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Document de biologie BIO2002-01:
La biologie du Beta vulgaris L. (Betterave à sucre)

Cahier parallèle des Critères d'évaluation du risque environnemental associé aux
végétaux à caractères nouveaux


Table des matières

Partie A - Généralités
A1. Contexte
A2. Portée
Partie B - Biologie du B. vulgaris
  B1. Description générale
B2. Utilisation agricole
B3. Centres d'origine de l'espèce
B4. Aperçu des méthodes d'amélioration, de production semencière et de production agricole pour la betterave à sucre
  B5. Biologie de la reproduction du B. vulgaris
  B6. Présence du B. vulgaris cultivé comme mauvaise herbe spontanée
  B7. Résumé de l'écologie du B. vulgaris
Partie C - Espèces voisines du B. vulgaris
  C1. Hybridation interspécifique et intergénérique
  C2. Risque d'introgression génétique du B. vulgaris vers les espèces voisines
  C3. Répartition des espèces voisines du B. vulgaris au Canada
Partie D - Intéractions possibles entre B. vulgaris et d'autres organismes
    Tableau 1. Taxinomie du genre Genus Beta
    Tableau 2. Exemples d'interactions possibles entre le B. vulgaris et d'autres organismes durant son cycle de vie
Partie E - Remerciements
Partie F - Bibliographie

Partie A - Généralités

A1. Contexte

L'Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA) réglemente les essais au champ, au Canada, de végétaux à caractères nouveaux (VCN). Le VCN est une variété ou un génotype de végétal qui possède des caractéristiques ni familières ni essentiellement équivalentes à celles présentes dans une population distincte et stable d'une espèce cultivée au Canada et qui ont été volontairement sélectionnées, créées ou introduites dans une population de cette espèce par une modification génétique particulière. La familiarité équivaut à la connaissance des caractéristiques d'une espèce végétale et à l'expérience des utilisations de cette espèce au Canada. L'équivalence essentielle est l'équivalence d'un caractère nouveau, à l'intérieur d'une espèce végétale particulière, quant à son utilisation particulière et à sa sûreté pour l'environnement et la santé humaine, aux caractères de cette même espèce déjà utilisée et jugée sûre au Canada sur la base d'arguments scientifiques solides.

Les VCN peuvent résulter d'une méthode classique de sélection ou d'une technique de recombinaison de l'ADN. Il faut les soumettre à des essais au champ réglementés lorsqu'ils sont jugés 1) peu familiers par rapport aux produits déjà sur le marché; 2) essentiellement différents des types végétaux semblables familiers, déjà utilisés et considérés comme sûrs.

Avant que la dissémination d'un VCN en milieu ouvert soit autorisée, une évaluation du risque environnemental doit être effectuée. La directive réglementaire D94-08 Critères d'évaluation du risque environnemental associé aux végétaux à caractères nouveaux définit les critères et les renseignements sur lesquels doit être fondée cette évaluation, pour que la sécurité de l'environnement soit garantie même si la dissémination se fait en milieu ouvert.

A2. Portée

Le présent document est un cahier parallèle au document Dir94-08, « Critères d'évaluation du risque environnemental associé aux végétaux à caractères nouveaux ». Il fournit des renseignements de base sur la biologie du Beta vulgaris L., sur ses centres d'origine, sur les espèces voisines et sur le risque d'introgression génétique depuis le B. vulgaris vers ces espèces. Le présent document fournit également des précisions sur les organismes avec lesquels le B. vulgaris a des interactions.

Le présent cahier, portant sur une seule espèce, servira de guide pour l'obtention de certains renseignements exigés dans la Partie D du document Dir94-08. Il permettra notamment de déterminer si les nouveaux produits géniques du VCN induisent chez celui-ci des interactions significativement différentes ou modifiées avec d'autres espèces. Ces interactions pourraient faire du VCN une mauvaise herbe agricole, ou une plante envahissant les milieux naturels ou nuisant de quelque autre façon à l'environnement.

