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Vie saine

Résumé de l'étude d'impact de la réglementation pour le Projet de règlement sur le potentiel d'allumage des cigarettes et le Projet de règlement modifiant le règlement sur les rapports relatifs au tabac



Description

Le ministère de la Santé propose l'adoption d'un règlement pour réduire les dangers que posent pour la santé publique les incendies allumés par des cigarettes. Les articles pour fumeurs sont la principale cause d'incendies résidentiels et de pertes entraînées par les incendies chaque année au Canada. D'après une analyse des statistiques sur les incendies pour la période de 1995 à 1999, l'Association canadienne des chefs de pompiers a signalé qu'au moins 14 030 incendies ont été allumés par des articles pour fumeurs (ce qui comprend les cigarettes, les cigares et les pipes). Ces incendies ont causé la mort de 356 personnes et des lésions sur 1 615 personnes, en plus d'avoir causé plus de 200 millions de dollars en dommages matériels. Les victimes de ces incendies sont souvent les êtres les plus vulnérables de la société : les enfants, les personnes âgées et les plus démunis.

Le ministère de la Santé envisage d'imposer une norme obligeant les fabricants à réduire la capacité de leurs cigarettes à mettre le feu aux meubles rembourrés, aux matelas et à la literie afin de réduire le nombre de décès et de lésions reliés aux incendies. Le règlement appuierait la Loi sur le tabac en s'attaquant à l'un des nombreux volets du problème national que représente le tabac pour la santé publique.

Les incendies causés par des cigarettes sont souvent le résultat de cigarettes laissées allumées sans surveillance ou de l'usage du tabac au lit ou de fumeurs ayant les facultés affaiblies par l'alcool, des drogues illicites ou des médicaments. Lorsqu'une cigarette allumée entre en contact avec des objets inflammables comme un matelas, de la literie ou un meuble rembourré, elle peut amorcer une combustion lente qui va rester inaperçue pendant un certain temps avant que des flammes apparaissent. Les personnes à proximité peuvent s'évanouir en raison de la fumée que dégage la combustion lente, ce qui augmente pour elles les risques de lésions ou de mort dans l'incendie. Il n'est donc pas surprenant qu'il y ait beaucoup plus de décès causés par des incendies résidentiels allumés par une cigarette que par d'autres sources d'inflammation.

Le ministère de la Santé a pris certaines mesures pour prévenir ces types d'incendies : l'éducation du public sur les dangers que représentent les articles pour fumeurs; l'établissement de normes de sécurité incendie pour les produits de consommation comme les matelas et la literie; la réglementation des sources d'inflammation comme les allumettes et les briquets en vertu des dispositions de la Loi sur les produits dangereux; et la collaboration avec le Conseil canadien des fabricants de meubles pour mettre en oeuvre des normes volontaires d'inflammabilité pour les meubles 1 rembourrés. Malgré ces efforts, les incendies allumés par des articles pour fumeurs continuent à faire de nombreuses victimes au Canada et causent en moyenne 70 décès et des lésions chez 300 personnes chaque année. On estime que les cigarettes commerciales sont responsables d'environ 82 p. 100 de ces incendies.1

L'inflammation d'un substrat (meuble rembourré, matelas ou literie) par une cigarette allumée est un procédé complexe qui dépend des facteurs suivants : les caractéristiques du substrat, la taille du bout incandescent de la cigarette, la vitesse de la combustion lente ainsi que la zone de contact entre le substrat et la cigarette allumée. L'inflammation d'un substrat a lieu lorsqu'une cigarette allumée chauffe l'étoffe ou le rembourrage à un point tel qu'une combustion lente est amorcée. Une cigarette à potentiel d'allumage réduit génère moins de chaleur (c'est-à-dire qu'elle consomme moins de combustible ou qu'elle limite le débit d'oxygène) ou ne chauffe pas autant l'étoffe.

Après avoir étudié les résultats de plus de 20 ans de recherche, le ministère de la Santé croit qu'il est possible de réduire le potentiel d'allumage des cigarettes en modifiant certaines caractéristiques de conception des cigarettes commerciales. Les modifications visant à réduire la quantité de chaleur dégagée pourraient inclure une diminution de la circonférence, de la densité du tabac et de la porosité du papier. Une diminution de la densité du tabac et de la circonférence de la cigarette réduirait la quantité de combustible (tabac) disponible, tandis que la diminution de la porosité du papier réduirait l'arrivée d'oxygène. Selon toute vraisemblance, une combinaison de ces modifications serait nécessaire pour répondre à la norme de potentiel d'allumage proposée dans le Règlement.

En juillet 2000, un grand fabricant américain a mis en vente une cigarette à potentiel d'allumage réduit aux États-Unis. En avril 2001, ce même fabricant a lancé une version à potentiel d'allumage réduit de la même marque en Nouvelle-Zélande. Ce produit est fabriqué avec un papier breveté comportant des bandes concentriques de papier ultra-mince appliquées sur le papier de cigarette ordinaire. Le fabricant prétend que « ces bandes ou anneaux agissent comme des ralentisseurs de combustion lorsque le bout allumé les touche ». Lorsque le National Institute of Standards and Technology des États-Unis a mis ces cigarettes à l'essai, il a constaté que leur potentiel d'allumage était grandement réduit.

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En décembre 2002, une méthode d'essai consensuelle a été adoptée par ASTM International2 pour mesurer le potentiel d'allumage relatif des cigarettes. Cette méthode s'intitule ASTM E2187-02b Standard Test Method for Measuring the Ignition Strength of Cigarettes (Méthode d'essai normalisée pour mesurer le pouvoir d'allumage des cigarettes). Cette norme s'inspire de la méthode d'essai Cigarette Extinction Test Method (Méthode d'essai d'extinction des cigarettes) qui a été mise au point par le National Institute of Standards and Technology des États-Unis.

Cet essai consiste à placer une cigarette allumée sur un nombre prédéterminé (trois, dix ou quinze) de couches de papier-filtre standard de laboratoire.3  Le papier-filtre sert de dissipateur de chaleur pour la cigarette qui brûle. Lorsque le bout incandescent baisse à une certaine température, la cigarette devrait s'éteindre d'elle-même. Plus il y a de couches de papier-filtre, plus la cigarette devrait s'éteindre rapidement. Pour chaque nombre de couches de papier-filtre, la procédure est répétée 40 fois. Un échec est défini comme une cigarette qui brûle sur toute sa longueur. Les résultats sont ensuite présentés en « pourcentage de cigarettes ayant brûlé sur toute leur longueur ».

