Gouvernement du CanadaSanté Canada/Health Canada
   
Sauter toute navigation -touch directe z Sauter au menu vertical -touch directe x Sauter au menu principal -touch directe m  
English Contactez-nous Aide Recherche Site du Canada
Accueil - ASPC Centres Publications Lignes directrices Index A-Z
Santé - enfants Santé - adultes Santé - aînés Surveillance Santé Canada
   
    Office de la santé publique du Canada
Relevé des maladies transmissibles au Canada

 

Relevé des maladies transmissibles au Canada
Vol. 25 (DCC-5)
15 septembre 1999

Une déclaration d'un comité consultatif (DCC)
Comité consultatif de la médecine tropicale et de la médecine des voyages (CCMTMV)*+

DÉCLARATION SUR LA VACCINATION DES VOYAGEURS CONTRE LE MÉNINGOCOQUE

Document Adobe télédéchargeable PDF (670 KB)


Préambule

Le Comité consultatif de la médecine tropicale et de la médecine des voyages (CCMTMV) donne à Santé Canada des conseils courants et à jour de nature médicale, scientifique et de santé publique concernant les maladies tropicales infectieuses et les risques pour la santé associés aux voyages internationaux. Santé Canada reconnaît que les conseils et les recommandations figurant dans cette déclaration reposent sur la pratique médicale et les connaissances scientifiques les plus récentes et les diffuse dans le but d'informer les voyageurs ainsi que les professionnels de la santé qui sont appelés à leur prodiguer des soins.

Les personnes qui administrent ou utilisent des médicaments, des vaccins ou d'autres produits devraient bien connaître la  monographie du produit ainsi que toute autre norme ou instruction approuvée concernant leur usage. Les recommandations relatives à l'usage des produits et les autres renseignements présentés ici peuvent différer de ceux qui figurent dans la monographie ou toute autre norme ou instruction approuvée  pertinente établie par les fabricants autorisés. Rappelons que les fabricants font approuver leurs produits et démontrent leur innocuité et leur efficacité uniquement lorsqu'ils sont utilisés conformément à la monographie ou à toute autre norme ou instruction approuvée semblable.

Introduction

Les infections à méningocoques sont une urgence médicale qui exigent un diagnostic précoce, l'hospitalisation et une antibiothérapie efficace. Même dans les meilleures conditions, le taux de létalité de cette infection varie entre 5 % et 10 % et peut même dépasser 50 % en l'absence de traitement(1). Quinze à 20 % des survivants, notamment les nourrissons et les enfants en bas âge, peuvent présenter des séquelles neurologiques permanentes(1,2). La méningite à méningocoques se caractérise par une période d'incubation brève (de 2 à 10  jours, mais souvent < 4 jours), après quoi les symptômes font leur apparition brutalement : céphalées intenses, fièvre, nausées, vomissements, photophobie et raideur de la nuque. Chez les nourrissons, la maladie n'est pas toujours d'apparition brutale et ne s'accompagne pas forcément d'une raideur de la nuque. La septicémie à méningocoques (méningococcémie) est une forme plus rare mais souvent fatale de la maladie caractérisée par un collapsus cardio-vasculaire rapide et une éruption hémorragique(1). Elle est responsable du taux de létalité élevé observé lors des éclosions de méningococcies du groupe C au Canada(3). La méningite à méningocoques est à l'origine de 10 % à 40 % des cas de méningite bactérienne endémique. Elle est causée par la bactérie Gram négative Neisseria meningitidis. Sur les 13 sérogroupes reconnus, ce sont les groupes A, B et C qui causent le plus souvent des maladies. La transmission se fait par contact direct, y compris par des gouttelettes provenant du nez et de la gorge des personnes infectées(2). La plupart des infections sont infracliniques et de nombreuses personnes infectées deviennent des porteurs asymptomatiques; cependant, il n'existe pas de relation constante et étroite entre le taux de portage dans la population et l'incidence de la maladie(4). Dans une étude cas-témoins réalisée au Tchad en 1988, les patients atteints de méningococcie étaient 23 fois plus nombreux que les témoins à présenter une infection concomitante des voies respiratoires(5), et l'on a noté une incidence accrue à la suite d'éclosions de grippe dans les pays tempérés(2).

