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Agence de santé publique du Canada
Relevé des maladies transmissibles au Canada

Relevé des maladies transmissibles au Canada
Volume 32 • DCC-1
le 15 février 2006

Une déclaration d'un comité consultatif (DCC)

Comité consultatif de la médecine tropicale et de la médecine des voyages (CCMTMV)*†

Déclaration sur la diarrhée persistante après un voyage

Version PDF
16 Pages - 1.26 MB PDF


Préambule

Le Comité consultatif de la médecine tropicale et de la médecine des voyages (CCMTMV) donne à l'Agence de santé publique du Canada (ASPC) des conseils courants et à jour de nature médicale, scientifique et de santé publique concernant les maladies tropicales infectieuses et les risques pour la santé associés aux voyages internationaux. ASPC reconnaît que les conseils et les recommandations figurant dans cette déclaration reposent sur la pratique méedicale et les connaissances scientifiques les plus récentes et les diffuse dans le but d'informer les voyageurs ainsi que les professionnels de la santé qui sont appelés à leur prodiguer des soins.

Les personnes qui administrent ou utilisent des médicaments, des vaccins ou d'autres produits devraient bien connaître la monographie du produit ainsi que toute autre norme ou instruction approuvée concernant leur usage. Les recommandations relatives à l'usage des produits etles autres renseignements présentés ici peuvent différer de ceux qui figurent dans la monographie out toute autre norme ou instruction aprouvée pertinente établie par les fabricants autorisés. Rappelons que les fabricants font approuver leurs produits et démontrent leur innocuité et leur efficacité uniquement lorsqu'ils sont utilisés conformément à la monographie ou à toute autre norme ou instruction approuvée semblable.

Introduction

La diarrhée est le problème de santé le plus fréquent chez les personnes qui voyagent dans des pays à faible revenu. Un grand nombre de pathogènes entériques sont beaucoup plus courants dans les pays disposant de peu de ressources, et les normes laxistes en matière de qualité de l'eau, d'assainissement et de préparation des aliments augmentent le risque de transmission. Bien qu'on recommande aux voyageurs de prendre des mesures de précaution à l'égard des aliments, de l'eau et de l'hygiène pour réduire au minimum le risque de contracter une infection entérique1, l'efficacité de ces mesures est limitée dans la pratique. Une diarrhée aiguë peut avoir de nombreuses causes, mais les pathogènes bactériens en sont la principale. En règle générale, aucune investigation n'est nécessaire et l'auto-traitement peut être préconisé pour une diarrhée des voyageurs (DV) aiguë. Cependant,même lorsqu'un traitement empirique est amorcé, il convient de faire appel à un médecin pour une investigation et pour la prise en charge du patient dans les plus brefs délais lorsque ce dernier est très malade (p. ex., forte fièvre, prostration, douleurs abdominales intenses), souffre d'une maladie sous-jacente sérieuse, présente un déficit immunitaire ou des selles sanguinolentes. Dans les faits, les épisodes de diarrhée sont généralement spontanément résolutifs après une période variant entre quelques heures et quelques semaines. Cependant, des changements perceptibles dans le transit intestinal persistent souvent très longtemps après le diagnostic de la gastro-entérite bactérienne2,3.

La présente déclaration traite expressément de la diarrhée persistante après un voyage, soit une diarrhée durant ≥ 30 jours, ayant commencé pendant le voyage ou dans les 30 jours suivant le retour d'un voyage, généralement dans un pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire. Des articles publiés en anglais, en français et en espagnol sur le sujet entre octobre 1990 et août 2005 ont été retracés dans la base de données MEDLINE à l'aide des mots clés « diarrhea » et « travel »; une recherche manuelle a également été effectuée pour retrouver les articles pertinents cités dans les bibliographies et les travaux personnels des auteurs.

Le taux d'incidence de la diarrhée persistante de ≥ 30 jours chez les voyageurs se situerait entre 1 % et 3 % selon plusieurs rapports4,5. L'affection touche tant les enfants que les adultes6 et, en fait, elle peut être plus grave chez les enfants7. Les nouveaux immigrants (adultes et enfants) peuvent également être à risque élevé de diarrhée persistante, mais ce groupe n'a pas fait l'objet d'une étude approfondie. Bien que le risque de diarrhée persistante soit vraisemblablement associé au type de voyage et à la durée de ce dernier, il n'existe aucune association géographique particulière avec la DV persistante; le problème a été signalé par suite de voyages dans une vaste gamme de pays à faible revenu.

