Durée de l'allaitement maternel exclusif - Recommandation de Santé Canada, 2004
ISBN : 0-662-77538-4
No Cat. : H44-73/2004F-HTML
No de pub. de SC : 4825
© Sa Majesté la Reine du chef du Canada 2004
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Introduction
Santé Canada fait la promotion de l'allaitement maternel en tant que meilleure façon qui soit de combler les besoins nutritionnels, immunologiques et affectifs reliés à la croissance et au développement du nourrisson [1]. Le présent document traite uniquement de la mise à jour de la recommandation relative à la durée de l'allaitement maternel exclusif, formulée en 1998, qu'on retrouve dans le document La
nutrition du nourrisson né à terme et en santé, page 12 [2]. Il ne s'agit pas d'un guide complet sur l'allaitement maternel. Le document La nutrition du nourrisson né à terme et en santé renferme de plus amples informations sur l'allaitement maternel. Une liste de questions et réponses a été préparée à l'intention des professionnels en tant que complément du présent document. On peut la consulter à l'adresse suivante:
http://www.santecanada.ca/nutrition
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Recommandation :
L'allaitement maternel exclusif1 est recommandé pendant les
six premiers mois de la vie chez les nourrissons nés à terme et en
santé étant donné que le lait maternel est le meilleur aliment permettant
d'assurer une croissance optimale. À partir de l'âge de six mois, on
recommande de donner au nourrisson des aliments solides ayant une teneur élevée
en nutriments, plus particulièrement en fer [3], tout en poursuivant
l'allaitement maternel jusqu'à l'âge de deux ans et même au-delà [4].
1 Selon la définition de l'OMS [5], on entend par allaitement maternel exclusif la pratique consistant à nourrir un bébé exclusivement de lait maternel (incluant du lait maternel qui a été extrait). On peut également donner au bébé des vitamines, des minéraux ou des médicaments. L'eau, les substituts du lait maternel, les autres liquides et les aliments solides sont toutefois exclus.
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Justification
En 2001, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a modifié sa recommandation relative à l'allaitement maternel exclusif pour faire passer la durée de celui-ci à six mois plutôt que quatre à six mois [6]. Avant d'aller dans le sens de cette recommandation, Santé Canada a examiné soigneusement les preuves scientifiques présentées par l'OMS ainsi que d'autres données récentes pertinentes, à la lumière du contexte canadien. L'allaitement maternel exclusif jusqu'à l'âge de six mois confère une protection additionnelle aux nourrissons contre les infections gastro-intestinales. Les nourrissons nés à terme et en santé qui sont allaités exclusivement au sein jusqu'à l'âge de six mois ont un taux de croissance et un statut en fer similaires à ceux des nourrissons allaités exclusivement au sein pendant trois à quatre mois, puis partiellement allaités au sein jusqu'à l'âge de six mois. Le peu d'études consacrées aux autres effets sur la santé de l'allaitement maternel exclusif jusqu'à l'âge de six mois, plutôt que quatre mois, ont eu des résultats non concluants, insuffisants, ou n'ont pas démontré de différence substantielle.
Voici les principales données examinées par Santé Canada en vue d'appuyer sa décision d'aller dans le sens de la recommandation de l'OMS.
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Effets sur la santé du nourrisson
Infections gastro-intestinales
Certaines études démontrent que les deux mois additionnels d'allaitement maternel exclusif (à savoir six mois plutôt que quatre mois) confèrent aux nourrissons une protection additionnelle contre les infections gastro-intestinales pendant ces deux mois.
Une importante étude prospective menée au Belarus, où on observe des conditions sanitaires semblables à celles du Canada, démontre que les nourrissons allaités exclusivement au sein pendant six mois ou plus présentent une diminution statistiquement significative du risque d'infections gastro-intestinales (au moins d'une occurrence ou plus), comparativement aux nourrissons allaités exclusivement au sein pendant trois mois, puis partiellement allaités au sein jusqu'à l'âge de six mois [7].
