autres espèces. Ces interactions pourraient faire du VCN une mauvaise herbe agricole, ou une plante envahissant les milieux naturels ou nuisant de quelque autre façon à l'environnement.
Les conclusions tirées dans le présent document au sujet de la biologie du B. napus ne visent que les végétaux non modifiés appartenant à cette espèce. En effet, si la plante est modifiée, les nouveaux caractères peuvent amener de nouvelles caractéristiques biologiques qui risquent d'avoir un impact sur l'environnement en cas de dissémination en milieu ouvert.
Le colza (B. napus L.) est cultivé depuis très longtemps. Il appartient à la famille des Crucifères, ou Brassicacées, c'est-à-dire à la famille de la moutarde. Le mot « Crucifères » signifie « qui portent une croix » et fait allusion à la forme des fleurs, dont les quatre pétales sont disposés en forme de croix. Le B. napus a des feuilles vert bleuâtre foncé, glauques, glabres ou portant quelques poils épars près de la marge, partiellement embrassantes. La tige est assez ramifiée, mais ce caractère varie selon les variétés et les conditions du milieu; les ramifications prennent naissance à l'aisselle des feuilles supérieures de la tige, et chacune se termine par une inflorescence. L'inflorescence est une grappe allongée de fleurs jaunes rassemblées aux extrémités mais ne dépassant pas les bourgeons terminaux. Les fleurs s'ouvrent successivement à partir de la base de l'inflorescence. (Musil, 1950).
Il existe deux types de colza : le colza oléagineux, dont le canola est un type aux qualités particulières, et le rutabaga, ou navet du Québec. On peut subdiviser le type oléagineux en formes de printemps et d'hiver. On mentionne explicitement le colza oléagineux et la moutarde dans des textes sanskrits datant de 2000 à 1500 ans avant Jésus-Christ et dans des écrits grecs, romains et chinois remontant aux années 500 à 200 avant notre ère (Downey et Röbbelen, 1989). En Europe, on croit que la culture du colza a commencé au début du Moyen Âge et qu'elle est devenue commerciale aux Pays-Bas dès le 16e siècle. À cette époque, l'huile de colza servait principalement de combustible à lampe. Plus tard, on l'a utilisée comme lubrifiant des moteurs à vapeur. L'huile de colza était largement utilisée comme huile comestible en Asie, mais, pour qu'elle devienne importante en Occident, il fallu attendre l'amélioration de sa qualité et des techniques de transformation. Depuis la Deuxième Guerre mondiale, par suite de l'amélioration de la qualité de l'huile et du tourteau, la production de colza a augmenté considérablement en Europe et au Canada. La Chine, l'Inde, l'Europe et le Canada sont maintenant les producteurs les plus importants, mais la plante pourrait aussi être cultivée avec succès en Australie, aux États-Unis et en Amérique du Sud.
Au Canada, les principales régions productrices sont les Prairies (Manitoba, Saskatchewan et Alberta) ainsi que la région de la rivière de la Paix (Alberta et Colombie-Britannique). Il y a aussi une certaine production en Ontario et au Québec. Aujourd'hui, deux espèces de Brassica ont des variétés de qualité canola : le B. napus, qui fait l'objet des présentes lignes directrices, et le B. rapa (syn. B. campestris). La première espèce a besoin d'un plus grand nombre de jours sans gel que la seconde pour arriver à maturité. En effet, les variétés de B. napus exigent en moyenne 105 jours de culture du semis à la récolte, tandis que les variétés de B. rapa n'ont besoin en moyenne que de 88 jours. Par conséquent, les variétés de B. napus ont tendance à être cultivées au sud des régions productrices de B. rapa, c'est-à-dire dans le centre de l'Alberta et de la Saskatchewan et dans le sud du Manitoba.
