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QUAND LA PORTE S'OUVRE

Modèle de traitement des personnes
de sexe masculin qui ont survécu à l'abus sexuel

 

Adrienne Crowder, M.S.W.

Conseiller clinique : Rob Hawkings, M.A., M.E.S., M.B.A.

ã Services à la famille et aux enfants de la région de Waterloo

Septembre 1993

Le présent projet a été financé par la Unité de la prévention de la violence familiale de Santé et Bien-être Canada sous le numéro FVDS 4887-06-91-088. Les opinions et les résultats présentés sont ceux des auterus et ne reflètent pas nécessairement la position du ministère.

Numéro de catalogue : 872-21/95-1993 F
ISBN No. : 0-662-98644-X

 

Ce livre est dédié à Christopher Crowder.
 
 

TABLE DES MATIÈRES


REMERCIEMENTS

CHAPITRE 1 - INTRODUCTION
Définition de l'abus sexuel
Langue
Méthodologie
Limitations de la recherche
Organisation du texte

CHAPITRE 2 - PRÉVALENCE, IMPACT ET PROBLÈMES
Estimations de la prévalence
Facteurs qui influent sur le dévoilement de l'abus sexuel parmi les hommes

1.  Facteurs liés à la recherche
2.  Impact des croyances et des stéréotypes culturels
  Mythe de l'autonomie masculine
  Mythe de l'initiation sexuelle
  Mythe de l'innocence féminine
  Mythe de la contamination
3.  Facteurs cliniques
Impacts de l'abus sexuel et problèmes éprouvés par les hommes qui en ont été victimes
Variables qui influencent l'impact de l'abus sexuel
  L'âge auquel l'abus a commencé
  La durée et la fréquence de l'abus
  Le type d'activités qui ont constitué l'abus
  La nature de la relation entre l'agresseur et la victime
  Le nombre et le sexe des agresseurs
  La façon dont l'abus a été dévoilé
  Les autres circonstances atténuantes dans la vie de la victime
Effets de l'abus sexuel sur les survivants
  Effets sur le plan physique
  Effets sur le plan mental
  Effets sur le plan affectif
  Stress post-traumatiques et dissociation
  Difficultés avec l'identité masculine
  Confusion quant à l'orientation sexuelle et homophobie
  Perpétration réactionnelle d'abus sexuel et agression
  Conduites sexuelles obsessionnelles
  Difficultés interpersonnelles
Différences entre les hommes et les femmes qui ont survécu à l'abus sexuel

CHAPITRE 3 - MODÈLE DE TRAITEMENT ET ÉTAPES DE GUÉRISON
Modèle thérapeutique à l'intention des survivants d'abus sexuel
Principes de base du traitement des survivants
  Validation
  Thérapie basée sur le client et dispensée au rythme du client
  Lien entre le passé et le présent
  Modèle de croissance et d'apprentissage
  Intégration
  Reconnaissance de sa peine
  Sécurité
  Reconnaissance que l'abus est à la fois personnel et culturel
  Transfert et contre-transfert
Étapes de la thérapie - modèle en quatre étapes
  Étape 1 - Rupture du silence
  Étape 2 - Étape de la victime
  Étape 3 - Étape du survivant
  Étape 4 - Étape du combattant

CHAPITRE 4 - CONSIDÉRATIONS THÉRAPEUTIQUES GÉNÉRALES
Établissement d'un contrat thérapeutique
  Frontières de la confidentialité
  Honoraires
  Structure des séances
  Limites des contacts physiques
  Crises et plans en cas d'urgence
Contre-indications
  État de crise
  Manque de soutien social
  Manque de motivation
  Limites des thérapeutes
  Rupture du contrat thérapeutique
Évaluation du client
  Antécédents généraux familiaux et sociaux
  Antécédents sexuels
  Stratégies de défense
  Perpétration réactionnelle d'abus sexuel
  Objectifs du traitement
Évaluation de la thérapie

CHAPITRE 5 - THÉRAPIE INDIVIDUELLE : ÉTAPE DE LA VICTIME
Interventions
  Travail avec l'enfant intérieur
  Visualisation
  Visualisation d'un « contenant »
  Visualisation d'un « lieu sûr »
  Hypothèses
  Livre de vie
  Histoire de sa vie
  Dessin de l'abus sexuel
  Reconnaissance du scénario
  Techniques de concentration

CHAPITRE 6 - THÉRAPIE INDIVIDUELLE -. ÉTAPE DU SURVIVANT
Fantasmes de revanche et d'agression et fantasmes sexuels
Fantasmes de revanche
Fantasmes de perpétration d'abus sexuel et de comportements sexuels déviants
Toxicomanies et obsessions
Augmentation de l'expression affective
  Musique
  Chaise vide
  Rédaction d'une lettre
  Collage
  Travail sur la respiration
  Expression concrète des émotions
  Jeu de rôle
  Libération bioénergétique de la colère
Les processus de dissociation
  Tenir un journal
  Utiliser des techniques d'ancrage dans la réalité
  Se regarder dans une glace
  Écrire ou parler à quelqu'un de ses souvenirs
  Utiliser des symboles de son identité adulte
Dissociation thérapeutique

CHAPITRE 7 - THÉRAPIE INDIVIDUELLE : ÉTAPE DU COMBATTANT
Confrontation de l'agresseur
Travail axé sur le corps
Fin de la thérapie

CHAPITRE 8 - THÉRAPIE DE GROUPE AVEC LES SURVIVANTS DEL'ABUS SEXUEL
Sélection des membres du groupe
  Aptitude du client à parler de l'abus sexuel dont il a été victime
  Soutien
  Motivation
  Aptitudes interpersonnelles
  Autonomie
  Homophobie
  Fonctionnement dans la vie présente
  Perpétration réactionnelle d'abus sexuel
  Trouble de personnalité multiple
Modèle de thérapie de groupe à deux niveaux
Règles des groupes
  Confidentialité
  Frontières
  Expression affective
  Participation active
  Présence
  Abstention
  Sobriété
Thérapie de groupe
  Mise au point
  Rituel de conclusion
  Cessation
Chefs de groupe

CHAPITRE 9 - PROBLÈMES PARTICULIERS ASSOCIÉS AU TRAITEMENT DES SURVIVANTS
Stratégies d'incitation au traitement
Impasses thérapeutiques
Problèmes associés au sexe de la personne en charge de la thérapie

CHAPITRE 10 - COUNSELING DES SURVIVANTS ADOLESCENTS
Rôle du counseling des adolescents victimes d'abus sexuel
Évaluation des adolescents victimes d'abus sexuel
Traitement des adolescents victimes d'abus sexuel
  Style de la ou du thérapeute
  Sexe de la personne en charge de la thérapie
  Définitions des frontières et des limites
  Processus de counseling
  Traitement de groupe

CHAPITRE 11 - QUESTIONS CONCERNANT LES THÉRAPEUTES
Le contre-transfert dans les thérapies à l'intention des survivants
Comment gérer les contre-transferts
  Vision de la thérapie comme d'un partenariat
  Thérapie personnelle pour les thérapeutes
  Identification de ses limites et frontières personnelles
  Supervision
  Soutien des pairs
  Engagement social
  Satisfaction dans sa vie personnelle
Problèmes particuliers aux thérapeutes qui sont eux-mêmes des survivants de l'abus sexuel

CHAPITRE 12 - RESSOURCES
Bandes magnétoscopiques
Documents imprimés
  Pour les thérapeutes et les clients
  Pour les thérapeutes
  Pour les clients
Documents imprimés en français
Formation

ANNEXE A - QUESTIONNAIRE

ANNEXE B - LISTE DES PERSONNES QUI ONT CONTRIBUÉ À LA RECHERCHE

ANNEXE C - DES

ANNEXE D - INTERVENTION VISANT À GÉRER LES FLASHBACKS ET INTERVENTION VISANT À AIDER LES CLIENTS À PRENDRE CONSCIENCE D'EUX-MÊMES DANS LE PRÉSENT

ANNEXE E - COMPORTEMENTS QUI FAVORISENT LE PROCESSUS DE GROUPE

ANNEXE F - QUESTIONNAIRE DEAN À L'INTENTION DES ADOLESCENTS

ANNEXE G - RÉFÉRENCES

REMERCIEMENTS

Il aurait été impossible d'effectuer les recherches présentées ici et de rédiger ce livre sans l'aide et le soutien d'un grand nombre de gens.

La Unité de la prévention de la violence familiale* de Santé et Bien-être Canada m'a offert un généreux soutien financier et Carole Miron et Giselle LaCroix ont administré le projet au nom de Santé et Bien-être Canada avec efficacité, patience et courtoisie.

La direction des Services à la famille et aux enfants de la région de Waterloo m'a accordé un congé de trois mois pour travailler sur ce livre. Jim Phillips et Del Armbruster ont veillé à ce que le projet ne dépasse les limites de son budget.

Susan Waterman et Fran Kolentsis, qui se sont chargées de rechercher les publications sur les survivants de l'abus sexuel, se sont admirablement acquittées de leur tâche. Rob Hawkings m'a apporté son concours sur le plan de l'expérience clinique et de la rigueur rédactionnelle. James Morgan a fait des recommandations qui sont devenues partie intégrante de l'organisation du texte. Témoin de mes joies et de mes frustrations pendant les dix-huit mois qu'a duré mon travail, il m'a été d'une aide inestimable tant par ces idées et ses suggestions que par le soutien moral qu'il m'a apporté. Susan Lawrence a édité la version finale du texte et ses suggestions ont permis d'en améliorer la qualité générale. Les talents d'éditrice électronique de Joan Laing ont permis de produire un texte final accessible et agréable à lire. L'excellente version française est le fruit du travail de Claude Gillard et Hélène Roulston. Je remercie tous ces gens de tout mon cœur.

Je voudrais enfin remercier de leur contribution les quarante et un thérapeutes qui ont généreusement partagé avec moi leur expérience de thérapie avec des survivants. J'ai toujours eu beaucoup de plaisir à parier avec elles et avec eux de leur travail et j'ai souvent été émue par leur compassion et leur talent. Je pense que la meilleure façon de leur exprimer ma profonde reconnaissance est de transmettre leurs idées à d'autres et de partager leur sagesse collective.

CHAPITRE 1 - INTRODUCTION

L'abus sexuel est une activité qui est perpétrée en secret. Les agresseurs sont souvent dans une position de confiance et toujours dans une position de pouvoir par rapport à leurs victimes. Les victimes se soumettent à l'autorité des agresseurs parce qu'elles y sont contraintes par la menace ou la séduction. Le manque de maturité intellectuelle et affective des victimes les rend souvent incapables de se rendre compte des risques associés aux comportements qui constituent l'abus sexuel.

Le processus thérapeutique a plusieurs traits en commun avec l'abus sexuel. La thérapie a lieu sous le couvert de la confidentialité. Les clients abordent la thérapie de bonne foi en partant du principe que les thérapeutes ont leurs intérêts à cœur. Les thérapeutes sont investis du pouvoir de décider du type d'intervention qui a le plus de chances d'aider leurs clients. Comme dans les situations d'abus, les clients n'ont généralement pas de moyen immédiat de juger des effets à long terme de leur thérapie ou de la compétence de leur thérapeute.

La différence fondamentale entre thérapie et abus, cependant, tient au fait que, si tout se passe comme il se doit, la thérapie est mue par les besoins des clients alors que l'abus ignore les besoins des victimes. Pour que la thérapie réussisse à rendre aux clients autonomie et bien-être, la ou le thérapeute doit dispenser le traitement d'une façon qui ne répète ni ne rappelle la dynamique de l'abus initial.

Quand la porte s'ouvre a été écrit pour aider les thérapeutes qui travaillent ou qui ont l'intention de travailler avec des survivants de l'abus sexuel. L'ouvrage ne perd jamais de vue le parallélisme entre thérapie et abus sexuel, et le modèle de traitement présenté est fondé sur les différences essentielles entre les deux processus qui font de la thérapie une occasion de guérison plutôt qu'une expérience nocive.

Le matériel brut qui constitue la base de ce livre a été recueilli auprès de quarante et un thérapeutes qui ont une solide expérience de travail avec des survivants de l'abus sexuel. On trouvera dans les chapitres qui suivent une discussion des similarités et des différences dans la façon de procéder de ces personnes ainsi qu'une description des interventions pratiques qu'elles utilisent pour mieux faire leur travail.

Ce livre est écrit à l'intention des spécialistes de la santé mentale (thérapeutes, travailleurs sociaux, infirmiers psychiatriques, médecins, travailleurs des centres d'intervention en cas de crise, etc.) qui offrent des services thérapeutiques aux adolescents et/ou aux adultes de sexe masculin qui ont survécu à l'abus sexuel. Les renseignements présentés ici ne prétendent pas être prescriptifs. Ils ont plutôt pour objet de stimuler la réflexion et la créativité des lecteurs qui sont invités à les améliorer en les adaptant à leur propre style et à leur propre expérience thérapeutiques.

Le livre est fondé sur l'idée que le processus de rétablissement d'un traumatisme sexuel subi dans l'enfance est différent pour chaque individu. Je pars également du principe que les types de traitements officiels discutés ici ne constituent qu'une partie du parcours personnel de chacun vers la guérison. Par ailleurs, bien que ce texte ne puisse pas faire abstraction des composantes politiques et culturelles de l'abus sexuel, il vise essentiellement les aspects personnels et psychologiques de la guérison du traumatisme.

DÉFINITION DE L'ABUS SEXUEL

On utilisera l'expression « abus sexuel » dans tout le livre pour décrire un comportement sexuel explicite ou implicite entre deux individus qui se produit dans les conditions suivantes :

1. La nature des actes sexuels n'est pas conforme au degré de développement d'au moins l'un des participants;

2. L'équilibre du pouvoir et de l'autorité (au sens du pouvoir psychologique, du pouvoir économique, du pouvoir associé au rôle, etc.) entre les deux individus est inégal; et

3. Il existe un rapport affectif établi entre les deux individus (comme entre enfant et pourvoyeuse ou pourvoyeur de soins ou enfant et personne en situation d'autorité).


Toute définition de l'abus sexuel fait nécessairement intervenir des valeurs et des croyances culturelles sur la sexualité, l'autodétermination et les rôles sociaux. Au sens le plus large, l'abus sexuel peut être défini comme :

des conduites sexuelles qu'un enfant ne peut pas comprendre, auxquelles un enfant ne peut pas donner de consentement informé ou qui viole les tabous sociaux de la société. (Krugman, 1986, dans Banning, 1989, p. 566)

La nature des actes sexuels qui constituent un abus varie en fonction du degré d'intrusion. Des activités comme le voyeurisme ou l'observation de matériel pornographique ou un intérêt pour la santé physique de l'enfant non adapté à son âge (p. ex., vérifier que le pénis d'un garçon de douze ans « se développe comme il faut ») se situent à un extrême du continuum. L'abus sadique et rituel occupe l'autre extrême.

Il faut noter que la perception qu'ont les clients du degré d'intrusion associé à une activité sexuelle spécifique est subjective. Le jugement d'un client peut évoluer à mesure qu'il redéfinit les expériences de son enfance à partir de sa compréhension d'adulte. C'est à l'expérience du client que s'adresse la thérapie plutôt qu'au fait que le comportement est jugé objectivement importun.

LANGUE

Ce texte traite du travail thérapeutique à effectuer auprès des personnes de sexe masculin qui ont survécu à un traumatisme sexuel subi dans l'enfance. Pour des raisons d'exactitude et de simplicité, j'utilise le masculin lorsque je me réfère aux victimes ou aux clients. Pour faciliter la lecture, dans la version française du texte, le masculin pluriel est également utilisé pour désigner les deux sexes.

Les termes « victime » et « survivant » sont tous deux couramment utilisés dans les discussions et les publications sur l'abus sexuel. Ces termes ont été adoptés par le mouvement féministe pour décrire les victimes de viol. Or, les victimes de viol sont agressées dans le cadre d'un incident violent qui est extérieur au déroulement normal de leur vie. Dans le cas de l'abus sexuel, le traumatisme est généralement répétitif et souvent accompagné de séduction. L'abus, sexuel est habituellement intégré à la vie de l'enfant et, d'une façon ou d'une autre, il conditionne ses croyances, ses sentiments, son comportement et sa sexualité. C'est pourquoi le terme « victime » ou « survivant » de l'abus sexuel risque de minimiser la dysfonction intériorisée à laquelle l'abus peut donner lieu à cause de son caractère envahissant et prolongé. Ces termes risquent également de constituer une généralisation hâtive de l'identité du client que l'on voit essentiellement comme un réchappé d'un traumatisme sexuel dans l'enfance au détriment des aspects de sa personne qui fonctionnent actuellement de façon saine et productive.

Compte tenu des limites du langage et des besoins de concision, j'utiliserai les termes « victime » et « survivant » dans le texte mais il ne faut pas ignorer que ces termes ont leurs limitations. En dernière analyse, en effet, les deux termes « victime » et « survivant » perpétuent l'association avec des antécédents de mauvais traitements (Hunter, 1990). On espère qu'à l'issue d'une thérapie réussie, un client considérera l'impact de l'abus sexuel dont il a été victime comme représentant une partie de sa vie et non sa totalité. L'idéal serait qu'il se voit comme « quelqu'un qui a été sexuellement abusé dans son enfance » plutôt que comme une « victime » ou un « survivant » de l'abus sexuel. « Le but ultime de la thérapie devrait être de transcender la survivance. [...] C'est l'intégrité de la personne qui doit venir en premier lieu » (Hunter et Gerber, 1990, p. 83). On demande donc aux lecteurs de ne pas oublier que les termes « victime » et « survivant » sont utilisés à titre de raccourcis pratiques plutôt que de descripteurs empiriques.

Les quarante et un thérapeutes qui ont été interrogés sur le travail qu'ils effectuent avec des survivants sont désignés dans le texte par les expressions « participants » ou « personnes qui ont contribué à la recherche ».

MÉTHODOLOGIE

Le matériel présenté dans ce texte a été compilé à partir de deux sources principales, à savoir des entrevues avec des thérapeutes qui ont dispensé un traitement à des garçons et des hommes victimes d'abus sexuel et les publications existantes (essentiellement livres et articles des journaux professionnels). Les personnes qui ont été invitées à participer à la recherche constituaient un échantillon non probabiliste de cliniciennes et de cliniciens choisis à dessein pour leur expérience thérapeutique avec des survivants de l'abus sexuel.

Les données ont été recueillies dans l'ordre suivant : pour commencer, des recherches informatiques et en bibliothèque ont permis de découvrir les publications pertinentes sur les survivants de l'abus sexuel. En deuxième lieu, une lettre a été envoyée aux auteurs nord-américains des livres ou des articles, décrivant la nature de la recherche et les invitant à y participer. Nous demandions en outre à ces auteurs de nous communiquer le nom d'autres thérapeutes travaillant avec des survivants et ces personnes ont également été contactées. Dans un troisième temps, on a envoyé un questionnaire à tous les thérapeutes qui avaient accepté de participer à la recherche leur demandant des renseignements sur leur orientation clinique, les caractéristiques démographiques de leur population de clients et les ressources qu'ils utilisent pour travailler avec des survivants. (On trouvera un exemplaire du questionnaire à l'annexe A.) En quatrième lieu, le questionnaire écrit a été suivi par une entrevue téléphonique semi-structurée visant à recueillir des informations plus approfondies sur la pratique clinique de chaque personne invitée à contribuer à la recherche et sur les interventions et techniques spécifiques utilisées par chacune d'elles. Ces entrevues téléphoniques ont eu lieu au cours de l'automne 1992 et de l'hiver 1993.

En tout, cinquante-huit thérapeutes du Canada et des États-Unis ont été invités à participer à la recherche et quarante et un ont accepté l'invitation. Le nom et l'adresse de ces personnes figurent à l'annexe B. Trente et une personnes ont renvoyé le questionnaire dûment rempli.

Les participants à la recherche comprennent trente-deux hommes et neuf femmes. La majorité ont une formation professionnelle en psychologie, travail social ou thérapie conjugale et familiale; certains thérapeutes ont des antécédents de soins infirmiers et de kinésithérapie. Ces personnes travaillent dans différents milieux en rapport avec la santé mentale, notamment des cliniques communautaires de santé mentale, des centres de thérapie familiale, des hôpitaux, des centres d'intervention en cas de viol, des programmes de traitement des délinquants sexuels et des cabinets privés.

Les thérapeutes ont été invités à identifier leurs années d'expérience, d'une part dans le traitement des victimes de l'abus sexuel en général et, plus spécifiquement, dans le traitement des victimes de sexe masculin. Comme on s'y attendait, compte tenu de la plus grande sensibilisation culturelle à la violence contre les femmes, les thérapeutes avaient davantage d'années d'expérience clinique dans le domaine de l'abus sexuel en général (prestation de thérapies aux victimes de sexe féminin et à leur famille) que dans celui des victimes de sexe masculin en particulier.

· 68 % des participants à la recherche ont dispensé un traitement à des victimes de l'abus sexuel en général pendant plus de huit ans;
· 23 % ont dispensé un traitement à des victimes de l'abus sexuel en général pendant six à huit ans;
· 9 % ont dispensé un traitement à des victimes de l'abus sexuel en général pendant cinq ans ou moins.

Eu égard aux victimes de sexe masculin de l'abus sexuel

· 32 % des participants ont dispensé un traitement à des victimes de sexe masculin pendant plus de huit ans;
· 42 % ont dispensé un traitement à des victimes de sexe masculin pendant six à huit ans;
· 26 % ont dispensé un traitement à des victimes de sexe masculin pendant cinq ans ou moins.

Bien que certains des participants se spécialisent dans le travail avec un groupe d'âge particulier, beaucoup travaillent avec des gens de tous âges.

· 93 % des participants dispensent des thérapies à des survivants adultes (clients de plus de 25 ans);
· 90 % travaillent avec de jeunes adultes (20 à 25 ans);
· 58 % travaillent avec des survivants adolescents (13 à 19 ans);
· 35 % travaillent avec des enfants en période de latence (6 à 12 ans);
· 16 % travaillent avec des garçons d'âge préscolaire qui ont cinq ans ou moins.

Les participants ont été invités à identifier les différentes modalités thérapeutiques qu'ils offrent aux survivants de l'abus sexuel.

· 97 % des participants dispensent une thérapie individuelle;
· 77 % dispensent une thérapie de groupe;
· 52 % dispensent une thérapie conjugale ou familiale.

Certains participants organisent aussi régulièrement des ateliers à l'intention des survivants et/ou dispensent une formation régulière à d'autres professionnels sur le traitement des survivants de l'abus sexuel.

LIMITATIONS DE LA RECHERCHE

Le processus de recueil des données primaires utilisées pour ce livre a été journalistique plutôt que scientifique. La compilation du matériel avait pour objet de créer une ressource pratique et appliquée à l'intention des thérapeutes qui travaillent avec des survivants de l'abus sexuel. J'ai utilisé à cette fin des méthodes de recherche qualitatives et exploratoires.

Les participants ont été choisis soit parce qu'ils avaient des publications à leur actif sur les survivants de l'abus sexuel, soit parce qu'ils connaissaient quelqu'un qui avait publié dans ce domaine. Il est évident que j'ai pu omettre de faire appel à certains thérapeutes importants parce qu'ils n'ont rien publié sur leur travail avec des survivants ou parce qu'ils ont échappé à mon attention aux étapes initiales de la recherche. En outre, certaines des personnes éminentes qui ont été invitées à participer à la recherche n'ont pas pu le faire parce que leur travail les retenait ailleurs.

La thérapie est une interaction humaine dynamique. Fluide par nature, elle est basée sur le vécu. L'expression écrite des concepts et de l'expérience thérapeutiques entraîne nécessairement une certaine perte de sens. J'espère cependant que le modèle de traitement décrit dans ce livre vous aidera dans votre travail avec les survivants.

ORGANISATION DU TEXTE

Le texte qui suit est divisé en onze chapitres (avec sept annexes). Le chapitre 2, intitulé « Prévalence, impact et problèmes », présente des renseignements sur la fréquence de la victimisation sexuelle parmi les personnes de sexe masculin, l'impact de cette victimisation sur l'individu et les problèmes que les victimes apportent généralement en thérapie.

Le chapitre 3 présente un modèle de traitement en quatre étapes à l'intention des survivants. Ces étapes sont appelées, Rupture du silence, Étape de la victime, Étape du survivant et Étape du combattant. Les tâches thérapeutiques typiquement associées à chacune de ces étapes y sont présentées et discutées.

Le chapitre 4 présente les grands processus associés à toutes les modalités thérapeutiques (thérapie individuelle, travail de groupe, etc.) utilisées pour le traitement des survivants de l'abus sexuel. On y discute des contrats à passer avec les clients et on y propose des directives sur l'évaluation de la situation et les méthodes à utiliser à cette fin.

Les chapitres 5, 6 et 7 portent sur le traitement individuel des survivants et examine tour à tour les différentes étapes de la thérapie, à savoir l'étape de la victime, l'étape du survivant et l'étape du combattant. La description des interventions mises au point par les personnes qui ont contribué à la recherche pour chacune de ces étapes est accompagnée de considérations théoriques d'ordre général.

Le chapitre 8 présente un modèle de traitement de groupe des survivants à deux niveaux. On y aborde des problèmes thérapeutiques comme les contre-indications au traitement de groupe et certaines des interventions qui peuvent être utilisées dans les groupes de survivants.

Le chapitre 9 examine plusieurs problèmes critiques associés au traitement des survivants. On y discute des stratégies d'engagement, des impasses thérapeutiques et de la dynamique liée à la différence ou à la non-différence de sexe entre client et thérapeute.

Le chapitre 10 porte sur l'application du processus thérapeutique aux survivants adolescents. On y discute des façons dont le processus de traitement doit être adapté aux besoins développementaux de ce groupe d'âge.

Comme la thérapie est un processus interactif et que les thérapeutes jouent un rôle tout aussi important que les clients dans le parcours thérapeutique, le chapitre 11 discute des questions qui concernent les thérapeutes plutôt que les clients.

Enfin, le chapitre 12 présente les ressources (documents imprimés et bandes magnétoscopiques ainsi que possibilités de formation) que les thérapeutes et les clients peuvent utiliser pour renforcer le processus de guérison d'un traumatisme sexuel.

CHAPITRE 2 - PRÉVALENCE, IMPACT ET PROBLÈMES

Ce chapitre présente des renseignements sur la prévalence de la victimisation sexuelle parmi les personnes de sexe masculin et discute des nombreuses raisons qui compromettent les efforts tentés pour dresser un tableau exact de la situation. On y discute des effets possibles de l'expérience du traumatisme sexuel sur les victimes de sexe masculin et on identifie les variables primaires qui permettent généralement de prédire la gravité de la pathologie qui en résulte. On examineenfin les différences essentielles entre les hommes et les femmes en matière de victimisation sexuelle en basant la discussion à la fois sur la recherche empirique et sur l'expérience clinique.

ESTIMATIONS DE LA PRÉVALENCE

Notre aptitude à reconnaître beaucoup des mauvais traitements et des formes d'exploitation qui font partie de notre culture est conditionnée par un certain nombre de mythes sociaux et culturels. L'abus sexuel, et particulièrement l'abus sexuel des enfants de sexe masculin, est resté jusqu'à très récemment invisible dans notre société.

Du temps de Freud, l'inceste père-fille n'était pas pensable. Il a fallu attendre les années 1960 pour reconnaître que les enfants pouvaient être victimes de mauvais traitements et le milieu des années 1970 pour admettre qu'ils pouvaient être abusés sexuellement. Ce n'est qu'au cours des années 1980 que l'on a reconnu qu'il "tait des victimes de sexe masculin et les études ont alors révélé que la victimisation des garçons était plus fréquente qu'on ne l'avait pensé précédemment. (Banning, 1989, p. 569)

Il est difficile d'estimer avec exactitude la prévalence de la victimisation sexuelle parmi les hommes et cela pour toutes sortes de raisons. Les chercheurs qui « [...] s'efforcent de déterminer le nombre de cas d'abus sexuel au sein de la population générale (prévalence) indiquent des taux qui varient entre 3 % et 31 % pour les personnes de sexe masculin [...] » (Finklehor et al., 1986 dans Dimock, 1988, p. 203). On remarque également une augmentation du taux de fréquence des déclarations d'abus sexuel parmi les hommes : « Bien que le taux des déclarations ait augmenté parmi les victimes des deux sexes, la proportion des hommes est passée de 15,7 % du total en 1980 à 21,7 % en 1984 » (American Humane Association, 1986 dans Dimock, 1988, p. 203). Au Canada, en 1984, le rapport Badgley a conclu que 33 % des hommes sont victimes d'abus sexuel à un moment ou un autre de leur vie, que 75 % de ces abus sont perpétrés contre des garçons de moins de 17 ans et que 25 % d'entre eux peuvent être considérés comme des infractions graves condamnables aux termes du Code criminel canadien (Bruckner et Johnson, 1987, p. 81).

Les estimations de la prévalence de l'abus sexuel varient d'une étude à l'autre. Une recherche effectuée en 1989 auprès de 592 étudiants américains de collèges situés dans deux régions géographiques différentes a trouvé que 15 % des étudiants du campus du Centre-Ouest et 13 % des étudiants du campus du sud-est « ont décrit au moins une expérience d'abus sexuel au cours de leur enfance » (Fromuth et Burkhart, 1989, p. 536). Un échantillon national représentatif de 2 972 étudiants américains des collèges a conclu ce qui suit :

7,3 % des hommes ont indiqué qu'ils avaient eu une expérience dans l'enfance qui répondait au moins à l'un des trois critères suivants de l'abus sexuel : 1) l'existence d'une différence d'âge entre l'enfant et la personne qui perpétrait l'abus, 2) l'utilisation d'une forme quelconque de contrainte pour obtenir la participation de la victime ou 3) le lait que la personne responsable de l'abus était chargée de s'occuper de l'enfant ou était en situation d'autorité vis-à-vis de lui. (Risin et Koss, 1987, p. 309)

Il est clair que, bien que les études empiriques aient fourni des données quantitatives qui permettent d'identifier le problème de l'abus sexuel parmi les personnes de sexe masculin, les chiffres relatifs à la prévalence ne sont que des estimations. On peut résumer comme suit le problème général que pose l'estimation de l'étendue de l'abus sexuel parmi les hommes :

Beaucoup et même la plupart des infractions sexuelles ne sont pas déclarées. Il est donc impossible de déterminer le nombre réel d'infractions, que la victime soit de sexe masculin ou féminin. (Freeman-Longo, 1986, p. 411)

FACTEURS QUI INFLUENT SUR LE DÉVOILEMENT DE L'ABUS SEXUEL PARMI LES HOMMES

Les nombreux facteurs qui compliquent le processus de dévoilement de l'abus sexuel parmi les hommes seront discutés en trois catégories :

1) facteurs liés à la recherche,
2) impact des croyances et des stéréotypes culturels,
3) facteurs cliniques.

1. Facteurs liés à la recherche

Les études qui s'efforcent de déterminer la prévalence de l'abus sexuel parmi les hommes parviennent à des estimations différentes et cela en partie parce qu'elles définissent l'abus sexuel en fonction de la recherche effectuée. Il n'y a pas de définition standard de l'abus sexuel qui tienne compte à la fois du sexe, de l'âge et des différences culturelles et régionales (Urquiza et Keating, 1990; Risin et Koss, 1987). Chaque étude part donc d'une définition unique de l'abus sexuel et, en lait, mesure différents types d'expérience.

Les échantillons utilisés par les différentes études ne sont pas standardisés. Certaines recherches utilisent des populations non cliniques comme les étudiants des collèges alors que d'autres se fondent sur des populations cliniques comme les adolescents actuellement en traitement ou les adultes emprisonnés pour infraction d'ordre sexuel. Il est clair que les données qui décrivent ces différentes populations refléteront des expériences influencées par des variables spécifiques. En outre, la méthodologie utilisée pour la collecte des données (p. ex., questionnaires individuels, entrevues particulières, sondages téléphoniques, etc.) varient d'une étude à l'autre, ce qui a un effet sur le degré de fiabilité des données. C'est ainsi que « [...] les différences entre les taux de prévalence déclarés sont davantage une réflexion de la méthode de collecte des données que du nombre d'enfants sexuellement abusés » (Urquiza et Keating, 1990, p. 96).

2. Impact des croyances et des stéréotypes culturels

La sous-déclaration de l'abus sexuel des enfants de sexe masculin est souvent un reflet des croyances culturelles sur le rôle des sexes et la socialisation. Certains actes, comme la victimisation sexuelle des enfants de sexe masculin, restent cachés parce que la façon dont ils sont interprétés est modelée par les valeurs et les mythes culturels.

