La santé des jeunes : tendances au Canada
Chapitre 3 : La vie à la maison
II apparaît de plus en plus évident que la qualité des relations des
parents avec leurs enfants influe fortement sur le degré d'intégration
sociale et la santé physique de ces derniers (Morrison et coll., 1994).
L'adolescence est souvent une période d'incertitude, durant laquelle les
jeunes sont censés devenir plus responsables et autonomes pour se préparer
à leur vie d'adultes, mais sans nécessairement briser tous les liens avec
leurs parents. La grande majorité des adolescents continuent de respecter
leurs parents, d'avoir le sentiment de faire partie de la famille et de
partager bon nombre des valeurs de leurs parents. Dans certaines familles,
toutefois, les conflits parents-enfants s'accentuent durant l'adolescence
et sont exacerbés par les problèmes conjugaux et les problèmes de toxicomanie
des parents (deGoede et Spruijt, 1996).
La façon dont les parents assument leur rôle influe apparemment sur la
tendance des adolescents à faire des choses susceptibles de mettre leur
santé en péril. En adoptant une attitude plus « démocratique »
quant à leurs attentes à l'égard de leurs enfants ainsi que dans leurs
relations avec eux et en leur fournissant le soutien affectif nécessaire,
les parents peuvent favoriser le sain développement de leurs adolescents
(Congrès des États-Unis, 1991). Des attentes clairement définies et des
règles raisonnables concernant le comportement sont considérées comme
des éléments essentiels d'un exercice efficace du rôle parental. Les jeunes
dont les parents sont indifférents, donnent le mauvais exemple ou manquent
de cohérence quant aux comportements qu'ils exigent de leurs enfants ont
beaucoup plus souvent des comportements déviants et des problèmes psychologiques
(Dougherty, 1993). De même, les adolescents qui ne se sentent pas proches
de leurs parents ou qui vivent dans des familles monoparentales ont davantage
tendance à avoir des problèmes liés à l'estime de soi, à souffrir de dépression
et à faire des choses qui mettent leur santé en péril telles que fumer
et prendre de la drogue (Resnick et coll., 1998). Il est difficile d'offrir
aux jeunes des modèles de relations satisfaisantes entre adultes, d'expériences
de travail enrichissantes et de mariages réussis lorsque les tensions
à la maison rendent les relations parents-enfants difficiles.
Figure 3.1 Structure familiale,
toutes classes et garçons et filles confondus (%) |
|
1994 |
1998 |
Deux parents |
76 |
74 |
Mère seulement |
12 |
12 |
Père seulement |
2 |
2 |
Mère et beau-père |
6 |
8 |
Père et belle-mère |
2 |
2 |
Autre |
1 |
2 |
Figure 3.2 Réponses
des élèves de 8e année à certaines questions,
suivant qu'ils estiment ou non vivre dans une famille riche,
1998 (%) |
|
Garçons |
Filles |
|
Riche |
Pas Riche |
Riche |
Pas Riche |
Bonheur (très heureux) |
52 |
28 |
40 |
25 |
Mes parents me comprennent |
74 |
44 |
57 |
40 |
Sentiment d'appartenance à mon école |
59 |
38 |
65 |
46 |
Pris de la marijuana |
13 |
38 |
14 |
26 |
Les résultats présentés dans le présent chapitre sont destinés à illustrer
l'évolution de la situation aux chapitres de la structure familiale et
des relations des parents avec leurs enfants ainsi que de montrer l'importance
des relations familiales positives pour la santé des jeunes.
La structure familiale et le statut socio-économique
L'évolution de la société a radicalement transformé la vie familiale
des Canadiens au cours des trente dernières années. Une plus grande liberté
en ce qui touche à la procréation et une évolution du monde du travail
ont permis d'élargir l'éventail des possibilités offertes aux femmes et,
par le fait même, ont singulièrement compliqué la vie familiale.
Comme on le voit à la figure 3.1, la structure familiale n'a pas beaucoup
changé au cours des quatre dernières années. Un peu moins d'élèves vivaient
avec leurs deux parents naturels en 1998 qu'en 1994, tandis que les pourcentages
des jeunes qui vivaient avec les autres personnes mentionnées, à l'exception
de ceux vivant avec « leur père et leur belle-mère », ont légèrement augmenté
durant la même période. Il convient toutefois de signaler que près des
trois quarts des élèves interrogés vivaient avec leurs parents naturels.