Le B. napus oléagineux est une culture d'été frais qui ne tolère pas autant la sécheresse que les céréales. Il s'adapte à toute une gamme de conditions et vient bien dans divers types de sols, à condition que l'eau et l'engrais soient en quantité suffisante. La température de l'air et du sol influe sur la croissance et la productivité du canola. La température optimale de croissance et de développement se situe juste au-dessus de 20°C, et la plante doit idéalement être cultivée à une température variant de 12&°C à 30°C. Après l'émergence, les plantules préfèrent une température relativement fraîche jusqu'au moment de la floraison; à partir de la floraison, une température élevée accélère le développement de la plante et raccourcit ainsi la période qui sépare la floraison de la maturité.
Étant donné la sensibilité nouvelle aux questions de conservation du sol, il est recommandé de produire le canola en éliminant ou en réduisant au minimum le travail du sol : la majeure partie des bases de plantes et des débris végétaux sont laissés au champ, ce qui aide à retenir la neige, à réduire le ruissellement des eaux de fonte, à prévenir l'érosion et à augmenter la rétention d'eau par le sol. Cependant, pour être efficaces, les techniques à travail du sol réduit doivent être complétées par un programme systématique de lutte contre les mauvaises herbes.
Les mauvaises herbes peuvent constituer un des facteurs qui limitent le plus la production du colza. À cet égard, de nombreuses crucifères causent souvent des problèmes : la moutarde des champs, le thlaspi des champs, la bourse-à-pasteur, la neslie paniculée, la sagesse des chirurgiens, le vélar fausse-giroflée, le vélar d'Orient et la lépidie densiflore. Le colza oléagineux n'est pas capable de concurrencer les mauvaises herbes aux premiers stades de leur croissance, car il pousse lentement et met du temps à couvrir le sol. Il faut donc commencer le désherbage assez tôt, pour éviter les pertes de rendement dues à la compétition. Par ailleurs, de nombreux insectes peuvent ravager les cultures de colza, mais il faut planifier la lutte antiparasitaire de manière à réduire l'application inutile ou coûteuse d'insecticides, à éviter une augmentation de la résistance des insectes à ces produits et à épargner les abeilles et les insectes pollinisateurs indigènes. Les principaux ravageurs du colza oléagineux sont les altises. Les maladies peuvent aussi poser problème dans les grandes zones de production et sont généralement liées aux pratiques culturales et aux facteurs écologiques; un programme phytosanitaire est donc à conseiller.
Dès l'ouverture des premières siliques, le B. napus est généralement fauché juste au-dessous des siliques et déposé en andains. L'application d'un agent dessiccatif réduit l'égrenage prématuré et permet ainsi la récolte en coupe directe.
Il ne faut pas cultiver le colza oléagineux plus d'une année sur quatre dans le même champ, pour éviter l'accumulation de pathogènes, d'insectes et de mauvaises herbes. Les plantes spontanées provenant de cultures antérieures (sarrasin, etc.) et les résidus chimiques d'herbicides sont également des facteurs à considérer au moment du choix d'un champ.
La plupart des cultivars du B. napus cultivés au Canada sont annuels, l'espèce affichant un piètre taux de survie à des températures inférieures à -6°C, bien qu'on produise dans la partie la plus chaude du sud de l'Ontario une certaine quantité du type rustique d'hiver, semé à l'automne. Les ovules sont généralement fertilisés par autopollinisation, bien que des taux d'allofécondation de 20 à 30 % aient été signalés (Rakow et Woods, 1987). Le pollen, lourd et collant, ne peut être porté par le vent à une grande distance. Il est donc transporté par les insectes, et principalement par les abeilles. Dans le cas de plantes situées à proximité l'une de l'autre, la pollinisation croisée peut également résulter du contact entre les grappes de fleurs. Les générations successives sont issues de graines des générations antérieures. On ne signale pour le Canada aucun cas de reproduction asexuée sur le terrain.
Les origines du B. napus (plante amphidiploïde, n = 19) sont obscures. U (1935) a d'abord proposé qu'il y avait eu hybridation naturelle entre les deux espèces diploïdes B. oleracea (n = 9) et B. rapa (syn. campestris) (n = 10), mais les conclusions d'une analyse récente de l'ADN dans les chloroplastes et les mitochondries (Song et Osborn, 1992) donnent à penser que le Brassica montana (n = 9) pourrait être très voisin du prototype commun qui a donné naissance aux cytoplasmes du B. rapa et du B. oleracea. On a aussi suggéré que le B. napus aurait une origine multiple et que la plupart des formes cultivées de cette espèce proviendraient d'un croisement dont le parent femelle serait une espèce très voisine ancêtre du B. rapa et du B. oleracea.
