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Commentaire N° 66

Nigeria : Chances de stabilité

Février 1996
Non classifié

Précis : Le 1er octobre 1995, jour du 35e anniversaire de l'indépendance du Nigeria, l'actuel chef d'État militaire du pays, le général Sani Abacha, a annoncé qu'il allait de nouveau tenter de désengager les forces armées de la politique et de remettre le pouvoir à une «IIIe République» civile, ce qui pourrait prendre au moins trois ans et probablement davantage. Pourtant, le groupe de défense des droits de la personne de New York, Freedom House, dans son examen annuel de cotation de 1995, indiquait que le Nigeria avait glissé dans la catégorie des «pires violeurs des droits de l'homme» parce que «la dictature militaire y est de plus en plus brutale et le processus judiciaire, corrompu». - Février 1996. Auteur : M. Robert D'A. Henderson.

Note du rédacteur : Commentaire est publié régulièrement par la Direction de l'analyse et de la production du SCRS. Si vous avez des questions sur la teneur du document, veuillez vous adresser au Comité de rédaction à l'adresse ci-dessous.

L'auteur du présent numéro est M. Robert D'A. Henderson, analyste des tendances, d'Ottawa. Vous pouvez communiquer avec lui à l'adresse suivante : C.P. 9732, succursale T, Ottawa (Ontario) K1G 4G4; ou par télécopieur au (613) 842-1312.

Avertissement : Le fait qu'un article soit publié dans Commentaire ne signifie pas que le SCRS a confirmé l'authenticité des informations qui y sont contenues ni qu'il appuie les opinions de l'auteur.


Carte de Nigeria

Le 1er octobre 1995, jour du 35e anniversaire de l'indépendance du Nigeria, l'actuel chef d'État militaire du pays, le général Sani Abacha, a annoncé qu'il allait de nouveau tenter de désengager les forces armées de la politique et de remettre le pouvoir à une «IIIe République» civile, ce qui pourrait prendre au moins trois ans et probablement davantage. Pourtant, le groupe de défense des droits de la personne de New York, Freedom House, dans son examen annuel de cotation de 1995, indiquait que le Nigeria avait glissé dans la catégorie des «pires violeurs des droits de l'homme» parce que «la dictature militaire y est de plus en plus brutale et le processus judiciaire, corrompu».

Puis, au cours de la réunion des chefs de gouvernement des pays membres du Commonwealth tenue en Nouvelle-Zélande et en dépit des appels internationaux à la clémence, le régime Abacha a pendu neuf dissidents de la minorité ethnique ogoni, dont Ken Saro-Wiwa, défenseur des droits de la personne et militant pour l'environnement bien connu, condamnés à mort par un tribunal militaire nigérian secret. Ce geste a été qualifié d'«acte haineux» par le président de l'Afrique du Sud, Nelson Mandela, et de «meurtre judiciaire» par le premier ministre britannique, John Major. Indignés, les chefs de gouvernement des pays membres du Commonwealth ont suspendu le Nigeria comme membre de l'organisation, ont interrompu l'aide au développement qui lui était fournie et lui ont donné deux ans pour revenir à un régime civil, faute de quoi il risque d'être expulsé du Commonwealth définitivement.

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Répercussions sur le Canada

Le Canada et le Nigeria entretiennent des relations politiques et commerciales cordiales depuis l'indépendance de ce dernier en 1960. Les échanges bilatéraux sont axés sur l'industrie pétrolière. À l'heure actuelle, plusieurs petites entreprises canadiennes participent à des projets d'exploration pétrolière off-shore au Nigeria et les importations de pétrole nigérian s'élèvent à environ 600 millions de dollars américains annuellement (moins de 1 pour 100 de ses exportations pétrolières). Pourtant, le gouvernement canadien faisait partie de ceux qui ont énergiquement appelé à la clémence pour Saro-Wiwa et les autres dissidents, à la libération de tous les prisonniers politiques et à un rapide retour à un régime civil.

Toutefois, la corruption généralisée sous le régime militaire et une économie qui se détériore suscitent un certain nombre de préoccupations, tant pour la stabilité du pays lui-même que pour la communauté internationale, y compris le Canada. Parmi celles-ci citons la corruption à tous les niveaux, les rackets financiers internationaux et les organisations criminelles qui exploitent des réseaux de trafic de stupéfiants et de devises. Lorsque les revenus du pétrole auparavant astronomiques se sont effondrés vers la fin des années 80, les «caïds du vol» nigérians et leurs «organisations» ont cherché de nouvelles façons de faire de l'argent et, comme l'intellectuel nigérian en exil Julius Ihonvbere le faisait remarquer, «les seuls moyens à leur disposition étaient le trafic des stupéfiants et des devises, ainsi que les fraudes 419¹».

