2003-08-13 | Volume 16 Numéro 14 | ISSN 1494-1813 | N° d'AAC 2081/F

Canola : situation et perspectives

D'après les prévisions, la production mondiale de canola en 2003-2004 devrait augmenter considérablement par rapport à celle de 2002-2003 qu'avait minée la sécheresse sévère qui régnait alors sur les principales zones productrices. Au Canada, l'amélioration des conditions de croissance en 2003-2004 et une production accrue devraient entraîner une reprise significative de l'exportation et de l'utilisation intérieure. On prévoit que les prix du canola au Canada reculeront de 10 % à 20 % par rapport à ceux de 2002-2003. Le présent numéro du Bulletin bimensuel examine la situation et les perspectives de la production de canola.

Situation

Situation mondiale des oléagineux

En 2002-2003, la production mondiale des sept principales cultures oléagineuses (abstraction faite du lin) a été évaluée par l'USDA (le ministère américain de l'Agriculture) à 327,8 millions de tonnes (Mt), en hausse par rapport à 324,4 Mt en 2001-2002. Cette hausse est attribuable à la production record de soja obtenue en Amérique du Sud, qui a amplement compensé la chute de la production mondiale de graine de coton, d'arachide et de canola/colza. Comme on prévoit un volume exceptionnellement élevé de trituration en 2002-2003, les stocks de fin de campagne des sept principaux oléagineux devraient reculer de 5 % à 38,7 Mt, soit le plus faible niveau depuis 1998-1999.

Situation mondiale du canola/colza

En 2002-2003, on évalue la production de canola/colza à 31,7 Mt, en recul par rapport au volume de 36,0 Mt engrangé l'année précédente. Ce recul s'explique par la faiblesse des volumes récoltés en Chine, au Canada, en Inde et en Australie. Le volume trituré à l'échelle mondiale est estimé à 31,0 Mt, soit en baisse par rapport aux 33,7 Mt de 2001-2002. Ce fléchissement est dû à la raréfaction des stocks et à la hausse du prix des graines oléagineuses. L'Union européenne (UE) échappe à cette situation, de même que la Pologne dans une moindre mesure, en raison de l'expansion des activités de trituration. L' USDA évalue à 4,5 Mt le volume des échanges mondiaux en 2002-2003 alors qu'ils atteignaient 5,8 Mt en 2001-2002. La baisse est attribuable à la rareté des stocks et au prix relativement élevé du canola/colza.

Au Canada, la production de canola prévue pour 2002-2003 est estimée par Statistique Canada (SC) à 3,6 Mt, en baisse par rapport à 4,9 Mt en 2001-2002. Cependant, il se peut que SC majore de 0,5 Mt ses estimations relatives à la production de canola en 2002-2003. Même avec une telle révision à la hausse, il s'agirait de la plus faible production en 10 ans, conséquence de la chute des rendements infligée par la grave sécheresse qui a sévi dans l'Ouest canadien. En outre, les pluies excessives de l'automne ont nui aux travaux de récolte, voire empêché les agriculteurs de finir leur moisson. En raison de la rareté des stocks en 2002-2003, on prévoit que les exportations diminueront de 8 % à 2,3 Mt et que le volume de graines triturées au Canada reculera de 4 % à 2,2 Mt. Les stocks de fin de campagne sont évalués à 0,8 Mt, en baisse par rapport à 1,2 Mt en 2001-2002. Il s'agit également du plus faible volume depuis 1998-1999.

Capacité de trituration et utilisation des oléagineux au Canada

L'industrie de transformation des oléagineux est, en volume, la première industrie primaire de transformation du secteur canadien des céréales et oléagineux. La trituration du canola représente 75 % de la capacité de trituration du pays, l'autre 25 % étant tributaire du soja. Les principales sociétés engagées dans cette activité sont : Archer Daniels Midland Agri-industries Ltd (ADM), par l'intermédiaire de ses usines situées en Ontario et en Alberta; CanAmera Foods (Bunge), qui exploite des usines en Ontario, au Manitoba, en Saskatchewan et en Alberta; Canbra Foods Ltd en Alberta et Cargill en Saskatchewan.

Pendant la plupart de la campagne agricole 2002-2003, l'industrie canadienne de trituration du canola a fonctionné à la moitié de sa capacité environ. Le ralentissement des activités est en grande partie dû à la hausse du prix des graines oléagineuses par rapport à celui du tourteau et de l'huile. Contrairement à l'industrie canadienne de trituration du soja, qui peut s'approvisionner aux États-Unis, l'industrie canadienne de trituration du canola doit livrer concurrence aux exportateurs pour s'approprier les rares stocks de canola, ce qui l'expose dans une certaine mesure aux aléas liés à l'offre intérieure.