Mythe de l'autonomie masculine

Dans son examen du problème, Finklehor dit qu'à cause de « l'éthique masculine d'autonomie, [on] a eu tendance à décrire la sexualité masculine du jeune en termes très positifs et audacieux [ce qui est] en partie responsable de la grave sous-déclaration des expériences de victimisation sexuelle des garçons » (Finklehor, 1984, p. 152).

La croyance que les hommes sont toujours forts et capables de se tirer d'affaire a créé une mythologie qui sous-entend que, si un garçon ou un homme admet avoir été victimisé, il est vu comme n'étant pas vraiment un homme. Notre culture n'a pas de mythologie pour identifier le processus de la victimisation masculine et cette lacune a pour effet d'émasculer les garçons victimes d'abus sexuel. On les voit soit comme des femmes et donc féminisés, soit comme des êtres faibles et donc imparfaits, son comme des individus intéressés par les relations sexuelles avec les hommes et donc homosexuels. Aucune de ces interprétations de la victimisation n'offre de réponse utile à un garçon qui a été abusé sexuellement et essaie de se réconcilier avec cette expérience.

Que les garçons soient abusés par des personnes de sexe masculin ou féminin ou les deux, l'interprétation culturelle de l'événement a tendance à minimiser son impact ou à assigner la responsabilité de l'abus à la victime (Sepler, 1991).

Mythe de l'initiation sexuelle

Les garçons qui ont été abusés par un homme sont souvent considérés comme ayant participé à des actes homosexuels pour le plaisir. Cette interprétation peut être celle de la victime elle-même, particulièrement si, au cours de l'abus, son pénis a répondu à la stimulation sexuelle par une érection (Struve, 1990; Urquiza et Keating, 1990; Dimock, 1988).

Il est intéressant de noter que plusieurs articles de journaux professionnels (Sandfort, 1984; Tindall 1987) discutent de la nature des rapports sexuels entre les adultes et les enfants et concluent que « [...] si les circonstances s'y prêtent (intimité, degré d'excitation sexuelle, etc.), la première relation sexuelle [entre un adulte mâle et un enfant mâle] s'est produite en conséquence d'un désir mutuel » (Tindall, 1978, p. 380). Cette façon d'interpréter les actes sexuels entre des hommes et des enfants de sexe masculin comme des expériences sexuelles consensuelles, sans tenir compte des éléments de pouvoir et de contrôle en cause, témoignent des œillères culturelles qui ont pour effet de perpétuer l'exploitation sexuelle des enfants. Des déclarations comme celle qui suit ignorent sciemment les différences de développement entre les adultes et les enfants dans le domaine des besoins sexuels et de leur expression.

Les recherches à venir sur la pédophilie ne devraient pas classer a priori les adultes qui ont des contacts pédosexuels comme des délinquants et les enfants comme des victimes et cataloguer tous les contacts pédosexuels comme des abus ou des mauvais traitements. Les chercheurs auront avantage à commencer par considérer les relations pédophiles simplement comme un autre type de rapport humain. (Sandfort, 1984, p. 140)

Ce type de déclaration témoigne des difficultés auxquelles doivent faire face certains hommes victimes d'abus sexuel lorsqu'ils commencent à identifier et à examiner leur expérience et qu'ils se heurtent à de pareilles tentatives de redéfinition de l'abus comme une activité sexuelle consensuelle.

Notre culture entretient la croyance que toute activité sexuelle est bonne pour les hommes et que le contexte importe peu. Les images que présentent la publicité, la télévision et le cinéma montrent souvent des activités sexuelles où les « réactions émotionnelles des victimes de sexe masculin [...] sont gravement déformées par rapport à celles des victimes réelles » (Trivelpiece, 1990, p. 67). Lorsque l'abus est hétérosexuel et qu'une femme sexuellement mûre agresse un garçon, il peut avoir du mai à reconnaître qu'il s'agit d'un abus puisque l'interprétation culturelle de cet événement est qu'il a « eu de la chance ». Dans des films comme The Summer of '42, l'abus sexuel est romancé et présenté comme une initiation (Trivelpiece, 1990).

Mythe de l'innocence féminine

Les garçons qui sont abusés par des femmes ou des filles font également face à des mythes sociaux qui peuvent les empêcher d'identifier l'abus. Les préjugés culturels sur les sexes perpétuent la croyance que les femmes en général et les mères en particulier sont aimantes. Les mères ont culturellement la permission de toucher leurs enfants. Lorsque ce contact est érotisé, parfois sous l'apparence de rituels liés à la toilette ou aux soins médicaux, un garçon peut avoir du mai à reconnaître ce comportement comme un abus. Comme il est également assujetti au mythe culturel selon lequel le toucher des femmes est une preuve d'amour plutôt qu'une expression de la sexualité, il peut être incapable de se rendre compte que le comportement sexuel a gratifié les besoins de la personne qui l'a agressé plutôt que les siens.

Les préjugés culturels déforment la façon dont les faits sont interprétés et les mêmes actes sont vus différemment suivant qu'ils sont accomplis par un homme ou par une femme. C'est à cause de cette double mesure que les rapports sexuels inopportuns entre une femme adulte et un enfant sont ignorés

Il y a une croyance très répandue dans la société que les femmes ne peuvent pas abuser sexuellement de leurs enfants. Au pire, leur comportement est vu comme séducteur et non comme nuisible alors que chez un père, la même façon d'agir est jugée être une atteinte à la pudeur. (Banning, 1989, p. 567)

Mythe de la contamination

La croyance populaire est que les victimes d'abus sexuel de sexe masculin deviennent automatiquement des délinquants. Bien qu'il soit vrai que certains délinquants sexuels ont eux-mêmes été victimes d'abus sexuel, les infractions sexuelles sont liées à des facteurs complexes et ne peuvent s'expliquer uniquement par une victimisation sexuelle antérieure (Freund, Watson et Dickey, 1990). Or, le stéréotype culturel qui veut que les victimes d'abus sexuel deviennent des délinquants empêche certaines victimes de dévoiler l'abus dont elles ont fait l'objet.

3. Facteurs cliniques

Plusieurs aspects du système de service social font obstacle au dévoilement de la victimisation sexuelle des personnes de sexe masculin. Le plus important est le fait que les organismes de protection de l'enfance ont tendance à s'occuper des cas d'abus sexuel au sein des familles où ils sont chargés d'assurer la sécurité des enfants. A l'issue du sondage qu'il a effectué auprès des étudiants, Finklehor a trouvé que « les garçons couraient plus de risques que les filles d'être victimisés par quelqu'un d'extérieur à la famille » (Finklehor, 1984, p. 166). En fait, environ 83 % des agresseurs des étudiants visés par ce sondage n'étaient pas des membres de leur famille (Finklehor, 1984). C'est ainsi que les actes d'abus sexuel perpétrés contre des victimes de sexe masculin, en admettant qu'ils soient dévoilés, ont tendance à être déclarés à la police ou au système de justice criminelle et non aux organismes de protection ou de traitement de l'enfance. Ce manque de reconnaissance sociale des besoins de traitement et de protection des victimes de sexe masculin a pour effet de perpétuer le silence. On ne peut guère s'attendre à ce que les victimes dévoilent l'abus sexuel dont elles ont fait l'objet si elles n'ont rien à gagner de ce dévoilement.

Comme on en discutera plus loin dans ce chapitre, les personnes qui ont subi un traumatisme sexuel dans leur enfance répriment souvent leurs souvenirs de l'événement. Cette structure de défense primitive réduit les chances de dévoilement. Même lorsque les souvenirs reviennent, si la personne chargée de la thérapie ou de la protection de l'enfant n'est pas à l'aise pour poser des questions sur la possibilité d'abus sexuel et les aborde d'une façon telle que l'enfant ne fait pas le rapport avec ce qu'il a vécu, l'abus n'est parfois pas dévoilé (Hunter, 1990).

La sensibilisation à la question de la victimisation sexuelle des jeunes garçons dans la communauté thérapeutique professionnelle est limitée par les mêmes facteurs que ceux qui informent la culture dans son ensemble. Jusqu'à récemment, les publications et les articles professionnels ont traité de la prévalence de la victimisation sexuelle des enfants de sexe masculin plutôt que de l'impact de l'abus sexuel sur les victimes ou des modèles et des méthodologies à utiliser pour aider les survivants. Cette absence d'informations sur la façon de travailler avec les survivants explique que beaucoup de thérapeutes aient ignoré qu'elles et ils comptaient des survivants parmi leurs clients ou n'aient pas su comment leur parler. L'absence de questions sur la possibilité d'abus sexuel peut se solder par une absence de dévoilement de la part du client.

En résumé, il y bien des raisons pour lesquelles l'ampleur véritable de l'abus sexuel des enfants de sexe masculin est relativement mal connue et probablement sous-déclarée.

[...] les hommes hésitant encore plus que les femmes à admettre leur victimisation, c'est à nous de deviner quel est l'ampleur véritable de la victimisation des hommes. Elle est certainement plus élevée que les rapports ne l'indiquent actuellement. (Blanchard, 1987, p. 20)

IMPACTS DE L'ABUS SEXUEL ET PROBLÈMES ÉPROUVÉS PAR LES HOMMES QUI EN ONT ÉTÉ VICTIMES

Les répercussions de l'abus sexuel sur ceux qui en ont été victimes sont généralement multiples et complexes. Toutes les parties du moi - physique, mentale, affective et spirituelle - sont touchées par l'abus et toutes peuvent présenter des manifestations et des symptômes en rapport avec l'abus.

Les symptômes liés à l'abus sexuel apparaissent à la fois à court et à long terme. Certains symptômes (comme les coupures et meurtrissures physiques, les maladies transmises sexuellement, le choc émotionnel ou les réactions d'agression) sont l'effet de la crise et leur impact se fait sentir à court terme. D'autres symptômes (comme la distorsion de la perception ou le manque d'amour-propre) sont intériorisés plus profondément par la victime et ont un impact à beaucoup plus long terme (Evans, 1990).

L'abus sexuel est souvent accompagné d'autres formes de mauvais traitements et de négligence si bien qu'il est difficile d'isoler le traumatisme causé par l'abus sexuel et qu'il n'est pas toujours possible de déterminer l'origine des symptômes dont les racines sont multiples. Cependant, comme le note Olsen (1990) :

Que l'on se fonde sur l'auto-dévoilement anecdotique ou sur une méthodologie comparative et une instrumentation valide et fiable, les données indiquent que les hommes qui commençaient une psychothérapie et avaient été abusés sexuellement à l'intérieur ou à l'extérieur de leur famille quand ils étaient enfants étaient beaucoup plus perturbés psychologiquement que les autres clients. (p. 148)

Il y a des chercheurs qui soutiennent que l'interaction sexuelle entre des adultes et des enfants ou des enfants plus âgés et des enfants plus jeunes a un impact neutre ou positif sur les jeunes enfants (Condy et al., 1987; Constantine, 1979; Sandfort, 1984; Tindall, 1978). Je ne partage pas cette opinion. Les jeunes enfants ne sont pas suffisamment mûrs intellectuellement, émotionnellement ni physiquement pour faire un choix informé en ce qui concerne leur participation à des activités sexuelles avec des adultes. C'est pourquoi, bien que certains survivants de l'abus sexuel puissent identifier cette expérience comme ayant eu sur eux un impact positif ou neutre, ce n'est certainement pas le cas pour la majorité des victimes d'un traumatisme sexuel.

La forme spécifique de l'expression des effets du traumatisme sexuel varie d'un individu à l'autre. Il est généralement vrai qu'un grand nombre des effets de la victimisation sexuelle, même s'ils ont constitué des tentatives d'adaptation au moment de l'abus, sont devenus dysfonctionnels dans le contexte qui le suit (Briere, 1990).

Chacune des victimes de l'abus sexuel a une histoire unique à raconter sur le rôle que cet événement a joué dans sa vie. Dans le reste du chapitre, je décrirai les divers effets que l'abus sexuel peut avoir sur les victimes de sexe masculin. Il n'existe pas de classification unique qui puisse tenir compte de toutes les conséquences possibles du traumatisme sexuel. Cependant, les survivants ont un grand nombre de thèmes et de problèmes en commun. On insistera plutôt sur les impacts à long terme qui deviennent partie intégrante de la vie du survivant que sur les effets aigus à court terme.

N'oubliez pas que l'histoire personnelle que vous racontent vos clients constitue le guide le plus utile pour comprendre les répercussions que l'abus sexuel a eu sur eux. Les renseignements qui figurent ici ont pour but de vous aider à mieux comprendre l'expérience de vos clients, non de remplacer une évaluation minutieuse.

Variables qui Influencent l'impact de l'abus sexuel

Les chercheurs et les thérapeutes ont observé que la sévérité de l'impact de l'abus sexuel sur ses victimes est fonction de plusieurs variables clés :

· l'âge auquel l'abus a commencé,
·  la durée et la fréquence de l'abus,
·  le type d'activités qui ont constitué l'abus,
· la nature de la relation entre l'agresseur et la victime,
·  le nombre et le sexe des agresseurs,
· la façon dont l'abus a été dévoilé,
· les autres circonstances atténuantes dans la vie de la victime.

(Condy et al., 1987; Crowder et Myers-Avis, 1993; Hunter, 1990a; Pierce, 1987)

L'âge auquel l'abus a commencé

De façon générale, plus jeune est la victime au moment où l'abus sexuel commence, plus grand est l'impact sur son développement psychologique (Hunter, 1990a; Pierce, 1987). Les enfants plus jeunes font appel à des défenses plus primitives et moins conscientes pour protéger l'intégrité de leur psyché. À mesure que l'enfant mûrit, ces défenses primitives provoquent souvent de graves troubles développement aux (Kilgore, 1988). Des défenses comme le déni, la répression, le clivage et la dissociation deviennent problématiques si la victime généralise ces stratégies d'adaptation et les applique à d'autres aspects de sa vie. Plus âgée est la victime au moment où commence l'abus, plus elle est capable de décider consciemment comment se protéger et moins nombreuses seront les étapes de son développement qui seront touchées par ses décisions.

La durée et la fréquence de l'abus

Plus l'abus sexuel est fréquent et plus il dure longtemps, plus il y a de chances pour que la victime soit conditionnée par l'expérience et plus sévère est donc l'impact du traumatisme (Hunter, 1990a). L'atmosphère psychologique que respire l'enfant nourrit sa psyché. Si l'atmosphère qui l'entoure est contaminée, sa psyché sera forcée de s'adapter à cet air pollué. Tout comme le plomb que respire l'enfant dans l'air des taudis empoisonne son système neurologique, de même l'abus sexuel répété déforme le rapport qu'il a avec lui-même et avec les autres.

Le type d'activités qui ont constitué l'abus

L'utilisation de la force a tendance à exacerber l'impact de l'abus sexuel (Pierce, 1987; Urquiza et Capra, 1990). Les menaces ou les actes de violence mettent en danger non seulement la santé psychologique d'un enfant mais aussi son existence physique. L'impuissance, l'incapacité et la rage d'un enfant sont plus grandes lorsqu'il est dominé par la force physique.

Dans certains cas d'abus rituel, la victime est forcée de participer activement à des rituels odieux (comme lorsqu'elle est forcée de tenir le couteau qui accomplit le sacrifice). Souvent la victime oublie que des adultes l'ont forcée ou l'ont obligée à se soumettre à leur plan et elle est accablée par la culpabilité et la haine de soi ou bien elle réprime le souvenir de l'événement. De façon générale, « Dans la plupart des cas, plus l'acte sexuel est déviant, plus grand est l'impact négatif » (Hunter, 1990a, p. 46).

La nature de la relation entre l'agresseur et la victime

L'abus peut être perpétré par des étrangers complots ou par les membres de la famille les plus proches de l'enfant. Lorsqu'il s'agit d'un membre de la famille ou d'un ami proche, l'interaction est plus intense et la victime se sent d'autant plus trahie. Le sentiment de loyauté de la victime à l'égard des membres de sa famille est généralement plus complexe qu'à l'égard des étrangers. C'est pourquoi, lorsque l'abus sexuel est perpétré par une personne de la famille, l'outrage à la confiance est encore plus profond.

Les membres de la famille continuent souvent à tenir un rôle significatif dans la vie de la victime et il n'est pas facile de les éviter ou de les oublier. C'est pourquoi le sentiment de perte, de chagrin et de trahison de la victime est plus fort si l'abus se produit au sein de la famille. Les victimes qui ont été séduites par une personne de la famille qui était douce et gentille pendant l'abus déclarent souvent qu'elles ont davantage de difficultés à se réconcilier avec leurs sentiments résiduels que les victimes qui ont été violées de force par une personne étrangère.

Les stratégies de séduction utilisées par une personne avec laquelle la victime a une relation continue créent un sentiment de confusion et d'ambivalence quant à la nature de l'abus. Les victimes d'abus intrafamilial ont généralement des sentiments mixtes à l'égard de leur(s) agresseur(s). L'ambivalence des sentiments, qui oscillent entre l'attachement envers l'agresseur et la peur et la rage devant ses actes abusifs, peut créer des tendances continues à l'instabilité dans les rapports humains. Comme le note Dimock (1988) :

[Pour beaucoup de survivants] la vulnérabilité devient associée à l'impuissance qu'ils ont ressentie étant enfant lorsque quelqu'un de plus fort a abusé d'eux. [Dans les rapports adultes] ils sont incapables de séparer leurs expériences passées du présent et [ils] réagissent émotionnellement comme s'ils étaient toujours impuissants lorsqu'ils se sentent vulnérables. (p. 217)

Le nombre et le sexe des agresseurs

« Plus les adultes qui participent effectivement à l'abus sexuel sont nombreux, plus l'enfant a de chances de voir le monde comme un lieu habité uniquement par des êtres dangereux (Hunter, 1990a, p. 48). Si, comme dans l'abus rituel, des sections importantes du monde de l'enfant tournent autour de l'abus et de sa nature secrète, l'enfant en vient à croire qu'il n'existe pas d'autre réalité. De même, si l'abus a été perpétré à la fois par des hommes et par des femmes, l'enfant se sent moins en sécurité que s'il avait été abusé par des personnes d'un seul sexe. Les hommes qui ont été abusés par plusieurs personnes ont généralement davantage de difficulté à guérir. La dynamique de l'abus est plus complexe et le processus de rétablissement plus lent.

La façon dont l'abus a été dévoilé

En général, lorsqu'une victime est capable de parler volontairement de l'abus sexuel qu'elle a subi ou retrouve graduellement les souvenirs qui y sont associés, le processus est moins pénible que si le dévoilement est involontaire ou brutal (Kilgore, 1988). Si le dévoilement a lieu alors que la victime habite toujours à la maison, les réactions des membres de la famille sont très importantes. Si les membres de la famille nient ou réfutent l'existence de l'abus sexuel, le sentiment d'impuissance et de désespoir de la victime pourra augmenter. Si, par contre, on écoute la victime et on lui apporte un soutien, cela l'aidera à se remettre du traumatisme qu'elle a subi.

L'étape de développement de la victime influence la façon dont elle révèle l'abus et son aptitude à faire face aux réactions des autres. Les enfants plus jeunes dévoilent souvent ce qui s'est produit en simulant le comportement abusif. Les adolescents peuvent dévoiler la chose indirectement en parlant à une ou un ami(e) proche qui, à son tour, informe une personne de confiance en situation d'autorité. Les adultes ont tendance à être plus directs une fois qu'ils ont admis personnellement qu'ils ont été victimes d'abus sexuel. En général, plus tôt la victime dévoile l'abus et cherche de l'aide pour lutter contre ses effets négatifs, plus facile est le rétablissement.

Il n'est pas rare que les enfants se rétractent après un dévoilement parce que les pressions familiales auxquelles ils doivent faire face sont trop horribles (Summit, 1983). Les enfants révèlent ce qui leur est arrivé parce qu'ils veulent que le comportement abusif cesse ou pour protéger la sécurité d'un autre enfant. Ils sont rarement prêts à faire face au processus d'enquête que la police et les organismes de protection de l'enfance sont tenus d'effectuer ou au bouleversement de la structure familiale que cela entraîne souvent.

Les autres circonstances atténuantes dans la vie de la victime

L'abus sexuel n'est pas l'unique événement de la vie d'un enfant. S'il représente seulement un incident parmi d'autres expériences relativement positives, il aura moins d'impact que s'il fait partie de tout un ensemble de négligences et d'abus physiques et psychologiques. Trois facteurs, en particulier influent sur l'aptitude de l'enfant à se rétablir de l'abus sexuel. Ce sont :

1) les caractéristiques constitutionnelles de base de l'enfant (par exemple, son tempérament, son amour-propre et son niveau de contrôle interne); 2) l'existence d'un milieu familial qui est une source de soutien (chaleur, affection, organisation, etc.); et 3) la présence d'une personne ou d'un organisme qui offre à l'enfant un système de soutien primaire pour l'aider à faire face et à trouver un modèle positif auquel s'identifier. (Urquiza et Capra, 1990, p. 129)

Effets de l'abus sexuel sur les survivante

L'abus sexuel est une agression à plusieurs niveaux qui est souvent accompagnée d'autres formes de mauvais traitements et de négligence. C'est pourquoi on présenterait un tableau inexact de l'expérience de la plupart des survivants si l'on isolait certains symptômes ou que l'on ignorait le rapport entre les différents symptômes provoqués par l'abus sexuel.

On examine ici l'impact de l'abus sexuel sur les victimes de sexe masculin d'un point de vue clinique en commençant par les symptômes généraux avant de passer aux symptômes plus complexes et spécifiques comme la dissociation. La discussion des effets typiques de l'abus sexuel sur les garçons et les hommes est présentée sous les titres suivants

· effets sur le plan physique,
· effets sur le plan mental,
· effets sur le plan affectif,
· troubles post-traumatiques et dissociation,
· difficultés avec l'identité masculine,
· confusion quant à l'orientation sexuelle et homophobie,
· perpétration réactionnelle d'abus sexuel et agression,
· conduites sexuelles obsessionnelles,
· difficultés interpersonnelles.

Effets sur le plan physique

Les enfants n'ont généralement pas le vocabulaire qu'il faut pour raconter aux autres leurs expériences d'abus sexuel ou les conséquences de ces expériences. Ils ont davantage tendance à « montrer » cette expérience aux autres en la simulant ou en utilisant d'autres comportements indicateurs. Il arrive souvent que les garçons victimes d'abus sexuel aient des cauchemars et des troubles du sommeil, souffrent d'encoprésie ou d'énurésie ou présentent d'autres symptômes physiques de souffrance (Urquiza et Capra, 1990). Des douleurs somatiques chroniques pour lesquelles il n'existe pas de cause organique apparente peuvent être des indicateurs d'abus sexuel.

Dans certains cas, les symptômes sont le dégoût et la haine à l'égard de sa personne physique (Hunter, 1990; Myers, 1989). Les garçons se sentent souvent trahis par leur corps qui a répondu aux avances sexuelles qui lui étaient faites. Leur sentiment intérieur de confusion, de peur ou de colère était en conflit avec leur excitation physique. Ce mépris du corps se manifeste sous différentes formes, notamment la négligence devant les besoins physiques (p. ex., boulimie ou anorexie, non-attention aux problèmes médicaux) ou les comportements autodestructeurs.

Les comportements autodestructeurs peuvent prendre diverses formes. Les conduites physiques téméraires (p. ex., conduite automobile imprudente, pratiques sexuelles dangereuses, etc.), l'alcoolisme, la toxicomanie et l'automutilation sont parmi les plus courantes. L'automutilation est souvent « une tentative pour bloquer ou interrompre des sentiments ou des pensées [...] et peut donc constituer un effort pour survivre aux symptômes invalidants [...] » (Briere, 1989, p. 27). Il n'est pas rare que les survivants manifestent leur haine d'eux-mêmes et leur désespoir par des idées de suicide ou de réelles tentatives de suicide (Dixon, 1978; McCormack, Janus et Burgess, 1986).

Les comportements autodestructeurs peuvent être l'expression de toute une variété de dynamiques différentes et il faut examiner le système de croyances personnelles de chaque client pour comprendre la signification métaphorique de ses conduites. Par exemple, avec des clients qui présentent une personnalité multiple, le comportement autodestructeur peut relever du domaine d'une personnalité particulière. À moins de travailler avec cette personnalité spécifique, le client risque de ne pas pouvoir accéder aux émotions qui sont à l'origine des actes autodestructeurs.

Lorsque la sexualité a été la façon de répondre à différents besoins non sexuels, le survivant peut voir son corps et sa sexualité comme une marchandise à échanger contre de l'argent ou un logement et ce comportement peut s'intégrer à son style de vie. Les prostitués et les fugueurs qui ont appris en tant que victimes d'abus sexuel quand ils étaient enfants que leur sexualité peut être une façon d'obtenir pouvoir et ressources se servent de leur corps pour gagner leur vie (McCormack, Janus et Burgess, 1986).

Le fait d'être une victime de sexe masculin est une expérience contre-culturelle puisque les hommes ne sont généralement pas considérés comme vulnérables et impuissants. Certains hommes craignent que leur vulnérabilité transparaisse et que même de parfaits étrangers puissent voir qu'ils ont été victimisés et sont donc imparfaits. Ils s'adonnent parfois à des activités contre-phobiques comme la musculation et l'athlétisme, non par amour du sport mais parce que cela représente un moyen de devenir plus forts et de cacher leurs « faiblesses ».

Effets sur le plan mental

L'une des distorsions de la perception les plus courantes chez les survivants est qu'ils se tiennent responsables de l'abus qu'ils ont subi (Briere et ai., 1988; McCormack, Janus et Burgess, 1986; Myers, 1987; Nielsen, 1983; Vander May, 1988). Les enfants ont une compréhension limitée des dynamiques interpersonnelles auxquelles ils participent. Lorsqu'ils sont maltraités ou négligés, ils comprennent la chose comme étant le résultat d'une insuffisance de leur part plutôt que d'une insuffisance de la part des adultes qui les maltraitent ou les négligent (Leehan et Wilson, 1985). Cette tendance à l'autocondamnation est souvent exacerbée par l'agresseur qui peut dire des choses comme « C'est toi qui me fais faire ça... » ou « Je fais ça parce que je t'aime... » ou « Si tu n'étais pas si séduisant, je n'aurais pas besoin de faire ça... »

Beaucoup de survivants parvenus à l'âge adulte ont besoin d'aide pour comprendre qu'un enfant n'est jamais responsable du comportement des adultes, dans aucune circonstance. Il arrive souvent que les survivants d'abus sexuel projettent des valeurs et des jugements adultes sur leur propre participation à l'événement. lis oublient qu'en tant qu'enfants, ils n'étaient pas suffisamment mûrs intellectuellement et émotionnellement pour porter un jugement éthique sur leur comportement sexuel. En aidant un survivant à se voir comme l'enfant qu'il était à l'époque de l'abus sexuel, on parvient souvent à réduire son sentiment de responsabilité.

Les survivants répriment fréquemment les souvenirs de l'abus dont ils ont été victimes ou nient l'impact qu'il a eu sur leur vie (Briere, 1989). Ils érigent habituellement ces défenses mentales à l'époque de l'abus dans un effort pour faire face aux événements dissonants de leur vie. Par exemple, dans les cas d'abus intrafamilial, beaucoup d'enfants ont dû faire face au dilemme que leur posait le fait que l'abus était perpétré par une personne qui leur montrait également amour et affection. Dans un effort pour admettre ce comportement discordant, l'enfant a pu juger qu'en niant l'abus ou en réprimant inconsciemment le souvenir qu'il en avait, il pouvait tolérer sa situation.

Les survivants présentent souvent des tendances à l'impuissance et à la passivité apprises (Blanchard, 1986; Briere, 1989).

Même si la façon de réagir de la victime représente un mécanisme d'adaptation utile dans l'enfance, elle perd sa raison d'être lorsqu'elle se maintient à l'âge adulte. L'individu victimisé est devenu adulte, avec les choix et le pouvoir d'un homme, mais il continue à se voir comme petit, impuissant et responsable de tous les mauvais traitements qu'il subit. Il passe sa vie adulte à apprendre aux autres à le maltraiter parce qu'il est passif et ne se défend pas. [...] L'abus était un élément normal de son enfance que personne n'a rien fait pour arrêter et il considère donc que c'est une partie normale et acceptable de la vie. (Hunter, 1990a, p. 71-72)

Les survivants qui pensent qu'ils sont responsables de l'abus dont ils ont été victimes et qu'ils sont incapables de faire quoi que ce soit pour modifier leur expérience ont souvent très peu d'amour-propre (Nielsen, 1983). lis pensent que le traitement qu'ils ont reçu des adultes était ce qu'ils méritaient et que le monde n'a rien de mieux à leur offrir. Ce désespoir et cette impuissance peuvent se concrétiser dans l'existence si le survivant ne trouve pas le moyen de changer ses convictions intimes.

Effets sur le plan affectif

Jusqu'à récemment, dans notre culture, les hommes n'étaient guère encouragés à exprimer leurs sentiments. Les survivants ont souvent été invités, dans le cadre de leur socialisation, à supprimer ou à réprimer leurs émotions. Beaucoup de survivants ne sont pas capables d'identifier, de reconnaître ou de montrer leurs sentiments. Ils souffrent d'engourdissement affectif (Hunter, 1990a; Leehan et Wilson, 1985). Certains hommes homophobes pensent que seuls les hommes homosexuels expriment leurs émotions et ils se créent un personnage stoïque pour confirmer leur « masculinité ».

Certains hommes n'ont pas conscience de leurs émotions et adoptent des comportements obsessionnels pour veiller à ce qu'elles restent réprimées (Urquiza et Capra, 1990). Les comportements obsessionnels sont des processus émotionnels inconscients secondaires qui bloquent temporairement les affects primaires. Le caractère compulsif du comportement obsessionnel est si absorbant et satisfaisant temporairement qu'il masque la réalité émotionnelle très profonde qui le sous-tend.

Beaucoup de survivants deviennent des toxicomanes et leurs rapports avec l'alcool, la drogue ou la nourriture peuvent mobiliser une grande partie de leur énergie mentale et affective. D'autres survivants se réfugient dans des conduites obsessionnelles et leurs rapports avec le travail, le sport, le sexe ou d'autres activités sont marqués par la compulsion et la dépendance. Leur travail ou leur intérêt pour le sport devient totalement absorbant parce qu'il assume la fonction secondaire d'empêcher la prise de conscience des émotions. Les comportements obsessionnels sont souvent bien acceptés socialement et peuvent assurer au survivant le respect de son patron ou des ses co-équipiers. Les personnes qui tirent avantage du comportement obsessionnel du survivant ne se rendent généralement pas compte que son activité est en fait mue par un besoin de bloquer l'émergence des sentiments.

Lorsqu'un survivant est en contact avec ses émotions, il ressent généralement des sentiments d'anxiété et de peur, de dépression, de culpabilité, de colère, de rage et de honte (Blanchard, 1986; Briere, 1989; Bruckner et Johnson, 1987; Constantine, 1979; Hunter, 1990a; Nielsen, 1983; Olsen, 1990; Pierce, 1987; Schacht, Kerlinsky et Carlson, 1990; Vander May, 1988; Urquiza et Capra, 1990).

Initialement, la colère est l'émotion que les survivants expriment souvent le plus facilement (Dimock, 1988). La rage des hommes est souvent dirigée vers l'homosexualité liée à l'abus plutôt que vers ses aspects d'exploitation. La colère a de la force et de l'énergie. C'est un état affectif en accord avec les rôles masculins tels que définis par la culture. La colère et la rage peuvent devenir l'émotion « fourre-tout » pour les victimes de sexe masculin. L'expression de la colère, émotion active, est ressentie comme plus acceptable que l'expression d'émotions davantage liées à la vulnérabilité.

Tous les survivants ne ressentent pas de la colère devant le fait qu'ils ont été victimes d'abus sexuel. Beaucoup ont du mai à éprouver et à exprimer leur rage. Pour un grand nombre d'hommes, la colère est associée à la violence. Beaucoup de survivants ont peur de céder à la violence s'ils entrent en contact avec leurs sentiments de colère. D'autres survivants adoptent une attitude de « victime » dans leur vie et réagissent au fait d'avoir été exploités par la passivité et le retrait.

Stress post-traumatique et dissociation

Les personnes qui travaillent dans le domaine des interventions en cas de viol, des interventions auprès des anciens combattants de la guerre du Vietnam et de la lutte contre l'abus sexuel des enfants ont rassemblé leurs connaissances pour mieux comprendre les effets des traumatismes graves sur les victimes. Ces connaissances combinées ont pris le nom d'étude du stress post-traumatique. Elles ont produit des concepts très utiles pour celles et ceux qui travaillent avec des survivants de désastres naturels, de guerres, de prises d'otages, de viols et, plus récemment, d'abus sexuel.