Depuis 1994, le service de renseignement de l'Economist de Londres estime que le Nigeria est l'un des pays les plus à risque de la planète, ne le cédant qu'à l'Iraq et à la Russie. D'après certains économistes, la corruption, qui est toujours endémique au Nigéria, pourrait représenter jusqu'à 10 p. 100 du produit intérieur brut (PIB) du pays. Au niveau local, les fonctionnaires et les administrateurs demandent un cadeau sous forme de «goutte» ou de «pain» pour s'acquitter même de la paperasserie la plus élémentaire, quoique cela soit de plus en plus dû au fait que les salaires déjà peu élevés sont maintenant en retard de plusieurs mois. À leur arrivée au Nigeria, les gens d'affaires étrangers se voient régulièrement demander par les douaniers et les agents de l'immigration, surtout à Lagos, s'ils ont apporté un «cadeau», en particulier des dollars américains [New York Times, 19 décembre 1994]. Toutefois, au niveau national et aux plus hauts échelons du gouvernement, les pratiques corrompues sont presque institutionnalisées, surtout en ce qui a trait au système d'attribution des contrats de «superprojets» et à la vente de permis d'importation pour les rares biens de consommation. On s'attend à ce que tous les soumissionnaires prévoient dans leur soumission un «supplément» de 10 à 15 p. 100 qui sera versé dans les comptes en banque à l'étranger de représentants du gouvernement. On a également pris l'habitude de «vendre» les permis d'importation de biens, en particulier de produits de consommation rares, comme les médicaments, le riz, l'huile de cuisson et les pièces de machinerie. Ces suppléments, fraudes fiscales, pots-de-vin, etc., qui représentent souvent des millions de nairas (la devise nationale), sont dénoncés par les médias nigérians qui les considèrent comme des «pertes» pour l'économie nationale.

Dans plus de 75 pays, des gens d'affaires ont été victimes de divers types de rackets internationaux perpétrés depuis le Nigeria, d'après les données d'Interpol. Nommées d'après l'article du code pénal nigérian qui les vise, ces «fraudes» comprennent les cartes de crédit frauduleuses et les faux chèques à l'échelle internationale, l'utilisation de multiples pièces d'identité pour s'assurer des prestations d'aide sociale à l'étranger, des subventions universitaires, etc., et la plus commune peut-être, les transferts de fonds frauduleux au moyen de fausses lettres. Ensemble, ces rackets provoquent des pertes financières annuelles de millions de dollars, de l'intimidation physique et même, dans certains cas, l'assassinat de gens d'affaires étrangers de passage—le tout à l'intérieur du territoire nigérian.

À l'échelle internationale, les organisations criminelles installées sur le territoire du Nigeria ou dans la diaspora nigériane à l'étranger, principalement en Amérique du Nord et en Europe mais aussi dans divers pays d'Amérique latine et dans certaines parties de l'Asie du Sud et du Sud-Est, administrent des opérations de blanchiment d'argent, de trafic de stupéfiants, etc. Les profits tirés de ces opérations sont estimés à plus de 750 millions de dollars américains annuellement (Service InterPress, Rome, 2 février 1995). Dans le secteur du trafic des stupéfiants, les Nigérians étaient à l'origine utilisés comme passeurs par des producteurs étrangers, mais depuis quelque temps les organisations criminelles nigérianes achètent des stupéfiants dans les régions de production et s'organisent pour les transborder au Nigeria ou ailleurs en Afrique et pour ensuite les acheminer vers le pays des consommateurs. Ainsi, ils achètent de l'héroïne en Asie du Sud, la transportent via l'Afrique de l'Est et le Nigeria (ou un autre pays d'Afrique occidentale), puis l'expédient vers l'Europe ou l'Amérique du Nord—et parfois même la distribuent par leur propre réseau de «marketing» là-bas. D'après les estimations, 30 à 40 pour 100 de l'héroïne qui entre aux États- Unis passerait entre les mains de ces organisations criminelles. En plus de transborder de l'héroïne, il semble, d'après les médias nigérians, qu'ils font entrer au pays de la marijuana indienne relativement moins chère pour répondre aux besoins des consommateurs intérieurs et qu'ils en introduisent également en contrebande dans le marché de consommation nanti de l'Afrique du Sud [connu là-bas sous le nom de dagga], provoquant des augmentations considérables de la consommation intérieure dans les deux pays. Dans le cas de la cocaïne, certaines preuves donnent à penser que ces organisations criminelles se sont associées à des cartels sud-américains pour faire entrer de la cocaïne en Amérique du Nord.

Au Nigeria, le trafic des stupéfiants, tout comme la violence et les profits criminels qu'il entraîne, a augmenté à un tel point qu'une Agence nationale de répression des toxicomanies (NDLEA) a été créée en 1989. Elle a toutefois elle aussi acquis une réputation d'avidité et de corruption. Après avoir dirigé l'enquête gouvernementale sur l'incapacité de la NDLEA d'éradiquer le trafic intérieur des stupéfiants, le major général Musa Bameyi en a été nommé le chef en 1994 et a été investi des pouvoirs nécessaires pour réformer l'agence. L'une des premières mesures qu'il a prises a été de demander le retour de la peine capitale pour les «barons de la drogue» du pays. Malgré tout, la filière nigériane du trafic mondial de la drogue est encore en pleine expansion (The Economist, Londres, 26 août 1995).

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La diversité de la «nation» nigériane

Le Nigeria n'est pas le plus grand pays d'Afrique en terme de territoire, mais il en est le plus peuplé, puisqu'il compte environ 100 millions d'habitants, d'après le recensement encore non proclamé de 1992, et une mosaïque de plus de 250 groupes ethniques ou linguistiques. Les trois principales ethnies—les Haoussas-Fulanis dans le Nord, les Yorubas dans le Sud-Ouest et les Ibos dans le Sud-Est—représentent environ les trois-quarts de la population nigériane. Il existe depuis toujours des tensions sociales et économiques entre le Nord musulman et le Sud principalement chrétien, mais même ces grands pôles sont eux-mêmes divisés (nombreuses minorités ethniques dans les États du Nord, population yoruba musulmane considérable dans les États du Sud-Ouest, nombreuses minorités dans l'Est, par exemple). En outre, les États du Middle Belt, dont la population est dispersée, sont constitués de minorités ethniques musulmanes. Bien que les régimes militaires nigérians aient été dominés par des officiers musulmans du Nord, ils n'ont pas imposé la loi islamique (charia) à l'échelle du pays, et ils ont même suspendu la participation du Nigeria à l'Organisation de la conférence islamique (OCI), dont il était membre depuis 1986. De plus, l'armée a réprimé énergiquement de graves éruptions de violence entre musulmans et chrétiens dans le Nord impliquant des intégristes islamiques.