Marges de trituration du canola

Les marges de trituration constituent un indice de la rentabilité et de la situation économique générale du secteur de transformation des oléagineux. Par contre, ces marges ne donnent pas nécessairement d'indications sur l'intensité des activités de trituration, car le moment des achats et des ventes effectués par les différentes compagnies ne coïncide pas toujours avec le moment de l'affichage des prix des oléagineux et de leurs dérivés.

On calcule la marge de trituration du canola en soustrayant le prix au comptant d'un lot donné de canola de la valeur du tourteau et de l'huile obtenus à partir de ce lot. Les prix cotés au Chicago Board of Trade (CBoT) pour le tourteau de soja et l'huile de soja servent souvent à déterminer par approximation le prix du tourteau et de l'huile de canola canadiens. Ce prix est ensuite ajusté en fonction du taux de change du dollar canadien par rapport au dollar US. Lorsqu'on utilise le prix du tourteau de soja et de l'huile de soja pour faire ce calcul, on doit tenir compte de la différence entre le soja et le canola relativement à leur rendement en tourteau et en huile, ainsi que de la différence de la teneur en protéines des tourteaux de soja et de canola. Il est important de noter que la marge de trituration de la CBoT ne tient pas compte des frais fixes et des frais variables de chaque usine de trituration. On peut cependant intégrer ces données afin d'obtenir un meilleur indice de la rentabilité d'une usine donnée.

Le marché de l'huile de palme

Le marché des oléagineux est fortement influencé par celui de l'huile de palme du fait que cette dernière peut très bien se substituer à d'autres huiles végétales, en particulier l'huile de soja. Cette relation prend une importance accrue lorsque que la hausse des prix des huiles végétales dépasse la hausse des prix du tourteau protéique, comme ce fut le cas l'an dernier. À titre d'exemple, au cours de la période de 12 mois se terminant en mai 2003, le prix moyen de l'huile de soja a augmenté de 24 %, comparativement à 6 % pour le tourteau de soja. Pareillement, le prix moyen de l'huile de canola a grimpé de 35 %, comparativement à 2 % pour le tourteau de canola. Au cours de la même période, le prix de l'huile de palme a augmenté de 38 %. Dans le passé, les prix des tourteaux protéiques ont joué un plus grand rôle dans la détermination du prix des graines oléagineuses. Cela était particulièrement vrai pour le soja, dont le rendement en tourteau protéique atteint 80 % en poids.

Perspectives

Perspectives mondiales des oléagineux

On prévoit que la production mondiale des sept principales cultures oléagineuses en 2003-2004 s'élèvera à 351,7 millions de tonnes (Mt), en hausse par rapport à 327,8 Mt en 2002-2003. Cette hausse est surtout attribuable à l'augmentation de la production de canola/colza. On prévoit que le volume des échanges et des graines oléagineuses destinées à la trituration atteindront des niveaux inégalés, soit 75 Mt et 288 Mt, respectivement. Les stocks de fin de campagne devraient progresser de 10 % à 42 Mt.

Perspectives mondiales du canola/colza

D'après les prévisions, la production mondiale de canola/colza en 2003-2004 devrait augmenter considérablement, en supposant que les conditions de croissance retournent près de la normale dans les régions touchées par la sécheresse. On s'attend à ce qu'une production record, évaluée à 36,0 Mt, compense largement la diminution des stocks de report. L'approvisionnement accru qui résultera de cette situation risque d'exercer une pression sur les prix en 2003-2004. Les exportations et le rythme des activités de trituration devraient se rapprocher des niveaux observés à long terme.

Chine

En 2003-2004, on prévoit que la production de colza atteindra 11,6 Mt, en hausse par rapport au volume estimatif de 10,6 Mt enregistré en 2002-2003; cette hausse de production est principalement due à l'accroissement des superficies. La demande d'huile de colza de la Chine devrait surpasser l'offre intérieure en 2003-2004. Par conséquent, on prévoit que les importations de canola/colza s'établiront à 0,6 Mt, en hausse par rapport au volume de 0,15 Mt enregistré pour 2002-2003.

Australie

En 2003-2004, on prévoit que la production de canola grimpera à 2 Mt, par rapport au volume de 0,6 Mt enregistré en 2002-2003. Cette hausse s'explique par l'accroissement des superficies. En supposant que les approvisionnements retournent près des niveaux normaux, les exportations devraient atteindre 1,5 Mt, comparativement à 0,5 Mt en 2002-2003.