Les victimes d'abus sexuel partagent beaucoup de problèmes avec les victimes d'autres désastres. Citons en particulier ce qui suit :

· Elles n'ont pas choisi la fréquence ni la durée de l'événement traumatisant.
· Leurs ressources personnelles étaient sans effet devant des forces négatives d'une grande puissance.
· Leur sécurité physique et psychologique était menacée.
· Elles ne savaient pas quand leur milieu était sans danger et quand il ne l'était pas.
· Leurs efforts pour parier du traumatisme avec d'autres se heurtent souvent à l'incrédulité et au manque de compréhension, ce qui provoque l'isolement
   affectif, la confusion et la honte.
· Elles ne sont pas capables de faire face émotionnellement au traumatisme tant qu'elles ne se sentent pas physiquement et psychologiquement en sûreté.
  (Briere, 1989; Evans, 1990)

Le stress post-traumatique, à cause de ses caractéristiques étiologiques, donne lieu à des stratégies de défense très variées auxquelles la victime a recours pour tenter de préserver son intégrité. Les symptômes les plus courants du stress post-traumatique comprennent les flashbacks; (éclairs de mémoire) et la répétition de l'expérience du traumatisme (Briere, 1989), un engourdissement général des réactions intellectuelles et affectives (Blanchard, 1986; Briere, 1989; Myers, 1989), l'hypervigilance (Blanchard, 1986; Briere, 1989) et toute une variété de réactions de dissociation (Briere, 1989; Evans, 1990; Hunter, 1990a; Nielsen, 1983).

Les flashbacks peuvent faire intervenir un ou plusieurs des cinq sens du survivant qui ont consciemment ou inconsciemment encodé le souvenir de l'abus (Briere, 1989). Les survivants mentionnent souvent de vagues sensations corporelles récurrentes qui ne sont associées à aucun souvenir conscient. Ces sensations ou ces souvenirs sont déclenchés par des stimuli internes ou externes qui évoquent le traumatisme initial. Par exemple, la présence d'un appareil-photo peut déclencher un flashback chez un survivant dont l'abus a consisté, entre autres, à poser pour des photos pornographiques; ou un survivant qu'on laissait seul pendant de longues périodes de temps après l'abus sexuel peut avoir des flashbacks de son expérience lorsqu'il se sent isolé.

Plus le traumatisme a été répété et plus l'intrusion a été grande, plus le souvenir neurologique du survivant est profond et puissant. Si un événement déclencheur se produit pendant un épisode de la vie du survivant qui rappelle des événements abusifs passés, une chitine d'associations se met en branle, habituellement inconsciemment, et le client commence à refaire l'expérience de l'abus dont il a été victime. Cette répétition de l'expérience s'accompagne souvent d'un brouillage entre le passé et le présent. Le survivant se retire inconsciemment du présent et projette les souvenirs et les sentiments liés au passé sur les stimuli actuels. Ce phénomène, qui ressemble à une transe, s'accompagne d'une baisse des perceptions sensorielles et le survivant a généralement besoin de reprendre contact avec sa réalité présente pour pouvoir transcender le flashback.

Des souvenirs réprimés peuvent revenir sous forme de flashbacks. lis peuvent aussi émerger sous forme de rêves et de cauchemars. Les survivants ont souvent des rêves qui rappellent explicitement l'abus dont ils ont été victimes ou des cauchemars récurrents de poursuite qui évoquent symboliquement les thèmes de l'abus (Briere, 1989; Nielsen, 1983).

Briere définit le symptôme d'engourdissement émotionnel qui fait souvent partie du stress post-traumatique comme « [...] une perte de réactivité, un détachement des autres et/ou un étouffement de l'émotivité » (Briere, 1989, p. 8). Les survivants donnent souvent des détails explicites sur l'abus dont ils ont été victimes sans ressentir d'émotions, comme s'ils parlaient d'événements qui sont arrivés à quelqu'un d'autre.

Bien que la distance émotionnelle ait une valeur à court terme comme moyen de défense contre le choc et la crise, lorsqu'elle est maintenue pendant une longue période de temps, elle sépare et isole le survivant de la gamme complète de ses sentiments (Grubman-Black, 1990; Nielsen, 1983). Les survivants ont souvent peur d'identifier ou d'exprimer leurs émotions parce qu'ils craignent que leurs réactions affectives soient si intenses qu'ils ne pourront pas les dominer.

Il arrive souvent que les survivants de traumatisme et d'abus sexuel deviennent hypervigilants en préparation pour la prochaine agression possible sur leur personne (Blanchard, 1986). Le stress post-traumatique est caractérisé par l'hypertension et l'hyperactivité du système nerveux sympathique. La tension musculaire chronique, l'incapacité de dormir, l'agitation, les troubles du sommeil et les sursauts exagérés sont des symptômes typiques des survivants de traumatisme sexuel (Nielsen, 1983).

La dissociation par rapport à l'expérience constitue une réaction courante des victimes de traumatisme en général et d'abus sexuel en particulier. Le corps d'un enfant peut rester présent au cours de l'abus mais son esprit s'en sépare pour se protéger psychologiquement. Certains des symptômes de dissociation que Briere (1989) mentionne sont la fuite mentale dans un espace apparemment neutre (mieux connue sous l'expression « perte de contact »), la déréalisation (le sentiment que les choses autour de soi sont fausses ou n'ont pas de réalité), la dépersonnalisation (le sentiment qu'on est différent de son moi habituel), les expériences extra-corporelles (la sensation de flotter à l'extérieur de son corps et de voyager ailleurs) et la présence de trous de mémoire bien définis dans des souvenirs par ailleurs continus.

Les comportements dissociatifs se répartissent le long d'un continuum qui va du rêve éveillé au trouble de personnalité multiple. Les formes bénignes de la dissociation font partie de l'expérience quotidienne. Cependant, lorsque des défenses dissociatives plus extrêmes comme le dédoublement et la répression sont utilisées pour faire face au stress, elles compromettent le sentiment d'intégrité personnelle.

Beaucoup de survivants ont dissocié leurs affects de leurs souvenirs intellectuels. D'autres ont le sentiment vague et inconfortable qu'ils ont été abusés mais ne peuvent pas se souvenir d'incidents d'abus spécifiques. Dans les deux cas, le survivant a souvent l'impression qu'il est fou et que son moi est partialisé. La thérapie a pour tâche de l'aider à réintégrer la totalité de son expérience.

Lorsque l'abus a eu lieu très tôt dans la vie, qu'il a été sévère et prolongé et qu'il a été perpétré par plusieurs personnes différentes, il arrive souvent que la victime an recours à des défenses hautement dissociatives et développe des symptômes comme le trouble de personnalité multiple. La personnalité multiple est une défense inconsciente sophistiquée par laquelle la psyché s'efforce paradoxalement de protéger sa cohérence en partialisant ses diverses composantes. Les sous-personnalités servent le système de personnalité multiple en assumant les tâches de protecteur, d'agresseur ou de victime. Généralement, les sous-personnalités sont très distinctes les unes des autres avec des caractéristiques et des traits vraiment différents. Les souvenirs de chaque sous-personnalité ne sont pas partagés avec les autres parties du système. C'est pourquoi les survivants qui présentent une personnalité multiple souffrent souvent de pertes de mémoire apparentes et ne se souviennent pas d'actions qui leur sont rappelées par d'autres personnes et qui se sont effectivement produites.

Difficultés avec l'identité masculine

Notre culture a créé une mythologie sociale qui attend des hommes qu'ils aient le contrôle de leur vie, qu'ils soient autonomes et forts. Les hommes ne sont pas supposés avoir besoin d'aide pour faire face à leurs sentiments. Des expressions comme « un garçon ne pleure pas » encouragent les hommes à dissimuler leur vulnérabilité. Dans notre culture, les hommes qui réussissent sont présentés comme des hétérosexuels, des initiateurs sexuels et des protecteur d'eux-mêmes et des autres.

Pour les survivants, la prescription sociale de la virilité réussie est en conflit direct avec l'expérience. Il arrive souvent que les survivants récrivent leur histoire d'abus en oubliant qu'ils étaient à l'époque des enfants impuissants. Ils projettent leur identité d'homme mûr sur les souvenirs de l'abus et se considèrent coupables de ne pas avoir empêché leur agresseur d'agir. En conséquence de l'abus, beaucoup d'hommes signalent « une atteinte à leur sentiment subjectif de virilité ou de masculinité [...] » (Myers, 1989, p. 210).

Certaines attitudes sociales augmentent l'aliénation du survivant par rapport à une identité masculine saine. Lorsque l'on répond au dévoilement d'un survivant par des questions comme « Êtes-vous un délinquant sexuel? » ou « Êtes-vous homosexuel? », son sentiment d'imperfection est confirmé (Dimock, 1988; Myers, 1989). L'un des sentiments qui prévaut parmi les survivants est :

qu'ils ont réagi sexuellement dans des circonstances où un homme normal aurait été impuissant. En conséquence, ils en sont venus à se considérer comme anormaux ce qui, à son tour, a provoqué ou reprovoqué des sentiments d'insuffisance en tant qu'homme. (Sarrel et Masters, 1982, p. 127)

Au cours de la thérapie, les survivants ont besoin d'examiner comment leur aptitude à affirmer leur masculinité authentique est limitée par les facteurs culturels. Grubman-Black (1990) dit que les thérapeutes peuvent aider les clients à acquérir une identité masculine positive en les amenant à reconnaître que les idées rigides sur les rôles et les stéréotypes sexuels basés sur des renseignements inexacts sont responsables d'une partie de la souffrance personnelle des survivants de l'abus sexuel. Les thérapeutes peuvent aider les victimes à prendre conscience du fait qu'il émerge aujourd'hui des définitions nouvelles de la masculinité qui affirment l'expression des émotions et intègrent la vulnérabilité.

Confusion quant à l'orientation sexuelle et homophobie

Beaucoup de survivants ont été abusés par un homme et cela les amène inévitablement à se poser des questions sur leur orientation sexuelle et leur masculinité. Ils se demandent parfois si leur orientation sexuelle naturelle est hétérosexuelle, homosexuelle ou bisexuelle (Bruckner et Johnson, 1987; Dimock, 1988; Hunter, 1990a; Myers, 1989). Les questions et les préoccupations liées à l'orientation sexuelle constituent souvent un problème central pour les survivants dont la confusion est parfois manifeste. Dimock (1988) dit que beaucoup de survivants s'adonnent à une activité sexuelle avec une personne du sexe opposé à leur orientation sexuelle déclarée ou ne sont pas capables d'affirmer leur préférence sexuelle.

En général, les victimes ont été excitées physiologiquement par la stimulation de leurs organes génitaux. Il arrive souvent qu'elles aient eu leur premier orgasme avec une autre personne à l'occasion de l'épisode d'abus sexuel. Désarmés devant ce qui leur est arrivé, beaucoup de survivants ont tendance à se référer aux signes extérieurs (c.-à-d. excitation physique et orgasme) plutôt qu'aux signes intérieurs (c.-à-d. désarroi affectif et confusion) dans leurs efforts pour identifier leur orientation et leurs préférences sexuelles. lis en viennent à croire que « [...] excitation signifie plaisir et plaisir signifie complicité » (Gerber, 1990, p. 173).

Les enfants ne savent pas que beaucoup d'hommes qui s'adonnent à des comportements sexuels avec des personnes du même sexe ne sont pas homosexuels. Ils n'analysent pas leur expérience en termes de contrôle et de pouvoir. Les enfants interprètent souvent l'abus sexuel dont ils ont été victimes comme un épisode homosexuel plutôt que comme un traitement abusif. lis voient l'agresseur comme « un homme gai qui a un rapport sexuel avec un enfant » plutôt que comme « un délinquant qui utilise un enfant sexuellement pour satisfaire des besoins essentiellement non sexuels ».

Tous les survivants posent des questions comme « Pourquoi est-ce que cela m'est arrivé à moi et pas à quelqu'un d'autre? Qu'est-ce que le fait d'avoir été abusé sexuellement révèle sur moi et sur ma sexualité? Pourquoi est-ce moi qu'on a choisi? » Les survivants qui ont été abusés par une personne du même sexe se posent des questions supplémentaires. Les hommes homosexuels ont tendance à se demander « Est-ce que je suis gai parce que j'ai été abusé? » ou « Est-ce que j'ai été abusé parce que je suis gai? ». Les hommes hétérosexuels, de leur côté, se demandent « Si j'ai été abusé par un homme, est-ce que cela veut dire qu'en réalité je suis gai? ».

Notre société est très homophobe. Tous les hommes, qu'ils soient hétérosexuels ou homosexuels, qui ont grandi dans notre culture ont intériorisé des croyances homophobes. Lorsque les survivants sont des hommes gais, le processus d'acceptation de leur homosexualité peut être plus difficile à cause de leur propre incertitude quant à l'impact que l'abus sexuel a eu sur leur orientation sexuelle. Leur famille et leurs amis peuvent avoir tendance à régler la question de leur orientation sexuelle en déclarent « Il est gai parce qu'il a été abusé sexuellement. » Leur propre homophobie intériorisée peut les inciter à voir l'abus sexuel comme responsable de leur orientation sexuelle parce qu'ils peuvent alors croire que le rétablissement de l'abus comprendra une - guérison - de leur homosexualité.

À l'heure actuelle, il n'existe pas de rapport prévisible entre l'orientation sexuelle et l'abus sexuel subi dans l'enfance. Certains chercheurs ont conclu à « un rapport [...] statistiquement fort entre l'abus sexuel subi dans l'enfance et l'activité homosexuelle à l'âge adulte » (Dimock, 1988, p. 205), mais on ne sait pas si cela démontre une cause, un effet ou une corrélation.

Certaines preuves indiquent que les garçons qui sont marginalisés sont plus vulnérables à l'abus sexuel (Finkelhor, 1984). Dans la mesure où les garçons qui s'écartent de l'identité masculine traditionnelle (c.-à-d. les garçons qui n'aiment pas les sports, qui s'intéressent aux sentiments, etc.) sont davantage marginalisés, ils sont peut-être plus susceptibles d'être abusés. La recherche sur cet aspect de l'abus sexuel est lourde de sous-entendus politiques et éthiques et les chercheurs courent le risque d'être vus comme anti-gais et homophobes (Hunter, 1990a).

Il est évident que les thérapeutes (qu'ils soient hommes ou femmes, homosexuels ou hétérosexuels) sont dans l'obligation de prendre conscience de leurs propres préjugés à l'égard du sexisme, du racisme, des classes sociales et de l'orientation sexuelle. Tout en sachant que l'orientation sexuelle couvre toute la gamme de l'hétérosexualité à l'homosexualité en passant par la bisexualité, nous avons concentré notre savoir et notre compréhension sur les deux extrêmes, à savoir l'hétérosexualité et l'homosexualité. On ne comprend pas bien comment le continuum entre ces deux pôles est influencé par les variables innées, situationnelles et transitionnelles. Il faut poursuivre plus avant les recherches sur le rapport entre l'abus sexuel et l'identité sexuelle subséquente.

Les thérapeutes doivent veiller à maintenir l'équilibre, au cours des séances de thérapie, entre les préoccupations thérapeutiques et politiques et ceci au nom des intérêts de leurs clients et non des leurs. Pour optimiser l'utilité du processus thérapeutique pour les clients, les thérapeutes doivent prendre conscience de leurs propres préjugés culturels et politiques et de la façon dont ils influencent leurs interventions auprès de leurs clients.

Perpétration réactionnelle d'abus sexuel et agression

L'expérience de la victimisation sexuelle semble donner lieu à trois réactions inconscientes typiques chez les victimes :

1. L'enfant comprend ce que c'est que d'être une victime et décide inconsciemment « C'est ce que je suis. » Il accepte son expérience de victimisation comme une image de sa propre valeur, ne définit jamais les frontières et les limites de son moi et ne cesse de répéter son expérience de victimisation.

2. L'enfant comprend ce que c'est que d'être une victime et décide inconsciemment « Je ferai en sorte que les autres ne deviennent jamais des victimes. » Il donne suite à cette conviction en offrant aux autres l'aide et la protection qu'il n'a jamais reçues lui-même.

3. L'enfant comprend ce que c'est que d'être une victime et décide inconsciemment « Cela ne m'arrivera plus jamais. » Pour retrouver son pouvoir, il décide de s'identifier avec la personne qui l'a agressé et d'utiliser des stratégies basées sur l'abus d'autrui pour satisfaire ses besoins.

Bien qu'il soit possible de réagir de plus d'une façon, les survivants ont tendance à s'identifier essentiellement à l'une de ces réactions. Beaucoup de survivants, même s'ils s'identifient d'abord avec la victime ou le protecteur, craignent de devenir aussi des agresseurs. Bruckner et Johnson (1987) font remarquer qu'il est relativement courant que les survivants aient peur d'avoir un comportement sexuel avec les enfants ou se sentent coupables d'avoir eu des expériences sexuelles avec des enfants lorsqu'ils étaient adolescents.

Il est évident que toutes les victimes ne deviennent pas des délinquants sexuels et que tous les délinquants sexuels n'ont pas été des victimes d'abus sexuel. Certains facteurs réduisent les risques à cet égard. Il y a moins de chances pour que la victime réagisse par l'agression si elle avait acquis un solide sens du moi avant l'expérience de l'abus, si elle a des rapports avec des modèles masculins positifs, si elle a des relations interpersonnelles qui lui sont une source de soutien et si elle a conscience de ce qui constitue une expression saine de la sexualité (Gerber, 1990).

Certaines victimes d'abus sexuel intériorisent inconsciemment le comportement de la personne qui les a agressées. La théorie de l'apprentissage social suggère que la copie des modèles et l'apprentissage par personne interposée jouent un rôle important dans la façon dont les comportements sociaux sont façonnés et mis en œuvre. Pour certains survivants, le comportement abusif devient une défense contre la victimisation puisqu'ils croient qu'il vaut mieux être fort que faible et que, pour être fort, il faut contrôler les autres. L'identification avec l'agresseur peut amener certains survivants à commettre eux-mêmes des abus dans un effort mai adapté pour satisfaire leur besoin d'être forts (Gerber, 1990). Il s'agit d'une tentative contre-phobique erronée pour comprendre et surmonter l'expérience de la victimisation (Hunter, 1990a).

La socialisation des hommes encourage l'action et tolère l'agression pour assurer la gratification de ses besoins. Certains survivants ont un répertoire limité d'aptitudes pour satisfaire leurs besoins et c'est pourquoi ils adoptent des comportements de contrôle et de manipulation à l'égard des autres. Bruckner et Johnson (1987) notent que les membres des groupes de survivants reconnaissent souvent qu'ils agressent sexuellement leurs partenaires adultes, qu'ils se montrent violents à leur égard et qu'ils ont généralement recours à la manipulation dans les rapports qu'ils ont avec les autres.

Lorsque les survivants se sont eux-mêmes rendus coupables d'abus contre les autres, il faut procéder à une évaluation sérieuse pour établir si ce comportement est un processus structuré, prédateur et délibéré ou s'il s'agit d'une expérience isolée et réactionnelle qui est le résultat d'une expérimentation comportementale ou de la répétition d'une conduite. Il n'entre pas dans le cadre du présent travail d'examiner l'évaluation et le traitement des délinquants sexuels récidivistes. Cependant, comme certains survivants sont devenus des agresseurs par réaction, on discutera de certaines des questions associées à ce comportement.

Les survivants qui se sont adonnés à des activités sexuelles abusives réactionnelles lorsqu'ils étaient adolescents ont souvent très honte de ce comportement. Cette honte ressentie à deux niveaux, pour avoir été à la fois une victime et un agresseur, doit être examinée. Les survivants ont souvent besoin que l'on replace leur comportement d'agression dans le contexte de leur propre victimisation. Il ne s'agit pas d'une tentative pour excuser leur conduite mais plutôt d'une stratégie visant à réduire la honte qu'ils en ressentent. En réduisant le degré de honte, on permet au client d'éprouver la culpabilité appropriée et d'assumer la responsabilité de ses actes.

Les survivants ont besoin de savoir que l'énergie sexuelle d'un enfant dont l'éveil sexuel a été prématuré n'est pas contenue comme il se doit par le jugement et la maturité. En grandissant, le survivant devra examiner ses expériences sexuelles précoces et peut-être corriger certaines tendances dysfonctionnelles inconscientes. Il devra canaliser son besoin d'être fort et d'exprimer sa rage devant l'abus dont il a été victime et l'orienter vers des comportements non abusifs.

Les survivants qui sont à la fois des victimes et des agresseurs représentent un défi pour beaucoup de professionnels de la santé mentale qui se heurtent alors aux limitations des théories qui leur sont chères sur les victimes et les agresseurs (Gerber, 1990). Lorsque la frontière entre victime et agresseur n'est pas claire, les modèles de traitement axés exclusivement sur la victimisation ou sur les processus d'agression comme sur des phénomènes séparés perdent de leur utilité. Beaucoup d'organismes séparent les services aux victimes des services aux agresseurs. Les clients qui tombent dans les deux catégories créent un dilemme au niveau de la prestation des services.

Conduites sexuelles obsessionnelles

L'activité sexuelle apporte avec elle un sérieux renforcement - à savoir l'excitation sexuelle et l'orgasme. L'excitation sexuelle des victimes est conditionnée par l'abus sexuel. Par définition, l'abus sexuel crée un conditionnement dysfonctionnel. Comme les jeunes enfants n'ont pas la maturité émotionnelle, intellectuelle et sociale nécessaire pour comprendre l'expérience sexuelle adulte, leur initiation sexuelle abusive peut créer des tendances à l'excitation et des comportements de défense érotisés qui peuvent s'avérer dysfonctionnels aux étapes de développement ultérieures.

Friedrich, Beilke et Urquiza (1988) ont comparé le comportement de deux groupes de jeunes garçons de trois à huit ans. Un groupe présentait un trouble du comportement et l'autre avait été victime d'abus sexuel. lis ont trouvé qu'ils pouvaient déterminer qui appartenait à chaque groupe avec un niveau d'exactitude relativement élevé. La variable qui contribuait le plus à cette différence concernait les problèmes sexuels. Les garçons qui avaient été abusés sexuellement étaient notablement plus érotisés en tant que groupe. Le comportement sexuel de ces jeunes garçons comprenait une masturbation excessive, une préoccupation pour lés choses du sexe et une répétition de leur abus sexuel avec leurs frères et sœurs. Si des victimes comme ces jeunes garçons ne reçoivent pas de thérapie au moment du dévoilement de l'abus, leur sexualité se développera d'une façon qui reflétera leur expérience sexuelle abusive initiale.

Pour les hommes de notre culture, le premier orgasme est un rite de passage et marque l'entrée dans l'âge adulte. Lorsque cet orgasme se produit dans le contexte d'un rapport abusif, il est marqué par des associations problématiques comme l'usage du pouvoir, le non-consentement mutuel et parfois la violence. Certains survivants ont élaboré des fantasmes et des rituels masturbatoires autour de leur expérience d'abus sexuel et sont excités par des activités sexuelles qui font intervenir l'agression, la violence ou l'exploitation.

Le mélange du secret et de l'excitation sexuelle laisse souvent à la victime un sentiment de grande honte à l'égard de sa sexualité, particulièrement s'il se rend compte que la façon dont il l'exprime est déviante. Certains survivants ne sont pas conscients du fait que leur comportement sexuel a été façonné par des processus d'abus et ils pensent qu'ils sont inadaptés, bizarres ou anormaux à cause de la nature de leurs désirs sexuels et de la façon dont ils vivent leur sexualité.

Il y a souvent un rapport entre l'expérience d'abus sexuel d'une victime et la façon dont elle exprime sa sexualité par la suite. Par exemple, si l'abus faisait intervenir des actes de violence et de sadisme, l'expression sexuelle subséquente de la victime peut fort bien répéter certains aspects de cette violence. A cause de la honte qui entoure ce comportement, un survivant hésitera généralement beaucoup à parier aux autres de sa sexualité.

Beaucoup de survivants déclarent s'adonner à des comportements sexuels obsessionnels comme des activités sexuelles fréquentes sans établissement d'une relation avec l'autre ou une masturbation compulsive.

Le comportement sexuel obsessionnel peut être défini simplement comme un manque de contrôle sur une ou plusieurs activités sexuelles spécifiques. Ces activités sont le plus souvent étrangères au moi et l'individu ressent honte et remords après s'y être adonné. Malgré son désir d'arrêter, il en est incapable même lorsqu'il est clair qu'il se fait du mal ou qu'il fait du mal aux autres. (Dimock, 1988, p. 207)

Comme les autres obsessions, l'obsession sexuelle est habituellement une tentative erronée de la part du survivant pour se guérir. Les comportements sexuels obsessionnels sont utilisés pour bloquer certains états d'esprit intolérables (p. ex., l'anxiété). Pour certains survivants, l'obsession sexuelle remplace l'intimité sexuelle. La masturbation avec du matériel pornographique est moins menaçante que le rapport sexuel avec une ou un partenaire, particulièrement si les situations sexuelles interactives déclenchent souvent, consciemment ou inconsciemment, des souvenirs de l'abus sexuel (Hunter, 1990a). Dans certains cas, les survivants s'efforcent de répondre à leur inconfort devant la sexualité en évitant complètement tout contact sexuel avec les autres (Bruckner et Johnson, 1987).

Pour que le client puisse modifier son comportement obsessionnel, il a besoin de prendre conscience du cycle que suit l'obsession. En observant le déroulement de sa conduite compulsive et des états d'esprit qui précédent le comportement obsessionnel, un survivant peut parvenir à décoder ses actes obsessionnels et à les remplacer par des comportements fonctionnels.

Difficultés interpersonnelles

L'abus sexuel est un traumatisme induit par des êtres humains et il a des répercussions durables sur les rapports subséquents avec les êtres humains. Chez les jeunes enfants, les réactions à l'abus comprennent l'agression contre les autres, la délinquance et la désobéissance (McCormack, Janus et Burgess, 1986; Schacht, Kerlinsky et Carlson, 1990; Urquiza et Capra, 1990). Les survivants ont souvent des sentiments ambivalents vis-à-vis de la personne qui les a agressées. Même S'ils n'ont pas aimé l'aspect non partagé du rapport sexuel, ils ont pu apprécier Inattention et l'intérêt que leur a montré l'agresseur (Blanchard, 1986; Hunter, 1990a; Nielsen, 1983). Cette ambiguïté peut se manifester plus tard comme une incapacité à distinguer entre sexualité et affection, confiance et exploitation et rapport sans danger ou abusif (Briere, 1989).

Les victimes d'abus sexuel peuvent avoir de la difficulté à amorcer, développer et entretenir des relations interpersonnelles intimes (Urquiza et Capra, 1990). L'abus de confiance qui est inhérent à l'abus sexuel amène souvent la victime à éviter les rapports interpersonnels. Cet isolement social exacerbe la stigmatisation de la victime et rend encore plus difficile l'intégration réussie de la crise psycho-sociale qu'a constituée l'abus (Briere, 1989; Leehan et Wilson, 1985).

Les chercheurs et le personnel clinique ont noté que les survivants de l'abus sexuel ont tendance à être plus souvent victimisés à nouveau dans leurs relatons subséquentes (Briere, 1989; Dimock, 1988; Hunter, 1990a; Myers, 1989; Nielsen, 1983). La dynamique du processus de revictimisation est complexe. Certaines victimes ne savent pas reconnaître les signaux de danger qui indiquent la présence d'un risque d'abus ou bien elles se dissocient quand cela se produit et entrent dans un état passif où leur aptitude à se protéger disparaît ou bien ces signaux font tellement partie de leur expérience normale qu'elles ne peuvent pas imaginer qu'il y ait des interactions interpersonnelles non abusives. D'autres victimes ont du mai à discerner les limites et les frontières de leur moi et ne sont pas capables d'identifier les moments où leurs besoins de sécurité ne sont pas satisfaits.

Une des façons de réagir à la victimisation subie dans l'enfance pour les survivants est de devenir hypervigilants à l'égard des humeurs et des comportements des personnes importantes qui les entourent (Blanchard, 1986; Briere, 1989). L'enfant qui pouvait prédire qu'un abus risquait de se produire acquérait un sentiment marginal de contrôle de la situation. Pour avoir ce faux sentiment de contrôle, il fallait absolument apprendre à déchiffrer l'état d'esprit et l'humeur de l'agresseur. Ce comportement, qui visait initialement la sécurité, devient dysfonctionnel dans les rapports adultes subséquents lorsqu'un survivant ne peut pas identifier son propre vécu intérieur et se concentre sur l'état d'âme des personnes qui ont de l'importance dans sa vie. Son amour-propre ne se développe pas comme il se doit et il façonne sa conduite en réaction aux autres plutôt qu'en réponse à ses propres besoins.

Les comportements sexuels interactifs des survivants sont souvent très problématiques (Blanchard, 1986; Briere, 1989; Myers, 1989; Nielsen, 1983; Sarrel et Masters, 1982). Un survivant peut être hanté par toute une gamme de dysfonctions sexuelles telles que manque de désir, difficultés détection et dissociation au cours de des activités sexuelles.

En général, l'abus sexuel accélère, retarde ou complique le développement sexuel de l'enfant. Lorsque la victime d'abus sexuel grandit, son développement psycho-sexuel reflète son expérience passée. Dans les rapports adultes, les partenaires sexuels sont parfois l'objet des projections inconscientes des survivants, ce qui peut être une source de confusion et de souffrance pour les uns et pour les autres tant que ces projections n'ont pas été identifiées et traitées. Par exemple, si un agresseur récompensait une victime avec des cadeaux après l'abus, la victime, une fois adulte, peut réagir de façon négative à tout cadeau qu'il reçoit de ses partenaires. Ceci peut être une source de confusion autant pour la ou le partenaire, qui s'attend à ce que les cadeaux soient acceptés avec joie, que pour le survivant qui ne peut pas comprendre pourquoi il réagit de cette façon au comportement de l'autre.

DIFFÉRENCES ENTRE LES HOMMES ET LES FEMMES OUI ONT SURVÉCU À L'ABUS SEXUEL

Les recherches actuelles indiquent qu'il existe des différences notables entre la victimisation sexuelle des garçons et celle des filles. Ces différences touchent la nature de l'expérience même de l'abus mais aussi la façon dont cette expérience est comprise et intégrée.

Les renseignements sur les différences entre les hommes et les femmes qui ont survécu à l'abus sexuel seront présentés de la façon suivante : je commencerai par discuter des résultats des recherches effectuées sur le sujet puis je décrirai certaines des observations des personnes qui ont contribué au présent travail sur la façon dont le sexe des clients influence le processus thérapeutique.

Il est très difficile d'établir les taux de prévalence de la victimisation sexuelle parmi les garçons et les filles. Les études actuelles indiquent qu'en chiffres absolus, plus de filles que de garçons sont victimes d'abus sexuel (Bruckner et Johnson, 1987; Finklehor, 1984; Fritz, Stoll et Wagner, 1981; Vander May, 1988). Il reste à voir si ces résultats changeront à mesure que les conditions sociales permettront aux hommes de reconnaître leur expérience de victimisation.

Les résultats de recherche notent régulièrement que les garçons et les filles ressentent l'abus sexuel différemment. Les hommes interprètent souvent l'abus sexuel comme une initiation sexuelle plutôt que comme un outrage à leur personne (Condy et ai., 1987; Constantine, 1979; Finklehor, 1984; Fritz, Stoll et Wagner, 1981; Risin et Koss, 1987; Sandfort, 1984; Tindall, 1978). D'après Fritz, Stoll et Wagner (1981), les femmes avaient tendance à attribuer une signification négative et nettement malfaisante à leur expérience sexuelle prépubertaire alors que les hommes la voyaient comme un phénomène neutre ou même positif.

Les différences de perception entre les victimes d'abus sexuel sont influencées par de nombreux facteurs, y compris la socialisation des sexes, la différence entre leurs réactions physiologiques et la façon dont la culture détermine les expressions de la sexualité. Le fait que les victimes de sexe masculin ne perçoivent pas nécessairement leur abus comme une expérience négative ne signifie pas que l'expérience ne les ait pas marquées de façon négative. Comme Finklehor (1984) a conclu à l'issue de son enquête sur les survivants, les garçons avaient davantage tendance que les filles à noter l'intérêt et le plaisir comme constituant leur réaction immédiate à l'abus sexuel. Cependant, lorsqu'il a examiné les effets à long terme de l'abus en mesurant son impact sur l'amour-propre sexuel des survivants, Finklehor a noté que les garçons étaient aussi marqués que les filles, sinon plus.

Les garçons sont plus souvent abusés de façon homosexuelle que les filles (Finklehor, 1984; Fritz, Stoll et Wagner, 1981; Risin et Koss, 1987). La réalité de la victimisation est que les garçons, comme les filles, sont plus souvent victimisés par des hommes.