Par ailleurs, la démographie fait constamment l'objet de «jeux politiques», c'est-à-dire de tentatives visant à gonfler les données sur la population régionale, parce que les recensements nationaux déterminent la répartition des fonds fédéraux consacrés à l'administration, à l'infrastructure, à l'éducation, à la santé, etc. Même si le recensement de 1952-1953, soit avant l'indépendance, n'avait été qu'un dénombrement approximatif, il avait établi qu'environ 55 pour 100 de la population vivait dans le nord du pays. Depuis, aucun des recensements nationaux—celui qui a été écarté en 1962-1963, celui qui a été officiellement désavoué en 1973 et l'actuel recensement de 1992 qui n'a pas encore été proclamé et qui semble indiquer qu'une majorité de la population vit maintenant dans le Sud—n'a été accepté par toutes les sections du pays.

Ces «jeux politiques de la démographie» sont aussi liés aux demandes constantes de création d'États «nouveaux» à l'intérieur du Nigeria afin de donner une voix aux intérêts des minorités ethniques au sein de l'administration et d'accroître le nombre des réseaux de clientélisme. Composée au départ de trois (puis quatre) régions avant la guerre civile (de 1966 à 1970), la Fédération du Nigeria a plus tard été subdivisée en 12 États (avril 1968). Elle a ensuite été portée à 19 États en mars 1976, puis à 21 États plus un nouveau territoire de la capitale fédérale à Abuja en 1987, puis enfin à 30 États en août 1991. La constitution actuelle, qui date de 1989, prévoit la création d'autres États encore. Ces redécoupages successifs d'un même territoire peuvent être considérés comme visant d'une part à estomper les polarisations régionales, ethniques et confessionnelles du pays et, d'autre part, à créer de nouveaux «fiefs de clientélisme» (réseaux) afin de morceler les bases de pouvoir régionales des élites politiques traditionnelles.

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Vingt-cinq ans de régime militaire

Depuis leur indépendance de la Grande-Bretagne en 1960, les Nigérians ont connu plus de 25 ans de régime militaire, et uniquement deux courtes périodes d'administration civil, soit la 1re République (1960-1966) et la IIe République (1979-1983). L'intervention de l'armée dans la politique nigériane a commencé lorsque la 1re République civile a succombé à un premier putsch, en 1966, dont les responsables ont immédiatement été évincés dans le contre-coup subséquent, et qui a conduit à la tentative de sécession de la portion est du pays, dominée par les Ibos et renommée Biafra. L'armée fédérale ayant vaincu les forces du Biafra dans l'Est, le Conseil militaire suprême a continué de régner sous la direction du général Yakubu Gowon, qui soutenait que la réconciliation et la reconstruction nationales ne seraient possibles que sous une administration militaire «neutre». Pendant cette période, le Nigeria est devenu le quatrième plus important producteur de l'OPEP, profitant de la manne de la rente pétrolière à la suite de la hausse des cours mondiaux en 1973. Ce boom pétrolier a favorisé les efforts d'industrialisation rapide du pays, un constant état d'agitation politique et l'essor de la corruption.

Les dirigeants militaires du Nigeria ont investi des milliards de pétro-dollars dans la mise au point de divers mégaprojets industriels prestigieux et dans la construction d'une nouvelle infrastructure massive nationale d'autoroutes, d'aéroports, de réseaux de télécommunications, d'universités, de complexes gouvernementaux, d'une nouvelle capitale, ainsi que d'un réseau de bases militaires et d'armement perfectionné. Toutefois, même si le pays «baignait dans les pétro-dollars», ces projets grandioses ont fourni énormément d'occasions de complots de corruption, dont les suppléments sur les appels d'offres et les demandes frauduleuses d'avances pour des ventes réelles ou fictives de pétrole.

Malgré sa richesse pétrolière et plus de deux décennies de programmes d'industrialisation, le Nigeria n'a pas atteint deux objectifs nationaux étroitement liés : un gouvernement élu et responsable et une économie industrialisée. À la place, les dépenses massives du gouvernement et la corruption omniprésente découlant des revenus du pétrole auparavant immenses ont réduit le Nigeria à son statut actuel de pays parmi les moins avancés (PMA) selon le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). Seuls ses efforts largement claironnés en vue d'atteindre son autre objectif national, celui de se faire reconnaître comme «la superpuissance régionale africaine» en termes de population, d'importance économique et de force militaire, semblent avoir été reconnus, du moins en Afrique occidentale.