Étiologie

L'étiologie précise de la plupart des cas demeure inconnue malgré des investigations poussées. On a émis l'hypothèse que des pathogènes intestinaux n'ont pas encore été identifiés ou reconnus à ce jour8,9; cependant, d'autres mécanismes, dont les troubles fonctionnels postinfectieux de la sécrétion et de la motilité intestinales, semblent être une cause plus probable des symptômes gastro-intestinaux (GI) persistants. La prise en charge de certains voyageurs souffrant d'une diarrhée prolongée peut être compliquée par la conviction de ces derniers, et celle de leur fournisseur de soins, qu'un parasite ou un autre agent microbiologique est toujours présent, en dépit de toutes les preuves du contraire.

Tableau 1. Étiologie de la DV persistante (aucun ordre particulier)

Non-infectieuse Intolérance au lactose, syndrome du côlon irritable, trouble fonctionnel intestinal post-infectieux, entérite associée aux sels biliaires,maladie intestinale inflammatoire ou maladie coeliaque devenues cliniquement apparentes
Autres infections Prolifération bactérienne de l'intestin grêle, sprue tropicale, infection à VIH
Parasites Giardia lamblia, Cryptosporidium spp.†, Cyclospora cayetanensis†, Isospora belli, Entamoeba histolytica, Strongyloides spp., Dientamoeba fragilis, Blastocystis hominis
Bactéries Diverses souches d'Escherichia coli, Shigella spp., Campylobacter spp., Aeromonas, la toxine de Clostridium difficile, Salmonella spp.
Agentsmineurs ou sans importance sur le plan médical (commensaux ou ne provoquant que des symptômesmineurs qui ne requièrent pas de traitement spécifique) Endolimax nana, Entamoeba coli, Entamoeba dispar, Entamoeba hartmani, Entamoeba polecki, Iodamoeba buetschlii, Chilomastix mesnili
†Nécessite des techniques diagnostiques particulières.
‡Son rôle pathogène est contesté. Les agents suivants peuvent être associés à la diarrhée persistante (voir les sources de référence, p.ex. www.medletter.com/freedocs/parasitic.pdfopen in the new window, pour les recommandations détaillées en matière de traitement).

Bactéries

Shigella, Salmonella, Campylobacter, diverses espèces d'E. coli, y compris les types entéro-agglutinants, et d'autres micro-organismes plus couramment associés à des maladies aiguës peuvent, quoique rarement, causer une diarrhée persistante10 et répondre à un traitement antimicrobien approprié11,12.

Clostridium difficile est pris en compte dans le diagnostic différentiel chez un grand nombre de voyageurs qui ont reçu un traitement antimicrobien pour une raison ou une autre, y compris de la doxycycline comme traitement antipaludéen. Un traitement standard à la métronidazole ou à la vancomycine par voie orale est généralement efficace, mais les rechutes sont relativement courantes.

La sprue tropicale est un syndrome acquis rare de malabsorption entérique qui serait apparemment associé à une prolifération bactérienne13,14. Un traitement antimicrobien prolongé associé à des suppléments de micronutriments, en particulier de folates, est généralement efficace.

Protozoaires

Giardia lamblia est un parasite très commun pouvant causer une infection subaiguë à chronique de l'intestin grêle, qui peut être asymptomatique ou associée à une diarrhée ou même à un problème de malabsorption. Le métronidazole (ou de nombreux autres agents) est généralement efficace, mais la résistance au métronidazole est de plus en plus reconnue.

Entamoeba histolytica peut causer une infection subaiguë à chronique du gros intestin. Ce micro-organisme est largement répandu, principalement dans les régions tropicales et subtropicales. Il est souvent surdiagnostiqué dans les pays en développement, où il est impossible d'effectuer des cultures bactériennes. E. histolytica peut également causer des abcès du foie. Il est morphologiquement identique à E. dispar non pathogène, ce qui complique les décisions concernant la cause et le traitement de l'infection. La plupart des cas d'infection symptomatique à E. histolytica sont associés à des tests sérologiques positifs; il existe maintenant des techniques moléculaires permettant de distinguer E. histolytica d'E. dispar.

Cryptosporidium parvum cause habituellement une infection de l'intestin grêle, qui est spontanément résolutive après une période moyenne d'environ 2 semaines chez l'hôte normal, mais qui est souvent chronique chez la personne immunodéprimée. Cette parasitose est cosmopolite et touche également les pays industrialisés. Des études récentes indiquent que le traitement par nitazoxanide donne de bons résultats15.