Dans l'analyse des relations des élèves avec leurs parents présentée dans
les pages qui suivent, il faut tout de même garder à l'esprit que les
répondants ne parlent pas tous de la même structure familiale.
L'enquête n'était pas conçue pour évaluer directement l'effet de la pauvreté
sur la santé des jeunes. Cependant, il était possible d'établir des corrélations
entre les réponses des élèves à la question « Selon toi, est-ce que ta
famille est riche? » et les variables relatives à l'état de santé et à
l'adaptation sociale. Ces corrélations étaient de faibles à modérées.
Certaines de ces corrélations sont illustrées à la figure 3.2, où on compare
les réponses à quatre questions des jeunes qui ont dit que leur famille
est « riche » ou « très riche » et de ceux qui ont indiqué que leur famille
« n'est pas riche ». Ceux dont la famille n'était pas riche étaient moins
nombreux à se considérer comme des personnes « très heureuses », à dire
que leurs parents les comprennent ainsi qu'à éprouver un sentiment d'appartenance
à leur école et une plus grande proportion d'entre eux avaient déjà pris
de la marijuana.
Les relations avec les parents et la santé
Une échelle intégrant les principaux aspects des relations des parents
avec leurs enfants avait été établie. Les pourcentages obtenus pour cette
échelle servent à mesurer la corrélation entre les relations parents-enfants
et d'autres variables. Chacun des éléments composant l'échelle est examiné
dans les pages qui suivent. Comme on le voit à la figure 3.3, il existe
une forte corrélation entre la nature des relations parents-enfants et
la plupart des autres variables liées à la santé. Les élèves qui avaient
de bonnes relations avec leurs parents avaient aussi davantage tendance
à être adaptés au milieu scolaire, à se sentir en bonne santé, à avoir
une bonne estime d'eux-mêmes et à éviter les comportements à risque.
La communication avec les parents
Les parents sont la plus importante source de soutien social durant les
premières années de l'adolescence. La qualité de la communication avec
les parents et leur capacité de comprendre les problèmes et les préoccupations
des adolescents ont des effets régulateurs importants sur la santé physique
et psychologique des jeunes. La figure 3.4 montre clairement que les proportions
d'élèves qui trouvent facile de discuter avec leur père des choses qui
les préoccupent vraiment diminuent régulièrement entre la 6e et la 10e année. À ce chapitre, la faible proportion de filles
qui trouvent facile de parler à leur père est particulièrement préoccupante,
étant donné que les filles attachent une grande importance aux opinions
de leur père et ont besoin de leur soutien à cette étape difficile de
la vie qu'est l'adolescence (Shulman et Seiffige-Krenke, 1997). Il semble
bien en outre que les problèmes de communication tant des garçons que
des filles avec leur père peuvent entraîner de graves problèmes psychosociaux.
Les choses ont peu évolué à ce chapitre durant la période visée par les
trois enquêtes pour les élèves de 8e et de 10e année.
Fait encourageant, toutefois, la proportion des élèves de 6e année, garçons et filles, qui trouvent facile de discuter avec leur père,
a augmenté.