Bien que l'objectif de cet essai soit l'arrêt de la combustion, il importe de noter qu'il ne s'agit pas d'un essai de cigarettes « qui s'éteignent d'elles-mêmes ». En général, les conceptions de cigarettes qui réussissent bien à l'essai au papier-filtre réussissent aussi bien sur des meubles réels ou des maquettes de meubles, parfois même en brûlant au complet sans allumer l'étoffe de ces
meubles. L'essai sert donc à estimer si la cigarette peut brûler assez longtemps ou assez chaudement pour causer l'inflammation d'un meuble sur lequel elle est laissée. On peut se procurer un exemplaire de la norme E2187-02b: Standard Test Method for Measuring the Ignition Strength of Cigarettes (l'essai au papier-filtre) auprès d'ASTM International :

ASTM International
100 Barr Harbor Drive
West Conshohocken
PA 19428-2959, USA
(610) 832-9585 (téléphone)
(610) 832-9555 (télécopieur)
Le lien suivant s'ouvrira dans une nouvelle fenêtre www.astm.org

Le ministère de la Santé s'est servi de la norme ASTM E2187-02b pour mettre à l'essai le potentiel d'allumage de 62 marques de cigarettes vendues au Canada. Les essais ont porté sur des marques sélectionnées pour représenter les diverses conceptions et caractéristiques des cigarettes actuellement vendues sur le marché canadien. Une seule marque a démontré un potentiel d'allumage réduit durant ces essais.

Le règlement prévu exigerait qu'à partir du 1 er octobre 2005, toutes les cigarettes fabriquées ou importées au Canada ne brûlent sur toute leur longueur au plus que 25 p. 100 du temps lors d'essais répétés 40 fois avec 10 couches de papier-filtre Whatman nº 2 tel qu'il est stipulé à la norme ASTM E2187-02b. Cette norme de rendement détermine un objectif mais laisse aux fabricants la liberté d'utiliser le procédé de fabrication ou la conception technique de leur choix pour atteindre cet objectif. Toutes les cigarettes fabriquées au Canada devront être conformes à la norme de potentiel d'allumage. Les cigarettes fabriquées pour l'exportation ne seront pas exemptées pour ne pas nuire à la réputation du Canada auprès de la communauté internationale.

De plus, pour donner suite aux préoccupations de l'industrie au sujet d'une augmentation possible de la toxicité des cigarettes, les modifications projetées au Règlement sur les rapports relatifs au tabac obligeraient les fabricants et les importateurs à effectuer des essais annuels de toxicité sur les marques de cigarettes vendues au Canada, avant et après l'entrée en vigueur de la norme sur le potentiel d'allumage. Les fabricants et les importateurs seraient tenus de soumettre les résultats de ces essais au ministère de la Santé annuellement.

À l'heure actuelle, il n'existe pas suffisamment d'information pour rendre obligatoire une norme pour d'autres produits du tabac, comme les bâtonnets de tabac, les cigarettes roulées à la main ou les cigares. Le ministère de la Santé a entrepris des recherches pour déterminer s'il est nécessaire et réalisable de réduire le potentiel d'allumage des autres produits du tabac. Étant donné que les cigarettes commerciales représentent environ 86 p. 100 des ventes totales de cigarettes et de tabac à coupe fine au Canada, le ministère de la Santé croit que le règlement proposé aura une incidence importante sur le nombre d'incendies allumés par des articles pour fumeurs ainsi que les pertes qu'ils entraînent.

Le 31 décembre 2003, l'État de New York est devenu la première administration au monde à imposer une norme pour réduire le potentiel d'allumage des cigarettes avec l'adoption des Fire Safety Standards for Cigarettes (Normes de sécurité incendie pour les cigarettes). À compter du 28 juin 2004, toutes les marques de cigarettes vendues dans cet État devront subir les essais d'une version modifiée de la norme ASTM E2187-02b, et il ne devra pas y avoir plus de 25 p. 100 des cigarettes de chaque marque qui brûlent sur leur pleine longueur dans les conditions d'essais.

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Solutions envisagées

Un certain nombre d'options ont été envisagées au cours de l'analyse de la question.

1. Le statu quo

Les recherches entreprises par le ministère de la Santé ont permis de conclure que la réduction du potentiel d'allumage des cigarettes est possible et qu'il existe une méthode d'essai acceptable pour la mesurer. Le ministère de la Santé croit donc qu'il est dans l'intérêt du public de prendre des mesures concrètes pour réduire le potentiel d'allumage des cigarettes.

2. D'autres normes Le ministère de la Santé a étudié la possibilité

d'imposer la norme de mesure la plus sévère, soit 0 p. 100 de cigarettes qui brûlent sur leur pleine longueur avec du papier-filtre à trois couches ou une norme moins sévère exigeant 50 p. 100 de cigarettes qui brûlent sur leur pleine longueur avec du papier-filtre à dix couches, les mesures étant effectuées selon la norme ASTM E2187-02b. Il a choisi la norme limitant à 25 p. 100 le nombre de cigarettes brûlant sur leur pleine longueur sur dix couches de papier-filtre puisqu'elle est la plus sévère réalisable et qu'elle devrait permettre une réduction importante du nombre d'incendies allumés par des cigarettes au Canada. Il s'agit aussi de la norme adoptée par l'État de New York.

3. Une norme technique

Le ministère de la Santé estime qu'il faudrait rendre obligatoire une norme technique par laquelle le règlement imposerait la méthode de fabrication des cigarettes pour réduire leur potentiel d'allumage. Les normes techniques servent souvent pour établir les règlements en matière de santé et de sécurité mais sont reconnues pour avoir le potentiel de mettre en veilleuse la recherche et la mise en oeuvre de nouvelles conceptions qui pourraient s'avérer plus efficaces que la norme technique fixée à l'origine. Pour cette raison, le ministère de la Santé a décidé de rendre obligatoire une norme de rendement qui fixe un objectif mais laisse les fabricants libres de choisir le procédé de fabrication ou la conception technique qu'ils préfèrent pour l'atteindre.

4. Accord volontaire

Le ministère de la Santé a envisagé la possibilité de conclure un accord volontaire avec les fabricants de cigarettes. Cependant, les codes volontaires précédents conclus au sein de l'industrie du tabac n'ont pas réalisé les objectifs du Gouvernement en matière de santé.

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Avantages et coûts

Évaluation économique

Cette section du Résumé de l'étude d'impact de la réglementation résume l'évaluation économique du règlement projeté sur le potentiel d'allumage des cigarettes. Pour obtenir de plus amples détails, prière de consulter le rapport complet affiché sur le site Web du ministère de la Santé à l'adresse http://www.hc-sc.gc.ca/hecs-sesc/tabac/reglements/index.html.

Estimation des coûts de production

Pour analyser l'impact du règlement projeté sur le secteur de la fabrication de cigarettes, on a d'abord élaboré un modèle de référence de la structure des coûts d'un fabricant de cigarettes typique. Ce modèle a permis de constater que les coûts de production totaux (c'est-à-dire avant les bénéfices d'exploitation et les taxes) d'un fabricant de cigarettes typique sont approximativement de 5,70 $ la cartouche. Une analyse en deux parties a ensuite permis d'estimer les coûts de la conformité : une estimation basée sur le modèle et une autre basée sur un sondage d'information de l'industrie.