Cyclospora cayetanensis peut causer une infection de l'intestin grêle, souvent associée à une fatigue et à une perte de poids, et qui, en l'absence d'un traitement, dure environ 6 semaines. Le traitement par cotrimoxazole est efficace.

Dientamoeba fragilis, qui a été associé à l'entérobiase (oxyure), est un micro-organisme non invasif qui colonise le gros intestin et peut parfois provoquer des symptômes. Il convient de rechercher de manière rigoureuse les micro-organismes pathogènes entériques bien établis décrits précédemment avant d'attribuer les symptômes à D. fragilis. Plusieurs agents ont une activité efficace contre ce micro-organisme dans les cas où un traitement est jugé indiqué.

Blastocystis hominis est un micro-organisme non invasif dont la pathogénécité est controversée, pour lequel il n'existe aucun traitement dont l'efficacité a été démontrée16.

Autre: les microsporidies ont rarement été mises en cause dans les cas de diarrhée des voyageurs17.

Helminthes

Les helminthes sont des causes peu communes de la diarrhée persistante. Les preuves d'un lien avec la diarrhée sont plus solidement établies dans le cas de Strongyloides stercoralis, Capillaria philippinensis, Trichuris trichiura, et Schistosoma sp.18. D'autres douves de l'intestin (p. ex., Fasciolopsis buski) peuvent également être associées à la diarrhée.

Virus

La diarrhée persistante est un signe relativement courant d'immunodépression avancée associée au VIH, et le cytomégalovirus peut alors causer une colite. En l'absence d'immunodépression, les virus ne sont pas reconnus comme des causes de diarrhée chronique.

Étiologie non infectieuse du trouble fonctionnel intestinal post-infectieux

Une perturbation fonctionnelle de l'intestin après une entérite infectieuse peut se révéler beaucoup plus courante et durer plus longtemps qu'on ne l'imagine généralement2,3. Le « syndrome du côlon irritable après un voyage » est essentiellement un diagnostic d'élimination et englobe vraisemblablement divers troubles de la fonction intestinale consécutifs à une infection associée à un voyage. On ne sait pas si sa physiopathologie est semblable à celle du syndrome du côlon irritable non associé au voyage.

L'intolérance au lactose déclenchée par une lésion infectieuse au niveau de la bordure en brosse de la muqueuse de l'intestin grêle peut provoquer une diarrhée persistante liée à un voyage.

Une diarrhée chronique, quelle qu'en soit la cause, peut également être associée incidemment à un voyage.

Une maladie intestinale inflammatoire, une maladie coeliaque, etc., concomitantes ou devenues cliniquement apparentes, et un certain nombre de tumeurs de l'intestin grêle et du gros intestin et d'anomalies endocriniennes peuvent être prises en compte dans le diagnostic différentiel de la diarrhée persistante.

De même, divers médicaments, dont les laxatifs, les préparations contenant du Mg++, les hormones thyroïdiennes substitutives, les herbes médicinales et certains antirétroviraux, peuvent causer ou compliquer une diarrhée persistante.

Approche chez un patient présentant une diarrhée persistante associée à un voyage

Anamnèse

Dans le cadre de l'évaluation, il peut être utile d'obtenir les renseignements particuliers suivants :

  • Déterminer s'il y a eu des intervalles asymptomatiques. Le cas échéant, il peut s'agir d'infections aiguës répétées, qui ne sont pas rares chez le voyageur, plutôt que d'une maladie persistante, ce qui appellera un diagnostic et un traitement très différents.
  • Déterminer les antécédents médicaux pertinents, notamment les habitudes intestinales et les antécédents de symptômes gastrointestinaux, les symptômes dus au stress, ou les symptômes apparentés au syndrome du côlon irritable antérieurs au voyage. Si ces antécédents sont présents, si les symptômes actuels évoquent le syndrome du côlon irritable et si l'analyse des selles visant à déceler des pathogènes courants est négative, il y aurait peut-être lieu de mettre l'accent sur le traitement des symptômes du côlon irritable. Des antécédents familiaux reconnus de maladie intestinale inflammatoire pourraient se révéler un indice utile.
  • Déterminer les états comorbides, comme le diabète ou l'infection à VIH (ou le risque d'infection par le VIH).
  • S'informer des médicaments utilisés, notamment les antimicrobiens, soit avant soit après le début de la diarrhée, et de leur effet. Toute amélioration consécutive à un traitement antimicrobien a une valeur diagnostique limitée. En cas d'utilisation récente d'un antimicrobien, généralement au cours des 2 mois précédents, il faudrait envisager immédiatement une infection à Clostridium difficile.
  • Vérifier les antécédents de voyage - destinations, durée et conditions. Bien qu'un grand nombre de pathogènes diarrhéiques soient cosmopolites, certains, comme Schistosoma mansoni, ont une distribution géographique particulière. Une maladie semblable diagnostiquée chez des compagnons de voyage peut être un indice utile.
  • Les antécédents de comportements, en particulier les mesures de «précaution» concernant les aliments et l'eau, et les circonstances dans lesquelles la diarrhée a vraisemblablement été contractée facilitent parfois l'évaluation de la diarrhée.