Les chercheurs ont trouvé que les victimes de sexe féminin étaient plus souvent abusées par des membres de leur famille alors que les garçons étaient plus souvent les victimes d'agresseurs de l'extérieur (Finklehor, 1984; Fritz, Stoll et Wagner, 1981; Pierce et Pierce, 1985; Risin et Koss, 1987; Vander May, 1988). Statistiquement, les garçons courent davantage de risques d'être abusés. par le personnel enseignant, le personnel d'entraînement, les personnes chargées de les garder et autres adultes en situation d'autorité que par des membres de leur propre famille. Les recherches empiriques indiquent cependant que le nombre absolu de garçons qui sont abusés sexuellement au Sein de leur famille demeure très élevé.

Les victimes de sexe masculin vivent plus souvent avec leur mère dans des familles monoparentales que les victimes de sexe féminin (Pierce et Pierce, 1985; Vander May, 1988). Un grand nombre des garçons victimes d'abus sexuel n'ont pas de parent actif de sexe masculin ou de modèle masculin qui leur apporte soutien et protection.

Les garçons sont plus souvent abusés avec d'autres enfants alors que les filles le sont plus souvent de façon isolée. Dans les cas où l'abus est intrafamilial, les garçons ont davantage tendance à être l'une de plusieurs victimes (Finklehor, 1984; Fritz, Stoll et Wagner, 1981; Dixon, Arnold et Calestro, 1978; Pierce et Pierce, 1985; Vander May, 1988).

Si c'est une fille qui est victime de l'un de ses parents, dans 65 % des déclarations, elle sera la seule victime déclarée. S'il s'agit d'un garçon, dans 60 % des cas, il y aura une autre victime. (Finklehor, 1984, p. 164)

Les garçons victimes d'abus sexuel sont aussi plus souvent victimes de mauvais traitements que les filles (Finklehor, 1984; Dixon, Arnold et Calestro, 1978; Vander May, 1988). Non seulement les garçons courent plus de risques d'être également victimes de mauvais traitements mais ils courent aussi davantage de risques que l'abus sexuel soit violent. Pierce et Pierce (1985) ont trouvé que le recours à la force et aux menaces était notablement plus fréquent avec les garçons qu'avec les filles.

Les types d'activité qui constituent l'abus diffèrent entre les victimes en fonction des sexes (Pierce et Pierce, 1985; Risin et Koss, 1987). Les garçons sont beaucoup plus souvent victimes de sodomie et participent plus souvent à une masturbation mutuelle. En outre, les garçons ont plus souvent un orgasme au cours de l'abus (Fritz, Stoll et Wagner, 1978). Une étude effectuée par Pierce et Pierce (1985) a conclu que les agresseurs avaient plus souvent des rapports sexuels oraux avec les garçons [52 % des garçons et 17 % des filles avaient des rapports oraux]. La même étude a conclu que 40 % des agresseurs masturbaient les garçons, ce qui est plus élevé que la statistique équivalente pour les filles. Cependant, les garçons étaient caressés beaucoup moins souvent que les filles.

Les garçons ont moins tendance que les filles à parler à des membres de leur famille de leurs expériences de victimisation (Fritz, Stoll et Wagner, 1978; Risin et Koss, 1987). Lors du dévoilement de l'abus, s'il s'agit d'un garçon qui n'a pas atteint la majorité, l'abus est plus souvent déclaré à la police qu'à un organisme de protection de l'enfance. Si l'abus est déclaré à des services de protection, le garçon est moins souvent placé hors de la famille aux fins de protection (Finklehor, 1984; Pierce, et Pierce, 1985; Vander May, 1988). Une fois l'abus dévoilé, les victimes de sexe masculin reçoivent moins souvent de thérapie que les filles et le traitement qu'ils reçoivent est en moyenne plus court (Vander May, 1988).

Le personnel clinique interviewé dans le cadre du présent travail a tout de suite tenu à faire remarquer que les différences cliniques entre les garçons et les filles victimes d'abus sexuel sont faibles comparées aux similitudes. Les victimes des deux sexes se sentent isolées et marginalisées. Elles ont toutes des problèmes d'amour-propre et d'intégrité. En dernière analyse, pour les uns comme pour les autres, le processus de guérison et de rétablissement est un processus d'acceptation de tous les aspects de la condition humaine, un processus qui transcende les sexes.

L'une des différences entre les deux sexes souvent mentionnée par les participants à la recherche est la réticence des victimes de sexe masculin à reconnaître leur victimisation. Les hommes ressentent davantage de honte devant leur victimisation que les femmes. Le fait d'être une victime est une expérience contre-culturelle pour un homme. Il est plus difficile pour un homme d'admettre qu'il a été victimisé, qu'il a été un enfant impuissant. Certains hommes refusent complètement d'ouvrir la porte a leurs souvenirs et à leurs sentiments en disant « Mon enfance, c'est du passé. » La conséquence de cette difficulté à briser le silence et à révéler aux autres l'abus dont ils ont été victimes est que les hommes cherchent moins que les femmes à se faire aider par des professionnels pour se remettre de leur expérience traumatisante. Lorsque les hommes entament une thérapie, ils ont moins tendance à identifier leurs antécédents d'abus sexuel comme présentant un problème. Beaucoup de victimes d'abus sexuel cherchent à se faire aider pour des problèmes relationnels ou des problèmes sexuels et n'ont pas fait intellectuellement le rapport entre leurs difficultés actuelles et leur passé de victimisation.

Les personnes qui ont collaboré à la recherche ont observé que les survivants ont plus souvent tendance à identifier les difficultés d'ordre sexuel (p. ex., dysfonction sexuelle, questions liées à l'orientation ou à l'identité sexuelle) comme posent un problème que les survivantes. Les survivantes ont aussi des problèmes sexuels mais il est rare qu'ils constituent leur préoccupation dominante. Lorsque ces difficultés font surface au cours d'une thérapie, les problèmes se présentent différemment que pour les survivants.

On a suggéré que notre culture encourage les hommes à faire de leur sexualité, particulièrement leur sexualité génitale, une composante primaire de leur identité. C'est pourquoi, quand cet aspect de la vie d'un homme ne fonctionne pas bien, il souffre d'une perte d'intégrité. Les femmes sont encouragées à s'identifier avec leurs relations intimes. Pour les femmes, la sexualité n'est qu'une partie du comportement intime. Les femmes sont donc moins centrées sur leur sexualité et davantage sur la qualité de leurs relations intimes.

L'orientation culturelle qui encourage les femmes à utiliser leurs relations avec les autres pour mieux se connaître alors qu'elle invite les hommes à plus d'autonomie a d'autres conséquences pour les personnes qui ont survécu à l'abus sexuel. Bruckner et Johnson, qui ont dispensé un traitement de groupe à des survivantes et à des survivants, notent que les hommes ont tendance à ne pas poursuivre leurs rapports avec les membres du groupe en dehors des séances alors que les femmes deviennent souvent amies. Comme l'isolement est un problème majeur pour les survivants, il peut être essentiel, pour les aider à guérir, de les encourager à se risquer à établir des rapports avec les autres, y compris avec les membres du groupe.

On dit que les hommes extériorisent leurs sentiments et que les femmes les intériorisent et ceci est vrai des personnes qui ont survécu à l'abus sexuel. Les personnes qui ont contribué au présent travail ont remarqué que les survivantes s'adonnent davantage à des comportements dépressifs et autodestructeurs alors que les survivants ont tendance à confronter leur agresseur pour exprimer leur colère et à se montrer agressif envers les autres. Beaucoup de survivants subliment leur colère à l'égard de l'abus en adoptant un comportement antisocial généralisé.

En thérapie, les survivants ont tendance à prendre contact avec leur colère et leur rage longtemps avant de sentir leur chagrin. Ils présentent souvent des fantasmes de revanche active et violente. Les survivantes, par contre, sont au départ davantage en contact avec leur tristesse et leur dépression, et leur rage devant la victimisation dont elles ont fait l'objet n'apparaît habituellement que plus tard dans la thérapie.

En réponse à la question « Remarquez-vous des différences entre les survivantes et les survivants sur le plan de la dissociation? », les personnes qui ont contribué à la recherche ont donné des réponses variées. Certaines ont dit qu'elles ne voyaient pas de différence. D'autres, cependant, ont suggéré que leurs clients avaient davantage tendance à se dissocier des composantes affectives de l'abus alors que leurs clientes se dissociaient de ses composantes intellectuelles.

Les survivants racontent souvent ce qui leur est arrivé tout à fait objectivement en décrivant en détail les comportements abusifs en cause. Ils parlent de ces événements comme s'ils étaient arrivés à quelqu'un d'autre et expriment peu d'émotion ou de compassion. Les survivantes ont en général plus de difficultés à se souvenir des incidents spécifiques qui ont constitué l'abus et plus de mal à en parier aux autres. Elles éprouvent cependant des sentiments intenses à l'égard de ces événements, même si elles ne s'en souviennent pas avec exactitude.

Les thérapeutes qui ont dispensé des traitements de groupe à des victimes d'abus sexuel des deux sexes remarquent que les hommes étaient davantage orientés vers l'action que les femmes. À cause de cette tendance à l'action, les thérapeutes doivent veiller à ce que leurs clients soient émotionnellement préparés aux comportements qu'ils ont l'intention d'adopter. Une confrontation prématurée avec l'agresseur ou des actes de colère et de revanche irréfléchis peuvent être contre-thérapeutiques.

CHAPITRE 3 - MODÈLES DE TRAITEMENT ET ÉTAPES DE GUÉRISON

Ce chapitre donne des renseignements sur les principes de base des thérapies à l'intention des survivants. On y propose un modèle de traitement fondé sur le principe du partenariat entre client et thérapeute qui vise à renforcer les aptitudesinnées du client à se rétablir de l'abus sexuel. Le modèle décrit quatre étapes de guérison, à savoir la rupture du silence, l'étape de la victime, l'étape du survivant et l'étape du combattant. Ce modèle en quatre étapes servira de cadre à la présentation d'interventions thérapeutiques spécifiques dans les chapitres suivants

On a parlé, dans l'introduction au présent ouvrage, des similarités qui existent entre l'abus sexuel et la thérapie. L'abus sexuel est un processus étalé dans le temps qui a lieu dans le cadre d'un rapport où les besoins de l'agresseur ont la priorité sur les besoins de la victime. Les activités qui le constituent sont gardées secrètes à cause de la honte qui les entoure. Or, il y a un risque que le processus thérapeutique reprenne ces caractéristiques de l'abus sexuel et devienne lui-même un processus abusif. Si la thérapie cherche à répondre aux besoins des thérapeutes plutôt qu'à ceux des clients et si la confidentialité du processus est utilisée pour protéger les thérapeutes plutôt que les clients, le processus peut devenir une expérience négative pour le client. La conviction des clients que les gens cherchent à les utiliser à leurs propres fins et qu'il n'est pas possible d'avoir des relations intimes sans danger, au moins pour lui, se trouvera renforcée.

Cependant, d'une façon qui n'est pas sans rappeler les principes de la médecine homéopathique, la thérapies à cause même de ses similarités structurelles avec le processus de l'abus sexuel, peut également guérir les blessures provoquées par ce dernier. Lorsqu'elle aide vraiment les clients à effectuer leur parcours thérapeutique et à retrouver leur pouvoir personnel, la thérapie peut s'avérer un instrument de guérison puissant. Une thérapie réussie permettra au client de faire l'expérience d'une dynamique de pouvoir fondée sur le respect et non sur l'exploitation qui l'aidera à reprendre possession des parties de lui-même qui avaient été perdues ou altérées par l'abus sexuel.

Les renseignements présentés dans le reste de cet ouvrage ont été recueillis à la fois dans les publications et dans le cadre des entrevues avec les personnes qui ont contribué à la recherche. Le modèle de traitement présenté propose un processus thérapeutique à l'intention des personnes de sexe masculin qui ont survécu à l'abus sexuel. Le présent chapitre discute des principes généraux de ce modèle de traitement, décrit les étapes générales de la guérison et identifie les problèmes qui risquent d'entraver le processus thérapeutique.

MODÈLE THÉRAPEUTIQUE À L'INTENTION DES SURVIVANTS DE L'ABUS SEXUEL

Il est difficile de parler d'un processus général de rétablissement ou de guérison. Chacune des personnes qui guérit de l'abus sexuel suit un parcours différent. Pour bien travailler avec les survivants de l'abus sexuel, cependant, chaque thérapeute doit élaborer un « plan de guérison » général sur lequel elle ou il se basera pour orienter le processus thérapeutique. Il est évident que la façon dont ce « plan » est conçu évoluera au cours de la carrière des thérapeutes mais elles et ils doivent pouvoir définir à tout moment les changements que leurs interventions ont pour but de faciliter chez leurs clients.

Le modèle présenté ici part du principe que le rétablissement d'un traumatisme sexuel est un processus qui mène le survivant d'une situation où il prend des décisions en réaction contre l'abus subi et sur la base de son expérience passée à une situation nouvelle où il prend des décisions et fait des choix proactifs basés sur ses besoins présents. À mesure que le survivant prend conscience de ses stratégies de défense inconscientes, son autonomie personnelle s'accroît. Les flashbacks de l'abus sexuel deviennent des souvenirs volontairement rappelés à la conscience, les peurs et les anxiétés inexplicables deviennent des associations avec des éléments du présent qui font écho aux expériences d'abus sexuel et certains symptômes somatiques chroniques deviennent des signaux qui permettent de reconnaître les besoins émotionnels et physiques non satisfaits.

À mesure que le survivant décode ses comportements, ses pensées et ses sentiments, il commence à comprendre comment son système de croyances a été façonné par sa victimisation et par la façon dont il a réagi à l'expérience. Cette compréhension est comme une porte qui s'ouvre pour lui offrir de nouvelles options. L'apprentissage, la pratique et l'intégration d'attitudes nouvelles et de comportements nouveaux ne se font pas de façon linéaire mais suivent un mouvement de spirale. Il faut souvent revisiter maintes fois les vieilles tendances avant de les remplacer par de nouvelles. Cependant, « avec chaque nouveau cycle, la capacité [du survivant] de sentir, de se rappeler, d'effectuer des changements durables est renforcée » (Bass et Davis, 1988, P. 59).

Les effets de l'abus sexuel sont compliqués par les autres formes de négligence et de mauvais traitements que la victime a pu subir dans l'enfance et ils sont renforcés par les dommages causés par les stratégies de défense qui, même si elles étaient adaptées au départ, finissent par s'avérer autodestructrices. Les traumatismes de nature sexuelle sont une source de honte et de dégradation pour la victime au niveau de son centre existentiel. Étant donné la longueur et les complexités du traumatisme, « [...] la résolution de l'abus sexuel subi dans l'enfance est un processus à long terme plutôt qu'à court terme » (Courtois, 1991, p. 51).

Les survivants ne peuvent pas changer la réalité de ce qui leur est arrivé. Ils ne peuvent pas arracher l'abus sexuel de leur vécu personnel. Ils peuvent cependant changer les rapports qu'ils entretiennent avec cette histoire et modifier les effets que ces événements ont sur leur vie.

Pour que le changement personnel soit authentique et intégré à la vie du survivant, il doit disposer de beaucoup de temps pour explorer et mettre à l'essai d'autres comportements. Les personnes qui ont contribué à la recherche ont généralement travaillé avec leurs clients pendant au moins un an et souvent beaucoup plus longtemps pour les aider à effectuer des changements importants et durables.

Tous les problèmes des survivants ne sont pas liés à leur expérience d'abus sexuel dans l'enfance. D'autres traumatismes ont aussi leur rôle à jouer. Les thérapeutes doivent faire preuve de discernement dans leur diagnostic. lis doivent veiller à ne pas trop simplifier les choses et à ne pas attribuer les problèmes des clients uniquement à leur traumatisme sexuel si cela n'est pas exact.

La thérapie à l'intention des survivants de l'abus sexuel a bien des aspects. Il s'agit, entre autres, de réduire le sentiment d'isolement du survivant, de l'aider à exprimer ses émotions, de remettre en question ses distorsions intellectuelles, de normaliser son expérience et de le mettre au courant des processus liés à l'abus sexuel (Briere, 1989). Il est également important de nourrir sa spiritualité (au sens le plus général du terme) et de ranimer son espoir. A la fin du voyage, le survivant a pris conscience du fait que « [...] il est un adulte qui peut prendre soin de lui-même mieux qu'on a pris soin de lui quand il était enfant » (Dimock, 1988, p. 217). PRINCIPES DE BASE DU TRAITEMENT DES SURVIVANTS

Les personnes qui ont contribué à cet ouvrage sont des thérapeutes expérimentés qui ont des connaissances à la fois pratiques et théoriques sur le travail avec les survivants. Elles sont représentatives d'une vaste gamme d'orientations théoriques, notamment les systèmes familiaux, la thérapie féministe, les processus de reconstruction de l'intellect et du comportement, l'hypnose et l'approche psychodynamique.

Toutes les personnes qui ont contribué à la recherche sont éclectiques dans la façon dont elles abordent leur travail avec les survivants. Bien que certaines d'entre elles accordent la préférence à un modèle théorique particulier, aucune n'utilise une seule base théorique. Elles conviennent toutes qu'il est plus important d'utiliser un modèle théorique qui soit adapté au client et à la façon dont il présente ses problèmes que de rester à tout prix fidèle à une théorie. Si, par exemple, un client est très intellectuel dans la façon dont il présente les choses, elles proposent de commencer par utiliser une orientation théorique, comme la restructuration de l'intellect, parce que c'est ce qui lui convient le mieux pour le moment. On attendra, pour utiliser des modalités thérapeutiques davantage basées sur les affects, comme la thérapie gestalt ou le psychodrame, que le client soit capable d'éprouver ses émotions sans trop de difficultés.

Malgré les différences entre leurs orientations théoriques, les personnes qui ont contribué à la recherche reconnaissent toutes que les facteurs suivants constituent des éléments clés d'une thérapie réussie avec les survivants.

Validation

Toutes les personnes qui ont contribué à la recherche conviennent que l'aide dispensée aux clients pour leur permettre de récupérer leur pouvoir personnel constitue une composante majeure du traitement réussi de l'abus sexuel. Il est essentiel de reconnaître les points forte du client et de valider ses aptitudes à la survie, qu'elles soient ou non fonctionnelles dans son contexte de vie actuelle. La seule présence d'un survivant dans le bureau d'une ou d'un thérapeute est une prouve vivante qu'il a ce qu'il faut pour transcender l'impact de l'abus sexuel. Quelle que soit la nécessité où il se trouve de transformer ses stratégies de survie en processus mieux adaptas, il faut qu'il reconnaisse que son niveau d'aptitudes actuel lui a permis de survivre jusqu'ici.

Thérapie axée sur le client et dispensée au rythme du client

Les thérapeutes et les clients doivent travailler ensemble à la résolution des problèmes des clients en rapport avec l'abus sexuel. Les thérapeutes qui se placent en position d'autorité dans la relation thérapeutique créent un risque de transfert de l'expérience initiale d'abus où l'agresseur utilisait son pouvoir sur la victime. Bien que ce transfert puisse éventuellement être résolu de façon constructive, il menace à court terme l'établissement de la relation thérapeutique. Le stress que cela impose aux thérapeutes comme aux clients est inutilement éprouvant et va à l'encontre de l'objecta recherché.

Cela ne signifie pas que le personnel clinique ne doive pas utiliser les compétences et les connaissances qui peuvent faciliter la guérison des clients. Mais le processus thérapeutique doit se dérouler dans un cadre où les thérapeutes agissent à titre d' « experts-conseils » auprès de leurs clients et où les clients sont des « consommateurs » informés qui décident des services qu'ils désirent « acheter ».

[...] le client est l'autorité en ce qui concerne le traumatisme subséquent à l'abus et c'est lui qui sait ce qui semble lui faire du bien et si la thérapie progresse comme elle le devrait [...]. (Briere, 1989, p. 59)

Non seulement le survivant est l'expert en ce qui concerne son expérience d'abus sexuel mais il est également responsable de son processus de guérison. Les thérapeutes peuvent faciliter le rétablissement des clients mais ils ne peuvent pas en assumer la responsabilité. Les clients et les thérapeutes doivent tous deux reconnaître clairement qui est responsable d'apporter des changements dans la vie du client. Si cela n'est pas clair, les clients risquent de rester dans une position de victimes qui ne prennent pas leur vie en charge tandis que les thérapeutes risquent de se transformer en sauveteurs ou en persécuteurs.

Lien entre le cassé et le présent

Beaucoup de survivants ne sont pas conscients des rapports entre leur expérience d'abus sexuel quand ils étaient enfants et les problèmes auxquels ils font face dans leur vie adulte. Parce qu'ils ont soit réprimé leurs souvenirs de l'abus, soit nié Inexpérience et déclaré qu'elle n'avait pas eu d'effet sur eux, ils n'ont pas de contexte pour comprendre leur comportement actuel. Cela les laisse souvent avec un sentiment d'anormalité ou de honte. Lorsque les symptômes sont vus comme « une adaptation créative à des circonstances extrêmement négatives plutôt que comme une expression de psychopathologie » (Courtois, 1991, p. 50), les survivants peuvent commencer leur trajet personnel vers la guérison.

À mesure que les survivants retrouvent leurs souvenirs et expriment leurs affects réprimés, ils peuvent commencer à comprendre et à modifier leurs tendances dysfonctionnelles. Lorsqu'ils se rendent compte que tout leur comportement a du sens, ils peuvent commencer à décoder leur expérience plutôt qu'à la désavouer ou à la juger. Les épisodes soi-disant « psychotiques » de certains survivants ne sont pas autre chose que des flashbacks dus au stress post-traumatique ou des expressions de personnalité multiple. Un client qui se voit comme un survivant qui présente des symptômes connus pour être liés à l'abus sexuel plutôt que comme un malade mental dont le seul espoir est dans les médicaments aura plus de chances d'apporter des changements positifs dans sa vie. Cela ne signifie pas que certains survivants n'auront pas besoin de psychotropes ou d'hospitalisation. Cependant, en général, le sentiment de normalité que les survivants retrouvent lorsque leur comportement présent est relié aux événements passés facilite le processus de rétablissement.

Modèle de croissance et d'apprentissage

Les personnes qui ont contribué à la recherche conviennent que les survivants doivent être invités à participer au processus thérapeutique en partant du principe que « Nous faisons tous tout le temps tout ce que nous pouvons. » C'est parce qu'il manque de compétences, qu'il est submergé par ses émotions ou par la confusion de sont état intérieur que le survivant réagit d'une façon non appropriée ou dysfonctionnelle aux événements de sa vie présente. Pour changer ces réponses mésadaptées, il doit acquérir de nouvelles compétences, prendre conscience de ses processus internes et mieux les comprendre et savoir reconnaître ses états émotionnels.

Le remplacement des tendances et des croyances maladaptées par des tendances et des croyances fonctionnelles et l'intégration de ces changements dans un milieu encourageant constituent des éléments essentiels du processus de rétablissement. La plupart des défis auxquels les clients doivent faire face dans leur vie ne se présentent pas au cours des séances de thérapie. Les clients ont besoin de soutien pour transférer l'apprentissage acquis au cours du processus thérapeutique dans leur vie quotidienne. Les thérapeutes doivent aider les clients à mettre en place les structures qui leur permettront d'ancrer leur croissance psychosociale pour qu'elle devienne un comportement habituel.

Intégration

La guérison de l'abus sexuel consiste en partie à reprendre possession de certaines parties du moi qui ont été perdues ou bloquées. Les survivants ont besoin qu'on leur dise : « Il t'est arrivé des choses mauvaises. Ce n'est pas toi qui étais mauvais. » Il arrive souvent qu'à l'époque de l'abus sexuel, du lait de son immaturité intellectuelle, affective et physique, l'enfant ait décidé qu'il était victime d'abus parce qu'il le méritait. Il a conclu qu'il était lui-même responsable de l'abus. Il a pensé que des parties honteuses ou dangereuses de son être avaient provoqué sa victimisation. Il a alors inconsciemment réprimé ou dissocié ces parties honteuses ou dangereuses dans un effort mal avisé pour retrouver sa normalité. Ces parties dévaluées du moi ont été exclues de la conscience mais vont réapparaître plus tard sous forme inconsciente.

La plupart des survivants ont besoin de reprendre possession des parties dévaluées d'eux-mêmes et de les intégrer. Les hommes qui nient ou qui répriment leur expérience de victimisation et présentent cependant des symptômes liés à l'abus sexuel comme la toxicomanie ont besoin de prendre conscience du fait qu'ils ont des besoins internes complexes et parfois conflictuels. lis ont besoin de reconnaître que, tout en ayant une persona adulte, ils portent également en eux un enfant interne blessé qui peut continuer à poser des problèmes quel que soit leur âge chronologique. C'est lorsque les différentes parties de son moi entrent en communication les unes avec les autres et qu'aucune partie n'est plus dévaluée ni ignorée que le survivant commence à retrouver santé et équilibre.

Reconnaissance de sa peine

Les survivants ont besoin de reconnaître ce qu'ils ont perdu en conséquence de l'abus sexuel subi dans leur enfance. Ils ont perdu l'innocence de leur enfance lorsque l'abus sexuel a commencé. Leur horloge sexuelle a été mise en marche prématurément. Ils ont souvent perdu leurs relatons intimes avec leur famille. Beaucoup doivent faire face aux conséquences de l'abus sexuel hors du soutien familial. Une partie du processus de guérison pour les survivants consiste à pleurer leurs pertes. Les étapes du déni, du marchandage, de la colère, de la tristesse et de l'acceptation font partie du parcours du survivant vers la guérison (Hunter, 1990a).

Sécurité

Dans la théorie du développement d'Erickson, la confiance constitue la première étape du développement psychosocial. Cette étape sous-tend toutes les autres et constitue la base de la croissance psychosociale. Or, par définition, la confiance du survivant dans les autres a été violée. Que le moyen utilisé ait été la séduction ou l'agression, le survivant a été violé par un autre être humain. Lorsqu'un survivant entame une thérapie, il apporte son manque de confiance dans les autres avec lui.

Au début du traitement, il faut gagner la confiance des survivants. Pour ce faire, il faut veiller à ce que le processus thérapeutique soit sans danger. Cela signifie qu'il ne faut pas s'attendre à ce que les clients fassent confiance à la thérapie ou à la personne qui la dispense tant que cela ne leur vient pas naturellement. C'est cependant à chaque client d'identifier ce dont il a besoin pour se sentir en sécurité dans le processus thérapeutique. Les thérapeutes aident les clients en les invitant avec douceur mais avec persistance à exprimer ces besoins. Par ailleurs, en discutant ouvertement du contrat et des règles thérapeutiques, on accroît la sécurité du processus. (Ces questions seront reprises en détail au chapitre 4.)

Reconnaissance que l'abus est à la lob personnel et culturel

Bien que l'abus sexuel soit une expérience personnelle, il est intrinsèquement lié à des forces culturelles plus vastes. L'analyse des forces culturelles et politiques à l'origine de l'abus sexuel ne fait généralement pas partie de la thérapie. Cependant, il est impossible d'examiner les réactions d'un client à l'abus sexuel sans reconnaître que les clients et les thérapeutes sont tous deux membres d'une culture qui permet la violence et l'exploitation sexuelle.

Il est encore plus important d'aborder les questions culturelles et sociales lorsque la victimisation due à l'abus sexuel vient s'ajouter à d'autres types de victimisation comme la discrimination raciale, les préjugés homophobes ou la pauvreté. Dans ce cas, les problèmes de la victime sont souvent le résultat complexe de processus de victimisation concomitants et doivent être traités thérapeutiquement comme tels.

Une partie du traitement des survivants consiste à démonter divers mythes sociaux concernant l'abus sexuel. Beaucoup de ces mythes sont liés à la façon dont le survivant voit sa masculinité ou aux questions qu'il se pose sur son orientation sexuelle. La démythification exige que l'on examine les valeurs culturelles et les attentes de la société. Une thérapie réussie passe par la compréhension de la façon dont les forces sociales ont été intériorisées et intégrées au moi du survivant. Souvent, en conséquence directe ou indirecte de la thérapie, les survivants réexaminent les valeurs sociales et culturelles du milieu qui les entoure. Cela les rend plus libres d'accepter pleinement les réalités de leur propre vie, y compris leur victimisation.

Transfert et contre-transfert

Les survivants de l'abus sexuel, comme les autres clients, ont tendance à interpréter et à façonner leur expérience thérapeutique en fonction de ce qu'ils croient. Si un client pense que tous les hommes sont sexuellement inadaptés ou que personne ne pourra jamais l'aider, il apportera ces croyances avec lui dans le processus thérapeutique et il cherchera inconsciemment à utiliser la ou le thérapeute pour confirmer ces convictions venues de l'enfance.

Pour pouvoir intervenir adroitement, les thérapeutes doivent être conscients des dynamiques de transfert et de contre-transfert. Les thérapeutes ont souvent des problèmes personnels non complètement résolus qui coïncident avec ceux de leurs clients. Dans ces circonstances, il est facile de réagir de façon personnelle aux problèmes ou aux appels au transfert des clients. Ceci n'est pas bon. Les thérapeutes doivent au contraire chercher à comprendre avec les clients d'où viennent leur façon de voir le monde et leurs modes d'interaction avec les autres. On n'insistera jamais assez sur l'importance d'une bonne supervision pour aider les thérapeutes à gérer avec succès les dynamiques de transfert et de contre-transfert.

Les personnes qui ont contribué au présent ouvrage ont également noté que certaines positions thérapeutiques sont nuisibles lorsque l'on travaille avec des survivants.

Les survivants n'ont pas besoin que leurs thérapeutes soient des modèles de perfection. En conséquence de leur enfance douloureuse, les survivants ont souvent des fantasmes de « rapports parfaits » où ils s'imaginent que tous leurs besoins non satisfaits sont enfin reconnus et comblés. Ces images de perfection sont tout aussi dysfonctionnelles pour établir des relations réelles que les rapports abusifs dont ils ont fait l'expérience dans l'enfance. L'authenticité est une qualité importante dont les thérapeutes peuvent donner l'exemple.

Les thérapeutes doivent respecter leurs propres limitations - « [...] les thérapeutes sont des êtres humains qui font inévitablement des erreurs et qui ne sont pas toujours capables de maintenir le lien d'empathie qui permet de dispenser une aide adéquate » (Briere, 1989, p. 59). Lorsque les thérapeutes reconnaissent honnêtement leurs erreurs et tiennent compte de ce que ces erreurs leur ont appris dans leur travail subséquent avec les clients, ils présentent à ceux-ci un modèle d'apprentissage par tâtonnements qui les aide à reconnaître leurs propres limites humaines.

Les thérapeutes qui ont appris au cours de leur formation à se présenter aux clients comme un « écran vide » doivent modifier cette attitude lorsqu'ils travaillent avec des survivants. Le client risque de percevoir une position neutre comme un manque d'attention à sa souffrance ou comme un jugement de son expérience et cela peut provoquer chez lui des sentiments de confusion, de peur et d'isolement. Les survivants ont besoin d'établir une alliance thérapeutique psycho-éducationnelle où les réponses des thérapeutes les aident à valider leur expérience et à dépasser ses effets négatifs. Les thérapeutes qui travaillent avec des survivants doivent faire ouvertement montre d'empathie, d'acceptation et de soutien.

ÉTAPES DE LA THÉRAPIE - MODÈLE EN QUATRE ÉTAPES

Du point de vue des thérapeutes, la thérapie avec les survivants comprend quatre étapes distinctes. Ce modèle de thérapie en quatre étapes est utile aussi bien à titre de description du processus de guérison des survivants qu'à titre d'instrument analytique de gestion des cas et de planification du traitement.

Les quatre étapes sont les suivantes

· 1 - Rupture du silence
· 2 - Étape de la victime
· 3 - Étape du survivant
· 4 - Étape du combattant

(Dans les chapitres suivants, les interventions sont organisées par rapport à ce modèle en quatre étapes et présentées en fonction de l'étape thérapeutique à laquelle elles sont le mieux adaptées.)

Les étapes seront plus ou moins longues suivant les besoins de chaque client et certaines étapes empiéteront les unes sur les autres. Certains clients resteront longtemps à l'une des étapes qui représentera un plateau dans leur croissance. Il sera parfois bon alors de décider d'arrêter la thérapie pendant un moment. Cependant, de façon générale, chaque étape est associée à des problèmes distincts et exige des compétences différentes de la part des thérapeutes.

À toutes les étapes, le processus thérapeutique doit correspondre aux besoins individuels des survivants. L'identification de l'étape à laquelle se trouve un client peut aider les thérapeutes à diriger adroitement et stratégiquement la thérapie en réponse aux besoins particuliers de ce client.

Avant d'entamer une thérapie axée sur l'abus sexuel, il faut expliquer le processus thérapeutique aux clients. Les clients qui savent à l'avance que la guérison est généralement un processus à long terme plutôt qu'à court terme et que le parcours thérapeutique n'est pas linéaire seront mieux à même de décider s'ils veulent poursuivre. (La question de l'engagement du client est discutée au chapitre 9.) C'est à chaque client de décider quelles ressources (p. ex., temps, argent, etc.) consacrer à sa guérison. En présentant le processus thérapeutique aux clients avec honnêteté et en leur donnant une idée relativement exacte de la longueur du traitement, on les aidera à prendre ces décisions.