Figure 3.3 Facteurs associés aux relations
des élèves avec leurs parents |
6e année |
8e année |
10e année |
Les élèves qui ont de bonnes relations avec leurs
parents ont davantage tendance à : |
M |
F |
M |
F |
M |
F |
Être heureux |
2 |
4 |
4 |
4 |
3 |
4 |
Avoir une bonne estime de soi |
4 |
4 |
3 |
4 |
2 |
3 |
Ne pas trouver que leurs parents ont des attentes trop élevées |
2 |
3 |
3 |
4 |
4 |
4 |
Être bien adaptés à l'école |
2 |
3 |
3 |
3 |
2 |
3 |
Ne pas avoir de périodes de déprime |
2 |
3 |
3 |
3 |
2 |
3 |
Ne pas avoir de périodes de mauvaise humeur |
2 |
3 |
2 |
3 |
2 |
2 |
Ne pas se sentir seuls |
2 |
3 |
2 |
3 |
1 |
2 |
Ne pas éprouver de pression à cause du travail scolaire |
2 |
3 |
2 |
2 |
1 |
1 |
Ne pas se sentir démunis |
2 |
2 |
2 |
2 |
1 |
2 |
Ne pas se sentir fatigués à l'école |
1 |
1 |
2 |
2 |
2 |
1 |
Ne pas vouloir que leur corps soit différent |
2 |
2 |
2 |
2 |
1 |
1 |
Obtenir de bons résultats à l'école |
1 |
1 |
2 |
2 |
2 |
2 |
Ne pas harceler les autres |
1 |
1 |
2 |
2 |
1 |
2 |
Ne pas avoir le sentiment d'être tenus à l'écart |
2 |
2 |
1 |
1 |
1 |
1 |
Croire que leur famille est riche |
1 |
2 |
1 |
1 |
1 |
1 |
Se sentir en bonne santé |
1 |
1 |
1 |
2 |
1 |
1 |
Ne pas fumer |
— |
1 |
2 |
2 |
1 |
2 |
Ne jamais s'être enivrés |
— |
1 |
2 |
2 |
1 |
1 |
Ne pas avoir d'amis qui prennent de la drogue |
— |
— |
1 |
2 |
2 |
2 |
Ne pas consommer de marijuana |
— |
— |
1 |
2 |
2 |
1 |
Ne pas manquer l'école sans raison valable |
— |
— |
2 |
2 |
1 |
1 |
Ne pas avoir d'amis qui fument |
— |
— |
1 |
2 |
1 |
2 |
Ne pas avoir d'amis qui boivent de l'alcool |
— |
— |
2 |
1 |
1 |
1 |
Coefficient de corrélation: 1=
.15 to .24 | 2= .25
to .34 | 3= .35 to .44 | 4=
.45 + |
Figure 3.4 Élèves
qui trouvaient « facile » ou « très facile
» de discuter avec leur père des choses qui les préoccupent
vraiment (%) |
|
1990 |
1994 |
1998 |
|
Garçons |
Filles |
Garçons |
Filles |
Garçons |
Filles |
6e année |
63 |
49 |
69 |
54 |
71 |
58 |
8e année |
56 |
41 |
56 |
39 |
59 |
39 |
10e année |
48 |
36 |
47 |
32 |
51 |
33 |
Les réponses des élèves à la question à savoir s'ils trouvaient « facile
» ou « très facile » de discuter avec leur mère des choses qui les préoccupent
vraiment sont présentées à la figure 3.5. D'une manière générale, les
répondants trouvaient plus facile de discuter avec leur mère qu'avec leur
père. Entre la 6e et la 10e année, la proportion
des élèves qui trouvaient facile de discuter avec leur mère des choses
qui les préoccupent vraiment diminue des quatre cinquièmes à environ les
deux tiers des répondants. Contrairement à la question concernant le père,
les proportions sont à peu près les mêmes pour les garçons et les filles.
De toute évidence, au Canada, les jeunes ont plus de facilité à discuter
avec leur mère qu'avec leur père et, selon toute probabilité, c'est le
plus souvent la mère qui aide les enfants lorsqu'ils ont des problèmes.
Figure 3.5 Élèves
qui trouvaient « facile » ou « très facile
» de discuter avec leur mère des choses qui les préoccupent
vraiment (%) |
|
1990 |
1994 |
1998 |
|
Garçons |
Filles |
Garçons |
Filles |
Garçons |
Filles |
6e année |
74 |
78 |
82 |
79 |
83 |
83 |
8e année |
67 |
70 |
73 |
71 |
72 |
71 |
10e année |
65 |
67 |
66 |
63 |
68 |
65 |
Figure 3.6 Élèves
de quinze ans qui trouvaient « facile » ou « très
facile » de discuter avec leur père des choses qui les
préoccupent vraiment, par pays, 1998 (%) |
|
Garçons |
Filles |
SUÈ |
62 |
45 |
POL |
57 |
38 |
ANG |
55 |
41 |
NOR |
55 |
35 |
GRÈ |
55 |
33 |
FRA* |
54 |
32 |
É-U |
53 |
41 |
DAN |
53 |
38 |
SUI |
52 |
37 |
CAN |
51 |
35 |
ALL* |
49 |
29 |
*La France et l'Allemagne sont représentées
par région (on trouvera les explications à ce sujet au chapitre 1). |
Le père est un important modèle de comportement pour les jeunes. Il existe
d'ailleurs un lien étroit entre l'intensité des rapports des pères avec
leurs enfants et l'adaptation sociale de ces derniers. Les jeunes suédois
et allemands sont respectivement les plus nombreux et les moins nombreux
à discuter avec leurs pères de leurs problèmes et préoccupations. Au Canada,
comme ailleurs, la communication pères-filles est particulièrement difficile.