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Le transfert du pouvoir par le général Obasanjo

En 1975, le général Gowon a été destitué après être revenu sur sa promesse de «remettre le pouvoir à un régime civil d'ici 1976». Le nouveau régime du général Murtala Mohammed a rapidement pris des mesures pour écarter les fonctionnaires corrompus et insister sur le développement national et la tenue d'élections. Cependant, Mohammed ayant été assassiné au cours d'un contre-coup d'État raté en février 1976, son chef d'état-major,le général Olasegun Obasanjo , lui a succédé et a repris à son compte l'engagement à restituer le pouvoir aux civils. Après une série d'élections tenues en 1979, Obasanjo a de son propre chef renoncé au pouvoir au profit du gouvernement de la IIe République civile, présidée par Shehu Shagari.

Cette deuxième tentative de régime civil a cependant elle aussi été un échec, en raison du clientélisme politique massif, de la corruption débridée et de la piètre qualité des politiciens. En 1983, l'armée est de nouveau intervenue, et le général Muhammad Buhari a déposé Shagari. Buhari a à son tour été remplacé en 1985, à la suite d'une révolution de palais dirigée par le général Ibrahim Babangida. Malgré l'appui populaire initial, le régime Babangida n'est pas arrivé lui non plus à assurer la croissance économique. Il a refusé d'appliquer les directives sévères imposées par le Fonds monétaire international en échange d'une assistance financière et a poursuivi les politiques d'austérité nationale et de contrôle monétaire de son prédécesseur. Malgré tout, l'effondrement des revenus du pétrole en raison de la chute des cours mondiaux a continué de miner l'économie, provoquant une agitation ouvrière et un nombre croissant d'émeutes étudiantes visant à protester contre le régime militaire et l'interdiction des activités politiques.

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L'échec de la «démo-cratisation africaine» au Nigeria

Le régime Babangida s'étant engagé à maintes reprises à préparer la voie au retour à un régime civil, il a pour ce faire lentement conçu un «processus complexe» que les partis politiques devaient respecter. Les élections présidentielles, qui devaient proclamer la IIIe République du Nigeria, ont été tenues le 12 juin 1993. Toutefois, au beau milieu de la publication des résultats du scrutin, le général Babangida a annulé les élections, que des observateurs internationaux avaient pourtant déclarées libres et équitables, et a refusé de remettre le pouvoir politique au vainqueur reconnu, le chef Moshood Abiola.

Après cette «élection volée», les protestations se sont faites plus véhémentes, surtout autour de Lagos, et de nombreuses organisations d'opposition ont vu le jour. Plusieurs dirigeants de l'opposition ont été emprisonnés alors que quelques uns furent offert des postes au gouvernement par le régime militaire.

Comme un grand nombre des dirigeants de l'opposition, dont le chef Abiola, sont en prison ou en résidence surveillée, il n'y a actuellement aucun mouvement démocratique à l'échelle nationale, ni aucun «gouvernement en attente». Le Conseil national de libération du Nigeria, dont la formation récente a été annoncée par le lauréat nigérian du prix Nobel de littérature, Wole Soyinka, maintenant en exil, tente de coordonner les divers mouvements d'opposition. Il a également été question de créer un «parti fort soutenu par l'armée» sur le modèle égyptien, mais la classe militaire du Nigeria peut-elle avoir une place dans un processus de démocratisation?

Les Nigérians voient leur niveau de vie diminuer constamment, mais ils n'ont encore aucun représentant unique pour coordonner leur colère et leurs appels à la réforme. Le régime Abacha s'enorgueillissait du statut de puissance régionale du Nigeria lorsqu'il a fait campagne pour obtenir que le siège africain au Conseil de sécurité de l'ONU lui soit proposé, mais pendant ce temps l'estime de soi nationale dégringole. La réaction de plus en plus répressive du régime au mécontentement populaire est devenue le point de mire d'une explosion nationale d'indignation populaire. Toutefois, comme les élites militaire et civile sont pareillement profondément corrompues, le professeur Claude Ake, l'un des principaux intellectuels du pays, écrivait «nos problèmes [ceux du Nigeria] vont au-delà de la démocratie... Nous préférons consommer sans produire; c'est pourquoi nous contestons le pouvoir politique aussi farouchement. Le pouvoir politique nous fournit les ressources coercitives nécessaires pour nous approprier tout ce que nous voulons et le consommer» [New York Times, 30 octobre 1995]. Le processus de démocratisation ne sera possible que lorsque le pouvoir politique aura pris ses distances par rapport à la malversation et à l'enrichissement personnel, surtout à l'échelle où cela se fait au Nigeria.

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Crise de légitimité nationale

Dans son rapport annuel de 1994, la Banque centrale du Nigeria reconnaît que les conditions économiques du pays ont empiré pour la quatrième année consécutive. La prospérité que devait entraîner l'industrialisation nationale pour les catégories professionnelles et les travailleurs industriels ne s'est pas produite. Les universités, qui ont longtemps été considérées comme l'un des principaux moyens de parvenir à la prospérité personnelle et à un statut social plus élevé, sont sous-financées depuis une décennie. Les protestations d'opposition à l'armée organisées par les enseignants et les étudiants ont à maintes reprises entraîné la fermeture d'établissements par les régimes militaires successifs. En outre, bien qu'essentiels à l'objectif d'industrialisation du Nigeria, de nombreux étudiants nigérians partis à l'étranger pour faire des études professionnelles ou techniques décident de ne pas revenir ou, le pays n'ayant pas réussi son démarrage économique, rejoignent la diaspora nigériane outre-mer.