La culture de N. meningitidis à partir d'échantillons de liquide céphalorachidien, de sang ou du produit de grattage des pétéchies est nécessaire pour établir le diagnostic. Le traitement englobe l'administration d'antibiotiques, habituellement la pénicilline G, l'ampicilline, le chloramphénicol ou le ceftriaxone(1).

Épidémiologie

La méningite à méningocoques survient de façon sporadique dans le monde entier ainsi que par foyers épidémiques. C'est la seule forme de méningite bactérienne qui conduit à des épidémies(6). Les sérogroupes B et C sont les causes les plus fréquentes de cas sporadiquesa et d'éclosionsb en Europe et dans les Amériques (figure 1). Une épidémie de méningite à méningocoques est définie comme suit : un taux d'incidence inacceptable nécessitant des mesures d'urgence, laquelle se rapporte à diverses conditions dans le monde entier(7). Par exemple, les taux d'incidence de récentes épidémies dans les Amériques et en Europe étaient moins élevés que l'incidence endémique dans différents pays de l'Afrique(7). Dans le passé, c'est le sérogroupe A qui a causé le plus d'épidémies dans le monde entier et il est toujours prédominant en Afrique et en Asie. Les épidémies se produisent le plus souvent pendant l'hiver et le printemps dans les régions tempérées et pendant la saison sèche dans les régions tropicales. L'incidence est la plus élevée dans les régions pauvres et surpeuplées. Les voyages et les migrations facilitent la circulation de souches virulentes à l'intérieur d'un pays ainsi que d'un pays à l'autre. Une éclosion importante associée au pèlerinage du Hadj en 1987 en Arabie Saoudite a été à l'origine d'une épidémie en Afrique quand les pèlerins sont rentrés dans leurs pays respectifs(2).

Les endroits qui sont reconnus pour être des zones d'endémicité ou d'hyperendémicité (la «ceinture de la méningite») englobent la savane de l'Afrique sub-saharienne qui s'étend de la Gambie et du Sénégal, à l'ouest, jusqu'à l'Éthiopie et l'Érythréé, à l'est (tableau 1 et figure 2). Cette région peut avoir un taux d'incidence de la maladie de > 1 000 cas pour 100 000 habitants durant les épidémies(8), qui surviennent le plus souvent pendant la saison sèche (décembre à juin) selon des cycles qui peuvent durer 2 ou 3 ans(1). Des épidémies très étendues se produisent souvent après des éclosions locales au cours de la deuxième année du cycle et les taux d'incidence peuvent demeurer élevés pendant les 2 années suivantes. Les épidémies éclatent généralement tous les 8 à 12 ans, mais depuis le début des années 1980, les intervalles entre les grandes épidémies sont plus courts et plus irréguliers(1). Depuis le milieu des années 1990, des épidémies d'une ampleur sans précédent ont eu lieu dans la «ceinture de la méningite» et se sont répandues au-delà des frontières habituelles (tableau 2). Il pourrait s'agir d'une nouvelle caractéristique de l'épidémiologie des méningococcies(2). En 1996, le nombre de décès imputables à la méningite à méningocoques en Afrique était le plus élevé jamais signalé à l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) durant une seule année(9).

À l'extérieur de la «ceinture de la méningite» on n'a observé aucune cyclicité des épidémies(2).

Tableau 1 Pays dans la ceinture de la méningite africaine*

Bénin
Burkina Faso
Cameroun
Côte d'Ivoire
Érythrée
Éthiopie
Gambie
Ghana
Guinée

Guinée-Bissau
Mali
Niger
Nigéria
Sénégal
Soudan
Tchad

* Adaptation de : Organisation mondiale de la Santé. Control of epidemic meningococcal disease. WHO practical guidelines. 2e éd. Genève : Organisation mondiale de la Santé, 1998. WHO/EMC/BAC/98.3:6.Note : En 1996, Burkina Faso, Mali, Niger, et Nigeria on compté 95 % de tous les cas et les décès (Source : Tikhomirov E, Santa Maria M, Esteves K. Infections méningococciques : importance pour la santé publique et efforts de lutte. Rapport trimestriel de statistiques sanitaires mondiales1997;50:173).