Les relations parents-enfants
Après avoir donné un aperçu général de la situation concernant les relations
des parents avec leurs enfants, il est utile d'examiner les réponses des
élèves à des aspects plus précis des relations parents-enfants tels que
la confiance, la compréhension et les attentes.
Les proportions des élèves qui étaient d'accord avec l'énoncé « Mes parents
me comprennent » sont indiquées à la figure 3.7. Comme on le voit, près
de la moitié des élèves de 10e année estimaient que leurs parents
ne les comprennent pas. Et constatation peut-être étonnante, dans les
trois enquêtes et pour les trois classes étudiées, une plus forte proportion
de garçons que de filles ont indiqué que leurs parents les comprenaient.
La diminution des pourcentages avec l'âge tient peut-être à ce que les
jeunes, en grandissant, cherchent à devenir plus autonomes et peuvent
avoir le sentiment que leurs parents ont du mal à comprendre la transition
dans laquelle ils sont engagés. Les résultats des trois enquêtes sont
à peu près les mêmes à ce chapitre, sauf pour les élèves de 6e année, dont la proportion de ceux qui considéraient être compris par leurs
parents a légèrement augmenté dans les enquêtes plus récentes.
Pendant la phase de conception du questionnaire, les questions sont mises
à l'épreuve par des groupes de consultation formés d'élèves afin de déterminer
dans quelle mesure ils comprennent ces questions. En répondant, à la question
à savoir si leurs parents leur faisaient confiance, les élèves du groupe
de consultation ont compris que l'on entendait par là la mesure dans laquelle
ils agissaient de façon responsable concernant les tâches qu'ils ont à
accomplir et la façon dont ils utilisent leur argent ainsi que la façon
dont ils se comportent d'une manière générale. Comme on le voit à la figure
3.8, la grande majorité des élèves canadiens estimaient que leurs parents
leur font confiance. Les proportions sont légèrement plus élevées chez
les garçons (sauf dans le groupe des 11 ans de la première enquête) et
la situation n'a pas beaucoup changé entre la première et la troisième
enquête. Globalement, le pourcentage des répondants qui considéraient
que leurs parents leur font confiance diminue de 10 p. 100 pour les garçons
et de 12 p. 100 pour les filles entre la 6e et la 10e année; dans les deux cas, c'est entre la 6e et la 8e année que la diminution est la plus marquée.
Figure 3.7 Élèves
qui estimaient que leurs parents les comprennent (%) |
|
1990 |
1994 |
1998 |
|
Garçons |
Filles |
Garçons |
Filles |
Garçons |
Filles |
6e année |
66 |
63 |
78 |
70 |
76 |
70 |
8e année |
56 |
46 |
62 |
51 |
64 |
50 |
10e année |
51 |
45 |
50 |
43 |
53 |
46 |
Figure 3.8 Élèves
qui estimaient que leurs parents leur font confiance (%) |
|
1990 |
1994 |
1998 |
|
Garçons |
Filles |
Garçons |
Filles |
Garçons |
Filles |
6e année |
74 |
79 |
82 |
81 |
83 |
81 |
8e année |
74 |
66 |
74 |
70 |
76 |
71 |
10e année |
68 |
62 |
68 |
65 |
74 |
71 |
Figure 3.9 Élèves
qui ont dit qu'ils se disputaient souvent avec leurs parents
(%) |
|
1990 |
1994 |
1998 |
|
Garçons |
Filles |
Garçons |
Filles |
Garçons |
Filles |
6e année |
26 |
22 |
20 |
21 |
19 |
18 |
8e année |
27 |
33 |
24 |
33 |
26 |
34 |
10e année |
30 |
35 |
31 |
34 |
29 |
36 |
Figure 3.10 Élèves
qui ont dit qu'il leur arrivait de vouloir partir de la maison
(%) |
|
1990 |
1994 |
1998 |
|
Garçons |
Filles |
Garçons |
Filles |
Garçons |
Filles |
6e année |
43 |
42 |
34 |
35 |
33 |
31 |
8e année |
41 |
51 |
33 |
42 |
33 |
43 |
10e année |
44 |
55 |
40 |
51 |
33 |
46 |
Les jeunes qui ont des conflits avec leurs parents sont plus susceptibles
de se détacher du foyer familial et de s'exposer à des risques qui mettent
leur santé en péril. Ces conflits prennent notamment la forme de fréquentes
disputes. Les pourcentages d'élèves qui ont dit qu'ils se disputaient
souvent avec leurs parents sont présentés à la figure 3.9. Comme on le
voit, près du tiers des élèves de 8e et de 10e année—et
relativement plus de filles que de garçons—ont fait cette affirmation.