Le chou (B. oleracea) a été cueilli à des fins alimentaires dès le Néolithique (Prakash et Hinata, 1980), et on estime que toutes les formes cultivées du même groupe sont issues de l'espèce sauvage, par mutation, sélection humaine et adaptation. Même si l'origine des divers cultivars n'est pas entièrement comprise, on peut supposer que le chou sauvage est leur ancêtre commun. Les changements dans la structure chromosomique ne semblent pas avoir joué un rôle important dans le développement des nombreux types de cultivars, puisque leur architecture génétique est semblable à celle du type sauvage (Harberd, 1972).
Les formes sauvages du B. oleracea sont des plantes vivaces suffrutescentes (arbustes bas dont les tiges ont une partie inférieure ligneuse et une partie supérieure herbacée). Elles poussent depuis la côte méditerranéenne de la Grèce jusqu'aux côtes atlantiques de l'Espagne et de la France, ainsi que sur les côtes de l'Angleterre et, en petit nombre, dans l'île de Helgoland (Snogerup et al., 1990). On trouve typiquement la forme sauvage sur les falaises de calcaire et de craie, dans les endroits à l'abri des animaux brouteurs. On trouve parfois des plantes isolées sous les falaises, dans les éboulis, où elles poussent entre les autres arbustes, et certaines populations poussent sur les pentes abruptes herbeuses. À Helgoland, on trouve des populations sur les terrains ouverts rocheux.
En Europe et en Amérique du Nord, on a signalé la présence de types cultivés considérés comme échappés de culture, mais ceux-ci ne forment pas de populations pouvant se maintenir par eux-mêmes en dehors des zones cultivées. Le B. oleracea est une introduction récente en Amérique du Nord.
On considère que le B. rapa sauvage (ssp. sylvestris L.) est à l'origine des sous-espèces rapa (navet cultivé) et oleifera (navette). La plante est indigène en Europe, en Russie, en Asie centrale et au Proche-Orient (Prakash et Hinata, 1980), et l'Europe est proposée comme un des centres d'origine de l'espèce. L'origine du type asiatique et proche-oriental suscite un certain débat : on se demande s'il provient d'un centre d'origine indépendant situé en Afghanistan et se serait déplacé vers l'est, où il aurait été cultivé. Prakash et Hinata (1980) suggèrent que le B. rapa ssp. oleifera serait apparu à deux endroits et aurait donné naissance à deux races différentes, une race européenne et une race asiatique.
On trouve typiquement le B. rapa dans les basses terres côtières, dans les zones montagnardes de haute altitude (pentes des vallées perchées des chaînes de montagnes) et dans les zones alpines de haute altitude des sierras. Au Canada, où il a été introduit récemment, on le trouve dans les terrains perturbés, typiquement dans les cultures, les champs, les jardins, les bords de routes et les terrains vagues (Warwick et Francis, 1994).
Le B. montana, ancêtre possible du B. napus (voir ci-dessus), est également une plante vivace suffrutescente. Il est originaire de la région côtière de la Méditerranée, entre l'Espagne et le nord de l'Italie (Snogerup et al., 1990).
L'espèce pousse typiquement sur les falaises de calcaire ou au bas de celles-ci et sur les rochers, les murs et autres substrats semblables, souvent perturbés. On le trouve habituellement dans les régions côtières et sur les îlots rocheux, mais on a signalé sa présence à 1000 mètres d'altitude, assez loin de la mer.