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Croissance
Les données disponibles à l'heure actuelle démontrent un taux de croissance et une composition corporelle similaires chez les nourrissons nés à terme et en santé qui sont allaités exclusivement au sein pendant six mois et ceux allaités exclusivement au sein pendant trois à quatre mois, puis partiellement allaités au sein jusqu'à l'âge de six mois [8].
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Fer
Selon les données scientifiques disponibles, la déficience en fer ne représente pas un problème chez la plupart des nourrissons nés à terme et en santé qui sont allaités exclusivement au sein pendant six mois [3,9]. Il faut introduire des aliments solides ayant une teneur élevée en nutriments, plus particulièrement en fer, à partir de l'âge de six mois.
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Effets sur la santé de la mère
Réapparition plus tardive des menstruations
Certaines études démontrent que la réapparition des menstruations est retardée lorsque l'allaitement maternel exclusif est prolongé de deux mois. Suite à l'examen des résultats d'études menées au Honduras (1998), Kramer et Kakuma [8] ont conclu que la possibilité de réapparition des menstruations avant six mois est plus faible chez les femmes qui allaitent leur bébé exclusivement au sein pendant six mois, comparativement aux femmes qui allaitent leur bébé exclusivement au sein pendant quatre mois et le nourrissent ensuite partiellement au sein jusqu'à l'âge de six mois. Parmi les avantages résultant de l'absence de menstruations pendant une période plus prolongée, mentionnons un plus grand espacement des naissances et une réduction des pertes sanguines qui a pour effet de diminuer les besoins en fer chez les femmes qui allaitent [10]. Tel qu'indiqué dans le Rapport des Apports nutritionnels de référence (ANREF), les besoins en fer sont moins élevés chez les femmes qui allaitent lorsque leurs menstruations n'ont pas repris. Les besoins en fer ont d'ailleurs été définis en tenant compte d'une période de six mois d'allaitement maternel exclusif [11].
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Perte de poids
Certaines études démontrent un rythme de perte de poids légèrement plus élevé, mais statistiquement significatif, chez les femmes qui allaitent leur bébé exclusivement au sein pendant une plus longue période.
Les résultats combinés de deux études menées au Honduras indiquent que les femmes appartenant au groupe d'allaitement exclusif pendant six mois avaient perdu en moyenne 0,42 kg (1 lb) de plus que les femmes appartenant au groupe d'allaitement exclusif pendant quatre mois [8].
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Autres données scientifiques examinées
Infections des voies respiratoires supérieures et inférieures
Au niveau de la réduction du taux de maladies respiratoires, les études ont donné des résultats contradictoires. On suppose donc que les différences sont faibles à cet égard entre le groupe d'allaitement maternel exclusif pendant six mois et celui de quatre mois.
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Allergies
Il n'a pas été démontré que le fait de prolonger de deux mois l'allaitement maternel exclusif réduisait le risque de développer des allergies. En effet, des données provenant d'une étude de cohorte prospective avec un échantillon important, ainsi que de deux autres études de cohorte, indiquent que les deux mois additionnels d'allaitement maternel exclusif ne sont pas associés à une réduction du risque d'eczéma atopique, d'asthme ou d'autres manifestations atopiques [8].
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Obésité et développement cognitif
Aucune recherche n'a étudié spécifiquement la relation entre l'allaitement maternel exclusif pendant six mois plutôt que quatre mois et l'obésité ou le développement cognitif à long terme.
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Incidence au niveau de la pratique
- Les preuves scientifiques disponibles justifient la recommandation
sur l'allaitement maternel exclusif pendant six mois, à l'échelle de
la population canadienne. Santé Canada encourage tous les professionnels
de la santé à faire la promotion de cette recommandation révisée et à la
mettre en oeuvre aux niveaux national, provincial et communautaire.
Il faut toutefois tenir compte de certains facteurs lorsqu'on applique
cette recommandation à l'échelle individuelle.
