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Consultation sur l'égalité entre les sexes


La problématique de la pauvreté pour les Canadiennes

Préparé pour Condition féminine Canada
Août 2005

Par: Monica Townson

Les opinions exprimées sont celles de l'auteure et ne reflètent pas nécessairement la politique officielle de Condition féminine Canada ou du gouvernement du Canada.

La pauvreté demeure encore et toujours un problème qui touche particulièrement les femmes. Bien que la situation se soit améliorée au cours de la dernière décennie, les femmes sont toujours plus susceptibles que les hommes d'avoir de faibles revenus. Cependant, les statistiques sur le faible revenu ne racontent pas toute l'histoire sur la pauvreté des femmes. Bien que les gouvernements et les groupes de revendication redoublent leurs efforts pour « faire de la pauvreté une histoire du passé », les Nations Unies ont suggéré que la pauvreté ne pouvait être éradiquée que si nous adoptions une vision plus globale de la pauvreté – une vision qui reconnaît que la pauvreté est plus qu'une insuffisance de revenus. D'après les Nations Unies, la pauvreté est « la négation des opportunités et des possibilités de choix les plus essentielles au développement humain, à savoir la longévité, la santé, la créativité, la liberté, le respect de soi-même et d'autrui et, enfin, des conditions de vie décentes »1.

L'exclusion sociale à laquelle de nombreuses femmes sont confrontées en raison des inégalités entre les sexes est nuisible, non seulement pour les femmes elles-mêmes mais aussi pour leurs familles et pour leurs collectivités. Les stratégies qui connaissent du succès dans la lutte contre la pauvreté doivent se pencher sur des enjeux liés au statut précaire des femmes et à leur manque d'autonomie2. Le manque d'accès aux études ou à des logements abordables, par exemple, pourrait signifier que les femmes ne puissent pas occuper une place dans la société à titre de membres à part entière et égale. L'inégalité économique des femmes et leur manque de revenus pourrait restreindre leur capacité de quitter des situations conjugales violentes et de se protéger, ainsi que de protéger leurs enfants de mauvais traitements et de blessures physiques. Le fait de vivre dans la pauvreté pourrait en fait aboutir à une mauvaise santé et une espérance de vie écourtée.


Mesurer la pauvreté

Le Canada ne possède pas de seuil de pauvreté officiel, mais les mesures les plus communes du faible revenu utilisent le seuil de faible revenu (SFR) calculé par Statistique Canada chaque année. Ces mesures évaluent le niveau de revenu avec lequel une famille ou une personne se trouverait dans une situation difficile parce qu'elle doit dépenser une plus grande partie de son revenu pour des nécessités telles que la nourriture, les vêtements et le logement que le ferait une famille moyenne de la même taille.

La plupart des groupes de revendication anti-pauvreté et de politique sociale, tels que le Conseil national du bien-être social, le Conseil canadien de développement social et divers groupes de femmes qui mesurent la pauvreté et établissent régulièrement des rapports à ce sujet, utilisent le seuil de faible revenu (SFR) avant impôt, qui mesure tout le revenu de la famille ou de la personne, y compris les transferts du gouvernement, tels que les pensions de vieillesse, les prestations d'assurance-emploi et l'aide sociale. Le SFR avant impôt est souvent appelé le « seuil de pauvreté » et les personnes qui gagnent un revenu inférieur au seuil sont décrites comme étant pauvres.

Statistique Canada préfère utiliser son SFR après impôt, qui tient compte de l'impôt sur le revenu que les personnes ont à payer, ainsi que les retenues d'impôt à la source et les exonérations fiscales qu'elles pourraient recevoir. Statistique Canada affirme que puisque l'achat de nécessités est effectué avec des dollars après impôt, il est plus logique d'utiliser le revenu après impôt des personnes pour tirer des conclusions sur leur bien-être économique3.

L'emphase récente placée sur le SFR après impôt pourrait avoir créé une confusion, car les taux de faible revenu déclarés par certains groupes de revendication ne sont pas toujours les mêmes que ceux déclarés par Statistique Canada. Dans ce rapport, nous utiliserons le SFR après impôt, sauf indication du contraire.