Les estimations basées sur le modèle et sur le sondage comprennent les coûts suivants :

  • production, assurance de la qualité et autres coûts pour se conformer à la norme de potentiel d'allumage;
  • essai de toxicité et établissement de rapports comme l'exigent les modifications projetées au Règlement sur les rapports relatifs au tabac;
  • essais supplémentaires sur les émissions et coûts d'imprimerie nécessaires pour se conformer à l'actuel Règlement sur les rapports relatifs au tabac;
  • coûts initiaux de recherche et de développement amortis avec le temps.

Pour le sondage de l'industrie, des questionnaires ont été envoyés à tous les fabricants et importateurs de cigarettes connus et à certains autres intervenants potentiellement concernés, dont des détaillants, des distributeurs, des tabaculteurs et des syndicats. Afin de faciliter les réponses, un résumé du futur règlement était joint aux questionnaires, et ces derniers étaient adaptés à chaque secteur. Par exemple, le questionnaire pour les fabricants comprenait une structure des coûts de référence estimative pour un fabricant de cigarettes typique ainsi que des exemples des modifications possibles que le Règlement pourrait apporter à cette structure.

Le but de cet exercice était de donner aux intervenants l'occasion de faire des commentaires sur les coûts potentiels et les autres impacts du règlement projeté. En tout, neuf réponses ont été reçues : trois de fabricants, trois d'importateurs, deux de syndicats et un des détaillants. Cependant, seuls les fabricants et les importateurs ont fourni des estimations sur les coûts prévus, et celles-ci variaient. Afin de s'assurer d'une limite supérieure fiable pour les coûts, les estimations basées sur les sondages ont retenu les valeurs les plus élevées fournies par les intervenants.

À partir de ces données, l'estimation basée sur le modèle a établi les coûts de la conformité à 0,126 $ la cartouche, tandis que l'estimation basée sur le sondage les a établis à 0,257 $ la cartouche.4 Ces augmentations se traduisent par des coûts annuels de 26 millions de dollars et de 53 millions de dollars, respectivement. Avec un taux d'escompte de 3 p. 100, la valeur actualisée se situerait entre 867 millions de dollars et 1,77 milliard de dollars, dans l'hypothèse où les coûts resteraient constants à perpétuité. Comme le veut la pratique, une analyse de sensibilité a été effectuée avec des taux d'escompte variant de 1 p. 100 à 10 p. 100. Les détails de cette analyse se trouvent dans le rapport complet.

L'impact des coûts de la conformité sur les tabaculteurs et les fournisseurs de papier et l'impact sur le marché et la compétitivité auront peu d'effet sur l'économie canadienne. La mise en oeuvre du projet de règlement ne devrait pas faire augmenter les coûts de distribution ou de vente au détail des cigarettes au pays.

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Avantages potentiels

Base de référence pour l'évaluation des pertes dues aux incendies

Le but du projet de règlement est de réduire le nombre de décès, de blessés et de dommages matériels attribuables aux incendies déclenchés par des cigarettes commerciales. Les avantages directs de cette réglementation seraient équivalents à la valeur monétaire des effets sur la santé et des dommages à la propriété qui pourraient être évités. La première étape de l'évaluation de ces avantages consiste à évaluer ce qui se passerait en l'absence de contrôle ou de situation de référence. Pour ce faire, la présente analyse utilise les rapport annuels du Conseil canadien des directeurs provinciaux et des commissaires aux incendies et des données de l'Alberta et de l'Ontario.

Le Conseil canadien des directeurs provinciaux et des commissaires aux incendies publie des rapports annuels fournissant des données sur les pertes directement imputables aux incendies en fonction de leur origine. Ces rapports indiquent que les articles de fumeur (y compris les cigarettes, les cigares et les pipes ainsi que les briquets et les allumettes associés à l'usage du tabac) ont causé en moyenne plus de 3 200 incendies par an de 1992 à 2000, et qu'ils ont en moyenne entraîné annuellement 75 décès, 349 cas de blessures et 44, 7 millions de dollars de dommages matériels à l'échelle nationale pendant cette période. Selon les données, 22 p. 100 des victimes de blessures causées par des incendies déclenchés par des articles de fumeur sont des pompiers et 78 p. 100 sont des civils. Ces pourcentages sont utilisés ultérieurement dans les analyses pour différencier le nombre de blessés parmi les pompiers et parmi les civils, dans le but d'évaluer les avantages potentiels de la réglementation projetée.

L'Alberta est la seule province qui enregistre les cigarettes comme une source d'incendie distincte. Pour cette raison, cette analyse utilise les données sur les incendies de l'Alberta pour ajuster les données nationales afin qu'elles reflètent les pertes directement imputables aux incendies causés uniquement par les cigarettes. Cet ajustement se traduit par des facteurs d'échelle de 75 p. 100 pour les incendies, de 82 p. 100 pour les décès, de 76 p. 100 pour les blessures et de 73 p. 100 pour les pertes matérielles. De plus, selon des données relatives aux ventes pour 2002, les cigarettes commerciales ne représentent approximativement que 86 p. 100 de la totalité des cigarettes consommées au Canada. Les 14 p. 100 restants sont constitués de bâtonnets de tabac ou de cigarettes roulées à la main. Étant donné que le règlement projeté imposerait une norme pour les cigarettes commerciales seulement, les statistiques doivent être ajustées d'un facteur de 86 p. 100 pour refléter les incendies causés uniquement par ce type de produit.

En se basant sur ce qui précède, on peut évaluer que, sans ce règlement, les cigarettes commerciales causeraient approximativement 2 085 incendies au Canada chaque année, entraînant en moyenne 53 décès, 227 blessés (51 pompiers, 176 civils) et 28, 1 millions de dollars en dommages matériels. Ces chiffres représentent la base de référence pour le reste de l'analyse.

Les données nationales sur la nature et la gravité des blessures des civils associées aux incendies reliés à la cigarette sont limitées. Pour cette raison, elle doivent être complétées par les données sur les blessures provenant du Bureau du commissaire aux incendies de l'Ontario, qui détient des renseignements sur la nature et la gravité des blessures reçues à la suite d'incendies déclenchés par des articles de fumeur. Le tableau 1 présente un résumé des résultats d'une évaluation des données sur les blessures en Ontario pour la période comprise entre 1995 et 2001.

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Tableau 1 : Blessures des civils à la suite d'incendies déclenchés par des articles de fumeur
Nature et gravité des blessuresa Pourcentage du nombre total de blessures
Asphyxie, problèmes respiratoires : mineures 27.6%
Asphyxie, problèmes respiratoires : graves 17.7%
Brûlures ou ébouillantage : mineures 13.8%
Brûlures ou ébouillantage : graves 11.4%
Autres : mineures 20.1%
Autres : graves 9.4%
Total 100.0%
Notes:
a Dans « Autres », on intègre tout ce qui est « indéterminé ». Pour caractériser la distribution globale des blessures, celles de gravité indéterminée sont réparties entre mineures et graves selon les proportions de gravité déclarées d'autres blessures de même type.
Source: Analyse des données sur les blessures enregistrées par le Bureau du commissaire des incendies de l'Ontario.