- Au Canada, on recommande que tous les nourrissons nés à terme et
en santé qui sont allaités au sein reçoivent un supplément de vitamine
D de 10 µg/jour (400 UI/j). Cette administration de supplément doit
commencer dès la naissance et se poursuivre jusqu'à ce que l'alimentation
du nourrisson fournisse au moins 10 µg/jour (400 UI/j) de vitamine
D à partir d'autres aliments ou que le nourrisson allaité au sein atteigne
l'âge d'un an [12].
- À partir de l'âge de six mois (environ 180 jours), on recommande de donner au nourrisson des aliments solides ayant une teneur élevée en nutriments, plus particulièrement en fer, tout en poursuivant l'allaitement maternel jusqu'à l'âge de deux ans et même au-delà.
- Il faut surveiller de près la croissance de tous les nourrissons
ainsi que les maladies dont ils peuvent être affectés, de façon à pouvoir
intervenir efficacement sur le plan clinique [8].
- On observe des courbes de croissance différentes chez les nourrissons
allaités au sein et ceux qui reçoivent des préparations commerciales
pour nourrissons[13]. Les courbes de croissance
utilisées actuellement (p. ex., celles du Centres for Disease Control
and Prevention) illustrent un modèle de croissance différent de celui
qu'on observe généralement chez les nourrissons allaités au sein. Cet état
de fait doit être pris en considération lorsqu'on évalue la croissance d'un
nourrisson qui est exclusivement allaité au sein,de façon à éviter
de procéder à des analyses inutiles, d'avoir recours à une préparation
commerciale comme supplément ou d'introduire précocement des aliments
solides.
- Les nourrissons nés à terme et en santé dont la mèreprésentait une
déficience en fer et ceux affichant une hypotrophie néonatale peuvent être à risque
accru de déficience en fer. C'est pourquoi les professionnels de la
santé doivent
surveiller de près le statut en fer chez ces nourrissons.
- Certaines mères ne pratiquent peut-être pas l'allaitement maternel exclusif pendant six mois pour des raisons d'ordre personnel ou social, ou les deux. De façon à garantir un état de bien-être nutritionnel optimal au nourrisson, il faut offrir du soutien aux parents. Il faut bien les informer pour qu'ils soient en mesure de prendre des décisions éclairées à l'égard de l'alimentation de leur nourrisson.
- Il est important pour la mère qui allaite de maintenir une alimentation saine et équilibrée en conformité avec le Guide alimentaire canadien pour manger sainement.
- Pour favoriser au maximum la mise en oeuvre de cette recommandation,
il faudra fournir un soutien social approprié aux femmes qui allaitent.
Il faudra redoubler d'efforts au niveau communautaire, de la santé publique,
des hôpitaux et dans les milieux de travail.
- Le Programme canadien de nutrition prénatale finance des agences et
des regroupements communautaires pour favoriser l'accès aux services
d'appui social et d'appui à la santé, incluant la promotion de l'allaitement
maternel chez les femmes enceintes confrontées à des situations à risque
pour leur santé et le développement de leurs bébés.
- Santé Canada appuie les efforts du Comité canadien pour l'allaitement
en vue de la mise en oeuvre au Canada de l'Initiative amis des bébés
de l'OMS /UNICEF.
- Bien que l'allaitement maternel exclusif pendant deux mois supplémentaires
retarde la réapparition des menstruations, il ne s'agit vraiment pas
d'une méthode contraceptive à toute épreuve.
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Incidence au niveau de la recherche future
- Étant donné que des études démontrent [14, 15] qu'à l'heure actuelle
la durée de l'allaitement maternel exclusif est considérablement inférieure à six
mois chez les femmes canadiennes, de nouvelles recherches s'imposent
en vue d'identifier des approches rentables, à l'échelle de la population,
permettant d'appuyer la mise en oeuvre de la présente recommandation.
Il faut encourager l'évaluation de programmes tels que l'Initiative
amis des bébés et en diffuser les résultats.
- De nouvelles recherches s'imposent en vue d'évaluer les autres avantages
pour la santé reliés à la prolongation de l'allaitement maternel exclusif.