Le canola transgénique en Australie

Jusqu'à récemment, l'Australie était exempte d'organismes génétiquement modifiés. Ce n'est plus le cas aujourd'hui, et les règles vis-à-vis du canola transgénique varient désormais selon les États. Par conséquent, il est probable que la production de canola se déplacera vers l'État du Victoria, qui est le seul à n'imposer que de faibles obstacles à la culture et à la vente de ce type de canola. Il en est tout autrement dans les États de l'Australie du Sud, de l'Australie de l'Ouest et de la Nouvelle-Galles-du-Sud, où les gouvernements envisagent d'interdire ou de restreindre la distribution commerciale de canola transgénique.

Dans une étude publiée par ABARE, on avance que les avantages agronomiques du canola transgénique compensent largement les inconvénients pour ce qui est de limiter les débouchés commerciaux du canola australien. On affirme également dans cette étude que le canola transgénique nécessite moins d'herbicide et tend à donner de meilleurs rendements que le canola ordinaire.

Inde

La production de colza de 2003-2004 est prévue à 4,6 Mt, en hausse par rapport à 3,6 Mt en 2002-2003, mais en léger repli par rapport à la normale à cause des conditions météorologiques défavorables qui ont prévalu dans certaines régions de production. Les échanges de produits dérivés du colza continueront de se limiter à l'importation de faibles volumes d'huile et à l'exportation de quantités marginales de tourteau. Toutefois, à titre de deuxième producteur d'huiles végétales dans le monde, l'Inde continuera d'exercer de l'influence sur les cours mondiaux des oléagineux. On prévoit que la consommation d'huile végétale de ce pays dépassera 11 Mt en 2003-2004.

Union européenne

Dans l' UE, certaines des cultures de colza d'hiver ont souffert du gel et ont perdu de leur potentiel de rendement. En Allemagne, par exemple, entre 5 % et 10 % de la récolte a été endommagée par le gel, soit une superficie bien supérieure aux 3 % observés en année normale. La production de colza de 2003-2004 est prévue à 9,0 Mt, en recul par rapport à 9,3 Mt en 2002-2003; cette situation est causée par des baisses de production en Allemagne et en France. Les stocks de colza de l' UE sont appelés à diminuer en 2003-2004, à cause de la rareté des stocks de report et de la baisse de production. On s'attend à ce que le volume de colza trituré dans l' UE augmente au cours de la campagne prochaine. Par ailleurs, on prévoit que les exportations atteindront 0,3 Mt, en baisse par rapport au volume estimatif de 0,9 Mt enregistré en 2002-2003.

États-Unis

Aux É.-U., on prévoit que la production de canola s'établira à 750 000 t en 2003-2004, en hausse par rapport à 706 000 t en 2002-2003. En effet, la hausse prévue des rendements devrait amplement compenser le recul de 15 % des superficies, lesquelles devraient atteindre 1,2 millions d'hectares (Mha). La réduction des superficies de canola est attribuable aux facteurs suivants : les coûts de production élevés de la culture du canola; la perspective de recettes accrues permises par des cultures comme le lin; la possibilité de contrats lucratifs de production d'orge brassicole; et l'accroissement de la production de soja au Dakota du Nord, qui était anciennement la première région de production de canola aux États-Unis.

Canada

On prévoit que les superficies de canola augmenteront considérablement en 2003-2004, sous l'effet de la rareté des stocks, des prix attrayants obtenus l'année écoulée et des perspectives encourageantes du canola comparativement aux autres cultures. Les superficies récoltées devraient atteindre 4,6 Mha, en hausse par rapport à 2,9 Mha en 2002-2003. Dans l'hypothèse de rendements inférieurs à la tendance la production devrait atteindre 5,9 Mt, en hausse par rapport au volume de 3,6 Mt enregistré en 2002-2003.

L'augmentation des stocks disponibles liée à la reprise de la production de canola devrait favoriser une augmentation de 12 % dans le volume de canola trituré au Canada; on prévoit que ce volume atteindra 2,5 Mt en 2003-2004. Les exportations de canola devraient aussi augmenter fortement; on prévoit qu'elles atteindront 3,3 Mt, comparativement au volume estimatif de 2,3 Mt en 2002-2003.

Perspectives de marché

Les principaux débouchés pour le canola canadien sont le Japon, le Mexique, la Chine et les É.-U. Les transformateurs de produits alimentaires et les consommateurs sont conscients des bienfaits de l'huile de canola, mais à cause de l'incertitude des approvisionnements, certains transformateurs se sont tournés vers d'autres types d'huile végétale. Cette décision était motivée d'une part par la rareté des disponibilités par suite de sécheresses au Canada et en Australie et d'autre part, par le prix élevé du canola. Certains transformateurs qui ont suivi cette voie ont dû changer les étiquettes de leurs produits en fonction de la nouvelle composition des denrées. Néanmoins, de la même manière que la hausse des prix a permis de freiner efficacement la demande mondiale, vu la rareté de l'offre de canola, le recul des prix prévu pour 2003-2004 aidera l'industrie du canola à reconquérir certains de ces marchés. De plus, à mesure que les consommateurs se sensibilisent de plus en plus aux avantages du canola tant pour la santé que pour la nutrition, la demande de l'huile de canola devrait s'accroître.