Tableau 2 Pays africains se trouvant à l'extérieur des limites habituelles de la ceinture de la méningite dans lesquels des épidémies ont été signalées à la fin des années 1980 et pendant les années 1990*

Angola (1998)
Burundi
Kenya
Mozambique
Ouganda
Malawi
République centrafricaine

République démocratique du Congo (1998)
Rwanda
Tanzanie
Togo
Zambie
Zimbabwe (1997)

* Source :Tikhomirov E, Santa Maria M, Esteves K. Infections méningococciques : importance pour la santé publique et efforts de lutte. Rapport trimestriel de statistiques sanitaires mondiales 1997;50:173-74.L'Organisation mondiale de la Santé. Meningococcal meningitis in Angola. URL:

<http://www.who.int/emc/outbreak_news/n1998/aug/n06aug1998.html>. Date d'accès : 21 juin 1999.Idem. Meningococcal meningitis in Democratic Republic of Congo. URL:

<http://www.who.int/emc/outbreak_news/n1998/jan/n28jan1998.html>. Date d'accès : 21 juin 1999.Idem. Meningitis in Zimbabwe. URL:

<http://www.who.int/emc/outbreak_news/n1997/sept/n2sept1997.html>. Date d'accès : 21 juin 1999.

Date d'accès : 21 juin 1999. Lorsque surviennent des éclosions sporadiques, ce sont les enfants qui sont le plus à risque, et l'incidence de pointe est observée chez les enfants âgés de < 2 ans. Depuis 1986 au Canada, la proportion des infections dues au sérogroupe C a augmenté par rapport au groupe B, et l'on remarque un taux d'incidence disproportionné chez les adolescents(3).

Lors d'épidémies, l'intervalle des âges est plus large et englobe les grands enfants, les adolescents et les jeunes adultes(2).

Figure 1 Distribution des sérogroupes prédominants de N. meningitidis (A, B et C), 1996-1997*

Figure 1 Distribution des sérogroupes prédominants de N. meningitidis (A, B et C), 1996-1997*

* Source : Tikhomirov E, Santa Maria M, Esteves K. Infections méningococciques : importance pour la santé publique et efforts de lutte. Rapport trimestriel de statistiques sanitaires mondiales 1997;50:171.

Vaccins contre le méningocoque

Ces vaccins contiennent des polysaccharides capsulaires purifiés. Deux produits sont autorisés au Canada : un vaccin quadrivalent contenant les groupes A, C, Y et W-135 et un vaccin bivalent contenant les groupes A et C. Il n'existe encore aucun vaccin autorisé contre les souches du groupe B parce que le polysaccharide de ce groupe est peu immunogène(10). Les vaccins conjugués sont plus immunogènes, mais ne sont pas encore autorisés au Canada.

Efficacité du vaccin

L'efficacité du vaccin est en fonction de l'âge. Il a été démontré que chez les adultes et les enfants âgés de >= 2 ans, les vaccins contenant des polysaccharides des groupes A et C ont une efficacité de >= 90 % contre les infections à méningocoques attribuables à ces groupes lors d'éclosions survenant dans des populations civiles et militaires(11). Au Québec, l'efficacité globale sur le terrain contre les infections dues au groupe C au Québec (1992-1993) s'est établie à 79 %; elle était plus élevée chez les adolescents (93 %) et plus faible chez les enfants âgés de < 5 ans (70 %)(12). Il n'existe pas de protection croisée entre les sérogroupes.

C'est chez les très jeunes enfants que le vaccin est le moins efficace. Dans deux études, l'immunogénicité selon l'âge contre le groupe A chez les nourrissons âgés de 3 à 5 mois était faible 3 mois après l'administration de deux doses de vaccin monovalent; le titre des anticorps sériques dirigés contre le polysaccharide de groupe A était < 2 µg/mL (36 %) et < 1 µg/mL (60 %)(13,14). Bien que le niveau protecteur soit inconnu, un titre d'anticorps de 1 µg/mL à 2 µg/mL est habituellement considéré comme un signe d'immunité(13,14). Dans un rapport plus récent publié à la suite d'une campagne de vaccination menée à Ottawa en 1991-1992, on a mesuré le titre des anticorps chez 50 enfants âgés de 6 à 12 mois. Un mois après la vaccination, on a observé une réponse immunitaire très modeste contre le groupe A : 0,13 µg/mL (avant) à 1,58 µg/mL (après)(15). De plus, d'autres chercheurs ont signalé une piètre corrélation entre l'activité bactéricide (qui est un indicateur de la protection contre la maladie) et des titres d'anticorps contre le groupe C chez les enfants âgés de < 18 mois(16).