On pourra rendre service aux clients en leur proposant un cadre intellectuel qui leur permette de comprendre, le processus de rétablissement. Bien que le modèle en quatre étapes soit relativement abstrait, un client qui pourra identifier l'étape à laquelle il se trouve sera mieux à même de comprendre où il va et à quoi il peut s'attendre. Que les clients soient intéressés ou non, cependant, il est essentiel que chaque thérapeute utilise un cadre pour guider ses interventions. On trouvera ci-dessous une description des différentes étapes du modèle.

Étape 1 - Rupture du silence

La première étape que don franchir un survivant pour se rétablir est de reconnaître qu'il a été victime d'abus sexuel étant enfant. Le recours au soutien des autres pour valider cette expérience et la rupture du silence qui a entouré le secret de l'abus constituent une étape importante de la guérison.

Les survivants prennent conscience du fait qu'ils ont été victimes d'abus sexuel de différentes façons. Pour certains, les souvenirs apparaissent au cours d'une thérapie entreprise pour traiter des problèmes sans rapport avec l'abus lorsqu'ils commencent à se rendre compte que leurs comportements sont le résultat d'un traumatisme sexuel subi dans l'enfance. D'autres n'ont jamais oublié qu'ils avaient été victimes d'abus sexuel mais n'ont pas tenu compte de l'impact de ces événements sur leur vie ou ne les ont jamais considérés comme un abus. D'autres encore se rendent compte tout d'un coup, en regardant un programme de télévision sur l'abus sexuel ou en lisant un livre qui traite de la question qu'ils ont eux-mêmes été des victimes.

Quelle que soit la façon dont elle se produit, la reconnaissance de la victimisation sexuelle est le début du processus de rétablissement des survivants. Certains hommes cherchent immédiatement à se faire aider en allant voir une personne-conseil ou en se joignant à un groupe d'entraide. Beaucoup attendent longtemps avant de partager cette information avec d'autres.

Lorsqu'une ou un thérapeute traite un homme pour d'autres problèmes mais soupçonne des antécédents d'abus à cause des symptômes de son client, elle ou il est éthiquement tenu d'explorer avec lui la possibilité d'un traumatisme subi dans l'enfance. Même si le client nie qu'il y ait eu abus sexuel, la ou le thérapeute doit évoquer la possibilité d'un traumatisme subi dans l'enfance avec les symptômes qui lui sont associés (Courtois, 1991). Il est clair que si le client ne trouve aucune association avec l'abus sexuel, il ne faut pas insister. Mais tant que les symptômes suggèrent un traumatisme subi dans l'enfance, il ne faut pas fermer la porte à cette possibilité.

Il faut parfois du temps pour amener le client à prendre conscience d'un traumatisme subi dans l'enfance et cela suppose qu'un rapport de confiance ait été établi entre thérapeute et client. Le client a aussi parfois besoin de développer certaines aptitudes fondamentales (p. ex., communication, affirmation de soi, gestion de l'anxiété, etc.) avant d'avoir un moi suffisamment fort pour faire face aux réactions émotionnelles qui suivront la reconnaissance de l'abus sexuel.

Certains thérapeutes hésitent à continuer à poser des questions sur l'abus sexuel si leur client ne se souvient pas en avoir été victime. Le « syndrome des faux souvenirs », qui laisse entendre que les thérapeutes créent les souvenirs de leurs clients par des suggestions hypnotiques, fait actuellement l'objet de bien de débats dans les milieux thérapeutiques. Je pense que la crainte de créer de faux souvenirs est moins importante que la nécessité de faire comprendre à un client que ses symptômes suggèrent des antécédents de traumatisme subi dans l'enfance qui peuvent comprendre l'abus sexuel. Tant que cette possibilité ne peut pas être clairement rejetée, la question reste ouverte.

Étape 2 - Étape de la victime

L'objectif premier de cette étape de la thérapie est de valider les antécédents d'abus sexuel du client, d'établir un rapport thérapeutique sans danger avec lui et de lui donner des renseignements sur les effets de l'abus sexuel sur les victimes. À moins que le client n'ait des flashbacks intenses ou d'autres problèmes affectifs pressants, une grande partie du travail effectué à cette étape consiste en une prise de conscience intellectuelle.

Les hommes ont souvent besoin qu'on les aide à reconnaître leur victimisation. Même s'ils peuvent se souvenir que des événements sexuellement importuns leur sont arrivés, beaucoup ne considèrent pas qu'il s'agissait d'abus sexuel. En parlant aux clients des rapports de pouvoir, de la coercition, de la fausse représentation de la réalité adulte, de l'utilisation de la menace et du mensonge pour obtenir ce qu'on veut, on peut les aider à prendre pleinement possession de leur expérience.

À cette étape, il est important de trouver le juste milieu et de ne pas s'éloigner du matériel en rapport avec l'abus sexuel sans pour autant pousser le client hors de sa zone de confort. Si les choses deviennent trop intenses ou si le client a l'impression que la ou le thérapeute cherche à contrôler le processus thérapeutique, il risque de se fermer devant cette répétition de la dynamique de l'abus sexuel.

Dans la mesure où ses souvenirs le lui permettent, le client sera invité à élaborer une « histoire de l'abus sexuel dont il a été victime » au cours de cette étape de la thérapie. Les secteurs à explorer sont les souvenirs de la façon dont il a été préparé à l'abus, qui a perpétré l'abus, combien de fois il a été perpétré, ce qui est exactement arrivé, quelles ont été ses réactions à l'époque, s'il en a parlé à quelqu'un ou non et s'il a pris plaisir à l'expérience. Le plus important, à cette étape thérapeutique, est de parier ouvertement de l'abus sexuel et de continuer à contester tout démenti de l'expérience.

Les clients qui se sont défendus contre le souvenir de l'abus sexuel en s'adonnant à la toxicomanie ou à en adoptant des conduites obsessionnelles se trouvent en quelque sorte devant une « impasse » - s'ils continuent à s'adonner à leur manie, ils ne peuvent pas assumer comme il se doit leur passé d'abus sexuel; s'ils abandonnent leur manie, ils sont souvent submergés par des souvenirs et des sentiments incontrôlables qui peuvent conduire à la rechute. Les thérapeutes doivent suivre de près les comportements obsessionnels à cette étape de la thérapie.

Si un client n'est pas encore prêt à abandonner une manie, on peut l'aider en lui recommandant d'autres moyens de faire face à son anxiété avant de commencer à examiner ses antécédents d'abus sexuel. Des rechutes occasionnelles sont à prévoir pour ce type de client - cependant, lorsque la manie continue à être utilisée comme une stratégie de défense primaire, la thérapie liée à l'abus risque d'être nuisible et est généralement contre-indiquée.

Les thérapeutes doivent apprendre aux clients comment gérer leur stress et prendre soin d'eux-mêmes pendant cette étape pour qu'ils disposent, lorsque la thérapie prendra une orientation plus affective, de moyens fonctionnels pour faire face à leurs émotions. À la phase de la victime, il faut s'assurer que les clients ont à leur disposition des systèmes de soutien actifs ou s'arranger pour en mettre en place.

À cette étape, les clients ressentent généralement un certain soulagement émotionnel lorsqu'ils comprennent que les problèmes auxquels ils font face dans leur vie ne viennent pas du fait qu'ils sont anormaux mais sont le résultat de l'abus sexuel dont ils ont été victimes dans leur enfance. À mesure qu'ils comprennent le processus de dissociation et d'autres stratégies de défense, ils commencent à se sentir plus normaux et à reprendre espoir dans l'avenir.

Le client passe de l'étape de la victime à l'étape du survivant lorsqu'il est capable de tenir l'agresseur comme pleinement responsable de l'abus sexuel. Lorsque le client reconnaît qu'il a été victime d'un rapport abusif et que l'abus sexuel qu'il a subi n'est pas une réflexion de sa valeur en tant que personne mais des problèmes non résolus de l'agresseur, il passe à l'étape suivante de la thérapie.

Étape 3 - Étape du survivant

L'étape du survivant décrit le travail souvent ardu qui consiste à réparer les dysfonctions émotionnelles, intellectuelles et comportementales des clients. C'est une étape caractérisée par un mouvement de « va-et-vient ». Les comportements désadaptés sont lentement remplacés par des comportements fonctionnels à mesure que le client prend le risque d'utiliser de nouvelles stratégies. La clé du succès, pendant cette étape de la thérapie, est de trouver le juste milieu entre le contrôle et l'expression des émotions et d'établir un équilibre viable entre les deux.

Les clients se découragent souvent au cours de cette étape. Parce qu'ils reprennent possession de processus affectifs précédemment bloqués, ils sont davantage conscients de leurs sentiments de peur, de souffrance, de rage ou de tristesse. Ils éprouvent une impression d'instabilité tandis qu'ils abandonnent leurs vieilles méthodes de défense et les remplacent par de nouvelles stratégies auxquelles ils sont encore peu habitués et qui ne sont pas faciles à utiliser. Ils ont le sentiment que la thérapie leur fait plus de mal que de bien. Beaucoup de clients mettent fin prématurément à la thérapie à cette étape parce qu'ils perdent l'espoir de pouvoir jamais changer de façon significative.

À cette étape de la thérapie, les thérapeutes doivent rester fermes et ne pas perdre de vue l'objectif visé. Ils doivent rappeler aux clients qu'il faut s'attendre à des moments de découragement à l'étape du survivant. L'enthousiasme initial associé à la reconnaissance de l'abus sexuel a perdu de sa force et une certaine fatigue s'installe. Les thérapeutes doivent cependant continuer à aider les clients à identifier leurs sentiments et à remettre en question leurs erreurs de jugement et leurs croyances erronées. Pendant toute cette étape, les thérapeutes doivent rendre hommage à la force et au courage des clients. En validant les difficultés et les souffrances associées à cette étape du travail thérapeutique et en reconnaissant les changements positifs effectués jusqu'ici, les thérapeutes remettent les choses en perspective, ce qui facilite la guérison des clients.

L'étape thérapeutique du survivant est marquée par des tâches thérapeutiques particulières. C'est le moment de l'identification des réactions affectives et du travail sur les émotions. Il s'agit, pour les clients, de reconnaître toute une gamme de sentiments et de chercher des moyens de les exprimer. Cela fait peur et prend du temps. Cependant, à mesure que les survivants se familiarisent avec des émotions préalablement dissociées, ils commencent à éprouver un sentiment d'intégrité et de bien-être. C'est aussi l'étape où l'on travaille sur les tendances intellectuelles et comportementales dysfonctionnelles. Les erreurs de jugement et les comportements voués à l'échec sont identifiés et remplacés par des substituts plus sains. Les clients apprennent à utiliser de nouvelles stratégies pour parvenir à l'autonomie.

Tout au long de l'étape du survivant, les nouvelles compétences doivent être mises en pratique en dehors des séances thérapeutiques. Les séances peuvent comprendre à la fois des processus spontanés et des processus abréactifs planifiés. (On discutera du travail avec les abréactions au chapitre 6.) Il arrive que les clients aient besoin de cesser la thérapie pendant un moment pour intégrer ce qu'ils ont appris avant de poursuivre.

Le client passe de l'étape du survivant à l'étape du combattant au moment où il reprend possession de son pouvoir personnel. Cela se manifeste souvent par le fait que le client est prêt à confronter la personne qui l'a agressé, soit en réalité soit, plus souvent, symboliquement. Il ne s'agit pas d'un geste de défi vis-à-vis de l'agresseur. Il s'agit plutôt de l'intégration d'un changement qui fait que le client ne ressent plus l'agresseur comme ayant un pouvoir sur sa vie.

Étape 4 - Étape du combattent

Lorsque le client arrive à l'étape du combattant, il reprend espoir. Valorisé par le fait qu'il a réussi à changer certaines de ses tendances dysfonctionnelles passées, il peut parier de la façon dont il a été influencé par l'abus dont il a été victime. il comprend que la marque d'une thérapie réussie n'est pas de « vivre heureux pour toujours » mais de disposer des aptitudes et des ressources dont on a besoin pour faire face aux difficultés de l'existence.

Le combattant est responsable de sa vie et sait qu'il a le choix entre afférentes options pour faire face à ses problèmes de vie, à la fois passés et présents. L'abus n'est plus vu comme un problème central dans l'auto-identification du client. Son image de lui-même s'est déplacée vers le présent et il fait confiance à son moi adulte.

C'est à l'étape du combattant que les clients et les thérapeutes doivent entamer le processus de cessation de la thérapie. Il faut permettre aux clients de mettre fin au processus thérapeutique à leur propre rythme. Il faut aussi insister sur le fait que les clients sont toujours invités à revenir en thérapie en cas de résurgence de leurs symptômes ou d'apparition de nouveaux souvenirs de l'abus sexuel.

Il faut veiller à ne pas compromettre les frontières entre clients et thérapeutes en permettant à une relation double de s'établir. Les clients ont besoin que leur thérapeute reste à leur disposition pour des consultations possibles à l'avenir. Toute relation double, comme cela se produit lorsqu'une ou un thérapeute devient ami, amant, propriétaire ou associé d'un client, compromet la sécurité du rapport thérapeutique. Il y a un risque de relation double lorsque le thérapeute est lui-même un survivant qui a besoin du soutien social d'autres survivants relativement « guéris » ou lorsqu'un client en cours de guérison est vu comme un allié professionnel qui peut aider à dispenser d'autres services à des survivants qui en ont désespérément besoin.

CHAPITRE 4 - CONSIDÉRATIONS THÉRAPEUTIQUES GÉNÉRALES

Ce chapitre décrit certains processus communs à toutes les modalités de traitement de l'abus sexuel. On y discute en détail des contrats thérapeutiques ainsi que des méthodes d'évaluation de la situation initiale et des progrès. On y identifie également les comportements et les circonstances qui constituent une contre-indication à la thérapie axée sur l'abus.

Toutes les modalités psychothérapeutiques primaires - traitement individuel, travail de groupe, travail en couple et thérapie familiale - peuvent être utilisées pour traiter les effets de l'abus sexuel subi dans l'enfance. Pour les survivants adultes, le traitement individuel et le travail de groupe sont généralement considérés les thérapies les plus efficaces.

Tout en reconnaissant que les thérapeutes doivent toujours faire preuve de flexibilité et s'adapter aux besoins de chaque client, les personnes qui ont contribué à la recherche sont tombées d'accord sur le fait que la meilleure façon de s'occuper des survivants est généralement de commencer par une thérapie individuelle et de passer ensuite à une thérapie de groupe avec travail individuel parallèle au besoin. Le travail en couple ou en famille peut être utilisé comme un ajout réguler au processus thérapeutique s'il contribue au rétablissement du client. Le travail axé sur le corps peut aussi constituer une addition utile au processus de guérison, surtout pendant l'étape du combattant.

Les personnes qui ont contribué à la recherche ont tout de suite remarqué qu'il faut faire la différence entre la situation idéale et ce qui est possible en termes de services aux survivants. Ce sont souvent les circonstances qui dictent les réalités auxquelles les clients et les thérapeutes doivent faire face. Un grand nombre des choix thérapeutiques des clients sont déterminés par des considérations d'ordre financier plutôt que par leurs besoins. Certaines régions géographiques ont des ressources cliniques limitées et le traitement individuel est le seul type de thérapie disponible. Ailleurs, le traitement de groupe est possible mais il n'y a pas suffisamment de thérapeutes individuels.

Certains aspects de la thérapie sont communs à toutes les modalités thérapeutiques. L'établissement d'un contrat thérapeutique, l'identification des problèmes qui constituent une contre-indication à la thérapie, l'évaluation minutieuse de la situation initiale et des résultats thérapeutiques constituent des composantes essentielles de la thérapie, quelle que soit la modalité utilisée. Ce sont ces composantes générales de la thérapie qui sont présentées ci-dessous.

ÉTABLISSEMENT D'UN CONTRAT THÉRAPEUTIQUE

L'abus sexuel et la thérapie sont tous deux des processus interpersonnels. Compte tenu de cette similitude, il est essentiel que la thérapie se déroule dans un contexte d'intégrité éthique et clinique si l'on veut qu'elle ait des effets positifs et non négatifs. Les clients comme les thérapeutes ont besoin de directives claires sur les aspects relationnels de la thérapie. Le contrat thérapeutique permet de clarifier les rôles et les règles du processus thérapeutique. La thérapie n'étant pas un processus statique, le contrat doit être renégocié au fur et à mesure que progresse le traitement. L'établissement d'un contrat thérapeutique est pour beaucoup de survivants l'occasion de parier de leurs besoins.

Les contrats thérapeutiques peuvent être écrits ou oraux. Cela dépend du style personnel de chaque thérapeute et de chaque client. Il arrive souvent que les aspects formels de l'accord (fourchette des prix, heure des séances, etc.) soient écrits alors que les aspects non structurés et spontanés du traitement (comment travailler avec un problème particulier) font l'objet d'une négociation verbale. Un contrat thérapeutique écrit pourra s'avérer particulièrement utile pour les clients qui présentent une dissociation grave. Ce sera quelque chose de tangible à quoi se référer s'ils ne peuvent pas se souvenir de ce qui s'est passé pendant une séance.

Certains thérapeutes utilisent le système de contrat pour donner à leurs clients des renseignements sur la façon dont ils travaillent. Certains thérapeutes, par exemple, préviennent explicitement leurs clients qu'ils n'auront pas de rapports sociaux ni sexuels avec eux et n'assumeront pas de rôle double. Ils disent aux clients que c'est à eux de déterminer le rythme et la durée du processus thérapeutique. Ils donnent explicitement aux clients la permission de remettre en question toute interaction qui s'avère pénible, difficile à comprendre ou peu claire afin qu'ils aient toujours la possibilité de réexaminer le processus thérapeutique. Ilspeuventdécrirebrièvementleurstylethémpeutiquepourdonnerauxclients la possibilité d'agir en consommateurs informés lorsqu'ils choisissent leur thérapeute.

Il est rassurant pour les nouveaux clients de passer du temps à mettre au point un contrat thérapeutique. Un contrat clair signifie que l'on dispose de directives concernant les comportements et les actions à venir et évite d'avoir des problèmes plus tard. On trouvera ci-dessous une description des éléments clés à discuter lorsqu'on établit un contrat thérapeutique.

Frontières de la confidentialité

Il faut assurer aux clients que le processus thérapeutique est confidentiel et que la ou le thérapeute respectera leur histoire personnelle. Les clients doivent également savoir, cependant, que s'ils se font du mal ou qu'ils font du mal aux autres (y compris à la ou au thérapeute) ou s'ils se montrent violents avec leur entourage, la confidentialité thérapeutique cessera de prévaloir. Les thérapeutes doivent être informés des aspects légaux du signalement des mauvais traitements et ils doivent partager ces informations avec leurs clients lorsque cela s'avère nécessaire. Las clients doivent savoir que, s'ils donnent des renseignements sur des situations actuelles d'abus sexuel ou sur des agresseurs qui ont accès à de jeunes enfants, la police et les organismes de bien-être de l'enfance devront en être informés. Les considérations de sécurité l'emportent toujours sur la confidentialité.

Comme l'abus sexuel se produit dans le secret, certains clients ressentent de l'anxiété devant la confidentialité thérapeutique. lis auront peut-être besoin de réexaminer les frontières de la confidentialité en détail pour s'assurer que la thérapie ne répétera pas l'abus sexuel. Les clients qui ont peur de ne pas pouvoir contrôler le processus thérapeutique sont souvent rassurés par des questions comme « Comment me préviendrez-vous si la thérapie va dans une direction qui ne vous fait pas de bien? ».

Honoraires

Les clients ont besoin d'avoir des renseignements clairs sur le prix que demandent l'es thérapeutes pour leurs services et sur la façon dont ils s'attendent à être payés. Les thérapeutes doivent s'expliquer clairement sur la flexibilité dont ils sont prêts à faire preuve en matière de paiement. L'établissement de politiques claires constitue une aide aussi bien pour les thérapeutes que pour les clients.

Structure des séances

Il faut informer les clients de la durée et de la fréquence des séances. Bien que ces éléments soient parfois renégociés en fonction des circonstances, l'établissement de frontières claires en matière de temps est un moyen important de différencier la thérapie de l'abus sexuel.

Limites des contacts physiques

Il est impératif que ce soient les clients qui contrôlent quand et comment ils sont touchés au cours de la thérapie. Chaque client doit toujours fixer ses propres limites en matière de contact physique. Au cours de l'abus sexuel, la victime n'avait pas de contrôle sur la façon dont elle était touchée. Les thérapeutes doivent veiller à ne pas répéter cette expérience pendant les séances de thérapie. Même des rituels sociaux habituels, comme la poignée de main, ne doivent se produire que s'ils sont amorcés par le client.

De même, chaque thérapeute doit veiller à ce que sa propre zone de confort en ce qui concerne les contacts physiques ne soit pas menacée. Si un client demande qu'on le prenne dans ses bras mais que ce contact met le thérapeute mal à l'aise, celui-ci doit le reconnaître et respecter ses frontières personnelles. Ce comportement présentera au client un modèle positif de respect des limites en matière de contacts physiques.

Crises et plans en ces d'urgence

Avant de commencer une thérapie, les clients doivent être informés du type de soutien qu'ils recevront de leur thérapeute en dehors des séances planifiées. Les clients ont besoin de savoir quelles sont les limites de leur thérapeute en ce qui concerne l'accès par téléphone et s'ils peuvent bénéficier, le cas échéant, de séances d'urgence non prévues. Lorsque les thérapeutes partent en vacances, les clients ont besoin de savoir s'ils se sont arrangés pour qu'une autre personne prenne la relève en cas d'urgence.

La planification d'une stratégie en cas de crise peut réduire le niveau d'anxiété des clients. Si un client devient si autodestructeur qu'il doit être hospitalisé pour sa sécurité personnelle, il acceptera plus facilement cette décision s'il a préalablement reconnu ses mérites. L'élaboration de plans en cas d'urgence avec les clients constitue un préalable utile avant d'entamer la thérapie.

Certains thérapeutes donnent à leurs clients un prospectus qui décrit leurs politiques et leurs façons de procéder. Ceci peut réduire le temps passé à communiquer ces renseignements et donne aux clients quelque chose de concret à quoi se référer.

CONTRE-INDICATIONS

Pour qu'une thérapie axée sur l'abus sexuel constitue une guérison plutôt qu'un nouveau traumatisme, les clients doivent être prêts à faire face à leur victimisation sexuelle et les thérapeutes doivent avoir suffisamment de compétences pour garantir que la thérapie produira un rajustement émotionnel. Il faut bien choisir son moment lorsque l'on offre ce type de traitement. On trouvera ci-dessous certaines des misons principales pour lesquelles une thérapie axée sur l'abus sexuel est parfois contre-indiquée.

État de crise

Si un survivant est en plein état de crise, le travail intensif sur le traumatisme passé ne fera généralement qu'exacerber son instabilité présente. Les clients qui ont du mal à garder un emploi ou à gagner suffisamment d'argent pour satisfaire leurs besoins fondamentaux ou qui sont en rupture de couple ne sont pas de bons candidats pour la thérapie axée sur l'abus sexuel. Ils doivent résoudre ces problèmes plus immédiats avant de commencer à travailler sur l'abus.

Les clients qui sont activement violents ou qui se trouvent dans une situation d'abus doivent s'occuper de ces tendances pour pouvoir les dépasser avant de s'attaquer aux causes plus profondes de leur comportement. Les survivants suicidaires ou psychotiques doivent régler ces problèmes de santé mentale avant de se concentrer sur leur victimisation.

Les clients qui présentent un comportement obsessionnel ou une toxicomanie ne sont pas de bons candidats à une thérapie axée sur l'abus sexuel tant qu'ils n'ont par, adopté de stratégie de défense émotionnelle plus saine. Bien que certains thérapeutes acceptent de travailler avec ces clients après six mois seulement d'abstinence, la plupart de ceux qui travaillent avec des ex-toxicomanes suivent la règle d'« une année sans alcool et sans drogues ».

Manque de soutien social

Si un survivant est très isolé, la thérapie doit viser l'acquisition d'aptitudes sociales et l'établissement d'une communauté de soutien avant de passer au processus d'abus sexuel. Il n'est bon ni pour les thérapeutes ni pour les clients que les thérapeutes soient l'unique source de soutien dans la vie des clients. Le manque de soutien social renforce les croyances dysfonctionnelles des clients. Il confirme l'image qu'ils ont d'eux-mêmes comme ne méritant pas l'attention d'autrui et leur conviction que leurs expériences de victimisation sont trop honteuses pour être partagées avec d'autres.

La thérapie ne constitue qu'une petite partie de la vie des clients. Les clients ont besoin d'attention et d'amitié aussi bien dans leur communauté naturelle que dans le cadre de la thérapie. Beaucoup de clients suivent des programmes en douze étapes pour trouver des formes nouvelles de soutien social. Les relations humaines, thérapeutiques aussi bien que sociales, constituent une composante importante du processus de guérison.

Manque de motivation

Certains clients commencent une thérapie parce que d'autres personnes pensent que cela les aiderait. Si un client ne reconnaît pas qu'il a un problème et que certaine aspects de sa vie ne sont pas satisfaisants, il n'a pas le désir de changer. La thérapie axée sur l'abus sexuel dans l'enfance exige un engagement de la part du client. Il devra faire face à des sentiments douloureux de trahison et de perte au cours du processus de rétablissement. Si un client n'est pas décédé à effectuer des changements et à atteindre les objectifs visés par la thérapie, ce n'est pas un bon candidat pour le travail axé sur l'abus sexuel.

Limitation des thérapeutes

Si une ou un thérapeute n'est pas en mesure de travailler avec un client de façon suivie ou ne se sent pas les compétences nécessaires pour faire face aux questions liées à l'abus sexuel, elle ou il devrait recommander le client à quelqu'un d'autre. C'est une expérience très traumatisante pour un survivant qui commence à explorer la possibilité de faire confiance aux autres, nommément à la ou au thérapeute, de voir soudain ce processus menacé parce que son thérapeute change d'emploi ou doit, pour une raison quelconque, mettre fin à la thérapie. Il est évident que des événements non prévus se produiront dans la vie aussi bien des thérapeutes que des clients; cependant, dans la mesure du possible, les thérapeutes doivent respecter les besoins de leurs clients en matière de stabilité et de sécurité et essayer d'éviter de mettre fin prématurément à la thérapie.

Rupture du contrat thérapeutique

Si un client n'est pas prêt à respecter les conditions acceptées du contrat thérapeutique, ce n'est pas un bon candidat au travail axé sur l'abus sexuel. Les clients qui n'assument pas la responsabilité de leur propre comportement, qui menacent la sécurité des autres, y compris celle de leur thérapeute, ou qui rompent régulièrement les accords passés sur l'heure des séances ou le paiement des honoraires doivent régler ces problèmes avant d'ouvrir la porte à leurs expériences de victimisation. Les émotions qui émergent au cours du processus de rétablissement ont tendance à être intenses. Si un client n'est pas prêt à assumer la responsabilité de ses rapports avec lui-même et avec les autres, la thérapie axée sur l'abus sexuel peut s'avérer dangereuse.

ÉVALUATION DU CLIENT

Lorsque l'on procède à une évaluation psychologique avec un survivant de l'abus sexuel ou avec quelqu'un que l'on pense pouvoir être un survivant de l'abus sexuel, il est très important d'insister auprès du client pour qu'il donne des renseignements sur l'abus sexuel et sur ses effets. Si l'on attend que le client parle le premier, on risque de ne jamais aborder le sujet. Si l'on ne pose pas de questions sur l'abus sexuel, le client pourra penser que l'on sanctionne son propre comportement de minimisation et de déni. C'est parce que le client a honte d'avoir été victime d'abus sexuel qu'il entoure l'événement de silence. Il revient aux thérapeutes d'apporter un soutien aux clients et de les encourager doucement mais activement à briser le silence et à faire face à leurs sentiments de honte.

Les thérapeutes ne doivent pas avoir d'idées préconçues sur les expériences d'abus sexuel de leurs clients. Il faut donner aux clients le temps et l'espace nécessaires pour qu'ils racontent leur propre histoire dans leurs propres termes. On peut généralement s'attendre à ce que la plupart des clients dévoilent leur histoire d'abus sexuel par morceaux. Les clients commencent par des révélations partielles pour voir la réaction des thérapeutes avant de se sentir suffisamment en sécurité pour faire une révélation complète. Ce sont habituellement les parties de l'expérience qui font le plus honte aux clients qui sont dévoilées les dernières. Les thérapeutes se trouvent dans une situation délicate où ils doivent inciter les clients à donner des renseignements sur leur expérience tout en évitant toute intrusion psychologique.

Pour que les renseignements soient utiles au diagnostic, les questions posées par les thérapeutes aux fins d'évaluation doivent être spécifiques et formulées d'une façon qui évite tout jugement. Au lieu de demander « Avez-vous des problèmes de sommeil? », posez une question plus ouverte et moins menaçante comme « Quelles sont vos habitudes de sommeil? ». Pour beaucoup de clients, les stratégies de défense dysfonctionnelles sont compatibles avec le moi ou sanctionnées par la culture et n'apparaissent pas comme anormales. Les thérapeutes doivent veiller à ce que les questions soient précises, directes et non menaçantes.

Les histoires de certains clients sont choquantes et très perturbantes et les thérapeutes doivent être prêts à entendre les réponses aux questions qu'ils posent. Les questions sur les pratiques et les habitudes sexuelles, par exemple, qui seraient embarrassantes dans un contexte social, doivent faire partie d'une évaluation complète. Il est essentiel que la ou le thérapeute se sente à l'aise pour interroger le client sur la masturbation, les fantasmes sexuels, les pratiques sexuelles, la colère, la peur et autres questions culturellement délicates ou chargées d'émotions. Si la ou le thérapeute est embarrassé, le sentiment se communiquera au client qui risquera alors de ne révéler que des informations partielles dans un effort pour détendre l'atmosphère.

En général, plus l'évaluation est minutieuse, moins il y aura de surprises au cours de la thérapie. Si, pendant le processus d'évaluation, il devient apparent qu'un client présente une forte dissociation, la ou le thérapeute devra être prêt à travailler avec une personne qui souffre peut-être d'un trouble de personnalité multiple ou d'autres symptômes connexes. La prévisibilité renforce la confiance et la sécurité des clients et le temps passé à effectuer une évaluation minutieuse représente généralement du temps gagné plus tard dans le processus thérapeutique. Certains clients présentent des symptômes associés à l'abus sexuel mais ne se souviennent pas consciemment d'avoir été victimisés. Dans ce cas, des questions générales et ouvertes comme « Je me demande si vous avez été traumatisé dans le passé. Les choses que vous me dites sur vous-même semblent indiquer que vous avez dû apprendre à faire face à des situations très traumatiques » peuvent aider le client. Il est important que les clients qui ont réprimé leurs souvenirs n'aient pas honte de ne pas pouvoir se rappeler leurs expériences et ne soient pas forcés de se souvenir de ce qui s'est passé avant que leur inconscient ne soit prêt à le faire. Les thérapeutes doivent laisser l'histoire de l'abus sexuel venir des clients et ne pas contaminer le processus thérapeutique en attendant des clients qu'ils révèlent des souvenirs prématurément. Lorsqu'un client retrouve des souvenirs réprimés au moment opportun, il fait confiance à sa propre mémoire et ne compromet pas son rétablissement en se posant des questions sur la validité de son expérience.

Si l'on ne comprend pas bien la dynamique d'un client, il faut consulter un collègue en qui l'on a confiance. Le processus d'évaluation pose les fondations du reste de la thérapie. Il est important que les clients ne soient pas sur ou sous-pathologisés en conséquence de ce processus.

Certains secteurs clés doivent être évalués avec un soin particulier. lis sont décrits ci-dessous.

Antécédente généreux familiaux et sociaux

La vie des victimes d'abus sexuel a souvent été également marquée par d'autres événements traumatisants. Il faut procéder à une évaluation sérieuse des antécédents sociaux et familiaux du client pour comprendre les événements et les personnages qui ont marqué sa vie. Il faut évaluer les secteurs problématiques, comme la violence ou le manque de soutien social, mais il faut aussi procéder à un inventaire clair des points forts et des ressources du client. Les qualités et les modes de fonctionnement positifs sont aussi importants que les secteurs problématiques et les traumatismes.

Il faut examiner soigneusement les tendances du survivant dans sa vie présente pour déterminer où il se situe en termes de travail, de rapports avec les autres, de santé, d'aptitudes parentales, etc. Tant que la vie quotidienne d'un client ne fonctionne pas comme il faut, il peut être contre-thérapeutique de se concentrer sur les événements en rapport avec l'abus sexuel.