L'agriculture nationale n'étant toujours pas en mesure de fournir les produits alimentaires de base à ce qui équivaut aux prix subventionnés exigés par les citadins, le mécontentement croît. Comme de nombreux Nigérians urbains sont incapables de se nourrir adéquatement au moyen de leurs salaires (souvent payés des mois en retard), le gouvernement est contraint de chercher un financement international pour importer des quantités massives de produits alimentaires afin de contenir l'agitation urbaine. Les services sociaux et de santé de base continuent de se détériorer en raison d'un manque de ressources financières et humaines. Le SIDA fait toujours de nombreuses victimes chez les fonctionnaires gouvernementaux, les gens d'affaires et les groupes professionnels des centres urbains, tandis que le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) continue de se répandre le long des principales artères de transport et dans les secteurs ruraux.

Cet échec du rêve nigérian d'un gouvernement responsable, d'une industrialisation nationale et d'un statut international a plongé le gouvernement central dans une grave crise de légitimité nationale. Si les critiques du développement économique africain notent que le Nigeria souffre d'un cycle familier en Afrique de pauvreté, de coups d'État et de violence ethnique, les Nigérians considèrent leur population importante quoique diverse et leurs vastes richesses pétrolières comme des forces et le fondement éventuel d'un démarrage économique réussi. Ces dernières années cependant, ce rêve national de prospérité et d'industrialisation financé par le pétrole a été remplacé par un cercle vicieux dans lequel la pauvreté urbaine et la rareté des biens de consommation croissent pour la plupart des Nigérians. En outre, les élites militaire et politique nigérianes font montre d'une jalousie à peine dissimulée face à l'ascension sur le continent de l'Afrique du Sud, dont le gouvernement multiracial jouit d'une légitimité à l'échelle nationale depuis les élections générales de 1994 couronnées de succès.

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Faiblesses des régimes militaires nigériens

Au cours de ces 25 années de régime militaire, des «conseils suprêmes» dominés par l'armée ont dicté des politiques nationales, réparti les fonds fédéraux, obtenu la collaboration des politiciens de l'opposition au moyen de «positions et d'à-côtés» et lentement établi des règles, qu'ils ont ensuite révoquées, régissant les activités politiques futures. Même s'ils se prétendent compétents pour organiser et construire le pays, les régimes militaires ont maintes et maintes fois fait montre d'un manque d'expertise dans la gestion de l'économie du Nigeria. À la place, ils se sont assurés la collaboration d'anciens politiciens, d'universitaires et autres à qui ils ont confié des postes au sein des ministères. La persistance de la corruption sur une large échelle empêchant toute amélioration de la situation économique, ces collaborateurs finissent souvent par se faire congédier et, tôt ou tard, les dirigeants du régime sont renversés par un nouveau coup d'État. L'effondrement total de la justification des dépenses publiques a été mise en lumière dans le rapport de 1994 de Pius Okigbo, qui a constaté que de 1988 à juin 1994, les «comptes spéciaux» extraordinaires injustifiés représentaient quelque 12,5 milliards de dollars américains en revenus du gouvernement [Africa Confidential, Londres, 4 novembre 1994].

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Faiblesses constantes de la «mono-économie» du Nigeria

La majorité de la population vit de l'agriculture de subsistance, mais le gouvernement du Nigeria dépend toujours, pour la majeure partie de ses revenus, des exportations pétrolières. Toutefois, malgré qu'il soit le quatrième producteur de pétrole de l'OPEP, sa dette extérieure a, au cours des dix dernières années, augmenté à plus de 30 milliards de dollars, la plus grosse en Afrique et l'équivalent du PIB du pays, et son service mobilise 5 milliards de dollars annuellement. Selon un rapport interne de la Banque mondiale datant de novembre 1991, «la mauvaise gestion systématique des ressources publiques au Nigeria n'est pas viable» [Christian Science Monitor, Boston, 5 août 1992].

Malgré une économie reposant sur un système de transport terrestre de camions et de «taxis longue distance» pour la distribution, les Nigérians souffrent fréquemment de pénuries d'essence, dues à une énorme demande des consommateurs et à une distribution médiocre. Le chômage est répandu et croissant, et l'inflation est de près de 100 pour 100 annuellement. Pour ajouter encore à cette détérioration de la situation, les revenus annuels totaux du pétrole, qui représentent entre 80 et 90 pour 100 des profits du pays à l'étranger, ont diminué de plus de la moitié à la suite d'une combinaison de mauvaise gestion et de la chute des cours [New York Times, 10 juillet 1995]. Pour s'assurer un accès exclusif aux revenus encore considérables du pétrole versés dans le Fonds spécial en fiducie du pétrole, le régime militaire en vertu du décret no 25 (1994) a placé le fonds en fiducie sous le contrôle du chef de l'État, soit le général Abacha, et d'un organisme spécial de dix hommes nommés par lui pour le gérer.

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Pressions internationales en faveur de la démocratisation

Même avant de suspendre le Nigeria, le Commonwealth par le biais d'une «diplomatie discrète» tentait de le presser de respecter les principes relatifs au bon gouvernement adoptés en 1991 à Harare. En décembre 1994, son secrétaire général, le chef Emeka Anyaoku—le plus haut fonctionnaire international du Nigeria—a fermement condamné le régime militaire dans un discours qu'il a prononcé à Abuja, dans lequel il soutenait que l'«armée [nigériane] ne devrait pas avoir une place en politique... Gouvernement militaire et gestion responsable des affaires publiques sont diamétralement opposés» [Commonwealth Currents, Londres, janvier 1995]. De même, les responsables de la Commonwealth Human Rights Initiative (CHRI)—dont Flora MacDonald du Canada faisait partie—ont fait enquête sur la situation au Nigeria et dans leur rapport de 1995 Nigeria: Stolen by Generals ont lancé un appel à l'acceptation des résultats du scrutin de 1993 et à la libération de tous les prisonniers politiques. Contrairement au Commonwealth, qui a décidé de suspendre le Nigeria et songe à lui imposer des sanctions, les participants au Sommet de la francophonie, réunis au Bénin en décembre 1995, ont opté pour une «critique indulgente» de la situation au Nigeria.