Les enfants et les adultes produisent une réponse en anticorps aux vaccins contenant les groupes Y et W-135, mais le degré de protection contre la maladie n'a pas été établi(11).

Primo-vaccination

Une dose unique de vaccin est recommandée pour les personnes âgées de >= 2 ans. S'il y a un risque d'exposition à un méningocoque du groupe A, il faudrait administrer deux doses du vaccin à 2 ou 3 mois d'intervalle aux nourrissons âgés de 3 à 23 mois. Lorsqu'il y a un risque d'exposition au méningocoque du groupe C, les nourrissons âgés de 6 à 23 mois peuvent recevoir une seule dose de vaccin si l'infection est observée dans leur groupe d'âge. Il y a lieu d'utiliser le vaccin quadrivalent, à moins qu'on sache que le risque d'exposition est limité à un sérogroupe spécifique pour lequel on dispose d'un vaccin monovalent ou bivalent(11).

Doses répétées du vaccin

Il existe peu de recherches sur lesquelles on peut se fonder pour recommander des doses répétées du vaccin. La persistance des anticorps sériques après l'administration d'un vaccin pour le groupe A ou le groupe C est limitée et varie selon l'âge. La protection contre les infections causées par un méningocoque du groupe A chute rapidement chez les enfants qui ont reçu une dose unique de vaccin avant l'âge de 4 ans; l'efficacité du vaccin 1 an, 2 ans et 3 ans après la vaccination était de 100 %, 52 % et 8 % respectivement. Des réponses transitoires similaires au polysaccharide du groupe A ont été observées avec le vaccin quadrivalent chez les enfants âgés de 2 à 8 ans 1 an après la vaccination(14,17,18).

Il a été établi clairement que le vaccin contre le groupe A entraîne une réponse immunitaire de type secondaire chez les enfants nord-américains. Les titres d'anticorps contre le polysaccharide du groupe A ont augmenté de façon significative après une dose de rappel aux âges de 15 à 18 mois et de 4 à 6 ans et persistaient jusqu'à l'âge de 10 ans, même quand la primo-vaccination était administrée dès l'âge de 3 mois(14). Toutefois, lorsqu'on a procédé à la primo-vaccination des enfants africains âgés de 1 à 4 ans avec une dose unique de vaccin bivalent (A et C), on a observé une chute des anticorps contre le polysaccharide du groupe A, 2 et 5 ans après la vaccination qui n'était pas modifiée par une dose de rappel administrée 2 ans après la primo-vaccination(19).

Le vaccin contre le groupe C n'entraîne pas une réponse immunitaire de type secondaire chez les enfants nord-américains. De plus, les recherches récentes ont montré que les jeunes enfants canadiens qui recevaient deux doses primaires du vaccin contre le groupe C avaient des titres d'anticorps plus faibles après une dose de rappel administrée 1 an après que les enfants d'un groupe témoin vaccinés pour la première fois. Cet état d'hyporéactivité était toujours présent 12 mois plus tard(20).

On connaît mal la durée de la protection conférée par le vaccin contre les groupes Y et W-135(11). Les autorités nord-américaines ne s'entendent pas sur l'âge auquel devraient être administrées les doses de rappel, surtout dans le cas du vaccin du groupe C chez les enfants âgés de < 5 ans(10,11,21). Dans une déclaration conjointe, la American Academy of Pediatrics et la Société canadienne de pédiatrie ont recommandé l'administration de doses de rappel après 1 an pour ce groupe d'âge(10), alors que le Comité consultatif national de l'immunisation recommande des doses de rappel après 5 ans ou à un intervalle plus court, dans des circonstances spéciales(11).

Effets secondaires et contre-indications

On observe fréquemment une rougeur et/ou une douleur localisées, mais ces réactions sont bénignes et disparaissent habituellement après 1 ou 2 jours. Il arrive rarement qu'une papule érythémateuse apparaisse immédiatement au site d'injection. Les réactions systémiques sont rares et sans gravité. L'incidence des effets secondaires est la même après une primo-vaccination et des doses de rappel du vaccin, à condition que la dose de rappel soit administrée conformément aux recommandations. La grossesse n'est pas une contre-indication à la vaccination(11).