Les données indiquent que la plupart des blessures courantes causées par des incendies déclenchés par des articles de fumeur en Ontario sont l'asphyxie ou les problèmes respiratoires (45, 3 p. 100) et les brûlures ou les ébouillantages (25, 2 p. 100). Un peu moins de 40 p. 100 des blessures déclarées sont identifiées comme graves. L'analyse utilise cette information pour caractériser la distribution probable des blessures attribuables à des incendies causés par des cigarettes commerciales.

Évaluation de l'impact du projet de règlement

Les avantages potentiels de la nouvelle réglementation seraient une réduction de pertes reliées aux incendies découlant de la conformité à la norme sur le potentiel d'allumage. Pour évaluer ces avantages potentiels, deux scénarios sont utilisés.

Scénario 1 : réduction de 68 p. 100 des incendies causés par des cigarettes commerciales
Ce scénario est basé sur les données indiquant que le potentiel d'allumage des cigarettes mesuré selon la norme ASTM E2l87-02b correspond bien au potentiel d'allumage des cigarettes établi par des essais à l'échelle du laboratoire. De plus, le rapport du Technical Study Group on Cigarette and Little Cigar Fire Safety (TSG) des États-Unis (1987) indique que les résultats des essais à l'échelle du laboratoire sur des maquettes de meubles correspondent bien aux résultats d'essais dans lesquels on utilise des meubles réels. Cependant, la relation entre les essais à l'échelle du laboratoire et les essais à l'échelle réelle indique que dans le premier cas, on aurait sous-évalué l'allumage des meubles d'un facteur de 1,26. Par conséquent, le scénario 1 laisse supposer que la norme limitant à 25 p. 100 le nombre de cigarettes brûlant sur leur pleine longueur se traduira par une réduction de 68 p. 100 des incendies et des pertes matérielles directement imputables aux incendies provoqués par la cigarette. Ce scénario est considéré comme le meilleur cas.

Scénario 2 : réduction de 34 p. 100 des incendies causés par des cigarettes commerciales
En réduisant le scénario du meilleur cas (scénario 1) de 50 p. 100, le scénario 2 tient compte de facteurs comme les tissus facilement inflammables, les feux de poubelles ou de papier plutôt que de canapés ou de lits et la part incertaine des courants d'air et des fissures sur le potentiel d'allumage. Ce scénario est considéré comme une évaluation minimale.

En appliquant ces pourcentages aux chiffres de la référence de base susmentionnés, le scénario 1 permettrait d'éviter 36 décès, 155 blessés (120 civils, 35 pompiers) et 19, 1 millions de dollars de dommages matériels par an. Dans le scénario 2, ces nom bres seraient respectivement de 18 décès, 77 blessés (60 civils, 17 pompiers) et 9, 5 millions de dommages matériels par an.

La prochaine étape consiste à évaluer la valeur économique des réductions potentielles des pertes directement imputables aux incendies. Pour les dommages matériels, aucune analyse supplémentaire n'est nécessaire, vu que ces dommages sont déjà chiffrés. De manière à attribuer une valeur économique à la réduction des décès, l'analyse utilise une approche de la valeur d'une vie statistique (VVS). Cette approche permet d'évaluer des avantages de 5, 8 millions de dollars par décès évité. L'évaluation de la VVS est basée sur un examen approfondi de la documentation et concorde avec les évaluations que le ministère de la Santé a récemment utilisées pour calculer d'autres avantages. De manière similaire à l'analyse de sensibilité pour les taux d'actualisation, une analyse d'incertitude de VVS différentes a été effectuée. On trouvera des détails supplémentaires dans le rapport complet.

Une approche des coûts liés aux soins de santé est utilisée pour estimer la réduction évaluée des blessures grâce au projet de règlement. Cette approche intègre les coûts associés aux blessures comme les coûts des transports d'urgence et des soins, des frais de séjour d'hôpital, des médicaments et des visites chez le médecin. Cependant, l'approche n'évalue pas les coûts indirects comme la volonté individuelle de payer pour éviter des conséquences sur la santé ou la perte de productivité, ni d'évaluer les coûts immatériels comme la douleur et la souffrance. Les coûts liés aux soins de santé sont donc considérés un seuil minimal dans l'évaluation économique des maladies ou des blessures.

Comme il n'existe pas d'études canadiennes sur les coûts des soins de santé découlant d'incendies causés par la cigarette, les estimations des traitements données au tableau 2 sont basées sur une étude de 1993 des coûts de la cigarette aux États-Unis (Miller, et al., 1993).

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Tableau 2 : Coûts des soins de santé pour les blessés civils ($ de 2002)
Gravité des blessures Catégorie des blessures
Anoxie Brûlures Autres
Graves -Hospitalisation 7 777 78 738 21 963
Graves -Sans hospitalisation 1 072 1 072 791
Mineures 151 151 151

Les pompiers risquent moins que les civils d'avoir des brûlures graves ou d'autres blessures, car ils s'approchent du feu en étant vigilants, bien protégés et bien entraînés. L'étude américaine évalue à 1 679 $ le coût par blessure non mortelle de pompier. Cette somme est intégrée dans l'évaluation du coût des soins de santé.

Le tableau ci-dessous présente l'évaluation des avantages annuels du règlement projeté engendrés par l'application de la VVS et des coûts liés aux soins de santé à l'évaluation des réductions annuelles.

Tableau 3 : Évaluation des avantages annuels du règlement projeté ($ de 2002)
Scénario Réduction des décès Réduction des blessures Réduction des dommages matériels Total des avantages
Scénario 1 208,8 million 0,2 million 19,1 million 228,1 million
Scénario 2 104,4 million 0,1 million 9,6 million 114,1 million

La valeur actuelle de ces avantages dépend de leur durée et du taux d'escompte utilisé. À des fins d'analyse de la réglementation, le ministère de la Santé utilise généralement un taux d'escompte de 3 p. 100, qui reflète les évaluations actuelles du taux d'actualisation de la consommation. Comme les coûts ont été calculés à perpétuité, les avantages et les coûts sont calculés de la même manière. Par conséquent, la valeur potentielle des avantages du projet de règlement se situe entre 7 604,1 millions de dollars pour le scénario 1 et 3 802,1 millions de dollars pour le scénario 2.

Avantages nets

Globalement, les avantages décrits dépasseraient l'évaluation des coûts de la réglementation d'un facteur de 2 ou plus. Le tableau ci-dessous indique la valeur actuelle des avantages nets (c'est-à-dire les avantages moins les coûts) pour les scénarios présentés plus haut.