Par exemple, on recommande de mener des recherches en vue d'examiner
les effets de la prolongation de l'allaitement maternel exclusif et
ceux de la durée totale de l'allaitement maternel sur la rétention
post-partum de poids corporel à long terme.
La présente prise de position tient compte des commentaires et avis du Comité consultatif d'experts sur l'allaitement maternel exclusif. Voici la liste des membres de ce Comité :
Gail Blair Storr, RN, PhD, University of New Brunswick
Geneviève Courant, MSc, RN, IBCLC, Hôpital regional de Sudbury
James Friel, PhD, University of Manitoba
Roberta Hewat, PhD, RN, IBCLC, University of British Columbia
Michael Kramer, MD, McGill University
Heather Maclean, Ed.D, University of Toronto
Joan Silzer, MSc, Dt.P., IBCLC, Calgary Health Region
Santé Canada souhaite également remercier Judy Sheeshka, du University of Guelph, qui a préparé un document de discussion en vue de faciliter les travaux du Comité.
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Références
[1] Santé Canada, Nutrition pour une grossesse en santé - Lignes directrices à l'intention des femmes en âge de procréer. 1999.Ottawa: Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux.
[2] Société canadienne de pédiatrie, Les Diététistes du Canada et Santé Canada. La nutrition du nourrisson né à terme et en santé. 19-24.1998. Ottawa, Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux.
[3] Griffin, I.J., Adams, S.A. Iron and breastfeeding. Pediatr Clin N Am 2001; 48:401-13.
[4] Goldman, A.S. The immune system of human milk: antimicrobial, anti-inflammatory and immunomodulating properties. Pediatr Infect Dis J 1993; 12:664-71.
[5] World Health Organization. Promoting proper feeding for infants
and young children. 2004. Geneva. World Health Organization.
http://www.who.int/nutrition/topics/infantfeeding/en/ (Disponible en anglais seulement)
[6] Organisation mondiale de la santé. Stratégie mondiale pour l'alimentation
du nourrisson et du jeune enfant, Durée optimale de l'allaitement au
sein exclusive. 2001. Genève.
http://www.who.int/gb/ebwha/pdf_files/WHA54/fa54id4.pdf
[7] Kramer, M.S et al. Infant growth and health outcomes associated with 3 compared with 6 mo of exclusive breastfeeding. Am J Clin Nutr 2003; 78:291-295.
[8] Kramer, M.S., Kakuma, R. The optimal duration of exclusive breastfeeding. A systematic review 2002,
http://www.who.int/nutrition/publications/ optimal_duration_of_exc_bfeeding_review_eng.pdf
[9] Pisacane, A et al. Iron status in breast-fed infants. J of Pediatr 1995; 12:429-31.
[10] Dewey et al. Effects of exclusive breastfeeding for four versus six months on maternal nutritional status and infant motor development: results of two randomized trials in Honduras. J Nutr 2001; 131:262-7.
[11] Institute of Medicine Food and Nutrition Standing Committee on the Scientific Evaluation of Dietary Reference Intakes. Dietary Reference Intakes for Vitamin A, Vitamin K, Arsenic, Boron, Chromium, Copper, Iodine, Iron, Manganese, Molybdenum, Nickel,Silicon, Vanadium, and Zinc. 2001.
[12] Santé Canada. Les suppléments de vitamine D chez les nourrissons allaités au sein : Recommandation de Santé Canada, 2004. http://www.santecanada.ca/nutrition
[13] Garza, C., de Onis, M. Rationale for developing a new international growth reference. Food Nutr Bull 2004; 25:S5-141.
[14] Barber, C.M., Abernathy, T., Steinmetz, B., Charlebois, J. (1997). Using a breastfeeding prevalence survey to identify a population for targeted programs. C J Public Health 1997; 88:242-245.
[15] Dubois, L., Girard, M. Social determinants of initiation, duration and exclusivity of breastfeeding at the population level. The results of the Longitudinal Study of Child Development in Quebec (ELDEQ1998-2002). C J Public Health 2003; 94:300-305.
This publication is also available in English under the title of:
Exclusive Breastfeeding Duration - 2004 Health Canada Recommendation
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