Antécédente sexuels

Au cours de l'évaluation, les survivants ne sont pas toujours capables de donner des renseignements spécifiques sur leur victimisation sexuelle. Si l'on formule ses questions avec soin, on peut mettre le client plus à l'aise et l'aider à partager ses souvenirs conscients. En disant à un client « Dites-moi ce que vous pensez que je dois savoir sur vos expériences sexuelles quand vous étiez enfant pour comprendre ce qui vous est arrivé », on ouvre parfois la porte à davantage de renseignements qu'en posant une question plus directe parce qu'on réduit ainsi souvent le niveau d'anxiété du client.

Dimock (1988) encourage ses clients à écrire leur autobiographie sexuelle parce que cela leur donne davantage d'intimité ainsi que de sécurité et de contrôle. L'information est ensuite partagée avec la ou le thérapeute au gré du client qui reste en charge du processus de dévoilement. Comme beaucoup de clients ont peur que leur thérapeute ne se transforme en voyeur de leur passé sexuel (comme la personne qui les a agressés), il est très important de réduire le niveau de menace et de honte associé à l'exposé de leur histoire. Dimock suggère d'offrir aux clients un moyen de classer leurs expériences d'abus sexuel. Il donne à ses clients une liste de quatre catégories de comportement sexuel dont chacune est accompagnée de plusieurs exemples. Ce sont :

(a) infractions punissables (relations sexuelles anales et orales, caresses, relations sexuelles, etc.);

(b) enfance passée dans une atmosphère sexualisée (intérêt excessif de la part des membres de la famille pour le voyeurisme et l'exhibitionnisme, présence explicite de pornographie, contacts implicitement érotiques et choses semblables);

(c) comportement importun (punitions sexuelles, intérêt et questions exagérées à l'égard de la sexualité, lavements inutiles, bains sous surveillance au-delà de l'âge raisonnable et application de substances médicamenteuses sur les parties génitales alors que l'enfant pourrait le faire tout seul, etc.); et

(d) rapports déplacés où l'enfant est mis dans une situation d'adulte avec des implications sexuelles (partage régulier du lit d'un parent, rendez-vous d'amoureux, partage d'informations sexuelles avec l'enfant, etc.).

Dans la mesure du possible, l'histoire sexuelle du survivant doit comprendre des renseignements sur les comportements spécifiques associés à l'abus sexuel, les personnes présentes, l'âge du client au moment de l'abus, l'âge de l'agresseur ou des agresseurs, les émotions ressenties et, le cas échéant, les souvenirs sensoriels (goût, odeur, etc.) liés à l'expérience (Dimock, 1988). Si le client a déjà parlé à quelqu'un de l'abus dont il a été victime, il faut l'interroger à ce sujet. Le fait d'avoir été crû ou non, d'avoir été aidé ou non peut influencer la façon dont il s'attend à ce que vous receviez ses révélations.

Stratégies de défense

Il faut demander aux clients de quelles façons, fonctionnelles ou dysfonctionnelles, ils ont fait face aux conséquences de l'abus sexuel. Beaucoup de clients ne sont pas capables de mettre en mots leurs mécanismes de défense. Cependant, c'est souvent les stratégies de défense dysfonctionnelles utilisées par le client qui l'ont amené à commencer une thérapie.

Il faut évaluer les comportements dissociatifs. Il est souvent nécessaire, avant de procéder à une évaluation complète, de parler aux clients des processus de dissociation et de leur faire prendre conscience de la façon dont ils ont recours à ce type de comportement. (On trouvera à l'annexe C une échelle des expériences dissociatives (DES) qui pourra être utilisée pour évaluer les tendances à la dissociation.)

Les survivants présentent souvent des symptômes dominants du système nerveux sympathique comme une tendance exagérée à sursauter et une tension musculaire chronique. Beaucoup de survivants vivent dans un état de peur émotionnelle et d'anxiété chronique. L'équilibre normal entre les systèmes nerveux sympathique et parasympathique est donc perturbé. Les crises d'anxiété, l'irritabilité excessive et l'hypervigilance sont des symptômes courants des survivants de traumatisme sexuel. L'alimentation et le sommeil sont souvent perturbés. Les difficultés à s'endormir ou le réveil au milieu de la nuit, l'incapacité de digérer les aliments ou la perte de poids rapide sont des indicateurs d'un système nerveux sympathique surchargé.

Beaucoup de survivants s'adonnent à des substances toxiques ou à des comportements obsessionnels dans un effort pour masquer leurs sentiments en rapport avec l'abus sexuel. Les problèmes mêmes que les obsessions ont pour objet de couvrir feront surface au cours de la thérapie. Comme le dit Dimock (1988), bien qu'on puisse s'attendre à des recours occasionnels aux comportements obsessionnels au cours de la thérapie, il est difficile de continuer la thérapie si le client s'adonne de façon continue à ces activités.

Perpétration réactionnelle d'abus sexuel

Comme on l'a vu au chapitre 2, certaines victimes, par suite soit d'une identification avec la personne qui les a agressées soit d'un effort inconscient pour comprendre leur propre victimisation, se sont rendues coupables d'abus sexuel envers d'autres. Cette activité doit être évaluée dès le début du traitement. Si un survivant est actuellement un agresseur sexuel ou l'a été dans le passé, il doit être tenu responsable de ses actes. Dans la plupart des instances, les thérapeutes sont obligés par la loi de déclarer toute infraction révélée par leurs clients. Même s'il s'agit d'infractions rares commises pendant l'adolescence du client, celui-ci doit reconnaître cette composante de son comportement et lui faire face en thérapie.

Il peut être difficile de poser des questions sur la perpétration d'abus réactionnelle. Beaucoup de victimes n'ont pas répété leur propre victimisation et seront bouleversées par l'insinuation qu'elles aient pu le faire. Il y a lieu de poser la question adroitement (comme dans l'exemple suivant) : « Il arrive souvent que les victimes d'abus aient envie d'imposer à quelqu'un d'autre ce qu'elles ont subi. Est-ce que cela vous est arrivé? ».

Objectifs du traitement

Les thérapeutes doivent évaluer les objectifs de leurs clients et établir s'ils sont réalistes ou non. Des objectifs bien délimités et concrets sont en général plus utiles que des objectifs plus vastes et plus abstraits. On pourra aider les clients à identifier des objectifs de traitement appropriés en leur posant des questions comme « Quelle est la première petite réussite qui vous indiquera que vous êtes sur le chemin de la guérison? » ou « Qu'est-ce que vous pensez que votre (ami, patron, partenaire, etc.) remarquera à mesure que vous vous rétablissez? » (Dolan, 1991).

ÉVALUATION DE LA THÉRAPIE

Les clients comme les thérapeutes ont besoin de pouvoir évaluer le processus thérapeutique. Lorsqu'on leur a demandé si elles utilisaient des méthodes systématiques ou non systématiques pour évaluer leur travail, la plupart des personnes qui ont participé à la recherche ont répondu qu'elles utilisaient des méthodes non systématiques. Les quelques personnes qui se servaient régulièrement de méthodes d'évaluation systématiques avec leurs clients avaient tendance à utiliser des tests psychologiques normalisés, avant et après la thérapie, pour mesurer les résultats du traitement.

Les thérapeutes qui utilisent des méthodes non systématiques pour évaluer les progrès de leurs clients interrogent ces derniers sur les résultats du processus thérapeutique. Des changements comme la réduction des symptômes de stress post-traumatique ou des souvenirs importuns liés au traumatisme, l'augmentation de la prise de conscience de soi, l'amélioration affective et la restructuration intellectuelle sont utilisés pour évaluer le succès de la thérapie. La satisfaction du client et les changements qu'il apporte dans sa vie, l'atteinte des objectifs proposés, l'amélioration du fonctionnement au travail ou dans les relations humaines sont d'autres indicateurs d'amélioration.

Les personnes qui utilisent des tests systématiques doivent les démystifier. Il faut expliquer en détail les tests aux clients pour qu'ils comprennent leur potentiel d'utilité et acceptent de s'y soumettre en connaissance de cause. Il faut aussi discuter des limites des tests (faux négatifs et faux positifs) pour que les clients se rendent compte que le testage n'est pas un processus infaillible.

Les personnes qui évaluent leurs clients avec des tests normalisés utilisent les deux échelles conçues spécifiquement à l'intention des survivants de l'abus sexuel ainsi que d'autres tests psychologiques généraux.

L'échelle des expériences dissociatives (DES) - instrument de dépistage utilisé pour identifier les survivants qui présentent des niveaux élevés de dissociation - est un test autodéclaré qui mesure trois principaux facteurs :

(1) dissociation amnésique,

(2) absorption et fuite dans l'imaginaire,

(3) expérience de dépersonnalisation et de déréalisation.

(On trouvera un exemplaire de l'échelle à l'annexe C.)

Le Trauma Symptom Checklist (TSC-33) est une liste de trente-trois questions conçues spécifiquement pour évaluer les perturbations psychologiques post-traumatiques. Le test mesure cinq sous-échelles cliniques (dissociation, anxiété, dépression, problèmes de sommeil et hypothèse de traumatisme dû à l'abus sexuel) et permet de procéder à une mesure générale du traumatisme. Ce test a été mis au point par John Briere et ses collègues. Le TSC-33 est décrit dans Therapy for Adults Molested As Children (voir le chapitre 12).

Les tests psychologiques non axés sur l'abus que certaines personnes utilisent pour évaluer leurs clients sont le Tennessee Self-Concept Scale, le Beck Depression Inventory, le Hudson Self-Esteem Scale et le Minnesota Multiphasic Personality Inventory (MMPI).

Certains thérapeutes évaluent la thérapie régulièrement. Toutes les quatre ou six séances, ils revoient le processus de thérapie avec leurs clients. D'autres font moins d'évaluations au cours de la thérapie mais, une fois celle-ci terminée, effectuent des appels téléphoniques de suivi pour vérifier la stabilité des changements thérapeutiques. Les thérapeutes qui travaillent avec des adolescents s'adressent à l'occasion aux parents ou aux enseignants de leurs clients pour vérifier que la thérapie les aide. Les clients des thérapies de groupe utilisent parfois un processus de vérification par les pairs pour suivre les changements et les progrès. La plupart des thérapeutes définissent le succès thérapeutique par des résultats comme l'accroissement de l'estime de soi de leur client. La combinaison de l'auto-évaluation et des changements observés personnellement par la ou le thérapeute constitue généralement une base adéquate pour évaluer la thérapie.

Il n'existe guère d'instruments d'évaluation faciles à utiliser dans le cadre du travail clinique, particulièrement à l'égard des survivants d'abus sexuel. Les données impressionnistes sont la forme la plus courante d'évaluation thérapeutique. Comme on l'a déjà dit, cette méthode a certainement des mérites mais elle rend impossible la généralisation d'un cas à l'autre. Les thérapeutes qui travaillent avec des survivants de l'abus sexuel ont besoin de meilleures méthodes normalisées d'évaluation de la thérapie.

CHAPITRE 5 - THÉRAPIE INDIVIDUELLE : ÉTAPE DE LA VICTIME

Ce chapitre présente les principales tâches thérapeutiques à accomplir pendant l'étape de la victime. Diverses techniques sont décrites dont certaines sont expressives tandis que d'autres portent sur les processus internes. Ces interventions ont pour objet d'accroître l'aptitude des clients à prendre conscience de leur expérience affective et à acquérir les compétences nécessaires pour gérer ces émotions de façon productive.

Le succès de la psychothérapie en général et de la psychothérapie liée à l'abus sexuel en particulier dépend de la nature du rapport entre thérapeute et client. Les clients ont besoin de se sentir suffisamment en sécurité dans cette relation pour être en mesure d'apprendre et de grandir. Les thérapeutes doivent avoir suffisamment de compétences et d'intégrité pour pouvoir encourager et soutenir l'apprentissage de leurs clients.

À mesure que les clients prennent conscience de leurs propres processus psychologiques et de leurs réactions inconscientes au traumatisme, ils commencent à avoir davantage de choix dans la façon dont ils réagissent aux événements qui se produisent dans leur vie. Ils peuvent alors remplacer les tendances dysfonctionnelles qui ont été adoptées en réponse au traumatisme aux étapes initiales de leur développement par des réponses plus saines et appropriées aux circonstances de leur vie actuelle.

Ce que je propose ici est un cadre général de thérapie individuelle avec les survivants plutôt qu'un guide étape par étape. J'illustrerai la présentation par des exemples spécifiques d'interventions utilisées par les personnes qui ont contribué à la recherche afin de transformer la théorie en processus clinique appliqué.

La raison pour laquelle la plupart des thérapeutes suggèrent que les survivants commencent par faire un travail individuel est que la sécurité constitue un élément essentiel de la thérapie axée sur l'abus sexuel. S'il ne se sent pas suffisamment en sécurité, le client ne peut pas faire face à son histoire passée d'abus sexuel. S'il est préoccupé par ce qui se passe dans le présent, il ne peut pas libérer suffisamment d'énergie psychique pour confronter son passé.

Les séances individuelles donnent au client la possibilité de se familiariser à la fois avec la ou le thérapeute et avec le processus thérapeutique. Dans le cadre de la thérapie individuelle, le client est encouragé à parler de sa victimisation à une personne qui le croit et qui lui apporte un soutien. La thérapie individuelle permet à la ou au thérapeute d'évaluer les compétences et les déficits du client et permet à celui-ci d'établir un rapport sans risque et encourageant avec une autre personne adulte. Ces deux éléments sont des précurseurs essentiels de la participation à une thérapie de groupe axée sur l'abus sexuel.

L'objectif de la première étape de la thérapie est de reprendre possession des faits et des conséquences de la victimisation du client et de les valider. La ou le thérapeute donne à son client la permission de se souvenir et de reconnaître l'abus sexuel dont il a été victime et écoute ses révélations d'une façon qui lui apporte un soutien sans le juger. Il s'agit de questionner doucement le client sur son passé et de commencer à remettre en question les notions déformées engendrées par l'abus sexuel que le client s'est constituées sur lui-même, sur les autres et sur le monde en général.

À cette étape de la thérapie, la ou le thérapeute travaille avec le client à faire de la thérapie un processus sans danger. Cela peut supposer que l'on enseigne au client comment contenir ses émotions (p. ex., techniques de gestion des flashbacks ou des crises d'anxiété) et qu'on l'aide à comprendre les processus liés à l'abus sexuel en partageant avec lui du matériel psycho-éducationnel.

Les conduites du client sont normalisées et déstigmatisées. On l'encourage à examiner ouvertement son expérience d'abus sexuel et l'impact que cela a eu sur lui. On l'aide à se réconcilier avec certaines parties de son expérience et certaines parties de lui-même qui lui font honte ou qu'il a repoussées. La douceur et l'humour facilitent souvent ce processus. Par exemple, on peut relever la tendance du client à se critiquer en disant « Tiens, revoilà cette partie de vous qui porte le monde sur ses épaules » et l'aider ainsi à reconnaître certains de ses aspects dysfonctionnels sans accroître sa honte ou son anxiété.

INTERVENTIONS

On trouvera ci-dessous une description de certaines des interventions que les personnes qui ont contribué à la recherche ont utilisées à l'étape thérapeutique de la victime pour aider les clients à développer leur sentiment de sécurité personnelle et à augmenter leurs souvenirs et leur accès aux affects réprimés.

Je tiens ici à demander aux personnes qui intégreront ces interventions à leur travail de ne pas les utiliser n'importe quand et avec n'importe qui. Elles devront veiller à ce que ces techniques répondent effectivement aux besoins de leurs clients plutôt qu'aux leurs. L'enthousiasme aveugle pour les nouvelles idées et les nouvelles interventions ne doit pas l'emporter sur la discrimination. En outre, « aucune technique ne peut remplacer le respect mutuel et le rapport stable et encourageant qu'offre une bonne psychothérapie générale [...] » (Briere, 1989, p. 82).

Travail avec l'enfant intérieur

Au cours de l'étape de la victime, on peut introduire la métaphore de l'enfant intérieur. La plupart des clients sont heureux d'apprendre qu'ils ont plusieurs « moi ». En général, plus le client est dissocié, plus il a de « moi ». La reconnaissance que les différents « moi » peuvent entrer en conflit les uns avec les autres ou réagir séparément au même stimulus peut aider les clients à mieux s'accepter et à mieux comprendre leur propre comportement.

Lorsque les clients commencent à voir l'enfant en eux qui a été traumatisé et maltraité, ils ouvrent la porte à une façon d'être basée sur l'amour de soi plutôt que sur la haine de soi. Ils commencent à éprouver de la compassion pour eux-mêmes, une compassion qui est ressentie indépendamment de leur état émotionnel ou intellectuel. Le client est graduellement invité à accepter de servir de parent aux parties de lui-même qui n'ont pas eu de parent adéquat dans l'enfance. Il est rassuré par le fait que la ou le thérapeute est prêt à lui servir de guide ou d'entraîneur dans ce processus et à lui offrir le soutien dont il a besoin.

Pour certains hommes, la métaphore de l'enfant intérieur est difficile à accepter pour commencer. Le fait d'être comme un enfant ou de réagir comme un enfant à certaines situations est vu sous un jour négatif. On peut parfois surmonter ce rejet des éléments immatures du moi en utilisant des métaphores de captivité. En comparant un enfant victime d'abus sexuel à un prisonnier de guerre exploité par ses ravisseurs à leurs propres fins, on peut aider certains hommes à mieux comprendre la situation où ils se sont trouvés quand ils étaient enfants. La reconnaissance que même les soldats entraînés pour la bataille décompensent lorsqu'ils se retrouvent en captivité peut aider certaines victimes à considérer leurs propres réactions à l'abus sexuel avec moins d'autocritique et davantage de respect.

D'autres hommes éprouvent plus facilement de la compassion pour les filles que pour les garçons. Ils croient que les hommes doivent être plus résistants à la souffrance que les femmes, quels que soient leur âge ou leur situation. Si on leur raconte leur propre histoire d'abus sexuel en changeant le sexe de la victime, on peut susciter chez eux les sentiments de compassion qu'ils n'arrivent pas éprouver pour eux-mêmes. Lorsqu'ils se montrent concernés par la victime imaginaire, on peut leur rappeler que les mêmes choses leur sont arrivées et qu'ils méritent également d'être traités avec compassion.

Visualisation

La visualisation peut s'avérer une technique utile pour permettre à certains clients de prendre contact avec leur « enfant intérieur ». Avant d'entraîner un client dans une visualisation, demandez-lui d'identifier des « ancres » où amarrer son moi adulte et ses ressources actuelles. Ces rappels adultes peuvent être des objets concrets comme l'alliance du client ou tout autre symbole de sa situation adulte. Si le client ressent de l'anxiété au cours de la visualisation, il peut reprendre contact avec son moi adulte en touchant l'objet symbolique.

Une fois le client ancré dans sa réalité actuelle, amorcez le processus de visualisation. Après avoir demandé au client de fermer les yeux, guidez-le vers un état de relaxation profonde. Si le client n'aime pas l'idée de fermer les yeux, invitez-le à regarder un point dans la pièce en se concentrent sur sa respiration et ses sensations corporelles. Une fois le client profondément détendu, demandez-lui d'entrer en contact avec l'enfant qu'il était juste avant que l'abus sexuel ne commence. (L'âge de l'enfant peut varier d'une situation à une autre en fonction des besoins des clients et des thérapeutes.) Vous pouvez aussi faire une suggestion plus générale, par exemple, « Laissez l'image d'un enfant vous venir à l'esprit. »

Lorsque le client a l'image d'un enfant, aidez-le à la renforcer en posant des questions comme « Comment l'enfant est-il habillé? » et « À quoi ressemble l'enfant? ». Demandez à l'enfant de dire au moi adulte du client s'il y a quelque chose qui le dérange ou de décrire au moi adulte du client son état de bien-être. Demandez ensuite au client de répondre à l'enfant. Cet échange entre le moi adulte et l'enfant intérieur peut être parlé ou silencieux. Il est utile d'appeler l'enfant par le nom qu'on lui donnait à son âge. Si un client s'appelle Robert mais qu'on l'appelait Rob au moment de l'abus sexuel, il faut s'adresser à son moi enfant en l'appelant Rob.

À la fin de la visualisation, demandez au moi adulte du client de s'assurer que l'enfant se sent en sécurité et protégé avant de quitter l'image. Il est possible que le client ait besoin d'effectuer un acte imaginaire avant de prendre congé de l'enfant.

Tout d'abord, beaucoup de clients on du mal à prendre contact avec leur enfant intérieur. Les clients sont parfois embarrassés à l'idée de prendre part à un processus de visualisation ou déclarent que leur enfant intérieur refuse tout contact parce qu'il a peur ou qu'il n'a pas confiance. Cependant, si le client accepte de persévérer et si on lui apprend comment aborder un enfant qui a peur ou qui n'a pas confiance, il prendra éventuellement contact avec son moi enfant. Lorsque cela se produira, le client sera souvent surpris de la façon dont ce processus peut stimuler des sentiments et des souvenirs intenses et de l'aide que l'on peut recevoir si l'on apprend à être le parent de son moi enfant.

La visualisation guidée est un instrument puissant pour aider les clients à développer leurs aptitudes à établir de solides limites personnelles. Les personnes qui ont contribué à la recherche utilisent cette technique de différentes façons. En voici deux

Visualisation d'un « contenant »

Les clients sont souvent hantés par leurs souvenirs ou ne cessent de penser à leurs expériences d'abus sexuel. On peut les soulager en les aidant à se créer un contenant imaginaire où ils peuvent placer ces souvenirs ou ces pensées en sachant qu'ils pourront aller les y chercher quand ils le voudront.

Après s'être assuré que le client est ancré de façon concrète dans son état adulte actuel, guidez-le dans un exercice de relaxation musculaire progressive jusqu'à ce qu'il soit profondément détendu physiquement. Lorsqu'il montre des signes de relaxation comme les yeux qui se ferment ou une respiration régulière, demandez-lui de penser à un contenant réel ou imaginaire qui est parfaitement étanche et auquel lui seul a accès. Invitez-le à placer les souvenirs importuns et les pensées répétitives dans ce contenant et à s'entraîner à les en sortir et à les y remettre à son gré. Dites-lui qu'il peut utiliser ce contenant à tout moment pour y garder ses pensées ou ses sentiments. Il peut toujours aller les chercher s'il en a envie ou il peut les laisser dans le contenant aussi longtemps qu'il le veut.

Certains thérapeutes utilisent cet exercice pour clore les séances au cours des premières étapes de la thérapie. Juste avant son départ, on guide le client vers un état de transe où il peut avoir accès au contenant et on lui dit : « Laissez toute pensée dont vous ne voulez pas prendre conscience avant la prochaine séance dans le contenant. » Le client est ensuite ramené graduellement dans la réalité présente de la salle de thérapie. En apprenant aux clients à utiliser cette technique régulièrement, on leur donne un moyen facile de gérer les expériences intérieures importunes. Plus cette aptitude est pratiquée, plus elle devient efficace.

Visualisation d'un « lieu sûr »

Comme pour la visualisation du contenant, commencez cet exercice en aidant le client à se détendre progressivement jusqu'à ce qu'il présente des signes de relaxation profonde. Dites-lui de se transporter dans un lieu, réel ou imaginaire, où il peut être seul dans un état de sécurité et de confort complets. Vos instructions sur le lieu en question doivent être délibérément vagues pour donner à l'inconscient du client la liberté de produire une image qui convienne à ses besoins du moment. Demandez au client de faire l'expérience totale de ce lieu intérieur - vue, ouïe, odorat, goût et sensation. Demandez-lui d'ancrer ce lieu sûr par une position de main ou un objet physique toujours disponible (p. ex., une bille ou une pierre). Dites-lui que, s'il se sent anxieux, il peut faire le geste de la main ou toucher la pierre et envoyer le signal à tous les niveaux de conscience qu'il se détend et pénètre dans un lieu sûr. Dites-lui qu'il peut retourner dans cet endroit quand il le voudra - personne d'autre n'aura besoin de savoir ce qu'il fait.

Une fois que le client a fermement établi un sanctuaire intérieur sans danger, on peut lui demander, en variation de cette visualisation, d'inviter quelqu'un à qui il fait confiance et qu'il respecte à lui rendre visite dans ce lieu sûr. S'il le veut, il peut poser des questions à son visiteur ou en recevoir des affirmations. Le client doit rester en tout temps en charge de son sanctuaire et, s'il ne veut pas inviter quelqu'un à le partager avec lui, ce désir doit être respecté.

Pour clore cette visualisation, demandez au client de quitter graduellement son sanctuaire, de revenir dans son corps et, lorsqu'il sera prêt, de revenir dans la salle de thérapie. Comme l'exercice du contenant, cette technique gagne en efficacité si elle est pratiquée fréquemment et devient un élément régulier de l'autogestion du client.

Hypothèses

Lorsqu'ils discutent de certains aspects de l'abus sexuel dont ils ont été victimes, les clients se montrent souvent réticents et projettent leur propre malaise sur la ou le thérapeute. Pour neutraliser les projections du client, la ou le thérapeute doit aborder les questions difficiles directement et sans porter de jugement. Cela donne au client la permission d'être également direct. On « part de l'hypothèse » que le client a fait certaines expériences puis on vérifie auprès de lui l'exactitude de ces hypothèses. Par exemple, pour en savoir davantage sur les peurs homophobes d'un client, on peut dire « Je ne sais pas si cela est vrai pour vous, mais beaucoup de survivants s'inquiètent de l'excitation qu'ils ont ressentie lorsqu'ils ont été abusés. Qu'en est-il dans votre cas? ». On peut étendre à beaucoup de secteurs cette méthode de l'hypothèse d'une expérience commune suivie de questions sur l'expérience personnelle du client.

Livre de vie

Invitez les survivants à revisiter les événements de leur enfance avec des yeux d'adulte en créant un « livre de vie ». Demandez à votre client d'acheter un cahier ou un carnet à couverture ferme. Le livre doit être de bonne qualité pour souligner l'importance de son contenu. Dites à votre client d'assigner une page à chaque année de sa vie depuis l'année de sa naissance jusqu'au moment présent. Demandez-lui d'écrire des histoires à propos de chaque année ou de faire des commentaires sur lui-même à l'époque. L'objectif est toujours dirigé vers le client. Si des événements traumatisants sont arrivés aux personnes qui l'entourent, dites-lui de décrire la façon dont ces événements l'ont affecté. Il faut laisser de la place en bas de page ou dans la marge pour pouvoir ajouter d'autres commentaires à l'histoire de sa vie.

Le livre de vie est un instrument actif et concret qui offre un moyen d'organiser les flashbacks et les souvenirs d'une façon non menaçante. Il indique les périodes de temps où les souvenirs sont bloqués ou réprimés. Il aide les clients à reconnaître leurs propres points forts et il ouvre la porte à une réflexion sur leur vie. Les clients peuvent faire preuve de toute l'imagination qu'ils veulent dans la façon dont ils créent et utilisent leur livre de vie. Lorsque vous revoyez le livre de vie avec chaque client, demandez « Qu'est-ce que ce processus vous permet d'apprendre sur vous-même? »

Histoire de sa vie

Un exercice similaire mais plus court consiste à demander au client de vous raconter l'histoire de sa vie. Il est bon d'utiliser un format structuré pour que le survivant garde le contrôle du processus. La narration doit être une expérience de guérison et non de renouvellement du traumatisme. Demandez à votre client de vous parler de sa famille en traçant un génogramme sur un tableau blanc ou en vous apportant des photos des membres de sa famille. On peut utiliser des objets symboliques comme des pierres pour représenter les membres de la famille. Pendant que le client raconte son histoire personnelle, aidez-le à identifier les compétences qu'il a utilisées pour survivre à l'abus dont il a été victime et à reconnaître les thèmes et les tendances de sa vie.

Dessin de l'abus sexuel

Cette intervention peut s'avérer efficace avec les clients qui s'expriment mieux par l'art que par la parole. Donnez à votre client un grand bloc de papier - la taille du papier évoque la réaction de l'enfant - et dites-lui d'emporter le papier chez lui et de « dessiner l'abus ». Dites-lui bien qu'il ne s'agit pas d'un exercice artistique mais d'une occasion pour lui de se rappeler des événements qui sont arrivés dans le passé et de les clarifier. Dites-lui de dessiner une scène de sa vie avant l'abus sexuel puis de dessiner des scènes spécifiques de l'abus dont il a été victime sous forme de bande dessinée. Il peut, par exemple, dessiner une bulle qui lui son de la tête pour décrire ce qu'il pensait ou ce qu'il ressentait ou mettre des légendes sous ses dessins pour expliquer ce qui se passe.

Demandez au client d'apporter ses dessins à la séance de thérapie et posez-lui des questions sur les informations qu'ils contiennent. N'interprétez pas les dessins - toute interprétation doit venir du client. Il arrive souvent qu'en concrétisant les images de l'abus sexuel, le client leur donne davantage de réalité et prenne mieux conscience des ses souvenirs et de ses sentiments. En touchant l'autoportrait du client, la ou le thérapeute touche symboliquement le client, ce qui peut l'encourager sans pour autant le menacer.

Reconnaissance du scénario

Cette intervention est une pratique relativement courante parmi les thérapeutes formés en analyse transactionnelle et elle convient bien aux clients victimes d'abus sexuel au sein de la famille. Six différents « moi » sont identifiés et chacun est symbolisé par une chaise ou un coussin.

Le premier « moi » est le « parent aimant » qui sait satisfaire ses propres besoins et reconnaît que les besoins de son enfant sont séparés des siens. Le second est le « parent critique » qui contamine ses interactions avec l'enfant par ses propres besoins non satisfaits. Ce parent peut être critique et punitif ou étouffant et surprotecteur et n'écoute pas l'enfant lorsqu'il exprime ses propres besoins. Le troisième est l'« adulte » qui est le moi logique et rationnel. L'adulte est capable d'analyser les situations et de chercher de nouveaux renseignements et de nouvelles compétences pour prendre de nouvelles orientations et grandir.

Les trois derniers « moi » sont l'« enfant naturel », l'« enfant obéissant » et l'« enfant rebelle ». L'enfant naturel est la source des sentiments, de la spontanéité et de la créativité. Il porte aussi la blessure de l'abus sexuel. L'enfant obéissant et l'enfant rebelle sont des adaptations réactionnelles à l'influence du parent critique et des déformations de l'énergie de l'enfant naturel.

Une fois que les « moi » ont été décrits et identifiés, demandez au client de s'asseoir à l'endroit qui représente le « moi » où il a passé la plus grande partie de son temps quand il était enfant. Le temps peut être divisé entre avant et après l'abus sexuel. Encouragez-le à parler de son expérience tandis qu'il se trouve dans cet endroit. Demandez-lui d'identifier les positions que son père et sa mère occupaient habituellement, de s'asseoir dans ces lieux respectifs et de jouer le rôle de chaque parent.

Ce processus, souvent intense, s'avère généralement utile pour les clients. La reconnaissance des rôles tenus par les membres de la famille peut représenter une libération pour les clients en leur permettant de comprendre la part qu'ils ont joué dans le maintien du scénario et les options dont ils disposent pour changer. La première étape que doit franchir le client pour modifier ces processus est de prendre clairement conscience des messages explicites et implicites qu'il a absorbés en tant qu'enfant et des dynamiques auxquelles il continue à se plier par loyauté envers sa famille.

Techniques de concentration

Pendant une séance où le client parle de son vécu d'abus sexuel ou de sa vie présente, suggérez-lui de rester assis tranquillement et de se concentrer sur les sensations physiques qu'il ressent. Demandez-lui s'il remarque une sensation physique ou corporelle en particulier. Dans ce cas, invitez-le à prendre pleinement conscience de cette sensation. Après avoir passé quelque temps à explorer la sensation, demandez-lui si des images lui viennent à l'esprit en rapport avec l'expérience physique sur laquelle il se concentrait. On peut alors explorer et travailler sur les images ou les sentiments qui viennent à l'esprit du client. Cette technique peut aider les clients à retrouver des souvenirs réprimés et à honorer leurs perceptions kinesthésiques.

Les interventions ci-dessus sont des exemples du type de travail qui se produit aux premières étapes de la thérapie. À mesure que le client prend davantage conscience de sa victimisation et, ce qui est encore plus important, des effets qu'elle a eus sur sa vie, il commence à passer de l'étape de la victime à l'étape du survivant où le parcours thérapeutique devient souvent plus intense. Lorsqu'un client cesse de se blâmer et commence à tenir la personne qui l'a agressé pour responsable de l'abus sexuel qu'il a subi, il libère son énergie psychique et peut faire face aux émotions qu'il a éliminées de sa conscience.

CHAPITRE 6 - THÉRAPIE INDIVIDUELLE : ÉTAPE DU SURVIVANT

J'examine dans ce chapitre l'étape intermédiaire de la thérapie appelée l'étape du survivant. Au cours de cette période de la thérapie, le client reprend possession des parties dissociées de son moi (comportement, intellect, affects) et acquiert de nouvelles façons de faire face aux éléments de stress de sa vie présente et aux événements traumatiques de son passé. Je décris des interventions qui accroissent la gamme affective des survivants et duplique comment remplacer les rapports avec soi-même et avec les autres établis en réaction contre l'abus par des modes de fonctionnement plus sains.