Tableau 4 : Valeur actuelle des avantages nets du règlement projeté avec un taux d'escompte de 3 p. 100 ($ de 2002, millions)
Scénarios des avantages Avantages nets
Évaluation du coût basée sur le modèle Évaluation du coût basée sur l'industrie
Scénario 1 6 737,4 5 837,4
Scénario 2 2 935,5 2 035,5

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Ventilation des coûts et des avantages

L'industrie du tabac et ses clients ressentiraient les premiers effets du projet de règlement. L'Ontario assure plus de 90 p. 100 de la production de tabac au Canada, le Québec et l'Île-du-Prince-Édouard produisant la plupart du tabac restant.

Si le coût de la conformité à la nouvelle réglementation était entièrement absorbé par les fabricants de cigarettes, leurs bénéfices d'exploitation seraient réduits de 2,9 p. 100 à 5,9 p. 100. De leur côté, les fabricants de cigarettes pourraient augmenter les prix en fonction de l'augmentation des coûts. Bien qu'une certaine augmentation des prix soit probable, l'augmentation adoptée par chaque fabricant est inconnue, et dépendra de la concurrence. Étant donné le niveau de concurrence dans ce marché, il est peu probable que les prix répercutent la totalité de l'augmentation du coût évaluée (c'est-à-dire de 0,13 $ à 0,26 $ par cartouche). Néan-moins, dans le but d'évaluer le potentiel des effets économiques de la réglementation, il est utile d'envisager ce scénario.

En supposant une valeur de base moyenne du prix de détail de 65,24 $ par cartouche (toutes taxes et tous droits compris), l'augmentation de 0,13 $ à 0,26 $ représenterait 0,2 p. 100 à 0,4 p. 100 du prix de détail. En utilisant une élasticité de la demande en fonction du prix pour les adultes inférieure à 0,4 p. 100, une augmentation du prix des cigarettes de 0,2 p. 100 à 0, 4 p. 100 entraînerait probablement une baisse de la demande de 0,08 p. 100 à 0,16 p. 100, soit une réduction des ventes totales annuelles de 152 200 à 304 500 cartouches. Géographiquement, les coûts transférés aux consommateurs seraient probablement répartis entre les provinces approximativement en proportion avec la distribution géographique des fumeurs de cigarettes au pays. Environ 61 p. 100 des fumeurs de cigarettes résident en Ontario et au Québec, donc, une proportion similaire des coûts de la nouvelle réglementation serait vraisemblablement supportée par les résidents de ces provinces. Les autres provinces supporteraient une partie plus petite du coût total, en proportion du nombre de fumeurs.

Comme on s'attend à ce que les revenus annuels provenant des ventes de cigarettes à la suite de l'augmentation de prix prévue augmentent de 23, 3 à 46, 5 millions de dollars, cela ne compenserait pas complètement l'augmentation des coûts de fabrication. De ce fait, on pourrait s'attendre à ce que les bénéfices d'exploitation annuels des fabricants diminuent approximativement de 0,7 à 1, 3 million de dollars (c'est-à-dire de 0, 08 p. 100 à 0, 16 p. 100).

Les fabricants de cigarettes, les tabaculteurs et les distributeurs ou les détaillants pourraient subir des pertes d'emploi à cause de la diminution de la vente de cigarettes. Une étude effectuée par le ministère de la Santé en 1996 a conclu qu'une baisse dans la demande de cigarettes se traduit par une réduction de la demande de main-d'oeuvre, en particulier chez les détaillants et les tabaculteurs et dans l'industrie des produits de tabac. Cependant, quand les effets de cette baisse s'accompagnent de demandes pour d'autres biens et services, les pertes d'emplois et de revenus sont largement compensés par les augmentations dans d'autres secteurs. Il faut noter qu'entre 1983 et 1998, la demande de produits de tabac a chuté de 29 p. 100 et il y a eu un ajustement ordonné.

Le projet de règlement profiterait directement à des secteurs de la population qui pourraient, éventuellement, être les victimes d'incendies causés par la cigarette. Cela comprend les Canadiens qui fument - environ 20 p. 100 de la population âgée de 15 ans et plus - et les non-fumeurs qui résident avec eux. Des études effectuées à l'étranger sur les dommages causés par des incendies indiquent qu'environ 40 p. 100 des victimes d'incendies causés par la cigarette sont des non-fumeurs. Selon la documentation, les victimes sont surtout ceux dont les capacités à réagir et à s'enfuir sont affaiblies. Cela comprend les personnes âgées, les tout jeunes, les personnes avec des déficiences mentales ou physiques, et les personnes qui dorment ou qui sont sous l'influence de drogues ou de l'alcool. En ce qui concerne l'âge, les données de l'Ontario indiquent que les personnes âgées sont de manière disproportionnée plus susceptibles de perdre la vie dans un incendie causé par des produits de fumeurs allumés. Plus de 27 p. 100 des décès concernaient des personnes de 70 ans et plus, alors qu'elles représentent seulement 9 p. 100 de la population canadienne.

Les données sur la distribution géographique des dommages associés aux incendies causés par la cigarette ne sont pas disponibles. Cependant, il est raisonnable de supposer que les avantages de la réglementation projetée se répartiront dans les provinces approximativement en proportion de la distribution géographique des fumeurs de cigarettes. Environ 61 p. 100 des fumeurs de cigarettes résident en Ontario et au Québec, donc, une proportion similaire des avantages reviendrait vraisemblablement aux résidents de ces provinces. Les autres bénéficieraient d'une plus petite partie du total des avantages, en proportion avec leur population de fumeurs.

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Consultations

Un document de consultation publique sur un avant-projet de règlement concernant le potentiel d'allumage des cigarettes a été publié le 2 décembre 2002. Il a été adressé à plus de 200 intervenants et affiché sur le site Web du ministère de la Santé. Quarante-cinq réponses ont été reçues : 30 des pompiers, 8 des organismes non-gouvernementaux et 7 de l'industrie du tabac.

En octobre 2003, plus de 40 lettres ont été adressées à des parties concernées, comme les fabricants, les importateurs, les détaillants et les tabaculteurs ainsi que les syndicats, les invitant à contribuer à l'évaluation des coûts. Les lettres contenaient une vue d'ensemble des éléments clés du projet de règlement, du mieux que l'on pouvait les prévoir, et un questionnaire pour aider les répondants. Les questionnaires ont été adaptés à chacun des groupes cibles. Au total, neuf réponses ont été reçues : 3 des fabricants, 3 des importateurs, 2 des syndicats et 1 des détaillants. Toute information pertinente reçue a été intégrée dans l'évaluation coûts-avantages.

De plus, un certain nombre de réunions ont été tenues avec les parties intéressées depuis janvier 2003.

Les préoccupations exprimées pendant les consultations et la réponse du ministère de la Santé sont résumées ci-dessous.

1. Comportement de risque

Certains membres de l'industrie du tabac ont souligné le besoin d'analyser davantage les effets de la réduction du potentiel d'allumage des cigarettes sur le comportement des consommateurs en matière de risques d'incendie. Pour répondre à ce besoin, il a été suggéré que le ministère de la Santé :

  • incorpore un mécanisme dans le Règlement pour surveiller la fréquence et l'étiologie des incendies;
  • soit prudent avec la terminologie qui peut être trompeuse, particulièrement dans l'utilisation du terme anglais « fire-safe » (en français : à inflammabilité réduite);
  • lance une campagne d'information publique sur la question.