Prix

En 2003-2004, on prévoit que le prix du canola atteindra 335-365 $CAN la tonne (/t), comparativement au prix de 413 $CAN /t observé en 2002-2003, prix qui n'avait pas été atteint depuis plusieurs années. Il faut noter que le taux de change du dollar canadien par rapport au dollar US continuera de jouer un important rôle dans l'évolution du prix du canola canadien en 2003-2004, comme ce fut le cas au cours de la campagne 2002-2003. La force du dollar canadien nuit à la capacité de concurrence de l'industrie canadienne du canola sur la scène internationale, et se traduit en bout de ligne par des prix inférieurs pour les producteurs canadiens.

Canola à forte teneur en acide oléique

Les canolas à forte teneur en acide oléique ont été mis au point pour les consommateurs soucieux de leur santé qui souhaitent limiter leur ingestion d'acides gras trans et de gras saturés. Cargill Specialty Canola Oils (CSCO) a récemment homologué ses premières variétés hybrides de canola de spécialité. Les deux nouveaux hybrides, qui présentent une teneur accrue en acide oléique et sont résistants au glyphosate, sont censés présenter un rendement de 13 % supérieur aux variétés équivalentes de canola à pollinisation ouverte, en plus de permettre aux producteurs de toucher une prime pour la teneur accrue en acide oléique. CSCO, qui entrevoit une vive demande pour ces canolas de spécialité, prévoit de proposer des contrats de production dès 2004. La variété Nexera/Natreon développée par Dow affiche également une forte teneur en acide oléique. Le Japon représente un marché cible pour le canola ayant une teneur en acide oléique élevée.

Développement du marché du canola

L'huile de canola représente près de 33 % du marché nord-américain d'huile alimentaire embouteillée et d'assaisonnement à salade, produits qui représentent à leur tour près de 18 % des 10 Mt d'huile végétale consommée annuellement. Le secteur de l'huile embouteillée et de l'assaisonnement à salade n'étant pas appelé à connaître un grand essor, on assiste actuellement à la mise au point d'huiles de canola de spécialité destinées à l'imposant secteur de la transformation alimentaire, qui a connu une croissance exponentielle ces dernières années.

Le canola est reconnu depuis longtemps pour ses bienfaits diététiques. Pour cette raison, les observateurs de l'industrie prévoient que, au cours des cinq prochaines années, le tiers des superficies canadiennes consacrées au canola pourraient être ensemencées avec des variétés présentant des caractéristiques spécialement adaptées aux besoins. Le plus important débouché est l'industrie des services alimentaires et de la friture alimentaire industrielle. Au sein de ce marché, on retrouve les fabricants de croustilles de pomme de terre et les restaurants à menus variés, qui offrent aux consommateurs des choix alimentaires plus sains, par opposition aux aliments préparés avec des huiles hydrogénées, comme cela se faisait jusqu'ici. Afin de favoriser la culture de canola à faible teneur en acide linolénique et à haute teneur en acide oléique, les transformateurs offrent aux agriculteurs des contrats pluriannuels attrayants afin de s'assurer de disposer de stocks suffisants pour répondre à une demande croissante. Ayant pris acte de l'accroissement de la demande de produits destinés à des consommateurs soucieux de leur santé, ADM a lancé un mélange d'huile de cuisson à base de soja et de canola afin d'aider les personnes à maîtriser leur gain de poids. ADM soutient que l'organisme métabolise différemment son produit, appelé Enova, comparativement à d'autres huiles de cuisson présentant les mêmes teneurs en calories et en gras que cette nouvelle huile. Le résultat est qu'une part plus importante de l'huile est convertie en énergie, donc non emmagasinée sous forme de gras. L'huile Enova a été mise au point par la société japonaise Kao; depuis son lancement sur le marché du Japon en 1999, elle s'est hissée au premier rang des huiles de cuisson vendues dans ce pays. Si Enova pouvait saisir 10 % du marché américain des huiles végétales, la demande d'huile de canola augmenterait de près de 320 000 t, ce qui représente environ 0,8 Mt de graines de canola.

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par Stan Spak, analyste des oléagineux pi

Bien que la Division de l'analyse du marché assume l'entière responsabilité de l'information présentée dans ce document; elle tient à reconnaître les organismes suivants qui ont contribué à sa préparation :  Conseil canadien du canola; Statcom; Direction générale des services à l'industrie et aux marchés (AAC).