Le B. napus aurait une origine multiple et résulterait de plusieurs hybridations naturelles indépendantes entre le B. oleracea et le B. rapa. L'espèce, et surtout sa forme d'hiver, est devenue en Europe une crucifère jaune commune le long des routes et dans les terrains vagues, les terres cultivées, les ports, les villes, les dépotoirs, les champs arables et les bords de rivières. Dans les îles Britanniques, par exemple, elle est naturalisée dans les endroits où on cultive le colza oléagineux. Le B. napus a été introduit assez récemment au Canada et aux États-Unis, et on le décrit comme une mauvaise herbe occasionnelle et une plante échappée ou spontanée dans les champs cultivés (Munz, 1968; Muenscher 1980). Il pousse typiquement dans les cultures, les champs et les jardins, en bordure des routes et dans les terrains vagues.
Comme chez toute espèce de grande culture, des graines de B. napus peuvent s'échapper au moment de la récolte et demeurer jusqu'au printemps dans le sol, où elles germent avant ou après l'ensemencement de la culture suivante. Dans certains cas, ces plantes spontanées peuvent soumettre la culture ensemencée à une forte compétition, justifiant ainsi des mesures de lutte chimique ou mécanique.
Le problème des plantes spontanées dans les cultures subséquentes est commun à la plupart des espèces de grande culture. Les façons culturales utilisées pour la production de chaque culture ont un rôle important à jouer pour la réduction de ce problème : par exemple, le fait que les plantes aient répandu des graines au moment de la récolte, le réglage de l'équipement servant à la récolte et la vitesse de la récolte elle-même déterminent si une quantité plus ou moins importante de graines est perdue au moment de la récolte. Chez les Crucifères, à cause de la petite taille et du nombre considérable des graines, les mauvaises pratiques culturales peuvent entraîner des problèmes graves d'envahissement des cultures subséquentes par des plantes spontanées. C'est notamment le cas des variétés cultivées du B. juncea et du B. rapa.
Le B. napus et ses ancêtres sont des végétaux d'habitats perturbés. Dans les écosystèmes naturels, ces espèces doivent être considérées comme « pionnières », car elles sont les premières à tirer profit des terres perturbées, où elles concurrencent pour l'espace les végétaux de types semblables. À moins qu'il s'agisse d'un habitat régulièrement perturbé, comme un bord de falaise, de rivière ou de sentier pratiqué par les animaux, les populations de ces types végétaux finissent par être supplantées par des espèces intermédiaires puis par les végétaux formant le climax, comme les graminées vivaces des prairies, et les arbres ainsi que les arbustes vivaces des forêts.
Dans les écosystèmes aménagés, notamment les bords de routes, les zones industrielles et les terrains vagues, de même que dans les terres cultivées, il est possible qu'en raison de leur nature pionnière ces espèces se maintiennent en populations permanentes. Ce sont d'ailleurs les types d'habitats mentionnés pour ces espèces dans les diverses flores du Canada et d'Amérique du Nord. Leur succès dépend donc de leur capacité à concurrencer pour l'espace les autres plantes pionnières, en particulier les mauvaises herbes qui ont de la facilité à s'établir. Leur établissement dépend ensuite de la mesure dans laquelle ces espèces sont adaptées aux conditions climatiques, édaphiques et autres, particulières à chaque lieu.
Dans les systèmes de production végétale, la récolte des graines du B. napus peut être incomplète en raison de mauvaises pratiques culturales, et des quantités importantes de ces graines se retrouvent ainsi dans le sol. Il est alors possible que ces dernières soient à l'origine de mauvaises herbes spontanées dans les cultures subséquentes, notamment si leur densité est élevée.
Le B. napus n'est pas considéré comme une mauvaise herbe nuisible dans l'Arrêté sur les graines de mauvaises herbes de 1986. On ne le mentionne pas comme plante nuisible ou mauvaise herbe des écosystèmes aménagés du Canada, ni comme plante envahissant les écosystèmes naturels. En résumé, rien ne prouve qu'au Canada le B. napus se comporte comme une mauvaise herbe ou comme une plante nuisible.