Les conclusions tirées dans le présent document au sujet de la biologie du B. vulgaris ne visent que les végétaux non modifiés appartenant à cette espèce.

Partie B - Biologie du B. vulgaris

B1. Description générale

La betterave à sucre (B. vulgaris L.) appartient à la famille des Chénopodiacées, qui compte environ 1400 espèces réparties en 105 genres (Watson et Dallwitz, 1992). Les membres de cette famille sont des plantes dicotylédones, en général herbacées. Les espèces de cette famille présentant une grande valeur économique sont d'une part la betterave à sucre, la betterave fourragère, la betterave potagère et la poirée ou bette à carde, appartenant toutes au B. vulgaris, et d'autre part l'épinard (Spinacia oleracea).

La betterave à sucre est en général une plante bisannuelle, mais dans certaines conditions elle peut se comporter comme une espèce annuelle (Smith, 1987). La plante produit la première année une grosse racine pivotante charnue et, la deuxième année, une tige produisant des graines. En général, la betterave est plantée au printemps et récoltée à l'automne de la même année. Pour la production de semences, cependant, la betterave doit survivre à une période hivernale de basses températures comprises entre 4 et 7°C (vernalisation) pour que la racine monte en graines la saison suivante et que le stade reproductif soit déclenché (Smith, 1987).

Pendant la première année (stade végétatif), la plante se caractérise par des feuilles glabres de forme ovale à cordée, de couleur vert foncé. Les feuilles forment une rosette à partir d'une tige souterraine. Une racine charnue à peau blanche se développe, avec un renflement prononcé au collet (Duke, 1983). Au cours de la deuxième année (stade reproductif), on observe une élongation de la tige florifère. Cette tige anguleuse forme une inflorescence qui peut atteindre environ 1,2 - 1,8 m de haut. Une grande feuille pétiolée se développe à la base de la tige, avec de petites feuilles; plus haut sur la tige, on trouve des feuilles moins pétiolées et finalement des feuilles sessiles. À l'aisselle des feuilles, des pousses secondaires à croissance indéterminée forment une série de grappes (Forster et al., 1997). Les fleurs de ces grappes sont petites, sessiles et soit isolées, soit réunies en petits glomérules. La betterave à sucre produit une fleur parfaite comprenant un pistil à trois carpelles entouré de cinq étamines et d'un périanthe à cinq sépales étroits. Les pétales sont absents, et chaque fleur est accompagnée d'une étroite bractée verte (Smith, 1987).

L'ovaire forme un fruit enfoui dans la base du périanthe. Chaque fruit contient une seule graine de forme ronde à réniforme. Les ovaires des fleurs d'un même glomérule sont réunis dans le réceptacle commun du glomérule (Duke, 1983). On obtient donc une semence monogerme si la fleur est isolée, et une semence multigerme si deux ou plusieurs fleurs sont réunies en un glomérule (Cooke et Scott, 1993).

B2. Utilisation agricole

Le Canada ne produit pas de semences de betterave. Presque toutes les semences de betterave à sucre importées au Canada proviennent de l'État de l'Oregon, aux États-Unis (Webster, 2001). Les racines sont transformées en sucre blanc, en pulpe et en mélasse destinées à l'alimentation humaine ou animale ou à des fins industrielles. Elles sont rarement utilisées comme matière première. Une racine typique de betterave à sucre est composée de 75,9% d'eau, de 2,6% de non-sucre, de 18,0% de sucre et de 5,5% de pulpe. Dans la fraction sucre, 83,1% est récupéré sous forme de cristaux de saccharose et 12,5% sous forme de mélasse (Bichsel, 1987). Le sucre est un glucide à usages multiples responsable en grande partie de la saveur, de l'arôme, de la texture, de la couleur et du corps d'un grand nombre d'aliments. En plus du sucre pur, les betteraveries produisent également un sous-produit appelé pulpe séchée. Cette pulpe sert d'aliment pour les bovins et les ovins. Elle est produite et expédiée sous forme brute pressée et séchée, sous forme séchée avec la mélasse et sous forme de granules. La mélasse de betterave à sucre est un autre sous-produit important. Il s'agit d'un liquide sirupeux renfermant environ 48% de saccharose, qui ne peut être cristallisé de façon économique. La mélasse de betterave à sucre sert à la production de levure, de produits chimiques, de produits pharmaceutiques et d'aliments composés pour le bétail.