Caractéristiques de la diarrhée qui pourraient être utiles dans l'évaluation de son importance et de son étiologie probable

  • Apparition (soudaine ou graduelle, premiers symptômes comme des crampes abdominales ou de la fièvre)
  • Durée
  • Fréquence
  • Caractéristiques des selles (présence de sang ou de mucus, en particulier)
  • Volume des selles
  • Ténesme
  • Caractéristiques générales - constante ou intermittente/récurrente, nocturne (indicateur d'une diarrhée sécrétoire)
  • Associations (p. ex., post-prandiale, après l'ingestion d'aliments contenant du lait ou d'aliments épicés, stress)
  • Symptômes abdominaux, comme une douleur ou un ballonnement et toute association temporelle, le cas échéant
  • Nausée ou vomissement
  • Incontinence fécale
  • Fièvre
  • Perte de poids : une perte de poids soutenue ou progressive ou une diminution du rang centile sur la courbe de croissance pédiatrique est particulièrement préoccupante, évoquant soit une malabsorption (et partant, un trouble de l'intestin grêle) ou des effets systémiques plus graves associés au trouble gastro-intestinal.

Les caractéristiques suivantes sont associées à une atteinte invasive, principalement iléale, ou à une atteinte du gros intestin : selles de petit volume, crampes abdominales basses, présence de sang et/ou de mucus ou de leucocytes dans les selles, ténesme et fièvre élevée/persistante.

Des selles de gros volume, en l'absence de crampes importantes ou en présence d'une douleur localisée dans la région médiane supérieure de l'abdomen et d'une perte de poids malgré un apport calorique suffisant, sont caractéristiques des troubles de l'intestin grêle. La plupart des causes de la diarrhée persistante touchent l'intestin grêle ou le gros intestin, de sorte que la localisation de la douleur peut aider à déterminer l'étiologie probable et peut également guider les investigations, tant microbiologiques qu'endoscopiques, s'il y a lieu. Chez un grand nombre de patients, le tableau clinique ne permet pas de déterminer clairement la région touchée, ou il peut même évoluer.

Bilan fonctionnel

Les deux éléments suivants sont d'une importance pratique particulière pour déterminer la portée et l'ordre logique des investigations : degré d'atteinte au bien-être et à l'exercice des activités de la vie quotidienne, et évolution des symptômes depuis leur apparition, c.-à-d. atténuation ou aggravation des symptômes. Une investigation limitée peut être indiquée dans le cas des patients dont les symptômes sont bénins ou régressent.

Recommandations

Diarrhée aiguë

En général, les personnes qui souffrent de diarrhée pendant < 5 jours au retour d'un voyage n'ont pas besoin de subir une série d'examens et devraient être prises en charge conformément aux recommandations contenues dans la déclaration du CCMTMV sur la DV1. Des enquêtes étiologiques peuvent se révéler appropriées pour des raisons épidémiologiques en cas d'éclosion dans un groupe de voyageurs (p. ex., navire de croisière, voyage organisé).

B III

Fièvre et autres symptômes associés
  • Lorsqu'un patient fébrile présente une diarrhée après un voyage dans une région où le paludisme est endémique, des frottis sanguins devraient être pratiqués pour écarter l'éventualité du paludisme (A II), maladie qui peut être incidemment ou étiologiquement associée à la diarrhée.
 