Les Canadiennes qui vivent d'un faible revenu

Près de 1,5 million de femmes adultes vivaient dans la pauvreté en 2003, année la plus récente pour laquelle il existe des données. Parmi les adultes âgés de 18 ans et plus, les femmes représentent 54 p. 100 des personnes vivant d'un faible revenu4

Pour certaines femmes, la pauvreté peut ne pas être un état persistant. Elles peuvent se trouver temporairement en dessous du seuil de pauvreté en raison d'un changement de circonstances, tel que la naissance d'un enfant ou la fin d'une relation conjugale. Mais Statistique Canada rapporte que sur une plus longue période de temps, le nombre de personnes qui se retrouvent avec un faible revenu à un point donné est beaucoup plus élevé que ce que l'on pourrait conclure des taux de faible revenu annuels. Les femmes sont plus susceptibles que les hommes d'avoir un faible revenu pendant une longue période. Il est également important de considérer le degré de pauvreté que vivent les femmes. Certaines femmes vivant dans la pauvreté ont des revenus qui sont nettement inférieurs (en milliers de dollars) au seuil de pauvreté.

Il existe de nombreuses raisons à la pauvreté des femmes : depuis les répartitions du travail rémunéré et non rémunéré, et la manière dont ces répartitions interagissent, jusqu'à la structure des programmes de soutien au revenu qui visent à protéger les citoyennes et les citoyens désavantagés. Mais la pauvreté des femmes est également étroitement liée à leurs antécédents culturels et à leur situation de famille.

Les femmes autochtones

Le pourcentage de femmes autochtones vivant dans la pauvreté représente plus du double de celui des femmes non autochtones qui sont pauvres. Au moment du recensement de 2001, selon les revenus avant impôt, plus de 36 p. 100 des femmes autochtones, comparativement à 17 p. 100 des femmes non autochtones, vivaient dans la pauvreté5. Comme beaucoup d'autres femmes vivant dans la pauvreté, les femmes autochtones sont particulièrement touchées par les politiques d'aide sociale des gouvernements provinciaux et territoriaux. Les femmes autochtones travaillant dans les réserves peuvent ne pas être couvertes par le Régime de pensions du Canada.

Les taux élevés de pauvreté parmi les Autochtones ont des conséquences désastreuses. Leur espérance de vie est de sept ans moins élevée que celle de l'ensemble de la population canadienne. En outre, il y a presque deux fois plus de morts infantiles parmi les Autochtones, un taux plus élevé que celui des quartiers les plus pauvres au Canada6.

Les femmes appartenant à une minorité visible et les immigrantes

Les données du recensement de 2001, selon les revenus avant impôt en 2000, indiquent que 29 p. 100 de femmes appartenant à une minorité visible vivaient dans la pauvreté. Alors que le taux de pauvreté pour toutes les femmes nées à l'étranger était de 23 p. 100, les femmes qui ont immigré au Canada entre 1991 et 2000 avaient un taux de pauvreté de 35 p. 100. Il est peut‑être important de noter que la majorité de ces femmes appartenaient également à des groupes de minorités visibles7.

Il est presque certain que le racisme et la discrimination contribuent aux taux élevés de pauvreté parmi les femmes d'origine ethnique différente. Les immigrantes peuvent également faire face à des difficultés pour trouver un emploi rémunéré parce que les titres de compétences qu'elles ont obtenus dans leurs pays d'origine ne sont pas reconnus au Canada. L'accès à la formation linguistique pose également un problème. De nombreuses personnes âgées immigrantes ne reçoivent pas les prestations de vieillesse, car elles n'ont pas vécu assez longtemps au Canada pour être admissibles à une prestation8.

Les femmes handicapées

Les données du recensement 2001, selon les revenus avant impôt en 2000, indiquent que 26 p.100 des femmes handicapées vivaient dans la pauvreté9. Les programmes provinciaux d'aide sociale peuvent offrir un soutien au revenu à ces femmes, mais les taux sont atrocement faibles. Les revenus du bien-être social pour les personnes célibataires handicapées étaient les moins élevés en Alberta et au Nouveau-Brunswick à 39 p. 100 du seuil de pauvreté et les plus élevés en Ontario à 59 p. 100 du seuil de pauvreté (selon les SFR avant impôt)10.