À l'heure actuelle, la betterave à sucre est la principale culture sucrière des régions tempérées du monde. Au Canada, elle est cultivée dans les provinces d'Alberta et d'Ontario. En 1998, 42 000 acres ont été semés en Alberta et 6 500 acres, en Ontario. Comme la superficie cultivée au Canada était significativement plus élevée en 1998 que les années précédentes, il est possible que la superficie cultivée soit en train d'augmenter (OMAFRA, 1998). En 1997, le Canada a produit 650 000 tonnes de betterave à sucre, évaluées à plus de 43 millions de dollars (Canadian Sugar Beet Producers Association, 1997). Au Canada, la production de betterave à sucre représente 10 à 15 pour cent de la consommation totale de betterave à sucre dans ce pays (Fédération canadienne de l'agriculture, 1998).

B3. Centres d'origine de l'espèce

La betterave (genre Beta) serait originaire du Moyen-Orient et plus précisément des vallées du Tigre et de l'Euphrate. La betterave sauvage se serait répandue vers l'ouest, sur le littoral méditerranéen, puis vers le nord, sur les côtes de l'Atlantique. L'isolement géographique de la betterave sauvage dans les îles Canaries est à l'origine de plusieurs espèces distinctes (B. patellaris, B. webbiana et B. procumbens), généralement annuelles (Cooke et Scott, 1993). Par ailleurs, la dispersion des types sauvages vers le nord dans les montagnes de Turquie et d'Iran et dans le Caucase, en Russie, a favorisé l'apparition des espèces B. trigyna, B. lomatogona et B. macrorhiza (Cooke et Scott, 1993), qui sont généralement vivaces. Finalement, la betterave sauvage s'est répandue vers l'est dans presque toute l'Asie de l'Est. La betterave à sucre cultivée est probablement issue de l'amélioration génétique d'une sous-espèce sauvage, la betterave maritime (B. vulgaris ssp. maritima) (Cooke et Scott, 1993).

Les betteraves servent depuis longtemps à l'alimentation du bétail et des êtres humains. La première utilisation de la plante a été signalée au Moyen-Orient. Les premières descriptions de la betterave à sucre comme plante à racine renflée nous viennent de documents datant du XIIe siècle (Toxopeus, 1984). Ce n'est qu'à la fin du XVIIIe siècle que des scientifiques allemands ont commencé à croiser les betteraves pour augmenter la teneur en sucre de leur racine (American Sugar Beet Growers Association, 1998). Les formes originales de la betterave à sucre sont issues de la betterave blanche de Silésie, qui était utilisée comme culture fourragère et ne contient qu'environ 4 % de sucre. Des sélections et des multiplications répétées ont permis d'augmenter sa teneur en sucre jusqu'à celle que nous connaissons actuellement.

B4. Aperçu des méthodes d'amélioration, de production semencière et de production agricole pour la betterave à sucre

C'est l'USDA qui a mis au point les premières techniques d'amélioration de la betterave à sucre, principalement fondées sur l'androstérilité cytoplasmique, les semences monogermes et l'hétérosis (Panella, 1996). À l'heure actuelle, tous les cultivars de betterave à sucre des États-Unis sont des hybrides monogermes. Grâce à l'utilisation de semences monogermes, il est de moins en moins nécessaire d'éclaircir les bouquets de semis, comme dans le cas des semences multigermes (Smith, 1987). Les établissements semenciers privés dominent maintenant le secteur de l'amélioration axée sur les variétés de betterave riches en saccharose, résistantes aux maladies et aux ravageurs et tolérantes aux herbicides.