Évaluation du risque d'infections à méningocoques chez les voyageurs

Il faudrait envisager de vacciner les voyageurs qui se rendent dans une région où il y a un risque élevé de contracter une infection à méningocoques causée par l'un des sérogroupes contenus dans le vaccin. La décision de recommander la vaccination devrait être fondée sur une évaluation soigneuse du risque et tenir compte des quatre facteurs suivants : la destination, la nature et la durée de l'exposition, l'âge du voyageur et l'état de santé de celui-ci.

1. Destination

Les voyageurs qui se rendent dans des régions éloignées de pays où ces infections sont endémiques et qui n'auront pas un accès immédiat à des soins médicaux de qualité courent le plus grand risque. Les régions géographiques où de tels risques existent sont les suivantes :

  • Les pays qui se trouvent dans ce qu'il est convenu d'appeler la «ceinture de la méningite» de l'Afrique sub-saharienne (tableau 1 et figure 2). Le risque est le plus élevé durant la saison sèche (de décembre à juin).
  • Les régions de l'Afrique sub-saharienne qui se trouvent en dehors de la «ceinture de la méningite» traditionnelle dans lesquelles des épidémies sont survenues au cours des 2 à 3 dernières années (tableau 2).
  • Les régions où des épidémies sont en cours ou dans lesquelles on observe une forte incidence de la maladie.

    Les régions où l'on observe une nouvelle activité sont indiquées dans des mises à jour fréquentes publiées par le Laboratoire de lutte contre la maladie (LLCM), Santé Canada et par l'OMS. Le service FAX
    link du LLCM (613) 941-3900, le site Web de Santé Canada . OMS : site Web d'information sur les éclosions.

2. Nature et durée de l'exposition

Les risques sont plus élevés chez les voyageurs qui font un séjour prolongé ou ceux qui auront des contacts étroits avec la population locale dans leur milieu de vie, les transports en commun ou leur milieu de travail(1). Le personnel médical court un plus grand risque s'il a des contacts étroits non protégés avec les sécrétions naso-pharyngées des personnes infectées(10).

Les voyageurs ne peuvent pas toujours prévoir la nature exacte d'une exposition éventuelle avant un voyage. En cas de doute, le personnel soignant doit mettre en balance la gravité de la maladie et le risque potentiel d'exposition. Étant donné que les réactions indésirables au vaccin sont rares et que la maladie peut rapidement évoluer vers une issue fatale, il serait peut-être prudent de procéder à la vaccination lorsque le voyageur n'est pas certain de la nature exacte de l'exposition.

3. Âge du voyageur

L'âge est un déterminant très important de l'immunité de l'hôte à l'égard des infections à méningocoques. Plus de 80 % des Canadiens ont acquis une immunité naturelle contre les sérogroupes A, B et C avant l'âge de 20 ans(3). Ce sont les très jeunes qui courent le plus grand risque de contracter la maladie. Dans les pays industrialisés en dehors des situations d'épidémies, entre 50 % et 60 % des cas surviennent chez les enfants âgés de 3 mois à 5 ans, mais l'on dénombre également des cas chez les adolescents et les jeunes adultes âgés de < 25 à 30 ans(2). En 1996, le taux d'attaque global au Canada s'établissait à 0,9 cas pour 100 000 habitants. L'incidence selon l'âge était deux fois plus élevée chez les adolescents âgés de 15 à 19 ans, plus de trois fois plus élevée chez les enfants de 1 à 4 ans et entre 12 et 13 fois plus élevée chez les nourrissons de < 1 an(22). Des données semblables ont été signalées aux États-Unis(21). Dans la «ceinture de la méningite», l'incidence est la plus élevée chez les enfants de 5 à 10 ans. Pendant les épidémies qui frappent cette région, les grand enfants, les adolescents et les jeunes adultes sont également touchés(2).

4. État de santé du voyageur

L'asplénie est un facteur de risque majeur. Les adultes et les enfants âgés de >= 2 ans qui souffrent d'asplénie fonctionnelle ou anatomique devraient être vaccinés indépendamment du risque d'exposition géographique(11). Un déficit en complément est un autre facteur de risque important et les autres déficits immunitaires, dont l'infection à VIH, peuvent aussi augmenter le risque(21).