La majorité des autres intervenants a écarté l'idée que la réduction du potentiel d'allumage des cigarettes créerait un faux sentiment de sécurité parmi les fumeurs. Beaucoup ont souligné que les fumeurs ont déjà un faux sentiment de sécurité et que c'est exactement pour cela qu'une réglementation sur la réduction du potentiel d'allumage est nécessaire. D'autres ont mentionné l'utilisation des ceintures de sécurité et des coussins gonflables comme des exemples de mesures de sécurité similaires qui ont sauvé des vies en dépit de certains qui prétendaient que les personnes seraient moins prudentes. Un intervenant a suggéré que l'introduction de la réduction du potentiel d'allumage des cigarettes pourrait en fait faire ressortir les dangers associés aux cigarettes classiques, augmentant ainsi la sensibilisation au risque d'incendie. D'autres ont suggéré le besoin de supprimer entièrement la promotion des cigarettes à potentiel d'allumage réduit.

Pour régler cette question, le ministère de la Santé effectue un sondage de référence pour déterminer le comportement actuel des fumeurs en matière de risques d'incendie en rapport avec les cigarettes. L'intention est de répéter le sondage après l'entrée en vigueur du Règlement et d'évaluer si le comportement a changé. De plus, le ministère de la Santé utilise des données du Commissaire aux incendies de l'Ontario pour brosser un tableau statistique d'un incendie typique dû à la cigarette en Ontario. Lorsque le Règlement sera entièrement en vigueur, le ministère de la Santé sera en mesure d'effectuer une analyse comparative. Cette analyse sera très utile comme indicateur des changements de comportement possibles.

Le ministère de la Santé convient que le terme anglais « fire-safe » et l'expression « cigarettes qui s'éteignent d'elles-mêmes » peuvent induire en erreur étant donné que des objets en feu de par leur nature présentent toujours un risque. Savoir si une cigarette s'éteindra d'elle-même ou non dépend en partie des conditions externes à la cigarette. Par exemple, il est peu probable que la réglementation sur la réduction du potentiel d'allumage aurait empêché les terribles incendies de forêt qui ont dévasté la Colombie-Britannique en 2003. De tels incendies sont normalement précédés de longues périodes de sécheresse, créant ainsi des conditions favorables à des feux de sous-bois. Pour cette raison, le ministère de la Santé a choisi d'adopter l'expression « potentiel d'allumage réduit ».

Le ministère de la Santé ne prévoit pas lancer de campagnes d'éducation sur les cigarettes à potentiel d'allumage réduit ni sur les risques d'incendie associés aux cigarettes. Toutefois, il continuera à évaluer le besoin de lancer une telle campagne au fur et à mesure que le dossier progresse.

2. Méthode d'essai choisie

L'industrie du tabac a fait part de deux préoccupations concernant l'utilisation de la méthode ASTM E2187-02b pour mesurer le potentiel d'allumage relatif des cigarettes : la méthode n'a pas de relation directe avec la réalité et elle a une variabilité inhérente élevée.

(A) La méthode n'a pas de relation directe avec la réalité
Pour justifier cette affirmation, l'industrie du tabac se rapporte souvent à : (1) l'utilisation de papier filtre au lieu de maquettes de meubles; (2) l'incapacité d'effectuer des essais dans des fissures; (3) l'absence d'un courant d'air artificiel dans la méthode ASTM E2187-02b.

Il est extrêmement rare, sinon impossible, pour une norme d'essai de laboratoire, quel que soit le domaine scientifique, de reproduire les multiples variantes environnementales qui existent dans la réalité. Dans le développement de méthodologies, les scientifiques s'efforcent de s'assurer que le paramètre qu'ils mesurent est pertinent et que les effets des autres paramètres sont minimes.

Au cours des 20 dernières années, on a essayé à plusieurs reprises de développer une méthode pour mesurer le potentiel d'allumage des cigarettes en utilisant des maquettes de meubles faites avec du tissu et de la mousse. Toutefois, pour qu'un essai soit utile à des fins de réglementation, il doit y avoir une garantie de fourniture à long terme de tissus d'essais qui soient de qualité rigoureusement uniforme. Étant donné que les tissus et les mousses utilisés dans la fabrication des meubles sont très différents et changent constamment, il s'est révélé très difficile de reproduire cette variable. Par ailleurs, le papier filtre est un produit couramment utilisé dans les laboratoires scientifiques pour une multitude d'usages, donc son approvisionnement peut être garanti. De plus, des comparaisons avec des essais d'allumage utilisant des maquettes de meubles ou des meubles grandeur nature ont montré une bonne relation avec la méthode du papier filtre quand on effectue les essais sur une variété de tissus.

Certains membres de l'industrie ont fait part de leur désaccord avec cette conclusion et ont même évoqué la possibilité d'effets contraires, citant le cas de cigarettes qui se comportent bien à l'essai du papier filtre mais ont un potentiel d'allumage supérieur lorsqu'elles sont placées sur une maquette de meuble. Cependant les données fournies à l'appui de cette affirmation ne sont pas très convaincantes. Par exemple, dans une étude où l'on utilisait des maquettes de meubles avec 500 tissus choisis au hasard, seuls six à dix tissus ont présenté un phénomène d'effet contraire statistiquement significatif, et là encore on peut avoir des doutes puisqu'on n'avait effectué que six répétitions pour chaque combinaison de meuble et de tissu. Or, le nombre minimum de répétitions recommandées pour cette méthode est de 24.

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D'autres études faisant état de constatations similaires portaient sur un nombre moins grand de tissus et n'ont fourni que des données limitées sur les caractéristiques des tissus ou sur la façon dont ces tissus avaient été choisis. De plus, les variations des caractéristiques des cigarettes utilisées pour les essais étaient limitées et dans certains cas, leur validité douteuse.

Dans le cas des courants d'air et des fissures, on a obtenu des résultats contradictoires lorsque ces variables avaient été introduites dans la méthode d'essai. Par exemple, on a observé une inflammation généralement plus élevée en plaçant une cigarette classique dans une maquette de meuble avec fissure que dans une maquette de meuble lisse. Pourtant, dans une étude récente publiée par l'industrie, l'inflammation était systématiquement plus faible dans le cas de maquettes avec fissure. Ces genres de résultats contradictoires montre à quel point il est difficile de reproduire un courant d'air particulier ou le positionnement précis d'une cigarette dans une fissure.