De son côté, le président sud-africain Nelson Mandela fait campagne pour que des sanctions sévères soient imposées au Nigeria, y compris pétrolières, afin que la démocratie soit chose faite dans «les plus brefs délais possibles». Tout en critiquant le mouvement d'opposition, qu'il a qualifié de «faible et inefficace», Mandela constate que le retrait du général Abacha dépend finalement des Nigérians eux-mêmes [The Independent, Londres, 27 novembre 1995]. Fait intéressant, ce sont les critiques de l'Afrique du Sud qui ont suscité les réactions les plus vives du régime nigérian—en partie en raison de l'appui financier assuré par le Nigeria à la lutte contre l'apartheid et de ses efforts pour faire respecter l'embargo pétrolier contre les régimes blancs de la Rhodésie et de l'Afrique du Sud.

Un embargo sur le pétrole nigérian serait valable parce que la perte de revenus d'exportation montrerait au régime Abacha que la détérioration défavorable et totalement inacceptable de l'économie, et avec elle de la stabilité nationale, entraînera des sanctions si elle se poursuit. Comme le Nigeria tire de l'exportation pétrolière des profits d'environ 40 millions de dollars américains quotidiennement, dont 60 à 80 pour 100 proviennent du pétrole brut à basse teneur en soufre exporté aux États-Unis (New York Times, 28 mars 1995), des sanctions pétrolières canadiennes à elles seules ne seraient que symboliques. Toutefois, si d'autres pays industrialisés, dont les États-Unis, la Grande-Bretagne et les membres du Commonwealth et de la Francophonie, étaient activement encouragés à le soutenir, un tel embargo pourrait avoir une incidence considérable—comme les sanctions canadiennes contre l'apartheid en Afrique du Sud. Aux États- Unis, le groupe de pressions africano-américain TransAfrica, dont la campagne pour que des sanctions soient imposées contre l'apartheid en Afrique du Sud a conduit à l'imposition de sanctions américaines à la fin des années 80, ferait bon accueil à une telle solidarité internationale pour sa bruyante campagne pour obtenir des sanctions américaines contre le Nigeria.

Un embargo pétrolier international aurait de terribles conséquences pour l'économie nigériane déjà chancelante, provoquant une reprise des grèves ouvrières et des émeutes urbaines. Cela pourrait donner au régime Abacha l'excuse de la «sécurité nationale» pour s'accrocher au pouvoir politique. Toutefois, l'effondrement du gouvernement central—même s'il s'agit d'un régime militaire—pourrait porter un coup mortel à l'«identité nationale» très fragile du pays, en retirant presque certainement ses derniers appuis à l'économie nationale et en fragmentant le pays. Des factions existantes à l'intérieur de l'armée tenteraient de se rendre maîtres par les armes des champs pétroliers du Sud-Est et des principaux centres urbains du Nord et du Sud-Ouest.

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Devenir un «État raté»?

Même sans sanctions économiques, le Nigeria risque de devenir ce que le secrétaire général de l'ONU Boutros Boutros-Ghali a appelé «un État raté», comme la Yougoslavie, Haïti et la Somalie. Dans son Rapport mondial sur le développement humain 1994, le PNUD, au chapitre des prédictions de la désintégration sociale, mentionnait que le Nigeria était extrêmement vulnérable, en raison des vastes disparités sociales et économiques entre ses États, qu'il considérait comme parmi les pires au monde.

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Perspectives

À court terme, toute perspective de démocratisation au Nigeria—et avec elle, d'une halte de sa détérioration économique—dépend de l'émergence possible de dirigeants politiques, qu'ils soient militaires ou civils, qui exécreraient avec zèle la corruption flagrante et la brutalité oppressive qui caractérisent de plus en plus le régime militaire Abacha. C'est précisément le risque d'une telle réaction extrême qui inquiète le plus le général Abacha et son cercle intime de commandants militaires. Ils craignent continuellement de futurs putschs - en particulier des coups d'État menés par un poignée d'officiers subalternes d'États du Middle Belt ou du Sud. Par contre, l'opposition civile est actuellement peu menaçante : elle est fractionnelle et manque de coordination centrale, malgré les efforts du Conseil de libération nationale, créé récemment. De plus, de nombreux personnages importants de l'opposition et anciens dirigeants politiques sont toujours susceptibles d'accepter des postes au gouvernement. Enfin, il existe peu de preuves de sentiments sécessionnistes parmi les divers petits groupes ethniques du Nigeria. De telles pressions fragmentaires sont canalisées en appels à la création de nouveaux États, dépendants du monopole exercé par le gouvernement central sur les revenus du pétrole.