  • Une hémoculture sera effectuée si la diarrhée s'accompagne de fièvre.
A II
  • Des tests sérologiques de détection du VIH devraient être envisagés en fonction du profil de risque du patient ou de la présence de signes évocateurs, comme une candidose buccale.
B III

Investigation initiale d'une diarrhée persistante

Les éléments suivants devraient être pris en compte dans l'évaluation d'une personne qui présente une diarrhée persistante après un voyage :

  • Anamnèse complète, y compris les points énumérés précédemment. Il faut vérifier la présence d'une maladie avant le voyage et effectuer un examen physique.
B II
  • Au moins deux échantillons de selles recueillis des jours différents dans un milieu de conservation doivent être examinés à la recherche d'oeufs et de parasites, dans un laboratoire compétent. Cet examen ne doit pas se limiter à la détection des antigènes et devrait comprendre la mise en évidence par colorations permanentes et par coloration acido-résistante.
A II
  • Un échantillon de selles devrait être envoyé pour une culture bactérienne.
A II
  • Si le patient a pris récemment des antimicrobiens, il importe de rechercher la cytotoxine de C. difficile.
A II
  • L'examen des selles en vue de déceler la présence de leucocytes fécaux, de lactoferrine, ou même de sang occulte, peut également aider à identifier les sujets souffrant de colite de toutes étiologies19,20.
A II
  • Une formule sanguine peut être utile si elle révèle une anémie, une leucocytose, une thrombocytose, ou une éosinophilie.
 
  • Tant que les résultats de ces examens ne sont pas connus, le patient doit éviter tous les produits laitiers ou aliments contenant du lactose; une période d'essai de 3 à 5 jours permet souvent de poser le diagnostic. En présence d'une amélioration clinique (C III), il ne sera peut-être pas nécessaire d'effectuer des examens complémentaires. (Une épreuve respiratoire à l'hydrogène peut confirmer une intolérance soupçonnée au lactose si la réponse clinique à l'exclusion du lait n'est pas concluante.)
 
  • Un traitement spécifique devrait être administré conformément aux lignes directrices publiées (www.medletter.com/freedocs/ parasitic.pdfopen in the new window ou autres sources) si des micro-organismes probablement pathogènes sont décelés.
A II

Indications de l'endoscopie digestive

Chez les patients qui présentent des symptômes persistants et importants, une endoscopie digestive peut faciliter la prise en charge dans les circonstances indiquées ci-après.

Si une perte de poids soutenue ou progressive est une caractéristique importante, une endoscopie digestive haute et une biopsie de l'intestin grêle devraient être effectuées. Par ailleurs, un dosage des graisses fécales dans des échantillons de selles recueillis sur une période de 72 heures permettra de confirmer la malabsorption, mais non d'en établir la cause. Si l'excrétion des graisses fécales est élevée, une endoscopie digestive haute et une biopsie seraient manifestement indiquées.

B III
En présence de caractéristiques d'une diarrhée du gros intestin ou de saignements rectaux, une endoscopie digestive basse, accompagnée de biopsies, devrait être envisagée en premier lieu. B III
Un examen endoscopique et des biopsies peuvent être envisagés dans le cas des patients qui présentent une diarrhée importante et persistante, même en l'absence des caractéristiques particulières susmentionnées, en particulier si le traitement empirique et les mesures symptomatiques décrites dans le prochain paragraphe n'ont donné aucun résultat. C III

Traitement empirique

Certains auteurs ont suggéré un essai thérapeutique avec un antibactérien de la famille des quinolones et/ou un agent antiprotozoaire comme le métronidazole; certains estiment même que cet essai doit être effectué dès le début de la prise en charge du patient21,22.

C III
Si des symptômes importants persistent, ou si des symptômes comme une perte de poids évoluent, le diagnostic différentiel doit tenir compte de la gamme complète des causes de diarrhée non associées au voyage23,24. Il faudrait effectuer des examens complémentaires, comme le dosage des anticorps antitransglutaminase dans le sérum (pour la maladie coeliaque), et consulter un gastro-entérologue. C III

Les modalités thérapeutiques suivantes ont été proposées en l'absence d'un diagnostic étiologique précis :

Interrompre la prise de médicaments qui causent la diarrhée (p. ex., laxatifs, antiacides contenant du magnésium, antibiotiques, diurétiques, théophylline, anticholinergiques, prokinétiques, prostaglandines).