La méthode ASTM E2187-02b est un bon indicateur prévisionnel de la capacité d'une cigarette à enflammer un substrat comme un matelas, un meuble ou de la literie. Une cigarette qui est conforme à la norme projetée, à savoir que pas plus de 25 p. 100 des cigarettes ne brûlent sur leur pleine longueur sur dix couches de papier-filtre en utilisant cette méthode, devrait avoir un potentiel d'allumage d'un meuble rembourré, d'un matelas ou de literie bien plus faible dans la plupart des conditions que la majorité des cigarettes actuellement en vente qui brûlent sur leur pleine longueur, même avec 15 couches de papier filtre.

(B) La méthode a une variabilité inhérente élevée
Neuf laboratoires, dont quatre de l'industrie de la cigarette, ont démontré que la méthode du National Institute of Standards and Technology des Etats-Unis, sur laquelle la méthode de la norme ASTM E2187-02b est fondée, donne des résultats que l'on pouvait répéter et reproduire. Un rapport publié par le National Institute of Standards and Technology en juillet 2003 a confirmé que les résultats obtenus de sa méthode d'essai d'extinction des cigarettes et par la méthode ASTM E2187-02b concordaient.

Un certain degré de variabilité est normal avec les méthodes d'essais scientifiques. Pour ce problème particulier, le ministère de la Santé considère que la variabilité de cette méthode est acceptable pour l'établissement d'une norme sur le potentiel d'allumage des cigarettes.

3. Technologie disponible

Un membre de l'industrie du tabac a indiqué que la technologie des bandes de papier utilisée par un important fabricant américain de cigarettes ne fonctionne pas et il a cité une étude où trois cigarettes différentes ont été mises à l'essai sur trente-quatre tissus. Malheureusement, les détails complets des caractéristiques des tissus, comme la teneur en cellulose ou la méthode de sélection des tissus n'étaient pas communiqués. Ces renseignements sont importants pour comprendre pourquoi la teneur moyenne en ions sodium et en ions potassium des tissus utilisés pour les essais des cigarettes à bandes de papier était presque le double de celle d'un échantillon de 500 tissus choisis au hasard dans une étude antérieure. De même, on ne mentionnait pas certaines caractéristiques des cigarettes comme le type de tabac, la présence ou l'absence d'additifs dans le tabac ou la teneur en citrate du papier. L'étude n'explique pas non plus le choix des caractéristiques des cigarettes, comme les 80 unités CORESTA du papier de base utilisé avec les cigarettes à bandes de papier contre 33 unités pour les cigarettes avec papier ordinaire.

Le ministère de la Santé propose une norme de rendement limitant à 25 p. 100 le nombre de cigarettes brûlant sur leur pleine longueur sur dix couches de papier filtre en utilisant la méthode ASTM E2187-02b. Cette approche donne aux fabricants la liberté du procédé de fabrication ou de la conception technique pour atteindre l'objectif de la norme. Donc si certains pensent que le papier à bandes risque de causer davantage d'incendies, ils peuvent choisir une autre solution.

De plus, le ministère de la Santé travaille avec les autorités en matière d'incendie et d'autres intervenants pour améliorer la compilation des données sur les incendies au Canada. Ces données, en plus de la base des données de l'Ontario devraient fournir une mesure fiable de l'impact du projet de règlement en matière de prévention des incendies au Canada.

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4. Toxicité

L'industrie du tabac a fait part de ses préoccupations à l'égard de certaines méthodes de réduction du potentiel d'allumage des cigarettes qui pourraient faire augmenter la toxicité à cause d'un dégagement de fumée plus important (voir le point 5, suivant). Selon l'industrie, les méthodes actuelles d'évaluation toxicologique ne sont pas adéquates et un programme d'analyses toxicologiques approprié devrait être adopté avant d'imposer une norme.

La majorité des intervenants ont fait savoir qu'ils sont d'avis que la responsabilité des fabricants de cigarettes est de s'assurer que les cigarettes qui ont un potentiel d'allumage réduit ne sont pas plus toxiques que les autres. Selon certains, il faudrait faire des études plus poussées ou bien la réglementation devrait exiger des analyses. Un autre croit que, d'après les informations d'un grand fabricant américain de cigarettes et du Technical Advisory Group for Cigarettes and Little Cigar Fire Safety des États-Unis, la toxicité n'est pas un enjeu.

Le ministère de la Santé a modifié le projet de règlement pour exiger que les fabricants effectuent deux essais à court terme de toxicité in vitro et communiquent les résultats une fois par an. Il s'agit de la méthode officielle du ministère de la Santé T-501: Essai de mutation réverse de bactéries sur des condensats de la fumée principale de tabac, Première édition, en date du 2004-01-30 et de la méthode officielle T-502: Essai de fixation du colorant rouge neutre pour la fumée principale de tabac, Première édition, en date du 2004-01-30. L'idéal serait une série d'essais portant sur plusieurs résultats toxicologiques pour surveiller les variations de toxicité de la fumée. Cependant, peu d'analyses de toxicité ont été validées et normalisées pour l'évaluation de la toxicité de la fumée du tabac.

Le but d'exiger des analyses de toxicité et la communication des résultats est d'avoir des données toxicologiques fiables. Le ministère de la Santé travaille également sur une troisième méthode officielle (Essai in vitro du micronoyau) en vue d'une incorporation par renvoi ultérieure. Il prévoit que les données obtenues permettront de mieux évaluer les variations possibles de la toxicité de la fumée.

5. Chimie de la fumée

L'industrie a fait savoir qu'elle craignait qu'en apportant des modifications aux cigarettes pour réduire le potentiel d'allumage, il pourrait y avoir augmentation de la toxicité de la fumée. Un fabricant de cigarettes a même indiqué que le dégagement de monoxyde de carbone pourrait augmenter de 10-15 p. 100. Pour bien comprendre l'incidence de cette augmentation, il faut préciser que la fumée de cigarette contient plus de 4 000 produits chimiques, dont plus de 50 sont cancérigènes. La plupart de ces constituants toxiques de la fumée, dont le monoxyde de carbone, le benzène, le formaldéhyde et l'acide cyanhydrique sont formés pendant la combustion du tabac. D'autres, comme la nicotine, le cadmium, le plomb et les nitrosamines, sont des constituants naturels du tabac qui sont libérés lors de la combustion.

Le ministère de la Santé ne connaît que deux études qui ont été publiées sur la chimie de la fumée de cigarettes dites à potentiel d'allumage réduit et elles ont été faites par deux grands fabricants américains. Selon la première, le papier utilisé pour ces cigarettes n'avait causé que des modifications mineures à la composition chimique de la fumée. La deuxième étude a conclu que, par rapport à la cigarette témoin, les produits dégagés de la cigarette modifiée (à potentiel d'allumage réduit) étaient similaires ou réduits.

Néanmoins, en raison de l'insuffisance actuelle de données scientifiques, il est difficile d'évaluer avec certitude l'incidence des modifications chimiques de la fumée. Le projet de règlement a pour but d'obtenir des informations supplémentaires en imposant de nouvelles analyses et de nouveaux rapports de toxicité à l'appui des rapports déjà exigés pour les émissions.