Les mères, chefs de familles monoparentales

Les femmes sont beaucoup plus susceptibles d'être pauvres si elles vivent seules, sans époux ou partenaire. Le degré de pauvreté des mères chefs de familles monoparentales pose un problème sérieux. Par exemple, en 2003, le revenu moyen gagné par les 208 000 femmes qui étaient chefs de familles monoparentales étaient de 6 300 $ en dessous du seuil de pauvreté11. Les tendances récentes ne sont pas encourageantes. Entre 1996 et 2001, le taux de faible revenu après impôt pour les femmes qui dirigeaient une famille monoparentale est tombé de 53 p. 100 à 34 p. 100. Mais ce taux a augmenté à 39 p. 100 en 2002 et n'a chuté que faiblement à 38 p. 100 en 2003. En revanche, le taux de faible revenu pour les familles monoparentales dirigées par un homme a baissé de moitié depuis 1996 – de 25 p. 100 à 12,6 p. 100 en 200312. Juste 8,4 p. 100 de toutes les familles canadiennes de deux personnes ou plus vivaient dans la pauvreté en 2003 et le taux de pauvreté pour les familles composées de deux parents non âgés et ayant des enfants était de 6,6 p. 10013.

De nombreuses familles monoparentales doivent compter sur une aide sociale versée par les gouvernements provinciaux et territoriaux. Mais les revenus de bien-être social pour les familles monoparentales, dont la plupart sont dirigées par des femmes, varient d'un chiffre aussi bas que 48 p. 100 du seuil de pauvreté (selon les SFR avant impôt de Statistique Canada) en Alberta, à un chiffre aussi élevé que 70 p. 100 du seuil de pauvreté à Terre‑Neuve‑et‑Labrador14.

Les femmes âgées vivant seules

En 2003, le taux de faible revenu pour les femmes âgées de 65 ans et plus était de 8,7 p. 100, comparativement à 4,4 p. 100 pour les hommes âgés15. Toutefois, au cours de la dernière décennie, le taux de pauvreté des femmes âgées vivant seules a varié entre 27 p. 100 et 19 p. 100, sans indiquer une tendance considérablement à la baisse au cours de cette période. En 2003, 19 p. 100 des femmes âgées vivant seules, comparativement à 15 p. 100 des hommes âgés vivant seuls, étaient considérées comme ayant un faible revenu16. Les revenus moyens des femmes âgées de 65 ans et plus qui vivaient seules et dans la pauvreté en 2003 étaient de 2 300 $ en dessous du seuil de pauvreté17.


Les questions stratégiques soulevées par la pauvreté des femmes

Il n'y a pas eu de tentative assez globale pour tenter de mettre fin à la pauvreté des femmes au Canada. Les politiques et les programmes existants semblent être inadéquats pour la tâche et travaillent souvent à contre‑courant.

Travail rémunéré, travail non rémunéré et faible revenu

La sagesse conventionnelle veut qu'un emploi (c'est-à-dire un emploi rémunéré) soit la meilleure protection contre la pauvreté. Mais comme le fait remarquer le Conseil national du bien-être social, bien qu'un grand pourcentage de personnes pauvres âgées de moins de 65 ans aient une certaine connexion à la population active rémunérée, il n'y a pas assez d'emplois à plein temps et il existe beaucoup trop d'emplois aux salaires très faibles18. Pour les femmes, certaines complications se rajoutent. Les femmes faisant partie de la population active gagnent encore moins, en moyenne, que les hommes, même lorsqu'elles sont employées à plein temps. Par exemple, en 2003, les revenus des femmes travaillant à plein temps durant toute une année s'élevaient en moyenne à 70,5 p. 100 des revenus moyens gagnés par des hommes qui travaillent à plein temps durant une année complète19.