B II
  • Les ralentisseurs du transit (lopéramide, diphénoxylate et opiacés) devraient normalement soulager la diarrhée et les crampes25.
B II
  • Le sous-salicylate de bismuth a été utilisé dans le traitement de la diarrhée chronique idiopathique et de la diarrhée attribuable à une colite microscopique26.
B II
  • Les agents probiotiques, surtout Lactobacillus ou Saccharomyces(27, se sont révélés efficaces pour réduire la durée et la gravité de la diarrhée aiguë chez les adultes et les enfants28, prévenir la diarrhée secondaire à un traitement antibiotique29, et éventuellement réduire la fréquence des rechutes dans les cas de diarrhée associée à C. difficile30. Ils ont effectivement soulagé la diarrhée chronique chez des enfants31, de même que la diarrhée persistante après un voyage32. Il est arrivé, quoique rarement, que Lactobacillus et Saccharomyces causent des infections graves, généralement chez des hôtes immunodéprimés; ils n'ont cependant pas été associés à des effets indésirables graves chez des patients par ailleurs en bonne santé, traités pour des syndromes diarrhéiques. Ces produits ont généralement été approuvés dans le cadre du Règlement sur les produits de santé naturels, un processus différent du processus d'approbation des médicaments sur le plan des exigences en matière d'essais sur l'innocuité et l'efficacité. L'intérêt de cette approche, l'agent ou les agents privilégiés, de même que les doses, n'ont pas été déterminés.
 
  • Des changements au régime alimentaire sont souvent recommandés. Un apport alimentaire adéquat – en liquides, calories, protéines et micronutriments – est essentiel et ne doit pas être compromis par les choix alimentaires. Il existe peu de données sur le traitement de la DV aiguë par l'alimentation33,34, et il n'existe aucune donnée de cette nature en ce qui concerne la diarrhée chronique. Cependant, le patient devrait éviter de consommer des aliments et des boissons qui se sont avérés irritants pour l'intestin, c.-à-d. l'alcool, les aliments épicés et la caféine.
C III
  • La résine de cholestyramine, en plus d'avoir un effet hydrophile, peut lier les acides biliaires. Par conséquent, elle est particulièrement utile dans le traitement de la diarrhée causée par les acides biliaires attribuable à la malabsorption des acides biliaires secondaire à une atteinte iléale (p. ex., maladie de Crohn). Il a été établi que la malabsorption des acides biliaires confirmée par des investigations appropriées réagit à la cholestyramine après une diarrhée infectieuse aiguë35.
B II
  • Les agents gonflants, p. ex., le psyllium, un agent hydrophile, augmentent la teneur en eau de la masse fécale, peuvent augmenter la consistance des selles et réduire les symptômes diarrhéiques, et ils auraient apparemment la capacité de lier les toxines36. Ces agents, parfois utilisés en association avec des agents laxatifs comme le lactulose, ont souvent été jugés utiles par des cliniciens ayant une expérience de la prise en charge de cette affection.
 
  • Les nouveaux médicaments disponibles pour la prise en charge du syndrome du côlon irritable n'ont pas été mis à l'essai chez des patients présentant une diarrhée chronique après un voyage37.
C III

Figure1. Prise encharge de la diarrhée persistante liée à un voyage

Figure1. Prise encharge de la diarrhée persistante liée à un voyage

Remerciements

Nous remercions le Dr Richard Fedorak, Division de gastroentérologie, Université de l'Alberta, et le Dr Jay Keystone, unité des maladies tropicales, Toronto Hospital, d'avoir révisé le manuscrit et fourni leurs commentaires à titre d'experts.

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*Membres : Dr B.Ward (président); Dr C. Beallor; M. Bodie-Collins (secrétaire général); Dr K. Gamble; Mme A. Henteleff; Dr S. Houston; Dre S. Kuhn; Dre A. McCarthy; Dr K.L. McClean; Dr P.J. Plourde; Dr J.R. Salzman

Représentants de liaison:Dr R.J. Birnbaum; Dr C. Greenaway; Dr C. Hui; Dr R. Saginur; Dr P. Teitelbaum; Dr M. Woo.

Représentants d'office: Dr N. Gibson; Dr J. Given; Dr F. Hindieh; Dr J.P. Legault; Dr P. McDonald; DrR. Paradis; Dr C. Reed; Dr M. Smith; Dr M. Tepper.

Membre émerité: Dr C.W.L. Jeanes.

Ce document a été préparé par le Dr S. Houston et approuvé par le CCMTMV.

[Relevé des maladies transmissibles au Canada]

 

Mise à jour : 2006-02-15 haut de la page