6. Acceptabilité pour les consommateurs

Cette question a été soulevée exclusivement par les membres de l'industrie du tabac. Le ministère de la Santé pense qu'il vaut mieux laisser ce type d'étude à l'industrie.

7. Autres produits du tabac

Le projet de règlement ne concerne que les cigarettes commerciales, qui représentent 85 p. 100 du marché canadien des produits du tabac. La plupart des intervenants ont fait savoir qu'ils favorisaient cette approche, quoique pour des raisons différentes. Les industriels ont évoqué des barrières techniques et méthodologiques alors que d'autres évoquaient les risques liés au risque d'allumage et la baisse de popularité des autres produits du tabac.

Un seul intervenant, membre de l'industrie du tabac, a manifesté son opposition à cette approche. Il pense que les consommateurs qui n'accepteront pas les cigarettes à potentiel d'allumage réduit pourraient se tourner vers d'autres produits comme les bâtonnets de tabac ou le tabac coupe fine (à rouler). Il justifie son raisonnement par le fait que comme c'est la clientèle de niveau socio-économique faible qui est plus portée à utiliser ces produits, une réglementation réduisant le potentiel d'allumage ne ferait « qu'accentuer la vulnérabilité de ce groupe ».

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Le ministère de la Santé ne sait pas très bien comment on en est arrivé à cette conclusion. D'abord, il est fort probable que ces autres produits n'aient pas un potentiel d'allumage supérieur à celui des cigarettes ordinaires. La vulnérabilité ne devrait donc pas s'accroître. En fait, c'est plutôt l'opinion de nombreux experts en inflammabilité et en incendie que le tabac à rouler constitue un risque d'incendie moins élevé que les cigarettes ordinaires. Deuxièmement, cette conclusion se fonde sur l'hypothèse que seuls les groupes socioéconomiques faibles abandonneront les cigarettes à potentiel d'allumage réduit pour se tourner vers d'autres produits.

Le ministère de la Santé pense que le projet de règlement entraînera une réduction du nombre d'incendies attribuables à des cigarettes commerciales, ce qui est raisonnable étant donné qu'elles constituent environ 85 p. 100 du marché des produits du tabac. De plus, le Ministère effectue des recherches sur les autres produits du tabac et pourrait éventuellement proposer des normes de potentiel d'allumage pour ces produits. En attendant, il est d'avis que si les consommateurs se tournent vers d'autres produits, les risques d'incendie ne seront pas supérieurs à ceux qui sont attribuables aux cigarettes commerciales actuelles.

8. Produits du tabac illégaux

L'industrie du tabac a aussi fait remarquer que si les consommateurs n'acceptent pas les cigarettes à potentiel d'allumage réduit, ils se fourniront sur le marché parallèle. Le ministère de la Santé continuera à exercer une vigilance et prendra les mesures appropriées si des activités illégales surgissent.

9. Chutes des charbons

Certains membres de l'industrie du tabac s'inquiètent d'une possibilité d'augmentation des chutes de charbons. Si cela se produit, la braise pourrait laisser une trace de brûlure sur la surface où elle tombe, que ce soit un vêtement, un meuble ou la peau.

L'industrie canadienne du tabac n'a pas fourni au ministère de la Santé des données montrant que le papier à bandes cause une augmentation de la chute des charbons. Les seuls renseignements qui ont été communiqués jusqu'ici sont quelques pages de constatations préliminaires sur un cas en cours de jugement aux États-Unis. Toutefois, les documents ne contiennent pas de données probantes dans un sens ou dans l'autre et la justice américaine ne s'est pas encore prononcée. Il est donc difficile pour le ministère de la Santé de prendre une décision éclairée sur la base de ces renseignements.

Toutefois, dans un rapport de 1988 intitulé The Influence of Cigarette Design on Coal Retention, des chercheurs de la British American Tobacco (U. K. & Export) Ltd. ont conclu que la perméabilité du papier n'avait aucune influence sur le maintien en place du bout allumé (dans les limites de l'analyse). Mais ils ont constaté que c'était les caractéristiques du tabac qui avaient la plus grande influence sur le maintien en place du bout allumé et, en particulier, qu'une augmentation de la teneur en tabac expansé supérieure à 40 p. 100 augmentait le maintien en place du bout allumé. Point intéressant, l'augmentation de la teneur en tabac expansé devrait réduire le potentiel d'allumage des cigarettes. À l'heure actuelle, la majorité des cigarettes canadiennes ont une teneur en tabac expansé inférieure à 22 p. 100.

À partir de ces renseignements, le ministère de la Santé ne peut que conclure qu'il n'existe aucune preuve permettant de confirmer que la norme proposée sur le potentiel d'allumage des cigarettes entraînerait automatiquement une augmentation des chutes de charbons.

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Respect et exécution

L'exécution des règlements sera effectuée par le ministère de la Santé en vertu de la Loi sur le tabac.

1. Norme sur la réduction du potentiel d'allumage

L'article 5 de la Loi sur le tabac (la Loi) stipule qu'il est interdit de fabriquer un produit du tabac qui n'est pas conforme aux normes établies par règlement. En vertu de l'article 43 de la Loi, quiconque contrevient à l'article 5 est passible, par procédure sommaire, d'une amende maximale de 100 000 $ et d'un emprisonnement maximal d'un an, ou de l'une de ces peines; et, par mise en accusation, d'une amende maximale de 300 000 $ et d'un emprisonnement maximal de deux ans, ou de l'une de ces peines.

La conformité à la norme projetée sur le potentiel d'allumage serait vérifiée par l'échantillonnage des cigarettes et leur analyse ultérieure. L'échantillonnage commencerait après le 1 er octobre 2005 et viserait toutes les cigarettes commerciales ou importées au Canada.

2. Rapports sur les essais de toxicité

L'article 6 de la Loi stipule que le fabricant et l'importateur d'un produit du tabac est tenu de transmettre au ministre, dans les délais et selon les modalités réglementaires, les renseignements exigés par les règlements en ce qui touche le produit et ses émissions. En vertu de l'article 44 de la Loi, un fabricant ou un importateur qui contrevient à l'article 6 est passible, par procédure sommaire, d'une amende maximale de 50 000 $ et d'un emprisonnement maximal de six mois, ou de l'une de ces deux peines.

Le respect de l'exigence de soumettre des rapports sera vérifié par l'examen des rapports reçus. Des inspections seront effectuées chez les fabricants et les importateurs pour vérifier si les renseignements fournis sont exacts et complets.

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Personne-ressource

Madame Christine Belle-Isle, Gestionnaire intérimaire, Division de la réglementation, Bureau de la réglementation et de la conformité, Programme de la lutte au tabagisme, Direction générale de la santé environnementale et de la sécurité des consommateurs, Santé Canada, Indice d'adresse 3507C1, 123, rue Slater, Ottawa (Ontario) K1A 0K9, (613) 941-1551 (télécopieur), pregs@ hc-sc.gc. ca (courriel).

Mise à jour : 2005-05-01 Haut de la page