L'androstérilité cytoplasmique permet au sélectionneur de produire des lignées parentales androstériles ou femelles, qui jouent un rôle clé dans l'amélioration des cultivars hybrides (Forster et al., 1997). En général, on hybride une lignée de type O monogerme (ou lignée mainteneuse) avec l'équivalent androstérile monogerme d'une autre lignée pour obtenir une F1 androstérile monogerme, laquelle servira de parent femelle dans les croisements avec des lignées pollinisatrices diploïdes ou tétraploïdes (Forster et al., 1997).

Les données montrent qu'il existe un rapport inverse entre le poids des récoltes par unité de surface et le pourcentage de sucre produit (Smith, 1987). Ce rapport n'a pas été modifié par les techniques de sélection récurrente et de sélection récurrente réciproque (Hecker, 1978). Au départ, la betterave à sucre était une variété diploïde à 18 chromosomes (2x). L'exploitation commerciale de la polyploïdie chez la betterave à sucre a commencé en Europe, dans les années 1940, avec la mise au point de variétés anisoploïdes. Ces variétés étaient en fait des mélanges d'individus diploïdes, triploïdes et tétraploïdes et résultaient d'une interpollinisation de parents femelles diploïdes et tétraploïdes (Forster et al., 1997). L'utilisation de l'androstérilité cytoplasmique conjointement avec la polyploïdie a permis la production de variétés triploïdes. Présentement, on trouve des variétés diploïdes, triploïdes et anisoploïdes (Forster et al., 1997). Des niveaux de ploïdie plus élevés ont été obtenus expérimentalement, mais ces variétés se sont révélées peu utiles. Au Canada, les principaux cultivars utilisés sont des hybrides diploïdes.

En Europe, pour la production de semence, on commence la première année par obtenir de petites plantes végétatives appelées planchons. L'année suivante, ces planchons sont repiqués au champ où s'effectuera la production de semences. Aux États-Unis, 90 - 95 % de la production de semences est obtenue par culture directe. On sème en août, les semences hivernent et la récolte a lieu en juillet de l'année suivante. En général, dans les zones de production de semences, on sème deux rangs de planchons pollinisateurs suivis de 4 à 8 rangs de planchons androstériles. Après la floraison et la dispersion du pollen, les plantes pollinisatrices sont arrachées afin d'optimiser la qualité des semences.

La betterave à sucre est sensible aux basses températures et est détruite par le gel lorsque les températures s'abaissent au-dessous de -5°C. Au Canada, les producteurs cultivent la betterave à sucre comme une annuelle, sa racine étant récoltée pour le sucre après une croissance de 5 - 7 mois. Le rendement en racines varie de 10 - 35 tonnes par acre, alors que la teneur en saccharose s'établit entre 12 et 20 %, ou davantage. La concentration de sucre dans la racine est affectée par l'azote disponible. L'azote doit être apporté tôt dans la saison, car un surplus d'azote en fin de saison réduit la teneur en sucre. Pour optimiser la réserve de saccharose dans les racines, les plantes doivent épuiser leurs réserves d'azote assimilable 4 à 6 semaines avant la récolte.

La betterave à sucre est un mauvais compétiteur face aux mauvaises herbes, particulièrement en début de saison. Le désherbage est critique depuis le stade des cotylédons jusqu'au stade de 12 feuilles. Dans les champs où l'on n'applique aucune mesure de lutte contre les mauvaises herbes, qui sont constituées d'espèces de grande taille comme le Chenopodium album (chénopode blanc), la perte de rendement peut atteindre 95 % (Scott et Wilcockson, 1976). Toutefois, ceci risque peu de se produire dans une exploitation commerciale, et la réduction de rendement causée par les mauvaises herbes se situe en général entre 6 et 10 % lorsqu'on utilise les méthodes de lutte voulues.