Mais de nombreuses femmes ayant un emploi ne travaillent pas à plein temps durant toute l'année. La mondialisation et la restructuration du marché du travail ont entraîné une prolifération de conditions de travail non conventionnelles, telles que le travail temporaire ou à contrat, les emplois à temps partiel, le travail autonome sans personnel. De nombreuses travailleuses et de nombreux travailleurs sont devenus des détenteurs d'emplois multiples, travaillant à différents endroits pour joindre les deux bouts. Nombre de ces emplois sont mal rémunérés, il existe peu de sécurité d'emploi et il n'y a généralement pas d'accès aux avantages tels que les pensions, et c'est la raison pour laquelle on s'y réfère souvent comme des « emplois précaires ». Environ 40 p. 100 des femmes qui travaillent, comparativement à 30 p. 100 des hommes qui travaillent, occupent maintenant ce genre d'emploi20. Lorsque toutes les femmes sont comparées à tous les hommes sur le marché des emplois rémunérés, les revenus des femmes en 2003 atteignent en moyenne 63,6 p. 100 de ceux des hommes21.

Le travail non rémunéré que les femmes effectuent, particulièrement le soin des enfants ou des membres de famille âgés qui sont à leur charge, limite souvent le type d'emplois rémunérés qu'elles peuvent entreprendre ainsi que les heures qu'elles peuvent consacrer au travail rémunéré. Même les femmes qui occupent un emploi rémunéré à plein temps ont en moyenne moins d'heures que les hommes qui travaillent à plein temps. De nombreux emplois à plein temps sont également mal payés et incertains. Les faibles revenus contribuent à la pauvreté actuelle des femmes, mais ceux-ci et le manque de protection en matière de pensions ouvrent également la voie à de faibles revenus pour l'avenir lorsque les femmes deviennent âgées.

Les politiques telles que l'équité salariale et l'équité en matière d'emploi, qui visent à combler l'écart salarial entre les femmes et les hommes, peuvent être moins efficaces dans le marché du travail actuel, dans lequel de nombreuses femmes qui ont un emploi rémunéré n'ont pas de relation continue avec un seul employeur, et nombre d'entre-elles travaillent pour de petites entreprises dans le secteur des services. Les groupes de revendication ont exercé des pressions en faveur de l'augmentation du taux du salaire minimum établi par les gouvernements fédéral et provinciaux. Bien que certains économistes argumentent que la hausse du salaire minimum se traduira par des pertes d'emploi, il y a de plus en plus de preuves qui réfutent cette conclusion.

Le manque d'accès aux services de soutien et aux programmes de remplacement du revenu

Le manque d'accès aux services de soutien, et particulièrement le manque d'accès aux services abordables et fiables de garde d'enfants, limitent également la capacité des femmes de faire partie de la population active. En 2003, environ 38 p. 100 des femmes âgées de 25 à 44 ans qui occupaient un emploi à temps partiel ont affirmé qu'elles travaillaient à temps partiel parce qu'elles devaient prendre soin de leurs enfants ou parce qu'elles avaient d'autres responsabilités personnelles ou familiales. (Il s'agit peut-être d'une indication de l'état actuel du marché du travail qui montre que presque 33 p. 100 des femmes âgées de 25 à 44 ans qui travaillaient à temps partiel en 2003 ont dit qu'elles travaillaient à temps partiel parce qu'elles ne trouvaient pas d'emploi à plein temps)22. Il n'existe pas de politique globale sur la famille qui tienne compte des besoins des mères et des enfants.

Les prestations de maternité et les prestations parentales offertes en vertu des programmes d'assurance-emploi permettent de couvrir une période de 52 semaines (y compris un délai de carence de deux semaines) pour les nouveaux parents. Mais les travailleuses et les travailleurs autonomes ne sont pas couverts. Une nouvelle réglementation mise en application en 1997 a rendu difficile pour certaines femmes d'être admissibles – surtout si elles ont occupé un emploi à temps partiel. Les demandeuses et les demandeurs doivent avoir travaillé 600 heures au cours des 52 dernières semaines pour être admissibles aux prestations. Statistique Canada rapporte que la fraction des mères de nouveaux-nés qui reçoivent un soutien du revenu par l'entremise de l'assurance-emploi a augmenté régulièrement durant les années 1970 et 1980, mais qu'elle a cessé d'augmenter durant les années 1990. En 1998, environ 49 p. 100 des familles ayant un nouveau-né étaient admissibles à des prestations de maternité et elles en ont reçu, dans une proportion essentiellement semblable à celles de 198923. Les données provenant de L'Enquête sur la couverture de l'assurance-emploi, 2003 de Statistique Canada indiquent que 35 p. 100 des mères ayant un nouveau-né n'ont pas reçu de prestations cette année-là24.