La phase intermédiaire de la thérapie, l'étape du survivant, est habituellement la plus longue et la plus difficile. À cette étape, le client est amené à identifier comment, dans sa vie actuelle, il continue à réagir aux effets de sa victimisation et il est invité à adopter des stratégies de vie plus fonctionnelles. Sa principale tâche à cette étape consiste à élaborer et à intérioriser de nouvelles croyances et de nouveaux comportements en remplacement des tendances dysfonctionnelles qu'il a développées inconsciemment en réponse à sa victimisation. En général, le client effectue également un travail abréactif et régressif pendant cette étape de la thérapie. Ces processus libèrent les émotions réprimées et, quand ils sont bien orchestrés, permettent au client d'intégrer le matériel psychique préalablement non assimilé.

Lorsque le client parvient à l'étape du survivant, sa relation avec la ou le thérapeute a mûri, ce qui lui permet de prendre davantage de risques dans le processus thérapeutique. C'est pourquoi il est possible d'entreprendre des tâches difficiles pendant cette période comme le travail avec l'image intériorisée de l'agresseur. L'intensité de cette étape de la thérapie peut être éprouvante aussi bien pour les clients que pour les thérapeutes. Les deux parties doivent être sûres qu'elles disposent des aptitudes d'autoprotection nécessaires pour conserver leur force et leur motivation pendant toute cette période difficile.

Je discuterai dans ce chapitre de plusieurs thèmes thérapeutiques clés qui marquent l'étape thérapeutique du survivant :

  • fantasmes de revanche et d'agression et fantasmes sexuels,
  • manies et obsessions,
  • augmentation de la gamme affective du client,
  • processus de dissociation.

FANTASMES DE REVANCHE ET D'AGRESSION ET FANTASMES SEXUELS

Les fantasmes des clients contiennent des renseignements importants sur leur victimisation sexuelle et la façon dont ils y ont réagi. La relation thérapeutique doit offrir des occasions de parler simplement de ces fantasmes bien que les survivants hésitent souvent à les révéler parce qu'ils en ont honte ou ont peur d'être jugés.

Fantasmes de revanche

La plupart des hommes victimes d'abus sexuel ont des fantasmes de revanche active où ils s'imaginent qu'ils se vengent de la personne qui les a agressés. Généralement, lorsqu'on les interroge sur leurs fantasmes de revanche, les clients ne révèlent que leurs fantasmes les plus inoffensifs tant qu'ils ne sont pas sûrs qu'ils peuvent partager d'autres informations sans danger. Les clients ont besoin de soutien pour révéler leurs fantasmes. Ils ont besoin de savoir que, lorsqu'on reconnaît ses fantasmes et qu'on en parle plutôt que de les garder secrets, ils ont moins de chances de se développer et de se matérialiser.

Les fantasmes de revanche exposent la rage et la colère du client. Il peut être utile de proposer au client de dessiner ou de représenter symboliquement son fantasme en thérapie tout en déchargeant simultanément sa colère. Une représentation symbolique qui s'est avérée efficace consiste à recouvrir une vielle boîte de carton de rappels de l'abus sexuel et de la personne qui l'a perpétré puis de détruire la boîte. Cela peut se faire au cours d'une séance de thérapie ou dans d'autres circonstances. Le processus doit cependant être partagé avec au moins une personne compréhensive pour faire savoir au client que sa colère envers la personne qui l'a agressé n'est pas honteuse ni secrète.

Chaque fois que le client dévoile des fantasmes qu'il avait gardés secrets jusqu'ici, il a besoin de travailler à la fois sur le contenu du fantasme et sur le processus de dévoilement. Un grand nombre des clients qui révèlent leurs fantasmes privés à leur thérapeute en ressentent beaucoup de honte. Ils deviennent autodestructeurs pour se punir s'ils ne se sont pas donné intérieurement la permission d'exprimer leurs sentiments et leurs fantasmes. Les thérapeutes doivent avoir conscience de ces dynamiques et veiller à ce que leurs clients aient assez d'aptitudes à l'autoprotection pour participer à des interventions émotionnellement intenses. Les thérapeutes ont parfois besoin de rappeler fréquemment aux clients la différence entre fantasmes et comportements réels pour leur permettre de reconnaître leurs fantasmes et de travailler sur eux dans le cadre du processus thérapeutique.

Fantasmes de perpétration d'abus sexuel et de comportements sexuels déviants

Si un survivant s'est rendu coupable d'abus sexuel envers une autre personne, il doit être tenu responsable de sa conduite et reconnaître son infraction. Il doit ressentir une culpabilité appropriée tout en remettant son comportement dans le contexte de sa propre victimisation de façon à assumer sa conduite d'une manière qui ne soit pas source de honte. Si les infractions du survivant sont récentes et indiquent une tendance à la répétition, la thérapie devra porter sur les problèmes en rapport avec les infractions, ce qui prolongera le processus de guérison.

Bien que beaucoup de survivants n'aient jamais commis d'infraction envers une autre personne, ils peuvent avoir des fantasmes où ils s'imaginent qu'ils abusent d'un enfant. Certains survivants ont très peur d'avoir un comportement sexuel avec un enfant et ces pensées déviantes leur causent une grande anxiété.

Pour faire face à ce problème, il faut aider le client à comprendre d'où viennent ses peurs de devenir un agresseur sexuel. Pour certains clients, elles proviennent d'une suridentification avec l'agresseur (p. ex., « Je suis comme mon père, donc je vais aussi agresser les autres »). D'autres clients ont pris des habitudes « contaminées » d'excitation sexuelle au cours de leur expérience d'abus sexuel. La victimisation les ayant excités, ils créent des fantasmes masturbatoires basés sur cette expérience. Leur excitation sexuelle subséquente devient associée aux fantasmes en rapport avec l'abus sexuel.

Pour soulager les craintes du client, il faudra peut-être lui enseigner des techniques mentales comme l'arrêt de la pensée, qui lui permettront de contrôler ses peurs ou ses fantasmes déviants. Un client qui a utilisé des fantasmes associés à l'abus pour renforcer son excitation sexuelle devra se constituer d'autres fantasmes plus appropriés.

Le client devra également mettre ses peurs à l'épreuve de la réalité. Il devra examiner sa vie adulte actuelle pour chercher des signes qui indiquent une tendance à abuser des enfants. En général, il n'y en a pas. On a parfois besoin de lui rappeler qu'en tant qu'adulte, il a des moyens de satisfaire ses besoins dont il ne disposait pas étant enfant (p. ex., il peut exprimer sa colère ou son besoin de se sentir fort directement, sans faire mal aux autres). Si les peurs du client persistent, il pourra élaborer un plan avec la ou le thérapeute qu'il pourra mettre en œuvre s'il commence à présenter des comportements problématiques. L'élaboration d'un plan d'urgence a généralement un effet très rassurant sur les clients qui ont peur de se comporter d'une façon destructive.

TOXICOMANIES ET OBSESSIONS

La toxicomanie et l'obsession sexuelle sont courantes parmi les hommes victimes d'abus sexuel, ainsi que d'autres comportements obsessionnels en rapport avec la nourriture, le travail ou l'exercice physique, par exemple. Les thérapeutes doivent veiller à ne pas se concentrer sur les symptômes obsessionnels au détriment des problèmes sous-jacents que le comportement obsessionnel est destiné à masquer.

Les obsessions ont bien des raisons d'être. Elles peuvent être un moyen de répondre à des besoins qui ne sont pas satisfaits par ailleurs ou une façon de créer une distraction afin d'éviter certaines prises de conscience ou la reconnaissance de certains sentiments. Les gens adoptent des comportements obsessionnels parce que, au moins à court terme, cela les aide à faire face à des expériences devant lesquelles ils sont désarmés.

Pour changer un comportement obsessionnel, le client doit comprendre les émotions qui sous-tendent sa conduite et il doit accepter de reconnaître ce que lui coûtent ses obsessions. Il doit être prêt à essayer d'autres façons de répondre aux besoins non satisfaits qui sont à l'origine de son comportement obsessionnel.

Les thérapeutes doivent veiller à ne pas s'engager dans une lutte pour le pouvoir avec leurs clients obsessionnels. Les clients doivent eux-mêmes être décidés à changer leur comportement obsessionnel s'ils veulent adopter des mécanismes de défense différents. Si les thérapeutes tiennent davantage à ces changements que leurs clients, ils risquent d'être déçus. Les thérapeutes ne doivent jamais perdre de vue que seuls les clients ont le pouvoir de changer leur façon d'être.

Beaucoup de thérapeutes recommandent à leurs clients toxicomanes de suivre un programme en douze étapes approprié. Ces groupes offrent un soutien, des informations et une structure prévisible qui peuvent aider notablement les clients à modifier leurs tendances obsessionnelles. À cette fin, les thérapeutes doivent se tenir au courant de ce qui se passe dans les groupes d'entraide en douze étapes et garder le contact avec les groupes locaux.

Lorsque le client prendra conscience de l'état d'esprit ou des sentiments que son comportement obsessionnel sert à bloquer, il aura besoin d'aide pour faire face directement à ces sentiments et pour remplacer ses conduites obsessionnelles par un système d'autoprotection sain. Les clients font souvent une expérience abréactive lorsqu'ils se permettent de sentir les affects qui ont été bloqués par le comportement obsessionnel. Cette abréaction peut fournir des informations sur les origines de la toxicomanie. Cela peut permettre au client, graduellement ou d'un seul coup, de se réconcilier avec l'état d'esprit ou le sentiment qui était précédemment inacceptable.

AUGMENTATION DE L'EXPRESSION AFFECTIVE

Beaucoup de survivants ont du mai à prendre conscience de leurs sentiments. Ils assimilent l'expression de l'émotion à la vulnérabilité et à l'impuissance. Les hommes croient souvent qu'ils peuvent compter sur leur force physique pour les protéger des sentiments de peur ou de vulnérabilité. Certaines victimes ont un monologue interne qui dit « Si quelqu'un essayait de me victimiser maintenant, je lui montrerais à qui il a affaire. » Ces hommes masquent leur vulnérabilité par un étalage de pouvoir. Ils peuvent se fâcher avec les thérapeutes qui suggèrent qu'ils auraient avantage à reconnaître leur vulnérabilité. Dans leur esprit, ils pensent que ces thérapeutes leur demandent de devenir impuissants et de prendre le risque d'être à nouveau victimisés.

D'autres survivants craignent d'être inondés par des affects non contrôlés s'ils ouvrent la porte à l'expression de leurs sentiments.

Comme les émotions réprimées sont souvent très puissantes et que le survivant associe les sentiments avec (d'une certaine façon) la non-survie, la victime d'abus sexuel peut effectivement croire que la libération émotionnelle est un processus dangereux. (Briere, 1989, p. 86)

Il faut veiller à ne pas pousser prématurément les clients à l'expression affective. Cela inviterait à la résistance et créerait une lutte pour le pouvoir et serait donc contraire à l'effet recherché. Certains clients peuvent être tellement effrayés par le contact trop rapide avec des émotions intenses qu'ils abandonnent la thérapie. L'expression des émotions réprimées est le résultat naturel du processus de guérison. Les thérapeutes et les clients doivent tous deux faire confiance au fait que le client saura quand il sera prêt à faire l'expérience directe de ses sentiments au sujet de l'abus.

Certains clients n'ont pas besoin d'une forte libération émotionnelle pour guérir. Pour d'autres, particulièrement ceux qui expriment inconsciemment leurs émotions dans leurs relations présentes avec les autres, l'expression active des sentiments est essentielle pour faire le lien entre les émotions réprimées et le comportement actuel.

Chaque fois qu'un travail affectif ou abréactif intense se produit en thérapie, il est important qu'il soit structuré de façon à accroître le pouvoir et la maîtrise du client. La reproduction du traumatisme original sans gains thérapeutiques a un effet contre-thérapeutique.

Les clients ont besoin qu'on leur enseigne comment identifier et gérer leurs processus émotionnels. Beaucoup d'expériences somatiques, telles que migraines ou douleurs dorsales chroniques, recouvrent des émotions non exprimées. A mesure que le client développera sa pleine capacité à exprimer ses émotions, ses problèmes physiques diminueront. Leehan et Wilson (1985) déclarent que beaucoup de victimes d'abus sexuel ont réprimé leurs sentiments avec tant d'efficacité qu'ils ne savent pas qu'ils les ont. Il arrive souvent que les thérapeutes aient besoin de demander « Avez-vous de la tension dans les épaules? Avez-vous la poitrine serrée? Avez-vous des maux de tête? ». Une fois que ces réactions physiologiques ont été identifiées, on peut discuter de leur signification et de leur rapport possible avec des émotions spécifiques.

Beaucoup de survivants éprouvent leur vie émotionnelle comme tout ou rien. Ou bien ils bloquent leurs émotions et les éliminent de la conscience ou bien ils laissent leurs sentiments exploser et les submerger. Tant que les clients n'auront pas appris comment contenir leurs affects de façon saine et n'auront pas adopté des façons fonctionnelles d'exprimer leurs émotions, ils risquent de conserver cette tendance émotionnelle au tout ou rien. En prévenant les clients de cette possibilité, on pourra les aider à gérer leurs incohérences émotionnelles tout en adoptant des stratégies plus saines pour faire face à leurs émotions.

Beaucoup de clients ont besoin d'aide pour trouver le vocabulaire qui leur permettra d'identifier leurs différentes émotions. Les thérapeutes pourront expliquer aux clients que leurs émotions suivent un continuum et qu'ils peuvent éprouver divers degrés de peur, de colère, de joie et de tristesse. On peut demander aux clients d'observer les autres de près pour voir comment différentes personnes expriment leurs émotions. On peut souvent aider un client à retrouver des émotions perdues en faisant des commentaires comme « Je suppose que vous ressentez une certaine tristesse (ou colère ou autre chose) quand vous me parlez de ça. »

On peut identifier et remettre en question les injonctions personnelles et culturelles qui empêchent les hommes d'exprimer leurs émotions. Il faut également identifier les injonctions parentales comme « Arrête de pleurer ou je vais te faire pleurer pour de bon. » Certaines parties du client restent souvent loyales à ces vieux messages et, tant qu'il n'en prend pas conscience, les messages continuent à façonner son comportement. On peut remettre en question les prescriptions sociales sur les hommes et l'expression des sentiments en posant des questions comme « Qu'est-ce qu'on apprend aux hommes dans notre culture sur la façon de faire face à ses émotions? Quels sont les messages que reçoivent les hommes sur la vulnérabilité? Est-ce que les messages que vous avez reçus de la société sur la façon dont les hommes doivent exprimer leurs émotions conviennent à la vie que vous menez? ». La remise en question de ces injonctions dépassées donne aux clients la permission de reprendre possession de la gamme complète de leurs sentiments.

La colère est un sentiment que la plupart des hommes ont culturellement la permission d'exprimer. Elle devient souvent une expression affective unidimensionnelle qui dévore toutes les autres. D'autres émotions, comme la peur ou la tristesse, peuvent par déformation se transformer en colère et en rage. Pour découvrir les sentiments qui sous-tendent leur colère, il faut d'abord aider les clients à faire l'expérience totale de leur colère. À cette fin, les hommes doivent faire une distinction claire entre la colère et la violence. Il ne faut jamais confondre la permission de ressentir et d'exprimer la colère avec la permission de se conduire avec violence.

Les survivants découvrent habituellement que l'émotion qu'ils ont le plus besoin d'exprimer n'est pas la colère qu'ils ressentent mais la peur ou un autre sentiment (comme une profonde tristesse) qui a été dissimulé par ce masque de colère. La séparation des processus émotionnels primaire et secondaire fait partie du parcours thérapeutique à l'étape du survivant. Par exemple, lorsqu'un survivant commence à comprendre qu'il se bat avec les autres quand il essaie d'éviter de ressentir de la peur, il peut commencer à regarder sa peur directement.

Lorsque les hommes ont très peur de découvrir leurs réactions émotionnelles, la création d'une distance avec l'intensité des sentiments peut paradoxalement les aider à prendre contact avec leurs affects. En demandant aux hommes de parler de leurs sentiments à la troisième personne, comme s'ils parlaient d'un de leurs bons amis, on peut les aider à reprendre possession de cet aspect de leur vie.

Si les survivants ont des sentiments très ambivalents et éprouvent à la fois un amour intense et une rage intense à l'égard de la personne qui a abusé d'eux, les thérapeutes doivent veiller à soutenir ces deux émotions. Des efforts prématurés d'intégration de l'ambivalence pourraient ralentir le processus de guérison. Bien que le client puisse être frustré par les sentiments apparemment contradictoires qu'il ressent, ces deux émotions opposées font partie de sa vérité émotionnelle et les deux doivent être honorées. Beaucoup de survivants ont besoin d'apprendre que l'amour et la colère peuvent être ressentis simultanément et que les deux sentiments ne sont pas mutuellement exclusifs.

Comme les sentiments réprimés ou reniés que les survivants apportent en thérapie sont basés sur l'expérience passée, il est bon de faire appel à l'avenir pour les encourager à modifier leurs tendances émotionnelles actuelles. En parlant au client d'un avenir où il aura intégré ses émotions et où ses sentiments seront en harmonie avec ses pensées et son comportement, on lui fait comprendre qu'il s'agit là d'un objectif possible qui vaut la peine que l'on y travaille.

Les personnes qui ont contribué à la recherche utilisent diverses techniques pour aider les clients à augmenter leur expression affective. Certaines se servent de la musique pour susciter les émotions des clients. Par exemple, elles jouent une chanson d'amour pendant la séance et demandent au client d'imaginer qu'il se la chante à lui-même. Cet exercice peut révéler la résistance à l'amour de soi ou le cynisme devant la notion d'amour. Quelle que son la réponse spécifique qui émerge, cela ouvre la porte à l'exploration des réactions affectives.

Certains thérapeutes utilisent la technique gestalt de la chaise vide pour aider les clients à découvrir leurs réactions émotionnelles. Les clients qui ont une orientation concrète et pratique auront peut-être du mal à faire ce genre de chose. Ceux qui acceptent de participer à l'exercice pourront s'y préparer en rédigeant une lettre à la personne ou à la partie d'eux-mêmes qu'ils veulent placer sur la chaise vide. Ils pourront alors commencer le dialogue en lisant cette lettre tout haut. Il est important que les clients comprennent que les lettres qu'ils écrivent en thérapie ne sont pas destinées à être envoyées à la personne réelle à laquelle elles sont adressées. Elles visent plutôt l'image intériorisée de cette personne que le client porte en lui.

On peut inviter les clients qui sont à l'aise avec l'expression non verbale à faire un collage pour montrer ce que l'on ressent lorsque l'on est victimisé, que l'on éprouve de la colère ou du chagrin. Pendant la préparation du collage ou pendant qu'on en discute en thérapie, le client prendra généralement contact avec l'affect associé aux événements représentés par le collage.

Certains thérapeutes utilisent le travail sur la respiration pour aider à libérer les sentiments. On peut encourager un client à régresser en accroissant la fréquence de sa respiration, comme dans le travail holotropique. Les thérapeutes qui utilisent ces techniques doivent avoir une formation très sérieuse pour pouvoir les mettre en œuvre avec compétence.

Des formes moins techniques de travail sur la respiration peuvent aider les survivants à acquérir des aptitudes de gestion des émotions. On peut demander aux clients de prendre conscience de leur respiration tout en se concentrant sur une suite d'associations qui suscitent des réactions émotionnelles. On s'assure ainsi qu'ils ne commencent pas à retenir leur respiration à mesure que s'accroît l'intensité du sentiment. On peut leur apprendre à envoyer leur respiration dans une partie de leur corps ou de lui associer un son pour les aider à approfondir leur prise de conscience émotionnelle. En suggérant à un client de laisser sa respiration porter les sentiments qui le submergent tandis qu'il se souvient d'un événement traumatique, on lui donne un outil nouveau, à savoir le moyen de maintenir le souvenir dans sa conscience sans être traumatisé par lui. La pratique de techniques de respiration qui induisent la détente physique donne au client l'assurance qu'il peut être présent à ses souvenirs d'abus sexuel sans être submergé par eux.

Les personnes qui ont contribué à la recherche utilisent diverses formes d'expression concrète des émotions pour faciliter la croissance affective de leurs clients. Le but de ce type de travail est de reprendre contact avec les sentiments originaux qui ont été dissociés au cours de l'abus et de les extérioriser sous forme concrète pour que le client les accepte mieux ou en ait moins peur. Par exemple, si un client éprouve un sentiment de perte et de tristesse devant son manque d'amour-propre, on peut lui proposer de participer à une tire à la corde (avec une serviette ou tout autre objet adéquat) pour reprendre possession de son amour-propre. Pendant la tire à la corde, encouragez le client à verbaliser et à vocaliser sa colère devant le dommage causé à son amour-propre par la personne qui l'a agressé. De même, si un client veut se débarrasser de ses sentiments de honte sexuelle, on peut l'aider à trouver une façon d'extirper littéralement ces sentiments de sa personne. La clé de ces dramatisations est de saisir les indices offerts par le client qui suggèrent une façon de concrétiser ou d'extérioriser ses sentiments et ses processus affectifs.

Le jeu de rôle peut être une façon très efficace de susciter les émotions. Si l'on utilise le jeu de rôle pour représenter une scène de l'abus subi par le client, il est conseillé de représenter ensuite des scènes qui lui donnent des messages de protection et d'encouragement pour lui permettre de se constituer un scénario interne d'affection et de soutien. Il ne faut pas demander aux clients de représenter les personnes qui les ont agressés pendant l'étape du survivant. En admettant que cela arrive, ce devra être à l'étape du combattant. Si un client joue le rôle de la personne qui l'a agressé avant d'avoir pleinement exploré sa propre réaction émotionnelle à l'agression, il peut devenir trop sensible aux vulnérabilités de l'agresseur et lui pardonner prématurément sans prendre pleinement contact avec ses propres processus émotionnels.

Certains participants au présent travail utilisent la libération bioénergétique de la colère pour aider les clients à trouver un exutoire puissant mais sans danger à leur rage. Avant de pratiquer ce type d'intervention, les thérapeutes doivent convenir avec les clients qu'ils y mettront fin si l'un ou l'autre est préoccupé par la direction qu'elle prend. Les thérapeutes doivent bien connaître ce genre de travail pour rester émotionnellement disponibles pendant la libération des sentiments sans se préoccuper de leurs propres réactions aux émotions intenses du client. Il faut apprendre aux clients qui font un travail centré sur la colère à garder les yeux ouverts et les deux pieds fermement sur le sol pour ne pas être emportés par une rage aveugle. Après avoir effectué ce type de travail, les clients doivent l'examiner minutieusement pour intégrer tout nouvel élément que le processus leur a permis de comprendre.

Il faut garder à portée de la main tous les objets dont on peut avoir besoin pour faciliter le travail actif de libération émotionnelle comme des raquettes de tennis, des serviettes, des oreillers, etc. Il faut aussi mettre à la disposition des clients des objets susceptibles de leur apporter un réconfort tactile. Beaucoup d'hommes qui ne toucheraient pas un ours en peluche ou un autre symbole enfantin de réconfort pourront utiliser aux mêmes fins un ballon de basket rembourré ou une couverture.

Si la libération émotionnelle se produit en présence d'autres personnes, au cours d'une séance de groupe, par exemple, il faut prévenir les observateurs que le processus peut susciter des réactions de leur part. Ils doivent avoir la permission de se protéger pendant le processus. Certains hommes se couvriront les yeux et les oreilles. D'autres pourront avoir besoin de changer de place pour aller s'asseoir auprès de quelqu'un à qui ils font confiance. Les observateurs ont également besoin de temps après la libération émotionnelle pour pouvoir eux aussi examiner l'expérience.

LES PROCESSUS DE DISSOCIATION

Les enfants sont généralement honnêtes et directs à moins qu'ils ne pensent qu'il est dangereux de dire la vérité. Lorsqu'on leur dit de ne pas parler de quelque chose qui est arrivé dans leur vie, comme le fait d'avoir été abusés sexuellement, ils doivent, pour ne pas mentir, « oublier » ce qui est arrivé. En jargon technique, ils apprennent à se dissocier de leurs comportements, de leurs sentiments, de leurs sensations et/ou de leurs pensées.

Si l'on compare un enfant à une maison, on peut dire qu'un enfant dissociatif a condamné la porte de certaines pièces de sa maison et agit comme si elles n'existaient pas. Le souvenir d'avoir été abusé est conservé derrière des portes condamnées, bloqué hors de sa conscience. Le moi victime de l'abus est en fait coupé et dissocié de l'identité de l'enfant.

Bien qu'un survivant adulte puisse ne pas avoir de souvenir conscient des événements sur lesquels il a fermé la porte, il peut avoir des comportements qui rappellent la présence de ces fantômes. Par exemple, un homme dont on a abusé dans un sous-sol peut ne pas avoir de souvenirs de l'abus mais ressentir de l'anxiété chaque fois qu'il pénètre dans un sous-sol. Certains hommes ressentent une excitation sexuelle jusqu'au moment où le comportement sexuel devient interactif. Bien qu'ils ne se souviennent pas avoir été victimes d'abus sexuel, leur comportement témoigne de la réalité de leur victimisation. Des comportements, des pensées ou des sentiments qui sont sans rapport avec les circonstances présentes de la vie du survivant indiquent souvent la présence d'expériences dissociées. De bien des façons,

[...] les traumatismes non assimilés [provoquent] des flashbacks, une réaction excessive aux stimuli, une déformation des perceptions et un niveau élevé de stress intérieur. (Steele et Colrain, 1991, p. 1)

Les survivants dissociatifs ont besoin d'examiner de près leurs processus de dissociation. Ils doivent commencer à remarquer quand et où ils font appel à la dissociation. Ils pourront tenir un journal personnel dans lequel ils noteront quotidiennement leurs épisodes de dissociation. À mesure qu'ils commenceront à comprendre ce qui déclenche la dissociation (p. ex., certains moments de la journée, certains endroits de la maison, un type d'activité, etc.), ils auront le choix entre la dissociation et d'autres façons de faire face à la situation qui provoque le stress.

À mesure que les clients prendront conscience de leurs tendances à la dissociation, ils pourront se demander, lorsque cela se produit « Quelle est la partie de moi qui a besoin de se sauver? ». On peut enseigner des techniques d'ancrage dans la réalité aux survivants qui ont tendance à la dissociation pour les ramener à la réalité actuelle et à leur identité présente. Le client peut se regarder dans une glace pour se rappeler qu'il est un adulte et non un enfant impuissant. Le fait de mettre par écrit la situation qui suscite les souvenirs traumatisants et d'écrire ou de parler à quelqu'un de ces souvenirs peut valider l'expérience du survivant et réduire son isolement. La présence de symboles de son identité adulte permettra également au survivant de reprendre contact avec son moi actuel et de rompre la dissociation. Certains survivants ne sont pas à l'aise avec ces interventions parce qu'elles sont une façon de reconnaître l'abus dont ils ont été victimes, ce qui peut s'avérer douloureux.

Le type le plus extrême de dissociation est le trouble de personnalité multiple. Les clients qui présentent ce trouble sont surdifférenciés et leur thérapie vise à les aider à réintégrer les parties fragmentées de leur moi (appelées « alters »). Pour poursuivre l'analogie de la maison, les clients qui présentent le trouble de personnalité multiple vivent dans plusieurs pièces séparées sans couloir pour les relier entre elles. La thérapie a pour but d'aider le client à relier les pièces.

La personnalité multiple est une stratégie de défense créée pour faire face à des situations d'abus trop accablantes pour pouvoir être intégrées par le moi immature d'un enfant. Bien que l'intention initiale de la défense ait été d'assurer la survie de l'enfant, cette stratégie inconsciente ne fonctionne plus dans la vie adulte du client. Certaines parties du moi s'identifient avec une époque qui est sans rapport avec le présent et utilise des stratégies qui ne sont plus fonctionnelles. Il faut éliminer les obstacles entre les différents « alters » et intégrer et remettre à jour les fonctions qu'ils assument.

En général, si le trouble de personnalité multiple est pathologisé, les clients ont tendance à se comporter de façon pathologique. Si le trouble est normalisé, les clients ont tendance à se comporter de façon normale et continuent d'aller à l'école, au travail ou autre. Pour que les différentes parties du moi fusionnent, les clients ont besoin de stabilité dans leur vie. Il faut établir la sécurité thérapeutique séparément avec chacune des personnalités et faire prendre conscience au client du rôle spécifique de chaque « alter » et des renseignements qu'il porte avec lui.

Au cours de l'étape du survivant, si le client se sent en sécurité dans l'alliance thérapeutique et n'est pas entièrement mobilisé par les crises de sa vie présente, les expériences dissociées sont invitées à revenir à la conscience. Cette reprise de possession est souvent accompagnée par la libération d'émotions réprimées intenses. Le client entre temporairement dans un autre état de conscience et, en fait, revit les incidents qu'il a dissociés. C'est ce qu'on appelle l'abréaction.

Les souvenirs traumatisants doivent parfois être revécus à plusieurs reprises pour permettre l'accès à tous les morceaux qui manquent (Steele et Colrain, 1991). Steele et Colrain (1991) ont constitué une liste des changements de comportement qui indiquent quand le travail abréactif est terminé. Ces changements sont les suivants .

1. Le client a un souvenir relativement continu des périodes traumatisantes.
2. Il ne présente pas actuellement de dissociation incontrôlée ou dysfonctionnelle.
3. Il n'a pas de flashbacks ni d'autres façons de revivre le traumatisme.
4. Il peut se souvenir du traumatisme et en parler sans émotion intolérable.
5. Il a acquis un sentiment subjectif de la signification personnelle du traumatisme.
6. Il montre de l'intérêt et de l'espoir pour l'avenir plutôt que de se sentir submergé par le passé.

La répression des souvenirs varie suivant les individus. À un extrême, on trouve les survivants qui se souviennent parfaitement de l'abus dont ils ont été victimes; à l'autre extrême, ceux qui n'en ont aucun souvenir. La majorité des survivants se situent entre ces deux pôles. Ils ont certains souvenirs conscients et certains trous de mémoire. Il n'est pas nécessaire qu'un survivant reprenne possession de tous ou même de la plupart de ses souvenirs réprimés pour se rétablir. Les survivants ont seulement besoin de suffisamment de souvenirs pour contrer leur propre déni.

Lorsque les clients pratiquent l'abréaction en thérapie, il faut souvent rapprocher les séances de thérapie pour leur donner le soutien et la sécurité dont ils ont besoin. Il y a guérison lorsque les vieux souvenirs traumatisants sont revisités et font l'objet de nouvelles associations affectives et intellectuelles. À l'issue d'une thérapie réussie, la stimulation des souvenirs traumatisants se produit dans le contexte de nouvelles associations puissantes. Le client a davantage de pouvoir parce qu'il dispose d'un nouveau contexte et de nouvelles aptitudes pour faire face à son vécu. Une nouvelle association est créée, par exemple, lorsque l'abréaction du client se produit en présence de la ou du thérapeute si bien que le souvenir de l'abus cesse d'apparaître dans une situation d'isolement et de honte. Une autre association nouvelle est créée lorsqu'un client a la permission d'exprimer pleinement les sentiments suscités par le souvenir de l'abus sexuel sans avoir à tempérer cette expression en réponse aux besoins d'autres personnes (c.-à-d. de ceux qui l'ont agressé).

(Pour d'autres renseignements sur le travail avec les processus d'abréaction, voir l'excellent chapitre de Katherine Steele et Joanna Colrain intitulé « Abreactive Work with Sexual Abuse Survivors: Concepts and Techniques » dans The Sexually Abused Male, Volume 2.)

Dissociation thérapeutique

La dissociation thérapeutique, que l'on appelle aussi transe ou hypnose, est un outil puissant pour aider les clients à gérer leur dissociation inconsciente. Cette intervention agit de façon paradoxale - des comportements dissociatifs inconscients adoptés au cours de l'abus sexuel sont gérés et assimilés en thérapie grâce à une dissociation consciente.

La transe utilisée en thérapie est une extension d'un processus naturel. Le rêve éveillé, l'hypnose engendrée par la conduite sur la route et les techniques systématiques de relation sont des expériences de transe quotidiennes courantes que connaissent bien la plupart des clients.

Avant d'utiliser la transe avec les clients, il est important de leur expliquer en quoi consiste ce type d'intervention. La dissociation thérapeutique est un processus naturel mais il doit souvent être normalisé et démythifié. On peut dire aux clients que l'hypnose est une façon de demander à l'inconscient d'aider le client dans son voyage vers la guérison. Le client a seulement besoin de se souvenir des événements qui l'aideront dans le processus de rétablissement.