Un certain nombre d'insectes peuvent s'attaquer à la plante en développement. La mouche de la betterave à sucre est un important ravageur en Alberta. Son nombre peut être réduit au moyen d'un pesticide appliqué au sol. Parmi les autres invertébrés nuisibles, on peut mentionner les vers gris, les larves de taupins, l'altise, les criquets, le puceron de la betterave, la tisseuse de la betterave, la pégomyie de la betterave et le nématode à kyste. La rotation des cultures est le principal moyen de lutte contre le nématode à kyste et les maladies affectant la betterave à sucre. La betterave à sucre doit être cultivée qu'une année sur quatre au maximum, et la rotation doit comporter une année de céréales ou de foin (Alberta Agriculture, Food and Rural Development, 1998).

B5. Biologie de la reproduction du B. vulgaris

Les graines ne sont normalement produites que par des sujets bisannuels, au cours de la deuxième année, mais certaines conditions peuvent déclencher une montée en graines prématurée dès la première année.

La floraison se produit environ 5 à 6 semaines après le déclenchement du développement reproducteur et dure plusieurs semaines. Après la déhiscence des anthères, le pollen globuleux est transporté en grande partie par le vent et parfois par des insectes. Le pollen de la betterave à sucre est très sensible à la moisissure, mais, en présence d'un milieu sec, il perd sa viabilité en moins de 24 heures. La pollinisation croisée est la principale méthode de fécondation, à cause de l'absence de synchronie entre la libération du pollen et la réceptivité des stigmates. Étant donné que le pollen peut être transporté par le vent sur de longues distances, les champs de production de matériel géniteur ou de semences commerciales doivent garantir l'isolement des plantes en fleur. Selon les règles de l'Association canadienne des producteurs de semences (ACPS), un périmètre de 400 mètres doit séparer les betteraves servant à la production de semences contrôlées des autres plantes qui risquent d'être une source de contamination par pollinisation croisée.

La betterave à sucre est autostérile, formant peu ou pas de graines dans des conditions strictes d'isolement. Les mécanismes génétiques expliquant ce caractère sont fondés sur la présence de deux séries d'allèles de stérilité multiples (S1 - Sn, Z1 - Zn) (J. R. Stander, 1995). La formation de quelques graines après l'autofécondation, communément appelée pseudo-compatibilité, est attribuable à une dégradation du mécanisme d'incompatibilité (J. R. Stander, 1995). La pseudo-compatibilité se manifeste à divers degrés chez différents génotypes et est fortement reliée aux conditions environnementales, en particulier la température (J. R. Stander, 1995). Il existe un gène d'auto-fertilité qui, lorsqu'introduit, peut produire des sujets autofertiles (Smith, 1987).

B6. Présence du B. vulgaris cultivé comme mauvaise herbe spontanée

Au Canada, la présence du B. vulgaris se limite à la production commerciale de racines dans le sud de l'Alberta et le sud-ouest de l'Ontario. De basses températures et des périodes d'éclairement plus longues peuvent parfois déclencher une montée en graines chez la betterave à sucre et entraîner la formation de graines dès la première année. Cette semence peut se transformer en mauvaise herbe dans les cultures subséquentes.

Les betteraves mauvaises herbes sont des espèces indésirables (de la section Beta du genre Beta) présentes dans les zones cultivées. La betterave mauvaise herbe ne pose pas de problème en Amérique du Nord, mais elle est un des principaux problèmes de mauvaises herbes dans les champs de betterave à sucre d'Europe. En Europe, l'apparition spontanée de betterave mauvaise herbe peut être due à une contamination par du pollen d'espèces annuelles sauvages sexuellement compatibles, ou à la présence de betteraves en montaison, de graines en dormance ou de petites racines laissées dans le champ après la récolte, lesquelles fleuriront la saison suivante si elles ne sont pas éliminées.