En examinant l'impact environnemental que pourrait avoir la dissémination en milieu ouvert du B. napus génétiquement modifié, il est important de comprendre le risque d'hybridation interspécifique ou même intergénérique entre cette espèce et les espèces voisines. La production d'hybrides peut entraîner l'introgression de caractères nouveaux dans ces espèces et ainsi avoir les répercussions suivantes :
La présente section pourra faire l'objet de mises à jour à mesure que de nouvelles données seront disponibles. Selon la teneur des renseignements de base du présent document, le demandeur devra évaluer le risque environnemental associé à un éventuel flux génique.
Bien que de nombreux croisements interspécifiques et intergénériques aient été réalisés entre le B. napus et les espèces voisines (Warwick et Black, 1993), nombre d'entre eux ont nécessité une intervention comme la culture d'ovaires ou d'ovules, le sauvetage d'embryons et la fusion de protoplastes. La liste suivante des hybrides interspécifiques et intergénériques obtenus par croisement du B. napus avec des espèces voisines est tirée de l'étude approfondie de Warwick et Black (1993).
Les hybridations suivantes ont été observées dans les études sur l'allofécondation au champ de Bing et al. (1991) :
Les hybridations suivantes ont été obtenues par pollinisation à la main (généralement par émasculation du plant femelle, suivie d'un transfert de pollen du plant mâle à l'aide d'un pinceau) :
Les espèces voisines du B. napus mentionnées ci-dessus peuvent également former entre elles des hybrides résultant de la reproduction sexuée :
Pour qu'un caractère s'intègre au génome d'une espèce, il faut que les hybrides intermédiaires soient rétrocroisés à des plantes de l'espèce et que la descendance de ces croisements soit viable et fertile.
Le S. arvensis (moutarde des champs) est peut-être la pire des espèces de mauvaises herbes voisines du genre Brassica, en particulier dans les principales régions productrices de canola du Manitoba, de la Saskatchewan et de l'Alberta. Une plante issue du croisement entre le B. juncea et le S. arvensis a été rétrocroisée au B. juncea et au S. arvensis (Bing et al. 1991). Les plantes résultantes étaient faibles ou stériles et ne produisaient aucune graine après pollinisation libre; on peut donc croire que ce croisement n'entraînerait pas l'introduction stable de caractères transférés naturellement dans l'une ou l'autre espèce.
Deux autres espèces de mauvaises herbes, le radis sauvage (Raphanus raphanistrum), plus abondant dans l'est du Canada que dans la région des Prairies, et la moutarde des chiens (Erucastrum gallicum), assez abondante localement dans les terres cultivées des provinces des Prairies, ont formé des hybrides avec le B. napus comme parent femelle. Des travaux sont en cours à Saskatoon (G. Séguin-Swartz, 1993, communication personnelle), qui visent à déterminer si les hybrides F1 sont viables, s'ils produisent du pollen fertile pouvant être rétrocroisé à l'un ou l'autre des parents et s'il est possible d'obtenir des populations stables. D'autres études prévues visent à déterminer si l'allofécondation naturelle peut avoir lieu au champ.
Des hybrides issus des croisements D. muralis x B. napus et D. erucoides x B. napus étaient androstériles (Ringdahl et al., 1987).
Le même résultat a été signalé pour le rétrocroisement d'hybrides résultant du croisement B. nigra x B. napus.
Bing et al. (1991) ont suggéré que, parmi les croisements qu'ils avaient tentés, il était possible pour des hybrides issus de croisements entre le B. napus, le B. juncea et le B. rapa de produire des semences viables pouvant survivre jusqu'à la génération suivante. Ces trois espèces sont communément cultivées pour la production de canola et de moutarde.
Les hybrides réussis ayant le B. napus comme parent femelle méritent toujours d'être étudiés quant aux possibilités de flux génique, car ils risquent d'agir comme ponts génétiques.