En raison de la différence entre les heures moyennes travaillées par les femmes et les hommes, il est désormais plus facile pour les pères que pour les mères d'être admissibles aux prestations parentales. En outre, les prestations ne remplacent que 55 p. 100 du revenu habituel du prestataire, jusqu'à un maximum de 413 $ par semaine. Par conséquent, les nouvelles mères, et près de 90 p. 100 des personnes qui demandent des prestations parentales ou de maternité sont des mères, pourraient faire face à des difficultés financières lorsqu'elles prennent un congé de maternité ou un congé parental. Cependant, le taux des prestations est relativement plus élevé pour les prestataires faisant partie d'une famille à faible revenu (définie comme étant une famille dont le revenu net est établi à un maximum de 25 921 $ par année). Certains employeurs peuvent suppléer les prestations de maternité et les prestations parentales – particulièrement dans les cas où cette mesure a été négociée avec les syndicats grâce aux négociations collectives.

En vertu d'une entente avec le gouvernement fédéral conclue en mars 2005, le Québec établira son propre programme d'assurance parentale à compter du 1 er janvier 2006. Le nouveau programme couvrira les travailleuses et les travailleurs autonomes et, dans certaines conditions, il offrira des prestations aussi élevées que 75 p. 100 du revenu précédent. Des prestations plus élevées seront mises à la disposition des prestataires à faible revenu et l'admissibilité à celles‑ci ne dépendra pas des heures travaillées durant la période d'admissibilité. Au contraire, les employées et les employés et les travailleuses et travailleurs autonomes pourront être admissibles s'ils ont gagné des revenus d'au moins 2 000 $ durant la période d'admissibilité – généralement les 52 semaines précédant la période de prestation25.

L'admissibilité aux prestations régulières d'assurance-emploi a été rendue plus difficile pour les femmes depuis que les règles ont changé en 1997. Le Congrès du travail du Canada a estimé qu'en raison des changements, entre 1989 et 1999, le pourcentage des femmes au chômage qui étaient admissibles aux prestations a chuté de 70 p. 100 à 32 p. 100. La couverture pour les hommes au chômage a baissé de 77 p. 100 à 42 p. 10026. De plus, la manière dont les prestations sont calculées désavantage également les femmes qui sont de garde ou qui exercent d'autres types d'emplois atypiques, car même les semaines qui ne sont pas travaillées sont comptées dans le calcul des revenus hebdomadaires moyens sur lesquels se basent les prestations27.

Formation et travail autonome

Il est important de noter qu'un accès restreint au programme d'assurance-emploi peut également limiter l'accès des femmes à la formation qui peut être offerte aux prestataires de l'assurance-emploi et qui pourrait aider les femmes à améliorer leur productivité financière. Il est également à noter que l'assurance-emploi offre un programme visant à encourager les personnes à « créer leur propre emploi » en devenant travailleuses ou travailleurs autonomes. Ironiquement, une fois qu'elles le deviennent, ces personnes ne sont plus admissibles aux prestations d'assurance-emploi si elles ne travaillent plus. Une étude sur le travail autonome menée en 1996 démontre que l'écart de revenus entre les femmes et les hommes était plus grand parmi les travailleuses et travailleurs autonomes qu'au sein de la population des salariés, même après avoir tenu compte du fait que le travail à temps partiel était plus élevé parmi les femmes28.

De faibles revenus pour les femmes âgées et une protection restreinte en matière de pension pour les jeunes femmes

Le Supplément de revenu garanti (SRG) offre une prestation fondée sur le revenu pour les personnes âgées pauvres, avec des taux différents pour les célibataires et pour les époux ou partenaires d'un couple. Le taux pour les personnes mariées est basé sur le revenu conjoint du couple. Les femmes sont plus susceptibles que les hommes de recevoir le SRG. Par exemple, en juin 2005, les femmes représentaient environ 51 p. 100 des personnes qui ont commencé à recevoir la Sécurité de vieillesse (SV), mais elles représentaient 63 p. 100 de celles qui ont commencé à recevoir le SRG29.