Figure 2 Ceinture de la méningite africaine*

* Source : Organisation mondiale de la Santé. Control of epidemic meningoccal disease. WHO practical guidelines. 2e éd. Genève : Organisation mondiale de la Santé, 1998. WHO/EMC/BAC/98.3:6.

Recommandations Le tableau 3 présente des catégories en ce qui concerne la fermeté et la qualité des preuves pour chacune des recommandations suivantes.

Tableau 3 Fermeté et qualité des preuves - tableau récapitulatif*

Catégories relatives à la fermeté de chaque recommandation

CATÉGORIE

DÉFINITION

A

Preuves suffisantes pour recommander l'utilisation.

B

Preuves acceptables pour recommander l'utilisation.

C

Preuves insuffisantes pour recommander ou déconseiller l'utilisation.

D

Preuves acceptables pour déconseiller l'utilisation.

E

Preuves suffisantes pour déconseiller l'utilisation.

Catégories relatives à la qualité des preuves sur lesquelles reposent les recommandations

CLASSE

DÉFINITION

I

Données obtenues dans le cadre d'au moins un essai comparatif convenablement randomisé.

II

Données obtenues dans le cadre d'au moins un essai clinique bien conçu, sans randomisation, d'études de cohortes ou d'études analytiques cas-témoins, réalisées de préférence dans plus d'un centre, à partir de plusieurs séries chronologiques, ou de résultats spectaculaires d'expériences non comparatives.

III

Opinions exprimées par des sommités dans le domaine et reposant sur l'expérience clinique, des études descriptives ou des rapports de comités d'experts.

* Source : Macpherson DW. Une approche de la médecine fondée sur les preuves. RMTC 1994;20:145-47.

Recommandation I : Calendriers de vaccination des voyageurs

Le tableau 4 présente les calendriers des vaccins primaires et de rappel recommandés dans le Guide canadien d'immunisation. Il faudrait utiliser les calendriers pour le groupe A à moins de savoir que le risque se limite au groupe C. La dose pour tous les âges est de 0,5 mL administrée par voie sous-cutanée. L'immunité protectrice est établie habituellement environ 7 à 10  jours après la vaccination(21).

I.1 Calendriers primaires d'après le tableau 4(A-II)

I.2 Doses de rappel d'après le tableau 4(C-III)

Tableau 4 Calendriers pour les doses primaires et de rappel des vaccins contre le méningocoque*+

 

Âge

Dose primaire

Rappel après

Groupe A

3 à 12 mois

2 doses :
2 à 3 mois d'intervalle

6 à 12 mois

13 à 23 mois

2 doses :
2 à 3 mois d'intervalle

1 à 2 ans

2 à 5 ans

1 dose

2 à 3 ans

>= 6 ans

1 dose

5 ans

Groupe C

6 à 23 mois

1 dose

6 à 12 moisEn raison de la controverse entourant le moment de la dose de rappel, prière de consulter un expert en maladies infectieuses ou en médecine des voyages

>= 2 ans

1 dose

5 ans

* Adaptation du Comité consultatif national de l'immunisation. Guide canadien d'immunisation. 5e éd. Ottawa (Ont.) : Santé Canada, 1998:127-28. (Ministre des Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, No de cat. H49-8/1998F). + Le moment de l'administration des doses de rappel est fondé sur des données limitées.

Recommandation II : Efficacité du vaccin chez les enfants de < 2 ans

II.1 Il importe d'informer les parents de  jeunes enfants que la protection conférée par le vaccin est de courte durée et que seulement un nombre limité de jeunes enfants seront protégés, en particulier dans le cas des infections du groupe C. Le vaccin contre le sérogroupe A pourrait ne pas être pleinement efficace chez les enfants âgés de 6 à 12 mois. L'efficacité du vaccin contre le sérogroupe C n'a pas été démontrée de façon concluante chez les enfants de < 2 ans(13-16). (A-II)

II.2 Dans l'éventualité d'un contact direct avec un cas, on recommande une chimioprophylaxie à base de rifampine ou de ceftriaxone pour ces enfants(10). (A-III)

Recommandation III : Voyageurs qui devraient recevoir le vaccin

Il faudrait envisager de vacciner les personnes suivantes :