Parmi les espèces énumérées ci-dessus, le B. carinata et le Hirschfeldia incana ne sont pas signalés pour le Canada (Warwick, 1993), et le Diplotaxis erucoides est rare, limité à la Gaspésie, au Québec. Le B. oleracea, à l'exception de ses types sauvages dans les habitats originaux d'Europe, est rarement présent à l'extérieur des zones cultivées. Parmi les autres espèces, on signale les suivantes :
Parmi les espèces voisines traitées, le S. arvensis et le R. raphanistrum sont considérées comme mauvaises herbes nuisibles primaires dans l'Arrêté sur les graines de mauvaises herbes de 1986, tandis que l'E. gallicum y figure comme mauvaise herbe nuisible secondaire. Les trois espèces sont sans doute les mauvaises herbes les plus envahissantes des terres cultivées. Toutes sont relativement faciles à enrayer dans les cultures d'espèces autres que les Brassica, par l'utilisation d'herbicides sélectifs.
L'abondance de ces trois espèces dans les terres cultivées dépend en partie des pratiques culturales. En effet, les systèmes de culture et les façons culturales peuvent avoir un effet considérable sur l'abondance de ces mauvaises herbes. Mentionnons entre autres l'adoption récente de systèmes de production végétale sans travail du sol ou à travail du sol minimal ainsi que l'abandon de la jachère de labour comme moyen de conservation des sols.
Les espèces susmentionnées croissent toutes dans des habitats perturbés. Leur succès dépend de leur capacité à concurrencer pour l'espace les autres espèces de colonisation primaire et notamment les mauvaises herbes réussissant à envahir les mêmes habitats. Cette capacité dépend à son tour de l'adaptation de chaque espèce aux conditions climatiques, édaphiques et autres, particulières à l'endroit.
Les renseignements du tableau 1 visent à aider le demandeur à déterminer les impacts possibles de la dissémination du VCN sur les organismes non visés mais ne devraient pas être considérés comme étant exhaustifs. En cas d'impact important du VCN sur tout organisme visé ou non visé, il peut être nécessaire d'évaluer les effets secondaires de cet impact.
Autre organisme | Type d'interaction avec B. napus (Pathogène; Symbiote ou organisme utile; Consomateur; Transfert de gène) |
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Albugo candida | Pathogène |
Alternaria spp. | Pathogène |
Botrytis cinerea | Pathogène |
Erysiphe spp. | Pathogène |
Leptosphaeria maculans | Pathogène |
Peronospora parasitica | Pathogène |
Plasmodiophora brassicae | Pathogène |
Pythium debaryanum | Pathogène |
Rhizoctonia solani | Pathogène |
Sclerotinia sclerotiorum | Pathogène |
Xanthomonas spp. | Pathogène |
Virus de la mosaïque du navet | Pathogène |
Mycoplasme jaune de l'aster | Pathogène |
Pollinisateurs | Symbiote ou organisme utile; Consomateur |
Champignons mycorhiziens | Symbiote ou organisme utile |
Oiseaux | Consomateur |
Animaux brouteurs | Consomateur |
Microbes du sol | Symbiote ou organisme utile |
Vers de terre | Symbiote ou organisme utile |
Insectes terricoles | Consomateur |
autres B. napus | Transfert de gène |
B. rapa | Transfert de gène |
B. juncea | Transfert de gène |
B. nigra | Transfert de gène |
Raphanus raphanistrum | Transfert de gène |
Erucastrum gallicum | Transfert de gène |
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Warwick, S. I. and A. Francis (1994) Guide to the Wild Germplasm of Brassica and Allied Crops, Part V: Life History and Geographical Data for Wild Species in the Tribe Brassiceae (Cruciferae). Technical Bulletin 1994, Centre for Land and Biological Resources Research, Agriculture and Agri-Food Canada.
Wojciechowski, A. (1985) Interspecific hybrids between Brassica campestris and B. oleracea L. 1. Effectiveness of crossing, pollen tube growth, embryogenesis. Genetica Polonica 26: 423-436.
Ce bulletin est publié par le Bureau de la biosécurité végétale (BBV). Pour de plus amples renseignements, prière de communiquer avec le BBV :
Bureau de la biosécurité végétale
Agence canadienne d'inspection des aliments
59, promenade Camelot
Ottawa (Ontario) K1A 0Y9
Téléphone: (613) 225-2342
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