Les proportions sont toutefois à peu près les mêmes entre les garçons
et les filles pour la 6e année de même qu'entre la 8e et la 10e année. Par ailleurs, la situation n'a pas beaucoup
changé entre 1990 et 1998, mis à part une légère diminution des pourcentages
chez les groupes des 6e année.
Les pourcentages d'élèves qui ont dit qu'il leur arrivait de vouloir
partir de la maison sont indiqués à la figure 3.10. La question telle
que posée comporte une certaine ambiguïté, étant donné qu'elle ne permet
pas de savoir combien de fois les répondants ont songé à partir non plus
que dans quelle mesure ils y ont songé sérieusement. Cela dit, les pourcentages
élevés de filles (de fait près de la moitié de celles de la 10e année) qui ont dit avoir déjà pensé à quitter le foyer familial ont de
quoi étonner. L'écart entre garçons et filles est important pour les élèves
de 8e et de 10e année, une proportion beaucoup plus
élevée de ces dernières s'étant dites d'accord avec l'énoncé proposé.
Par ailleurs, la proportion des filles qui ont dit qu'il leur arrivait
de vouloir partir de la maison augmente de façon appréciable entre la
6e et la 10e année, peut-être un signe de la difficulté
de passer l'âge de la puberté pour certaines adolescentes. On n'observe
toutefois pas le même phénomène chez les garçons : à l'exception des élèves
de 8e année dans la deuxième et la troisième enquêtes, les
proportions des répondants qui songeaient parfois à quitter la maison
diminuent légèrement entre 1990 et 1998.
Ce n'est pas facile pour les parents d'établir des attentes réalistes
pour leurs enfants, notamment en ce qui concerne leur rendement et leur
travail à l'école. Il va de soi que la plupart des parents veulent que
leurs enfants réussissent—et donc obtiennent de bonnes notes—et
aillent un jour à l'université. Bien sûr, un tel cheminement n'est pas
à la portée de tous les enfants. Pourtant, beaucoup de parents, par leurs
paroles ou par leurs actes, ont des attentes exagérément élevées, qui
risquent de créer de la tension chez leurs enfants et même d'engendrer
des conflits avec eux. Les pourcentages d'élèves qui ont répondu que leurs
parents attendaient trop d'eux augmentent régulièrement dans les classes
supérieures. Environ le tiers des répondants de 8e et de 10e année considéraient que leurs parents attendent trop d'eux (figure 3.11).
Les proportions sont moindres chez les élèves de 6e année et
elles diminuent légèrement entre les trois sondages. Les résultats ne
varient pas beaucoup selon le sexe, ce qui semble indiquer que les parents
ont des attentes aussi élevées à l'égard de leurs garçons et de leurs
filles.