Des betteraves spontanées apparaissent parfois au Canada, mais elles ne deviennent pas des mauvaises herbes persistantes. Au Canada, les racines de betterave à sucre ne survivent pas aux basses températures hivernales, et les plantes produites par les graines issues de plantes montées en graines ne restent pas longtemps dans le milieu. L'absence d'espèces voisines annuelles et la présence de basses températures dans les zones canadiennes de culture réduisent la fréquence des betteraves mauvaises herbes. Dans les systèmes de production végétale, les betteraves spontanées sont éliminées par les méthodes culturales normalement utilisées pour les espèces qui succèdent aux betteraves dans la rotation. La betterave à sucre est facile à détruire au moyen de la plupart des herbicides éliminant les plantes à feuilles larges. Cependant, dans certains cas, les herbicides dont l'utilisation est homologuée pour la betterave à sucre peuvent causer des dommages à la culture de betteraves.

B7. Résumé de l'écologie du B. vulgaris

Le B. vulgaris n'est pas un colonisateur primaire des écosystèmes naturels. Les semis de cette espèce ne peuvent pas opposer aux plantes du même type une compétition efficace pour l'espace. Au Canada, les betteraves ne survivent pas longtemps lorsqu'elles ne sont pas en culture, à cause de leur sensibilité au froid et de leur faible capacité de compétition.

Dans les systèmes de production végétale, les plantes spontanées sont de mauvais compétiteurs des cultures utilisées en rotation avec la betterave à sucre. De plus, les betteraves spontanées sont éliminées par les méthodes de production caractéristiques des cultures utilisées en rotation avec les betteraves. De plus, certaines méthodes chimiques et mécaniques permettent de lutter efficacement contre les betteraves spontanées.

Le B. vulgaris ne figure pas comme mauvaise herbe nuisible dans l'Arrêté sur les graines de mauvaises herbes (1986). Il n'est pas signalé comme organisme nuisible ou mauvaise herbe dans les écosystèmes aménagés du Canada, ni reconnu comme plante envahissante des écosystème naturels. En résumé, rien n'indique que le B. vulgaris possède au Canada des caractéristiques de mauvaise herbe ou d'organisme nuisible.

Partie C - Espèces voisines du B. vulgaris

C1. Hybridation interspécifique et intergénérique

Au moment d'évaluer l'impact environnemental que pourrait avoir la dissémination en milieu ouvert du B. vulgaris génétiquement modifié, il est important de comprendre le risque d'hybridation interspécifique ou même intergénérique entre cette espèce et les espèces voisines. La production d'hybrides peut entraîner l'introgression de caractères nouveaux dans ces espèces et ainsi avoir les répercussions suivantes :

  • l'espèce voisine peut se comporter encore plus comme une mauvaise herbe;
  • un caractère nouveau risquant de perturber l'écosystème peut être introduit dans l'espèce voisine.

Le genre Beta, auquel appartient le B. vulgaris, comprend 15 espèces reconnues, réparties en quatre sections : Beta (anciennement Vulgares), Corollinae, Procumbentes (anciennement Patellares) et Nanae (voir le tableau 1).

Il peut y avoir hybridation entre le B. vulgaris et certains membres de la section Beta (c.-à-d. betterave fourragère, betterave potagère, bette à carde ou poirée). Une étude a permis de relever des cas d'hybridation réussie entre le B. vulgaris et des espèces voisines originaires d'Europe de l'Ouest, le B. maritima, le B. macrocarpa et le B. atriplicifolia (BRIDGE, 1993, annexe 2). Les hybrides issus du B. vulgaris et du B. maritima sont fertiles et sont compatibles au niveau des chromosomes (Forster et al, 1997). Les hybrides issus du B. macrocarpa et du B. vulgaris ont donné des mauvaises herbes dans les champs de betterave à sucre en Europe (McFarlane, 1975). D'autres études ont révélé l'existence de barrières génétiques entre ces deux espèces, entraînant la production d'un pollen partiellement stérile et l'avortement de l'embryon chez l'hybride (Abe et al., 1986). De même, l'étude BRIDGE a relevé un faible taux d'hybridation entre le B. vulgaris et le B. macrocarpa (BRIDGE, 1993).