III.1 Les enfants et les adolescents ainsi que les jeunes adultes (âgés jusqu'à 25 à 30 ans) qui se trouvent ou se rendront dans une région où la maladie est épidémique, indépendamment de la durée de l'exposition(2,10,21). (A-II)

III.2 Les personnes qui se rendent dans la région qu'il est convenu d'appeler la «ceinture de la méningite» de l'Afrique sub-saharienne ou dans des pays africains situés en dehors des limites habituelles de la ceinture de la méningite où des épidémies ont été observées au cours des 2 à 3 dernières années (figure 2  et tableaux 1 , 2) qui

  • vivront ou travailleront dans ces régions(1)
  • pourraient avoir des contacts étroits avec la population locale, p. ex., dans leur milieu de vie ou dans les transports en commun(1)
  • se rendront dans des régions éloignées des grands centres où les soins médicaux ne sont pas facilement accessibles

Dans ces régions les risques sont les plus élevés pendant la saison sèche (décembre à juin)(2). (A-II)

III.3    Les voyageurs qui se rendent dans d'autres régions éloignées où des épidémies sporadiques ont été signalées au cours des 6 derniers mois (consulter les sites Web de Santé Canada ou de l'OMS) et où les services médicaux ne sont pas facilement accessibles. (C-III)

III.4 Les personnes qui travaillent dans les hôpitaux, dans les domaines des soins de santé ou de l'épidémiologie d'intervention, de la recherche, de l'aide internationale ou encore dans les camps de réfugiés dans les régions où les infections à méningocoques sont hyperendémiques ou endémiques. (A-III)

III.5 Les personnes qui sont appelées à voyager beaucoup ou sans préavis, p. ex., les militaires et le personnel des services de renseignements, les agents de bord et le personnel de cabine. (B-III)

III.6 Les voyageurs qui se rendent en Arabie Saoudite pour l'«Umra» ou le pèlerinage du Hadj ou pour effectuer des travaux saisonniers. L'Arabie Saoudite exige une preuve de vaccination contre les sérogroupes A et C au cours des 3 années précédentes pour ces visiteurs(23).

Recommandation IV : Voyageurs qui n'ont pas besoin de vaccins

La vaccination n'est pas systématiquement recommandée pour les gens d'affaires ou les touristes (dont ceux qui font un safari) qui séjourneront pendant une période de < 3 semaines dans des zones d'activité méningo- coccique accrue (éclosions sporadiques ou zones situées dans la ceinture de la méningite) si ces personnes seront peu exposées aux populations locales dans des conditions surpeuplées. Lorsqu'il y a des doutes quant à la nature de l'exposition il pourrait être prudent d'offrir le vaccin. (C-III)

Références

  1. L'Organisation mondiale de la Santé. Epidemic meningococcal disease. URL: <http://www.who.int/inf-fs/en/fact105.html>. Date d'accès : 21 juin 1999.

  2. Tikhomirov E, Santa Maria M, Esteves K. Infections méningococciques : importance pour la santé publique et efforts de lutte. Rapport trimestriel de statistiques sanitaires mondiales 1997;50:3-10.

  3. Gold R. Meningococcal disease in Canada: 1991-92. Revue canadienne de santé publique 1992;83:5-8.

  4. Broome CV. The carrier state: Neisseria meningitidis. J Antimicrob Chemother 1986;19(Suppl):25-34.

  5. Moore PS. Meningococcal meningitis in sub-Saharan Africa: a model for the epidemic process. Clin Infect Dis 1992;11:515-25.

  6. L'Organisation mondiale de la Santé. Control of epidemic meningococcal disease. WHO practical guidelines. 2e éd. Genève : Organisation mondiale de la Santé, 1998. WHO/EMC/BAC/98.3:1.

  7. Ibid:3.

  8. Ibid:31.

  9. Organisation mondiale de la Santé. Interagency appeal to control epidemic meningitis in Africa. URL: <http://www.who.int.archives/inf-pr-1997/en/pr97-11.html>. Date d'accès : 21 juin 1999.

  10. American Academy of Pediatrics and Canadian Pediatric Society. Meningococcal disease prevention and control strategies for practice-based physicians. Pediatrics 1996;97:404-12.