À l'échelle internationale, en dépit de critiques étrangères croissantes, le régime Abacha est peu soucieux des protestations des gouvernements occidentaux, des organisations internationales comme le Commonwealth, et des défenseurs des droits de la personne, ainsi que de leurs récents appels à des sanctions pétrolières. Seul l'appel de l'Afrique du Sud à un embargo pétrolier a suscité une vive réaction du régime. Les relations extrêmement tendues entre les deux pays africains à l'heure actuelle pourraient fournir au président Mandela l'influence nécessaire pour obtenir par médiation que le régime Abacha finisse par accepter de remettre le pouvoir à une administration civile présidée par le chef Abiola.

Si les tendances sociétales et économiques actuelles se maintiennent au Nigeria, elles auront inévitablement un certain nombre de conséquences à moyen et à long termes. Comme ils auront peu d'argent pour entretenir l'infrastructure et l'équipement actuels, les services gouvernementaux et les industries manufacturières vont continuer de décliner, faisant dégringoler encore davantage l'économie. Si l'économie s'effondre, il y aura peu de nouveaux investissements étrangers au Nigeria, à l'exception peut-être de rentrées de capitaux «à hauts risques et à hauts profits». Toutefois, à court terme, même ces fonds seront probablement investis dans le trafic des devises, les investissements frauduleux, le blanchiment d'argent et d'autres activités illégales.

Liés à cette triste perspective actuelle, un certain nombre d'événements perturbateurs pourraient déboucher sur l'effondrement social et économique du pays. Sur la scène politique, le décès en prison du chef Abiola, qui est actuellement en mauvaise santé, pourrait être l'étincelle provoquant des soulèvements urbains massifs, surtout dans le Sud-Ouest. Toutefois, le régime Abacha semble préférer risquer de le voir «mourir en martyr en prison» plutôt que de le libérer pendant la période de transition politique qu'il a lui-même décrétée. Sur la scène économique, divers facteurs internationaux pourraient affecter la valeur de l'économie nigériane déjà chancelante, dont une nouvelle baisse des cours mondiaux du pétrole et des revenus qui en découlent, une nouvelle dévaluation du naira et/ou l'effondrement de sa convertibilité, ce qui aurait des répercussions massives sur la balance des paiements et sur le remboursement de la dette, ou une chute drastique des réserves en devises étrangères, qui mettrait un terme aux importations. Sur la scène sociale, de nouvelles éruptions de violence entre chrétiens et musulmans sur une large échelle dans des villes du nord du Nigeria, qui pourraient être provoquées par des intégristes islamiques, risquent de faire éclater des tensions régionales.

Ce qui est certain c'est qu'à l'échelle nationale il y aura une nouvelle désintégration sociale découlant de facteurs perturbateurs comme un affaiblissement des services de santé publics associé à une augmentation du nombre des cas de VIH ou de SIDA, un approvisionnement en électricité de plus en plus erratique et une production agricole nationale inadéquate associée à des restrictions gouvernementales des importations de denrées alimentaires. Plus les soulèvements urbains et régionaux se feront nombreux, plus il y aura de nouvelles tentatives de coups d'État et avec elles, de risques d'un putsch réussi par des officiers militaires subalternes.

Par contre, les perspectives de stabilité du Nigeria semblent reposer sur la définition d'un rôle politique permanent pour sa «classe militaire» à l'intérieur de tout processus de démocratisation. Tant que cela ne sera pas fait, le statu quo sera maintenu : les dirigeants militaires «administreront» la descente du pays sur la pente savonneuse menant à l'«État raté». Dans un tel état d'anarchie, des groupes armés régionaux se disputeront les secteurs urbains du pays et ses principales ressources naturelles, en particulier les champs de pétrole du Sud- Ouest—probablement avec l'aide d'intérêts étrangers. Il faudra alors des interventions humanitaires internationales massives pour venir en aide aux millions de civils déplacés ainsi que des appels à une opération régionale de maintien de la paix pour séparer les combattants.

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Glossaire des principaux intervenants au Nigeria (au mois de janvier 1996)

Général Sani ABACHA (homme du Nord, de l'État de Kano)—Actuellement président du Conseil transitoire de gouvernement (PRC), dominé par l'armée et actuellement au pouvoir, et président ou chef d'État, commandant en chef des Forces armées nigérianes et ministre de la Défense depuis le coup d'État d'octobre 1993 qui a renversé le Gouvernement national intérimaire (GNI) mis en place en août 1993 à la suite de l'expulsion du chef militaire antérieur, le général Ibrahim BABANGIDA (homme du Nord, de l'État du Niger). Abacha avait participé au putsch de 1983 qui a mis fin à la IIe République (1979-1983) civile, présidée par Alhaji Shehu SHAGARI, et porté au pouvoir le général Muhammadu BUHARI (homme du Nord, de l'État de Borno), ainsi qu'au coup d'État de 1985 qui avait porté Babangida au pouvoir et auprès duquel il avait servi comme ministre de la Défense.[Retournez]

Chef Moshood Kasimavo Olawale ABIOLA (Yoruba musulman du sud-ouest du Nigeria)—Vainqueur reconnu du scrutin présidentiel du 12 juin 1993, annulé par l'armée, qui aurait transféré le pouvoir à une IIIe République civile, il a été incarcéré en juin 1994 en vertu d'accusations de trahison déposées par l'actuel régime militaire Abacha. Souvent appelé MKO par les journalistes et les défenseurs des droits civils du Nigeria, Abiola refuse résolument toute mise en liberté sous condition - malgré sa santé qui se détériore - si son mandat électoral n'est pas reconnu et si le pouvoir ne lui est pas remis. En janvier 1996, les médias nigérians affirmaient que les autorités militaires exigent maintenant qu'Abiola non seulement mette un terme à toutes ses activités politiques, mais aussi quitte le pays en échange de la liberté—ce qu'il refuse de faire.[Retournez]