Des hybrides artificiels ont été obtenus avec des espèces de la section Corollinae. Toutefois, de tels hybrides sont hautement stériles et forment rarement des graines lorsqu'ils sont rétrocroisés à la betterave à sucre. En général, il n'est pas nécessaire d'utiliser une espèce pont, mais le B. vulgaris ssp. maritima a permis d'introduire des traits du B. trigyna chez la betterave à sucre.

Il a été très difficile de produire des hybrides artificiels entre la betterave à sucre et les espèces de la section Procumbentes. Les hybrides se nécrosent et meurent au stade de semis. On peut obtenir des plantes viables en greffant des hybrides sur des betteraves à sucre ou en utilisant la betterave fourragère, B. vulgaris ssp. maritima, comme espèce pont. Ces hybrides sont presque complètement stériles, et les sujets fertiles produisent peu de graines lorsqu'ils recroisés avec le B. vulgaris. La stérilité du pollen des générations F1 et BC1 est attribuable à une anomalie de la méiose. Un chromosome retardataire, des fuseaux multiples, des espèces ponts et le rejet d'un chromosome sont souvent responsables de l'infertilité ou de l'avortement de l'embryon. Les chromosomes des espèces de la section Procumbentes ne s'apparient pas à ceux de la section Beta (Van Geyt et. al., 1990). Aucun hybride n'est issu du rétrocroisement entre les betteraves cultivées et le B. nana, de la section Nanae.

En conclusion, dans la famille des Chénopodiacées, la probabilité de croisement entre la betterave à sucre et les espèces des sections autres que Beta est fort peu probable.

C2. Risque d'introgression génétique du B. vulgaris vers les espèces voisines

Selon les données actuelles, le B. vulgaris ne peut s'hybrider qu'avec les autres espèces de la section Beta (De Bock, 1986). Des croisements naturels peuvent se produire entre la betterave cultivée et certains formes sauvages ou spontanées de la section Beta, dans des zones où elles coexistent. Parmi les formes sauvages qui peuvent s'hybrider avec la betterave à sucre, seul le B. vulgaris ssp. maritima et le B. vulgaris ssp. macrocarpa existent en Amérique du Nord. Ces formes ne sont présentes qu'en populations isolées, limitées à la Californie, et ne se trouvent pas à proximité des zones de production de semences de betterave à sucre de cet État.

C3. Répartition des espèces voisines du B. vulgaris au Canada

Aucune espèce sauvage du genre Beta n'est présente au Canada. La présence du B. vulgaris se limite à la production commerciale de racines. Il arrive parfois que des semis ou autres sujets spontanés apparaissent au Canada, mais ils ne deviennent pas des mauvaises herbes persistantes.

Partie D - Intéractions possibles entre B. vulgaris et d'autres organismes

Tableau 1. Taxinomie du genre Genus Beta (d'après DeBock, 1986)

ESPÈCES NOMBRE DE CHROMOSOMES DISTRIBUTION
Section 1: Beta (syn: Vulgares)

B. vulgaris ssp. vulgaris L.

18 Mondiale (cultivée) 1
B. vulgaris ssp. maritima L. 18 Afrique du Nord, Albanie, Allemagne, Belgique, Bulgarie, Danemark, Égypte, Espagne, France, Grèce, Irlande, Israël, Italie, Jordanie, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni, Suède, Syrie, Turquie, Yougoslavie 1
B. atriplicifolia (Rouy) 18 Europe 1
B. patula (Ait.) 18 Portugal 1
B. orientalis (Roth.) 18 Inde (cultivée) 1
Section 2: Corollinae

B. macrorhiza (Stev.)

   

Caucase, Iran, Turquie 3

B. lomatogona (Fish et Mey.) 18, 36 Asie de l'Ouest, Caucase
B. corolliflora (Zos.) 18 Caucase, Iran, Turquie 3
B. trigyna (Wald et Kit.) 36, 45, 54 Asie de l'Ouest, Caucase, Europe de l'Est, sud-est de l'Europe 2
B. intermedia (Bunge) 18 Turquie 3
B. foliosa (Hausskn.)    
Section 3: Nanae