Figure 3.11 Élèves
qui ont répondu que les attentes de leurs parents à
étaient trop élevées (%) |
|
1990 |
1994 |
1998 |
|
Garçons |
Filles |
Garçons |
Filles |
Garçons |
Filles |
6e année |
28 |
24 |
21 |
19 |
19 |
18 |
8e année |
32 |
34 |
31 |
31 |
30 |
30 |
10e année |
34 |
34 |
36 |
34 |
30 |
33 |
Figure 3.12 Élèves
de treize ans qui ont répondu que les attentes de leurs parents
à l'égard de leur rendement scolaire étaient
trop élevées, par pays, 1998 (%) |
|
Garçons |
Filles |
GRÈ |
76 |
71 |
ANG |
41 |
31 |
É-U |
40 |
37 |
POL |
37 |
32 |
ALL* |
35 |
27 |
DAN |
35 |
22 |
CAN |
34 |
28 |
FRA* |
34 |
28 |
SUÈ |
34 |
28 |
NOR |
33 |
22 |
SUI |
26 |
24 |
*La France et l'Allemagne sont représentées
par région (on trouvera les explications à ce sujet au chapitre 1). |
Les attentes des parents à l'égard du rendement scolaire de leurs enfants
sont particulièrement élevées en Grèce. Ailleurs, la situation est à peu
près comparable. Dans tous les pays, les garçons étaient proportionnellement
plus nombreux que les filles à penser que les attentes de leurs parents
à l'égard de leur rendement scolaire étaient trop élevées.
Figure 3.13 Élèves
qui ont dit qu'ils accordaient de l'importance à
ce que leurs parents pensent d'eux (%) |
|
1990 |
1994 |
1998 |
|
Garçons |
Filles |
Garçons |
Filles |
Garçons |
Filles |
6e année |
80 |
81 |
84 |
76 |
82 |
77 |
8e année |
75 |
73 |
76 |
69 |
74 |
69 |
10e année |
72 |
74 |
71 |
69 |
67 |
72 |
II ressort des recherches menées sur la question que la très grande majorité
des jeunes continuent, durant leur adolescence, à attacher de l'importance
à ce que leurs parents pensent d'eux. Les résultats de la présente recherche
aboutissent à cette même conclusion. Quoique les pourcentages diminuent
légèrement dans les groupes d'âge supérieurs, la très grande majorité
de nos répondants ont en effet indiqué qu'ils accordaient de l'importance
à ce que leurs parents pensent d'eux (figure 3.13), et ce malgré la tension
et les conflits parents-enfants qui s'expriment clairement dans leurs
réponses aux autres questions examinées dans le présent chapitre. Les
résultats varient peu selon le sexe. Dans des analyses antérieures des
résultats de l'enquête HBSC, il était signalé que les jeunes Canadiens
avaient tendance à trouver plus difficile que les jeunes de la plupart
des pays d'Europe de parler à leurs parents. Il était aussi signalé que
les jeunes qui trouvent facile de discuter avec leurs parents sont moins
susceptibles d'avoir des problèmes affectifs. Il est extrêmement important
pour leur état de santé général que les adolescents puissent discuter
facilement et ouvertement avec leurs parents de tous les aspects de leur
vie.
Résumé
La structure familiale a subi des transformations radicales au cours
des dernières années. De plus en plus de jeunes ne vivent pas avec leurs
deux parents biologiques. Cependant, les trois quarts des jeunes composant
notre échantillon vivaient avec leur père et mère biologiques.
La qualité des relations des parents avec leurs enfants s'amoindrit apparemment
à mesure que les enfants grandissent, notamment en ce qui touche à la
confiance et aux attentes. Près de la moitié des filles et du tiers des
garçons de 10e année ont dit qu'il leur arrivait de vouloir
partir de la maison. Même si les jeunes attachent beaucoup d'importance
à ce que leurs parents pensent d'eux, les relations parents-enfants sont
souvent tendues. Cela est particulièrement vrai pour ce qui touche aux
attentes des parents à l'égard du rendement scolaire de leurs enfants,
près du tiers des élèves interrogés ayant indiqué que ces attentes étaient
trop élevées.
La proportion d'élèves qui discutent de leurs problèmes avec leur père
diminue nettement entre la 6e et la 10e année, particulièrement
dans le cas des filles. Les jeunes trouvaient beaucoup plus facile de
discuter avec leur mère. Il semble bien pourtant que les jeunes tiennent
leur père en haute estime et que ces pères pourraient jouer un rôle beaucoup
plus important dans la vie de leurs enfants en passant plus de temps et
en communiquant mieux avec eux. Enfin, il semble que les parents canadiens
soient un peu moins proches de leurs enfants que ceux de bon nombre de
pays d'Europe.
|