Chef Emeka ANYAOKU (Ibo du sud-est du Nigeria)—Secrétaire général du Commonwealth installé à Londres (Royaume-Uni) et ancien ministre nigérian des Affaires étrangères dans les années 70, il a prononcé le 19 décembre 1994 à Abuja, la capitale nationale, un discours condamnant fermement le régime militaire au Nigeria.[Retournez]

Lieutenant général Oladipo DIYA (Yoruba du sud-ouest du Nigeria)—À titre de chef de l'état- major de la Défense après l'expulsion du général Babangida, Diya a assisté le général Abacha au cours du coup d'État d'octobre 1993. Actuellement chef de l'état-major général, il est le bras droit d'Abacha au sein du Conseil provisoire de gouvernement (PRC) et le premier ministre du régime militaire.

Conseil national de libération du Nigeria (NALICON)—Créé en juin 1995, le Conseil, qui compte 17 membres, espère rallier et coordonner l'opposition nationale au régime Abacha, selon son porte-parole le professeur Wole SOYINKA, lauréat nigérian du Prix Nobel de littérature qui a été forcé de s'exiler en 1994.[Retournez]

Général (retraité) Olasegun OBASANJO (Yoruba du sud-ouest du Nigeria)—Après l'assassinat du chef d'État militaire, le général Murtala Ramat MUHAMMED, en février 1976, Obasanjo (Yoruba) a assumé la direction de ce qui était alors le Conseil militaire suprême (SMC) à titre de chef de l'état-major des Forces armées. Lorsque Obasanjo a de son propre chef remis le pouvoir à des civils élus en 1979, il est devenu le seul dirigeant militaire de l'histoire du Nigeria à le faire. Il a alors pris sa retraite et il est depuis l'un des principaux porte-parole de l'Afrique à l'échelle internationale. Le 13 mars 1995, Obasanjo a été arrêté en vertu d'accusations de trahison pour avoir soi-disant planifié un coup d'État contre le régime Abacha en plus de faire partie du mouvement d'opposition appelant à un retour à un régime civil—il est toujours en prison.[Retournez]

Ooni d'Ife, Oba Okunade SIJUWADE—Plus prestigieux chef souverain traditionnel parmi les groupes ethniques yorubas du sud-ouest du Nigeria, car Ife est réputé être le lieu d'origine de tous les Yorubas.

Chef Ernest SHONEKAN (Yoruba du sud-ouest du Nigeria)—Président du Conseil provisoire, créé en janvier 1993 et composé d'officiers et de ministres triés sur le volet par le général Babangida pour faciliter la transition vers un gouvernement civil. Après l'«expulsion» de Babangida en août 1993, Shonekan a été nommé chef du nouveau Gouvernement national intérimaire (GNI) jusqu'à ce que les «nouvelles» élections présidentielles proposées puissent être tenues en 1994, mais il a été écarté lorsque le général Abacha est passé au ministère de la Défense en novembre 1993.

Lieutenant-général (retraité) Shehu Musa YAR'ADUA (homme du Nord, de l'État de Katsina)—Anciennement chef de l'état-major des forces terrestres sous le général Obasanjo, il a pris sa retraite en même temps que ce dernier lorsque le pouvoir a été remis à un régime civil en 1979. Yar'Adua a été l'un des principaux participants à la Conférence constitutionnelle nationale de 1994. Toutefois, il a été arrêté le 10 mars 1995—avec 29 officiers et civils—et il est toujours en prison pour avoir soi-disant «comploté un coup d'État» contre le régime Abacha.


¹Essentiellement, les fraudes 419 (au moyen de fausses lettres) sont commises comme suit. Un «haut fonctionnaire» qui dit avoir en main un «trop-perçu» à la suite d'un contrat communique avec des gens d'affaires étrangers par lettre ou par télécopieur sur du papier à l'en-tête de la Banque centrale du Nigéria, de la Nigerian National Petroleum Corporation (une société d'État) ou d'un ministère, notamment celui de la Défense, et leur demande d'ouvrir pour eux un compte de banque à l'étranger pour y déposer la somme, toujours des millions. Lorsque les gens d'affaires étrangers acceptent, le «haut fonctionnaire» s'engage à leur verser 30 % de la somme. Ensuite, il leur demande de lui avancer de l'argent afin qu'il puisse payer les frais administratifs divers au Nigéria et d'envoyer ou d'apporter la somme - normalement il s'agit de dizaines de milliers de dollars; cependant, dès que les gens d'affaires en question se rendent au Nigéria, la somme peut s'élever à des centaines de milliers de dollars et son paiement devient l'une des conditions pour quitter le pays sain et sauf. Après le transfert des fonds au Nigéria, le «haut fonctionnaire» disparaît ou, si l'étranger vient le relancer, il le menace d'exiger davantage d'argent. Les fraudes 419 se poursuivent, comme toutes les autres activités criminelles qui minent le pays, à cause de l'avidité et de la réputation que le Nigérien s'est acquise d'être profondément corrompu. Les preuves de la collusion des représentants nigériens et de la police avec les fraudeurs se multiplient. [Magazine Time, 18 avril 1994, et Report on Business, Toronto, 25 avril 1995.][Retournez]

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Date de modification : 2005-11-14

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