B. nana (Bois. et Held.)

18  

Grèce 3

Section 4: Procumbentes

(syn. Patellares)

B. procumbens (Chr. Sm.)

 

 

18

 

 

Îles Canaries, sud de l'Espagne, nord-ouest de

l'Afrique 3

B. webbiana (Moq.) 18 Îles Canaries, sud de l'Espagne, nord-ouest de

l'Afrique 3

B. patellaris (Moq.) 36 Afrique du Nord, Macaronésie, sud-est de l'Europe. sud-ouest de l'Europe 2

1 D'après Trell, E.E. 1986.

2 D'après Wiersema, J.H and León, B. 1999

3 D'après une publication de l'USDA sur le web, 2001

Tableau 2. Exemples d'interactions possibles entre le B. vulgaris et d'autres organismes durant son cycle de vie

Les renseignements du tableau 2 visent à aider le demandeur à déterminer les impacts possibles de la dissémination du VCN sur les organismes non visés mais ne devraient pas être considérés comme étant exhaustifs. En cas d'impact important du VCN sur tout organisme visé ou non visé, il peut être nécessaire d'évaluer les effets secondaires de cet impact.

Autres organismes
(Nom commun)
Intéraction(s) avec B. vulgaris
(Pathogène, Symbiote ou organisme utile, consommateur et/ou transfers de gènes)
Virus de la frisolée de la betterave Pathogène
Cercospora beticola
(Tache cercosporienne)
Pathogène
Maladies fongiques des semis (p. ex., Pythium ultimum, P. aphanidermatum, Aphanomyces cochlioides) Pathogène
Rhizoctonia solani
(Rhizoctone commun)
Pathogène
Rhizomania
Virus de la rhizomanie de la betterave sucrière (BNYVV)
Pathogène
Virus causant des jaunisses [p. ex. jaunisse grave de la betterave (BYV), jaunisse de la betterave type ouest américain (BWYV), mosaïque de la betterave (BMV)] Pathogène
Pegomya hyoscyami
(Pégomyie de la betterave)
Consommateur
Loxostege sticticalis
(Tisseuse de la betterave)
Consommateur
Euxoa spp.
(Vers gris)
Consommateur
Psylliodes punctulata melsheimer
(Altise)
Consommateur
Metanplus spp.
(Criquets)
Consommateur
Meloidogyne arenaria, M. incognita, M. javanica, M. hapla (Nématodes cécidogènes) Consommateur
Nacobbus aberrans, N.dorsalis (Nématodes cécidogènes) Consommateur
Silpha bituberosa
(Silphe de l'épinard)
Consommateur
Heterodera schachtii
(Nématode à kyste)
Consommateur
Pemphigus populivenae betae
(Puceron de la betterave à sucre)
Consommateur
Tetanops myopaeformis
(Mouche de la betterave à sucre)
Consommateur
Elateridae
(Taupins)
Consommateur
Pollinisateurs Consommateur; Symbiote ou organisme utile
Champignons mycorrhiziens Symbiote ou organisme utile
Oiseaux Consommateur
Animaux brouteurs Consommateur
Microbes du sol Symbiote ou organisme utile
Vers de terre Symbiote ou organisme utile
Insectes du sol Consommateur
Autres Beta spp. (B. vulgaris ssp. maratima, B. vulgaris ssp. macrocarpa) Tranfer de gènes

Partie E - Remerciements

Le présent document a été préparé en collaboration avec AgrEvo Inc., Monsanto Canada Inc. et Novartis Seeds Inc.

Partie F - Bibliographie

Abe, J., J. A. H. Yoshikawa, and C. Tsuda. 1986. Reproductive Barriers in Sugar Beet and Its Wild Relatives of the section vulgaris, the genus Beta. Journal of the Faculty of Agriculture Hokkaido University, vol. 63(1):40-48.

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