Les taux élevés de pauvreté chez les femmes âgées qui vivent toutes seules pourraient persister dans l'avenir à moins qu'on ne fasse quelque chose pour aider les femmes à se préparer à un avenir financier sécuritaire avant la retraite. Le pourcentage de femmes qui exercent un emploi rémunéré et qui appartiennent à un régime de pension en milieu de travail a diminué de 42 p. 100 en 1992 à 39 p. 100 en 2002. Durant la même période, la protection en matière de pensions pour les hommes exerçant un emploi rémunéré a baissé de 48 p. 100 à 40 p. 10030. Le faible revenu des femmes entrave leur capacité d'accumuler des épargnes de retraite grâce aux contributions aux régimes enregistrés d'épargne-retraite. En outre, leurs faibles revenus et la répartition de leur travail rémunéré ou non rémunéré au cours de leur vie entraînent des pensions réduites du RPC qui est destiné à remplacer un pourcentage des revenus moyens lors de la retraite. Par exemple, la pension de retraite (RPC) moyenne mensuelle versée aux femmes qui venaient de prendre leur retraite en juin 2005 s'élevait seulement à 333,76 $, comparativement à une moyenne de 527,04 $ versée aux hommes qui venaient de prendre leur retraite31.

Taux d'aide sociale inadéquats

Les programmes d'aide sociale sont offerts par les provinces et les territoires aux personnes et aux familles dont les ressources sont inadéquates pour combler leurs besoins et qui ont épuisé les autres voies de soutien. Mais le Conseil national du bien-être social rapporte que la valeur de la plupart des prestations provinciales et territoriales de bien-être social et les prestations connexes ont continué de baisser en 2004, situant plusieurs des prestations à leurs taux les plus bas depuis les années 1980 après le rajustement pour l'inflation32.

Le gouvernement fédéral verse une Prestation nationale pour enfants à toutes les familles à faible revenu qui ont des enfants âgés de moins de 18 ans. En réalité, il existe une Prestation fiscale canadienne pour enfants et un Supplément de la prestation nationale pour enfants. Mais certaines provinces font une retenue du supplément pour les familles à faible revenu qui reçoivent une aide sociale. Par conséquent, ces familles ne s'en sortent pas mieux qu'avant.

Garantir un revenu de subsistance et autres propositions

Certains groupes de femmes préconisent désormais un « revenu de subsistance garanti » (RSG) universel qui serait établi à un niveau visant à assurer une « vie confortable », qui remplacerait tous les programmes actuels de soutien du revenu et qui serait versé par le gouvernement sur une base individuelle à chaque femme, chaque homme et chaque enfant au Canada. Toute personne ayant un revenu d'emploi ou une autre source de revenu se situant au-dessus d'un certain niveau devra apparemment rembourser son RSG par l'impôt. Bien que les estimations de coûts dépendront du niveau de revenu à garantir, la SV qui est versée aux personnes âgées de 65 ans et plus et retenue à la source pour les personnes qui gagnent un revenu plus élevé, paie moins de 500 $ par mois à environ 2,5 millions de personnes âgées. La SV coûte environ 20 milliards de dollars par année après avoir tenu compte des montants recouvrés par les retenues33.

Toutefois, la politique gouvernementale au Canada semble désormais s'éloigner de la responsabilité collective des programmes sociaux universels, qui sont considérés comme des mesures visant à protéger les personnes des effets du marché, et transfère la responsabilité aux personnes en mettant l'accent sur les programmes qui offrent des incitatifs pour aider les gens à intégrer le marché. Maintenant on préfère « habiliter plutôt que soutenir » les gens34. La nouvelle approche que l'on favorise dans les cercles de la politique sociale se fonde sur l'aide accordée aux gens pour qu'ils accumulent des actifs qui leur permettront de dépendre plus d'eux-mêmes – dans un sens, s'offrant ainsi leurs propres programmes de soutien du revenu. Les « politiques sociales fondées sur les actifs » mettent l'accent sur l'égalité des chances pour l'avenir, qui pour le moment nous éloigne de l'égalité des résultats. C'est une approche qui devrait sonner la clochette d'alarme pour les femmes à qui la longue expérience d'inégalité a appris que le fait de donner des « chances égales » à celles qui partent d'une position désavantageuse n'aboutit pas à des résultats égaux.