  11. Comité consultatif national de l'immunisation. Guide canadien d'immunisation. 5e éd. (Ont.) : Santé Canada, 1998:147-51. (Ministre des Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, No de cat. H49-8/1998F.)

  12. De Wals P, Dionne M, Douville-Fradet L et coll. Impact d'une campagne de vaccination de masse contre le méningocoque du sérogroupe C dans la province de Québec, Canada. Bulletin de l'OMS 1996;74:407-11.

  13. Peltola H, Makela PH, Kayhty H et coll. Clinical efficacy of meningococcus group A capsular polysaccharide vaccine in children three months to five years of age. N Engl J Med 1977;297:686-91.

  14. Gold R, Lepow ML, Goldschneider I et coll. Kinetics of antibody production to group A and C meningococcal polysaccharide vaccines administered during the first six years of life: prospects for routine immunization of infants and children. J Infect Dis 1979;140:690-97.

  15. King J, MacDonald N, Ashton F et coll. Immunogenicity of quadrivalent meningococcal polysaccharide vaccinea (Menomune) during a mass vaccination campaign. Pediatr Res 1993;33:90A. Abstrait 525.

  16. King J, MacDonald N, Wells G et coll. Total and functional antibody response to a quadrivalent meningococcal polysaccharide vaccine among children. J Pediatr 1996;128:196-202.

  17. Reingold AL, Broome CV, Hightower AW et coll. Age-specific differences in duration of clinical protection after vaccination with meningococcal polysaccharide A vaccine. Lancet 1985;2:114-18.

  18. Lepow ML, Beeler J, Randolph M et coll. Reactogenicity and immunogenicity of a quadrivalent combined meningococcal polysaccharide vaccine in children. J Infect Dis 1986;154:1033-36.

  19. Ceesay S, Allen SJ, Menon A et coll. Decline in meningococcal antibody levels in African children 5 years after vaccination and the lack of effect of booster immunization. J Infect Dis 1993;167:1212-16.

  20. MacDonald N, Halperin S, Law B et coll. Induction of immunologic memory by conjugated meningococcal polysaccharide vaccine in toddlers. JAMA 1998;180:1685-89.

  21. Advisory Committee on Immunization Practices. Control and prevention of meningococcal disease: recommendations of the Advisory Committee on Immunization Practices (ACIP). MMWR 1997;46(RR-5):1-9.

  22. Deeks S, Kertesz D, Ryan A et coll. Surveillance de la méningococcie invasive au Canada, 1995-1996. RMTC 1997;23:121-25.

  23. Organisation mondiale de la Santé. Health conditions for travellers to Saudi Arabia: Pilgrimage to Mecca (Hajj). Wkly Epidemiol Rec 1999;74:6-7.

a Cas sporadiques : cas séparés de maladie invasive dans une communauté lorsqu'il n'existe aucune preuve d'un lien épidémiologique de nature interpersonnelle, spatiale ou temporelle (Source : American Academy of Pediatrics and Canadian Paediatric Society. Meningococcal disease prevention and control strategies for practice-based physicians. Pediatrics 1996;97:404).

b Éclosion : Augmentation du nombre de cas sporadiques dans une population (Adaptation de : Ibid).

*    Membres : Dr B. Ward (président); Dr K. Kain (ancien président); H. Birk; M. Bodie-Collins (secrétaire général); Dre S.E. Boraston; Dr H.O. Davies; Dr K. Gamble; Dr L. Green; Dr J.S. Keystone; Dre K.S. MacDonald; Dr J.R. Salzman; Dre D. Tessier.

Membres d'office : Dre E. Callary (SC); Dr M. Cetron (CDC); R. Dewart (CDC); Dr E. Gadd (SC); Dr C.W.L. Jeanes (retraité, anciennement avec SC); Dr H. Lobel (CDC); Dre A. McCarthy (MDN); Dre M. Parise (CDC).

Représentants de liaison : Dr R. Birnbaum (SCSI); S. Kalma (CUSO); Dr V. Marchessault (SCP and CCNI); Dre H. Onyette (SCMI); Dr R. Saginur (ACSP); Dre F. Stratton (CCE).

+ Ce document a été préparé par H. Birk et approuvé par le CCMTMV.

 

[Relevé des maladies transmissibles au Canada]

Dernière mise à jour : 2002-11-08 début