Au sujet de l'auteure :

Monica Townson est une chercheuse indépendante et une consultante qui oeuvre dans le domaine de la politique sociale. Elle est l'auteure de cinq livres et de nombreuses études et de nombreux rapports sur les pensions, ainsi que sur la situation économique des femmes. Elle a été présidente de la Commission de l'équité fiscale de l'Ontario et elle est consultante à la Commission économique des Nations Unies pour l'Europe en matière du rôle économique des femmes.



1 Programme des Nations Unies pour le développement (1998). New York : Publications des Nations Unies.

2 Ibid.

3 Statistique Canada (2005) Revenu au Canada, 2003. Numéro de catalogue 75-202-XIE.

4 Ibid.

5 Les données de recensement fournies par Statistique Canada se rapportent aux revenus de 2000.

6 Townson, Monica (1999) Health and Wealth: How Social and economic Factors Affect Our Well Being. Ottawa : Centre canadien de politiques alternatives et James Lormier and Co. Ltd.

7 Données de recensement fournies par Statistique Canada

8 Conseil national du bien-être social (2004) Profil de la pauvreté, 2001. Ottawa : Conseil national du bien-être social.

9 Données de recensement fournies par Statistique Canada

10 Conseil national du bien-être social (2005) Revenus de bien-être social, 2004.

11 Statistique Canada (2005) Revenu au Canada, 2003. Numéro de catalogue 75-202-XIE.

12 Ibid.

13 Ibid.

14 Conseil national du bien-être social (2005) Revenus de bien-être social, 2004.

15 Statistique Canada (2005) Revenu au Canada, 2003. Numéro de catalogue 75-202-XIE.

16 Ibid.

17 Ibid.

18 Conseil national du bien-être social (2004) Profil de la pauvreté, 2001.

19 Statistique Canada (2005) « Gains moyens selon le sexe et le régime de travail » à http://www40.statcan.ca/l02/cst01/labor01a_f.htm

20 Statistique Canada, L'Enquête sur la population active, totalisations spéciales

21 Statistique Canada (2005) « Gains moyens selon le sexe et le régime de travail » à http://www40.statcan.ca/l02/cst01/labor01a_f.htm

22 Statistique Canada (2004a) Femmes au Canada : une mise à jour du chapitre sur le travail : 2003. Tableau 9.

23 Statistique Canada (1999) « L'assurance-emploi comme mesure de soutien aux familles ayant un nouveau-né », dans Le Quotidien, le lundi 5 octobre 1999.

24 Statistique Canada (2004c) « Enquête sur la couverture de l'assurance-emploi, 2003 » dans Le Quotidien, le 22 juin 2004. Ottawa : Statistique Canada.

25 Assemblée nationale du Québec (2001) Le projet de loi 140, la Loi sur l'assurance parentale. Québec : L'éditeur officiel du Québec.

26 Congrès du travail du Canada (2000) Analyse sur la couverture des femmes par l'a.-c. à http://action.web.ca/home/clcpolcy/fr_issues.shtml?x=10320 consultée le 28 août 2005

27 Ibid.

28 Statistique Canada (1997) Le point sur la population active : Les travailleurs autonomes. Ottawa : Statistique Canada, numéro de catalogue 71-005-XPB.

29 Développement social canada (2005) Bulletin statistique – Régime de pensions du Canada, Sécurité de la vieillesse. Juin 2005. Tableau 48

30 Statistique Canada (2004b) Régimes de pensions au Canada – le 1 er janvier 2003. Ottawa : Statistique Canada. Numéro de catalogue 13F0026MIE.

31 Développement social Canada (2005) Bulletin statistique – Régime de pensions du Canada, Sécurité de la vieillesse. Juin 2005. Tableau 36

32 Conseil national du bien-être social (2005) Revenus de bien-être social, 2004.

33 Développement des ressources humaines Canada (2003) Le livre sur les statistiques sur les PRS. Statistiques reliées aux programmes de la sécurité du revenu. Ottawa. Développement des ressources humaines Canada

34 Townson, Monica (2004) “ A New “ Social Architecture”  For Canada?” dans The Monitor – Septembre 2004. Ottawa : Centre canadien de politiques alternatives.



Bibliographie

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Mise à jour : 2005-11-14
Contenu revu : 2005-11-14
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