Avant d'entrer en transe, le client est ancré dans sa réalité adulte actuelle. Cet ancrage se fait dans le plus possible de systèmes de représentation pour permettre au client de faire appel à tous ses sens pour quitter la transe s'il le désire. Les clients sont prévenus que des régressions spontanées peuvent se produire en état de transe. Ce phénomène est normal et courant.

L'hypnose permet souvent aux clients de reprendre contact avec des pensées et des croyances qu'ils ont acquises dans l'enfance et qui ne pénètrent pas dans leur conscience habituelle. Si le client s'est dissocié de croyances négatives fondamentales qu'il a élaborées dans son enfance, ces informations peuvent souvent être rappelées à la conscience pendant la transe. Les distorsions de la pensée et les croyances erronées peuvent alors être remises en question par l'esprit adulte du client.

La dissociation thérapeutique invite les aspects moins conscients de l'esprit du client à aider son esprit conscient à effectuer activement des changements. Cela aide le client à reprendre le contrôle de processus qu'il avait préalablement utilisés de façon inconsciente et dysfonctionnelle. À mesure que les survivants de l'abus sexuel apprendront à entrer en transe à leur gré, ils commenceront à remarquer les moments de leur vie où ils font la même chose inconsciemment. Cette nouvelle prise de conscience sera pour eux l'occasion d'adopter des méthodes plus fonctionnelles pour répondre aux situations difficiles de leur réalité présente.

Deux interventions thérapeutiques spécifiques basées sur la dissociation et élaborées initialement par Yvonne Dolan sont présentées à l'annexe D (voir page 138). Du fait de leur longueur, elles ne sont pas inclues dans le texte. L'une des techniques aide les clients qui se trouvent dans une situation de dissociation à s'ancrer et constitue également une induction efficace de relaxation physique. La seconde intervention donne aux survivants une méthode pour faire face aux flashbacks et distinguer entre les aspects de leur réalité présente qui sont menaçants et ceux qui ne le sont pas.

Les personnes qui ont contribué à la recherche s'accordent pour reconnaître que la dissociation thérapeutique est un instrument très utile pour aider les clients à gérer leurs souvenirs traumatisants mais moins utile comme méthode de rappel des souvenirs réprimés. Les clients qui rappellent les souvenirs perdus sous hypnose ne sont généralement pas convaincus que ces souvenirs sont valides. Les personnes qui ont contribué à la recherche s'accordent également sur le fait que les thérapeutes qui ont l'intention d'utiliser l'hypnose avec leurs clients doivent s'assurer une formation et une supervision adéquates.

La dissociation thérapeutique n'est pas recommandée avec les clients qui veulent utiliser l'hypnose à des fins non thérapeutiques (p. ex., un client qui n'est pas vraiment intéressé à travailler sur son expérience d'abus sexuel mais veut davantage de renseignements pour pouvoir accuser les autres d'avoir ruiné son existence). Il n'est pas non plus recommandé d'utiliser ce type d'intervention avec des clients psychotiques ou des clients qui poursuivent en justice la personne qui les a agressés parce que les souvenirs rappelés sous hypnose ne constituent pas une preuve acceptable au tribunal et que le client peut perdre son procès pour cette raison technique.

CHAPITRE 7 - THÉRAPIE INDIVIDUELLE : ÉTAPE DU COMBATTANT

À quelques exceptions près, comme lorsqu'un client victime d'abus sexuel confronte symboliquement ou en réalité la ou les personnes qui l'ont agressé, une grande partie du traitement dispensé à cette étape finale de la thérapie est la même que pour les clients qui n'ont pas été victimes d'abus sexuel. Je discute de l'utilité et de l'opportunité d'un travail axé sur le corps à cette étape pour certains clients. Finalement, je traite de la façon de mettre fin à une thérapie axée sur l'abus sexuel et fais des suggestions pour réussir cette transition.

Lorsque le client arrive à l'étape du combattant, la majorité du travail à effectuer au cours des séances de thérapie est semblable à ce qui se fait avec les autres clients. À cette étape, la partie la plus difficile du parcours du client vers la guérison est généralement terminée.

Cette étape est souvent une période satisfaisante et agréable pour les clients et les thérapeutes. Les tendances dysfonctionnelles engendrées par l'abus sexuel ont été remplacées par des tendances plus saines et l'amour-propre du client s'est amélioré de façon remarquable.

Les problèmes que les combattants apportent en thérapie portent sur leurs difficultés relationnelles avec leurs partenaires, leurs enfants ou les membres de leur famille, leurs dysfonctions et leurs problèmes sexuels et leurs préoccupations en matière de sécurité personnelle et d'autoprotection (Courtois, 1991). En général, la thérapie utilisée pour faire face à ces problèmes est la même pour les victimes d'abus sexuel que pour les autres clients.

À cette étape de la thérapie, les clients devraient être en mesure d'identifier et de gérer leurs propres frontières. C'est le moment où certains clients choisissent de faire un travail axé sur le corps, ce pour quoi ils devraient être maintenant suffisamment préparés.

Les techniques axées sur le corps permettent à certains survivants de prendre contact avec des blessures qui risqueraient autrement de rester cachées. Les thérapies axées sur le corps accèdent directement à des questions essentielles pour le sentiment de sécurité du survivant comme son rapport avec son propre corps et sa capacité à toucher et être touché. Ce chapitre traite de ce sujet plus en détail dans la section intitulée « Travail axé sur le corps ».

CONFRONTATION DE L'AGRESSEUR

Une partie de l'étape thérapeutique du combattant qui ne touche que les survivants de l'abus sexuel concerne la nécessité pour le client de reprendre totalement possession de son pouvoir personnel. Pour ce faire, on peut amener le client à confronter son agresseur, soit symboliquement soit, plus rarement, en personne. Dans les cas d'abus sexuel au sein de la famille, certains clients expriment le désir de confronter plusieurs membres de leur famille. La famille du client ne participe à cette démarche que si cela ne compromet pas la sécurité du client. Le choix des membres de la famille qui seront invités aux séances de confrontation dépend de leur acceptation, de la nature de la relation présente du client avec eux et de la nature de ses rapports avec eux dans le passé.

Avant de participer à une séance de confrontation, le client doit être parfaitement sûr de ses souvenirs et de ses expériences d'enfant. Qu'une réunion familiale soit réelle ou symbolique, il faut consacrer plusieurs séances à la préparer. Les thérapeutes doivent veiller à ce que les attentes des clients en la matière soient réalistes et réalisables. Il faut prévoir les résultats possibles de la réunion et mettre au point des stratégies de soutien pour parer à toutes les éventualités. Pour que la confrontation soit réussie, il est essentiel que le client définisse ses objectifs et que ceux-ci soient formulés de telle façon que la réussite dépende du processus personnel du client et non de la réaction désirée des autres.

Pour certains clients, les séances familiales sont décevantes. Elles brisent leur illusion secrète que, s'ils parlent des problèmes avec la famille, cela les réglera. Les membres de la famille peuvent réagir aux renseignements sur l'abus sexuel du client par le déni, la minimisation ou la rationalisation. Si le client n'est pas préparé comme il faut, il peut se retrouver très perturbé.

D'autres clients trouvent que les séances familiales ont un important pouvoir de confirmation, qu'elles se passent bien ou non. La possibilité de vérifier ce qu'il pense des membres de la famille peut représenter une expérience positive pour le client qui observe les comportements attendus. Cela lui permet de voir combien il a changé et de reconnaître son aptitude à se différencier de sa famille. Il arrive aussi que les idées qu'avait le client sur sa famille ne soient pas confirmées et qu'il découvre qu'il peut la voir de façon plus réaliste.

TRAVAIL AXÉ SUR LE CORPS

Le client conserve les détails et les souvenirs de l'abus sexuel non seulement dans son esprit mais aussi dans son corps. Certains clients trouvent que, pour se rétablir, ils ont besoin d'ajouter des thérapies non verbales axées sur le corps à la psychothérapie traditionnelle. Ils comprennent intuitivement que le traumatisme dont leur corps a été victime requiert des interventions physiques autant que symboliques.

Le travail axé sur le corps consiste en une suite d'interventions qui vont des séances sans aucun contact physique où le client reste tout habillé, jusqu'au massage, en passant par le travail sur la respiration et les étirements du yoga. Les types de processus de guérison qui peuvent se produire à l'issue du travail sur le corps sont innombrables. Ils peuvent être à la fois physiologiques et psychologiques. La personne qui effectue le travail doit avoir une formation adéquate et s'y connaître à la fois en thérapies physiques et thérapies psychologiques. Il arrive souvent que les survivants reprennent possession de souvenirs en rapport avec l'abus sexuel au cours du travail sur le corps. La personne en charge du travail doit être prête à aider ses clients à faire face aux abréactions si elles se produisent.

L'un des avantages physiologiques du travail axé sur le corps est qu'il aide les clients à prendre conscience des tensions physiques chroniques inconscientes qui leur ont servi de structure de défense. Les systèmes de défense du corps sont contrôlés par l'inconscient. La tension nerveuse chronique peut raidir les libres musculaires pour en faire une armure défensive. Le travail sur le corps aide les clients à prendre conscience de ces lieux de tension chronique. Cela donne aux clients l'occasion de changer car ils peuvent alors apprendre à se détendre et à libérer les affects réprimés.

Le traumatisme de l'abus sexuel produit souvent des réactions psychosomatiques qui déséquilibrent le système nerveux. L'hyperstimulation nerveuse provoque des réactions hypertoniques comme une tension extrême et une incapacité de se détendre. À l'opposé, les réactions hypotoniques se manifestent par la dépression et la léthargie. Les thérapeutes peuvent enseigner aux survivants des techniques de relaxation et les aider à faire l'expérience de niveaux de relaxation de plus en plus profonds et à restructurer graduellement leurs réactions aussi bien émotionnelles que physiques.

Psychologiquement, le travail axé sur le corps présente beaucoup d'avantages pour les survivants. En travaillant avec une personne qualifiée, le survivant fait parfois l'expérience pour la première fois du contact sans danger et contractuel avec quelqu'un d'autre. Le travail sur le corps est l'occasion pour les clients d'apprendre à accepter des contacts rassurants et non sexuels dont ils gardent le contrôle. Ceci leur permet de prendre conscience de leurs propres frontières physiques et de les définir.

Beaucoup de survivants de l'abus sexuel ou bien ont évité le contact physique avec les autres ou se sont hypersexualisés et ont des contacts physiques avec n'importe qui. Dans les deux cas, ils n'ont guère eu de choix véritable quant au niveau de contact physique qu'ils reçoivent et aux circonstances dans lesquelles ce contact se produit. Il peut être très important pour eux d'apprendre à déterminer le type de contact qu'ils désirent en réponse à des besoins définis intérieurement. Le travail sur le corps peut servir de cadre à cet apprentissage.

Beaucoup de survivants de l'abus sexuel ont une image déformée de leur corps ou ont établi un rapport d'évitement avec leur personne physique. Certains survivants se sentent très superficiellement liés à leur corps. D'autres sont très mal à l'aise avec leur corps ou leurs processus corporels. Le travail axé sur le corps peut aider les clients à reprendre contact avec leur corps et à en reprendre possession pour eux-mêmes. Beaucoup de clients commencent à éprouver leurs sentiments pour la première fois lorsqu'ils prennent conscience de sensations et de processus physiques préalablement dissociés.

C'est toujours aux clients de décider s'ils veulent ou non effectuer un travail axé sur le corps. Il ne faut pas le leur proposer tant qu'ils n'ont pas eux-mêmes indiqué qu'ils ont pris conscience des aspects physiques de l'expérience d'abus sexuel. Si un client se sent trop menacé par le travail sur le corps, il ne donnera pas suite aux suggestions qui lui seront faites à cet égard.

À certaines exceptions près, la personne en charge du travail axé sur le corps et la ou le psychothérapeute doivent généralement être deux personnes distinctes pour réduire le risque de transfert négatif. Cette séparation des rôles permet au client de faire face à son expérience de thérapie corporelle ou à ses réactions de transfert, le cas échéant, envers la personne qui l'effectue avec lui, avec l'aide d'une tierce partie neutre et rassurante, à savoir sa ou son psychothérapeute. La ou le psychothérapeute peut exceptionnellement assumer ce double rôle lorsque le travail sur le corps se produit dans le cadre d'une thérapie de groupe et qu'elle ou il n'est pas seul avec le client.

Comme on l'a déjà dit, il faut respecter scrupuleusement les frontières des clients en matière de contact physique en psychothérapie. Lorsqu'une ou un thérapeute a établi un rapport avec un client et que celui-ci se déclare par la suite intéressé à effectuer un travail sur le corps, si c'est la ou le thérapeute qui commence à faire le travail, ceci peut être perçu comme une invitation à répéter la dynamique de l'abus sexuel initial. Le client peut considérer le travail effectué en thérapie avant le travail axé sur le corps comme un processus élaboré de préparation au contact physique. La croyance du client que les personnes en situation d'autorité finiront par chercher à avoir des contacts physiques sexuels avec lui se trouve confirmée.

Bien que les deux personnes qui dispensent la psychothérapie et le travail axé sur le corps doivent être distinctes, elles ne doivent pas travailler indépendamment l'une de l'autre. Il faut demander aux clients qui travaillent avec plus d'une ou d'un thérapeute d'accepter que ces personnes partagent les renseignements qu'elles recueillent de façon à leur dispenser le meilleur traitement possible. Lorsque le travail s'effectue avec plusieurs spécialistes, on court le risque d'une division improductive des rôles ou d'un manque de partage d'information entre les différentes parties.

Il faut éviter le travail sur le corps avec les clients toxicomanes ou qui souffrent d'épisodes psychotiques. Il faut également l'éviter avec les clients dont les objectifs en la matière ne sont pas réalistes ou appropriés. Certains clients, qui ont peu de souvenirs de l'abus dont ils ont été victimes, entreprennent un travail axé sur le corps parce qu'ils supposent que cela libérera leurs souvenirs réprimés. Bien que ceci puisse se produire, ce n'est pas garanti. Les clients peuvent finir par mettre en doute l'utilité du travail sur le corps non parce que cela ne les a pas aidés mais parce que cela ne s'est pas conformé à leurs attentes.

Si un client décide d'effectuer un travail axé sur le corps, il faut lui suggérer de demander à d'autres survivants et thérapeutes de lui recommander une ou un spécialiste qui a l'expérience des survivants de l'abus sexuel. Il doit aussi faire confiance à ses réactions intuitives. Il ne doit pas travailler avec une personne avec qui il ne se sent pas à l'aise.

Lors de la première rencontre avec une personne spécialisée dans le travail sur l e corps, il faut s'efforcer d'établir un contrat de travail axé sur les problèmes que le client apporte à ce type de thérapie. La personne en charge du travail corporel doit évaluer les besoins du client et déterminer s'ils correspondent à sa pratique. Bien qu'elle ne doive pas poser de questions importunes au client sur l'abus sexuel dont il a été victime, elle doit recueillir suffisamment de renseignements pour s'assurer que ses interventions sont appropriées. Pour veiller à ce que le client garde le contrôle de ce qu'il choisit de divulguer, on peut lui demander « Dites-moi seulement ce que j'ai besoin de savoir sur votre passé d'abus sexuel pour vous aider à guérir. »

La personne en charge du travail axé sur le corps doit informer explicitement le client que le contact sexuel ou la stimulation sexuelle ne feront pas partie de leurs rapports. Elle doit également informer le client qu'il doit la prévenir s'il éprouve des sensations sexuelles au cours de la séance, de façon à renégocier le travail effectué ensemble. Le client doit rester en tout temps en charge du type de contact qu'il a avec la ou le spécialiste et il doit toujours pouvoir mettre fin au processus s'il le désire.

Les spécialistes compétents doivent toujours demander la permission du client avant de procéder à un contact physique. Si on a l'impression que le client est mal à l'aise, Il faut lui dire « Je sens une tension quand j'approche de votre épaule (ou d'une autre partie du corps). Voulez-vous que je continue? De quelle façon voulez-vous que je vous touche là? ». C'est la réponse du client qui doit toujours guider le type de travail à effectuer.

Il est important que le travail sur le corps se produise dans un cadre éthique de la plus haute qualité. Lorsqu'un client décide de suivre une thérapie non verbale, il augmente ses chances de complète guérison mais aussi ses risques de revictimisation. La ou le spécialiste en charge doit agir avec un très haut degré d'intégrité pour veiller à ce que le processus soit positif et sans danger.

La crainte des conséquences sexuelles possibles du contact physique a amené beaucoup de thérapeutes à éviter tout travail axé sur le corps. La solution se trouve du côté de l'éducation et du perfectionnement professionnel, non de l'évitement. (Timms et Connors, 1990, p. 130)

FIN DE LA THÉRAPIE

La dernière étape thérapeutique pour le combattant est de planifier la In du traitement. Cette dernière tâche mérite autant d'attention que toutes, celles qui l'ont précédée. La célébration de la réussite du client et la reconnaissance de ses aptitudes et de ses points forts actuels font partie de ce processus final. Il est essentiel de procéder à un examen sérieux des progrès thérapeutiques du client et de reconnaître ouvertement l'importance de la relation thérapeutique aussi bien pour le client que pour la ou le thérapeute. Le client doit quitter la thérapie de façon nette sans laisser derrière lui d'aspects non résolus du processus thérapeutique.

Les clients indiquent qu'ils sont prêts à mettre fin à la thérapie lorsqu'ils se comportent régulièrement d'une façon autonome, montrant par là qu'ils sont prêts à devenir les architectes de leur propre rétablissement. Cela ne signifie pas nécessairement qu'ils ne présentent plus de symptômes en rapport avec l'abus sexuel. Cependant, lorsque ces symptômes apparaissent, le client se sent sûr de lui et capable de leur faire face.

Il est important que le client qui met fin à la thérapie sache que la porte de la ou du thérapeute lui est ouverte s'il désire revenir. Certains clients trouvent rassurant de revoir leur thérapeute à l'occasion et utilisent des séances de suivi irrégulières pour stabiliser leurs gains thérapeutiques. D'autres clients ont besoin de savoir qu'ils peuvent retrouver le soutien thérapeutique sans honte et sans perdre la face si des événements inattendus se produisent comme le rappel de souvenirs d'abus préalablement réprimés. En donnant au client la possibilité de renouveler son contrat avec la ou le thérapeute, si le besoin s'en fait sentir, on apporte un élément de sécurité au processus de cessation de la thérapie.

CHAPITRE 8 - THÉRAPIE DE GROUPE AVEC LES SURVIVANTS DE L'ABUS SEXUEL

Ce chapitre présente une thérapie de groupe à deux niveaux à l'intention des survivants de l'abus sexuel. Après avoir décrit les critères de sélection des participants et les règles générales qui s'appliquent aux groupes, on explique la différence entre les deux niveaux dont le premier est essentiellement psycho-éducationnel tandis que le deuxième est axé sur le processus. Je recommande un modèle de facilitation de groupe basé sur un leadership mixte et discute des problèmes associés au sexe des chefs de groupe.

La thérapie individuelle offre aux survivants un lieu rassurant et sans danger où identifier et examiner leur passé d'abus sexuel. La ou le thérapeute est souvent la première personne à qui le survivant parle de l'abus sexuel qu'il a subi dans son enfance et de la façon dont il a réagi par la suite à cette expérience. Même si la thérapie individuelle a un rôle central à jouer dans le processus de guérison, elle est renforcée et complétée par le traitement de groupe.

La thérapie de groupe axée sur l'abus sexuel donne aux survivants l'occasion de normaliser leurs expériences. et de réduire leur isolement. Beaucoup de survivants se sentent plus forts lorsqu'ils se rendent compte qu'ils n'ont pas été les seuls à être maltraités par une personne adulte à qui ils faisaient confiance. Les groupes de survivants donnent aux clients l'occasion de faire l'expérience d'un milieu social où le respect des frontières personnelles est de la plus haute importance et où ils peuvent pratiquer les aptitudes nouvellement acquises dans leurs rapports avec eux-mêmes et avec les autres. Les membres du groupe deviennent des modèles mutuels de guérison et catalysent la croissance les uns des autres.

Les groupes de survivants offrent à leurs membres un milieu sûr, structuré et rassurant où acquérir de nouvelles compétences et résoudre le traumatisme de l'abus sexuel. Pour beaucoup de survivants, c'est la première occasion qu'ils aient jamais eue de parler avec d'autres hommes de vulnérabilité et de blessure. Un homme qui se joint à un groupe de survivants déclare ouvertement qu'il a été victime d'abus sexuel. C'est un signe tangible qu'il cesse de nier la chose et qu'il est prêt à travailler plus directement avec les questions en rapport avec l'abus sexuel (Timms et Connors, 1990).

Le soutien que les survivants reçoivent des membres du groupe prend toutes sortes de formes. Le fait d'être écouté et cru constitue une validation puissante de l'expérience de victimisation de chaque survivant. L'écoute des expériences d'abus sexuel des autres membres suscite souvent chez les survivants des sentiments de compassion et de colère préalablement réprimés. Au départ, ces sentiments sont projetés sur les autres membres du groupe. Ils finissent par être revendiqués et intégrés au moi. Le partage émotionnel avec d'autres hommes, sans que cette intimité soit chargée de sous-entendus sexuels, offre à beaucoup de survivants de nouvelles possibilités d'amitiés masculines.

L'appartenance à un groupe donne aux survivants l'occasion de prendre conscience de leurs processus interactifs mésadaptés et de pratiquer de nouvelles aptitudes interpersonnelles. Les interactions directes avec les autres participants et les jeux de rôle effectués au sein du groupe permettent aux membres d'apprendre comment résoudre les conflits sans violence, comment veiller à ce que leurs besoins soient satisfaits et comment donner et recevoir une affection non sexuelle. Le fait de donner et de recevoir de l'aide renforce l'amour-propre des clients et compense leur sentiment d'impuissance.

Les membres du groupe se présentent les uns aux autres des modèles de stratégies d'adaptation efficaces et non efficaces. Ils réagissent directement et indirectement les uns aux autres à toutes sortes de niveaux. Il est fréquent que les interventions de groupe aient un effet indirect. Les membres du groupe apprennent par personne interposée en regardant leurs pairs croître et changer. « Chaque fois que quelqu'un prend davantage sa vie en charge, la réalité de la guérison est renforcée pour tout le monde » (Lew, 1988, p. 212).

Le traitement de groupe, cependant, n'est pas une panacée qui convient à tous les survivants. Pour certains clients, l'expérience du groupe peut s'avérer écrasante. Si les ressources intérieures d'un client ne sont pas suffisamment fortes pour contrebalancer le poids du processus de groupe, l'expérience peut s'avérer contre-thérapeutique. Chaque client a beaucoup moins de contrôle sur son expérience dans un groupe qu'en thérapie individuelle. Le fait que les clients déclenchent les souvenirs les uns des autres et servent de catalyseurs à leur croissance mutuelle peut être un élément positif ou négatif suivant le niveau de fonctionnement du client.

SÉLECTION DES MEMBRES DU GROUPE

Le processus d'évaluation des candidats possibles à une thérapie de groupe donne le ton des expériences de groupe subséquentes. Il faut prendre le temps nécessaire pour procéder à une évaluation minutieuse et complète des candidats. Pour fournir des renseignements utiles, les questions posées dans le cadre de l'évaluation doivent être directes, concrètes et axées sur le comportement.

Le travail de sélection est utile aussi bien pour les clients que pour les thérapeutes. Les clients peuvent utiliser l'entrevue d'évaluation pour se renseigner sur la thérapie de groupe et pour décider s'ils veulent ou non prendre part au processus. Les thérapeutes utilisent les entrevues de sélection pour se renseigner sur les antécédents d'abus sexuel des clients possibles et sur leur processus de rétablissement jusqu'ici afin de juger s'ils sont prêts à faire l'expérience de la thérapie de groupe.

Pendant l'entrevue de sélection, les clients doivent donner suffisamment de détails sur leur passé d'abus sexuel pour que les thérapeutes disposent des renseignements nécessaires pour encourager adroitement leur croissance dans le groupe. Les clients doivent aussi être informés des objectifs de traitement du groupe, de la philosophie qui le sous-tend et des méthodes qu'il met en œuvre. Il est bon de remettre aux clients une feuille d'information qui donne une liste des comportements acceptables et non acceptables dans le groupe et/ou des renseignements sur les objectifs et la structure du groupe. (On trouvera à l'annexe E un exemple de liste des comportements favorables au travail de groupe.)

Les personnes qui ont contribué à la recherche évaluent les questions spécifiques suivantes pour décider si un client est prêt à participer à une thérapie de groupe en rapport avec l'abus sexuel :

Aptitude du client à parler de l'abus sexuel dont il a été victime

Les survivants doivent pouvoir parler de leur passé d'abus sexuel sans trop de difficultés avant de se joindre à un groupe. Ils doivent avoir au moins un souvenir clair d'avoir été victimes d'abus sexuel. S'ils parlent de l'abus sexuel comme de « ça » ou ne sont pas capables de dire ou d'entendre les mots qui se réfèrent explicitement à l'abus sexuel, ils ne sont pas prêts à se joindre à un groupe.

Soutien

Les clients qui n'ont pas de soutien en dehors du groupe de thérapie ne sont pas de bons candidats pour le travail de groupe. Les membres d'un groupe doivent avoir accès à au moins une ou un ami proche ou à un réseau d'entraide en douze étapes qui leur fournisse un soutien social à l'extérieur du groupe. L'idéal serait que les clients qui participent à un traitement de groupe suivent en même temps une thérapie individuelle, au moins en fonction de leurs besoins. Au cours de l'évaluation, les thérapeutes en charge des groupes doivent demander à leurs clients un consentement à la divulgation d'informations pour pouvoir prendre contact avec leur thérapeute individuel(le) si nécessaire.

Il arrive qu'un client ne puisse pas suivre de thérapie individuelle simultanée faute d'argent ou faute de thérapeute. Dans ce cas, les chefs de groupe doivent être absolument sûrs, avant d'admettre le client dans leur groupe, que ses soutiens sociaux et ses aptitudes à l'autonomie sont suffisants pour faire face aux exigences de la participation à un groupe.

Motivation

Les membres des groupes doivent pouvoir parler de la façon dont leur victimisation sexuelle leur pose des problèmes dans leur vie actuelle. Ils doivent aussi être capables de mettre en mots les objectifs qu'ils cherchent à atteindre à l'issue du travail de groupe. Si les clients sont envoyés en traitement de groupe par leur thérapeute individuel(le), il est important de s'assurer que l'intérêt pour la thérapie de groupe vient du client et non de la ou du thérapeute. Les clients qui participent à un groupe parce que quelqu'un d'autre le leur conseille ne sont pas de bons candidats pour le travail de groupe.

Aptitudes Interpersonnelles

Les membres des groupes doivent avoir les aptitudes interpersonnelles nécessaires pour participer à un travail de groupe. Si un client se retrouve le bouc émissaire des autres membres du groupe à cause de son manque d'aptitudes sociales, le traitement de groupe n'aura sur lui qu'un effet de revictimisation ou de patronage. Tant qu'un client n'a pas suffisamment d'aptitudes sociales pour participer pleinement au travail de groupe, il est préférable d'utiliser d'autres modalités de traitement.

Autonomie

Les membres potentiels d'un groupe doivent pouvoir décrire les stratégies d'autoprotection qu'ils utiliseront pour faire face à leur propre souffrance et à la souffrance qu'ils ressentiront en écoutant les autres. Ils doivent prouver non seulement qu'ils connaissent ces stratégies mais qu'ils sont capables de les mettre en pratique.

Homophobie

Les clients activement homophobes ne sont pas de bons candidats pour le traitement de groupe de l'abus sexuel. Les hommes victimes d'abus sexuel doivent disposer de l'espace nécessaire pour explorer leur orientation sexuelle et leur identité masculine au cours du traitement de groupe et les attitudes rigoureusement hétérosexistes font obstacle à cette exploration.

Les hommes hétérosexuels et homosexuels sont traités dans les mêmes groupes. Certaines des personnes qui ont contribué à la recherche ont dit qu'elles séparaient autrefois les groupes en fonction de l'orientation sexuelle des membres mais qu'elles n'observent plus cette pratique. L'objet des groupes de traitement des survivants est l'expérience humaine de victimisation qu'ils partagent et non la question de l'orientation sexuelle.

Les personnes qui ont contribué à la recherche ont noté un paradoxe - bien que beaucoup de survivants soient très préoccupés par le fait qu'ils ont été agressés par un homme (lorsque c'est le cas) et que beaucoup d'entre eux soient passablement homophobes, ils ont un très grand désir d'établir des rapports plus étroits avec les hommes. lis ont remarqué que le mélange d'hommes hétérosexuels et homosexuels dans un groupe commence par provoquer la consternation. Pendant la période d'installation dans le groupe, les hommes commencent par être très sensibles à l'orientation sexuelle des membres. Cependant, lorsqu'ils arrivent à se connaître et à comprendre la différence entre les pédophiles et les homosexuels, cette tension se relâche. À la fin du traitement de groupe, quand les membres s'ouvrent les uns aux autres et partagent leur humanité, la question de l'orientation sexuelle n'a plus aucune importance.

Fonctionnement dans la vie présente

Les clients qui sont des toxicomanes actifs ou qui se remettent tout juste de leur toxicomanie ne sont pas de bons candidats pour la thérapie de groupe. Les clients suicidaires ou homicides sont trop instables émotionnellement pour se joindre à un groupe. Les clients qui se trouvent impliqués dans des rapports de mauvais traitement ou d'abus sexuel doivent régler ces problèmes directement avant d'entrer dans un groupe de survivants. Les clients activement psychotiques ou qui font face à une crise de vie majeure ne doivent pas non plus se joindre à un groupe.

Perpétration réactionnelle d'abus sexuel

Les thérapeutes doivent demander aux clients s'ils ont eux-mêmes pratiqué l'abus sexuel. Ce sera à vous de décider comment évaluer les actes commis par un client lorsqu'il était adolescent. La règle générale est qu'un client qui a commis des actes de perpétration répétitifs et structurés ou qui en a commis au cours des cinq dernières années ne doit pas se joindre à un groupe de survivants.

Trouble de personnalité multiple

Les clients qui présentent un trouble de personnalité multiple peuvent participer à un travail de groupe à condition de contrôler suffisamment leurs différentes personnalités. Les clients qui peuvent négocier des contrats thérapeutiques sur la façon dont ils gèrent leur dissociation et qui peuvent garder leur personnalité persécutrice à l'écart du groupe peuvent être acceptés dans un groupe. Les thérapeutes de groupe doivent expliquer aux autres participants en quoi consiste la personnalité multiple et ses manifestations afin de normaliser le processus.

MODÈLE DE THÉRAPIE DE GROUPE À DEUX NIVEAUX

Les personnes qui ont contribué à la recherche ont mis au point un certain nombre de modèles de groupe à l'intention des hommes victimes d'abus sexuel : toutes sortes de groupes - groupes menés par un et par deux leaders, groupes structurés et non structurés, groupes ouverts et fermés - sont offerts par différents thérapeutes dans différents lieux. Certains de ces modèles sont basés sur des principes théoriques, d'autres sur des nécessités pratiques. Cependant, qu'elles aient ou non dirigé un groupe elles-mêmes, toutes les personnes qui ont contribué à la recherche s'accordent à reconnaître l'utilité du traitement de groupe. Le modèle de traitement de groupe présenté ici reflète à la fois l'expérience de ces personnes et mon expérience personnelle.

Je recommande d'effectuer le travail de groupe à deux niveaux. Au premier niveau, on pratique un travail psycho-éducationnel dans un groupe fermé et structuré pendant huit à dix semaines. Cela convient aux clients qui en sont à l'étape de la victime. Les clients qui veulent pousser le traitement de groupe plus loin peuvent passer au deuxième niveau dans un groupe ouvert et non structuré qui se concentre sur la résolution du traumatisme lié à l'abus sexuel et sur l'acquisition d'aptitudes de vie fonctionnelles. Le niveau de traitement des effets de l'abus sexuel et l'intensité de cette deuxième étape conviennent aux clients qui en sont à l'étape du survivant.

Ce modèle convient aux survivants de l'abus sexuel pour un grand nombre de raisons. Comme pour la thérapie individuelle, la sécurité est le principe directeur du traitement de groupe offert aux survivants. Au début, lorsque les survivants commencent à fréquenter un groupe axé sur l'abus sexuel, ils sont anxieux et hésitants. Ils craignent de parler de leur victimisation avec d'autres personnes. Un groupe psycho-éducationnel structuré, dont l'objectif est connu à l'avance, constitue une initiation sans risque à ce processus nouveau.

Chaque semaine, le groupe psycho-éducationnel se concentre sur un thème choisi, comme la sexualité, les stratégies d'adaptation, l'autoprotection, la dynamique de l'abus sexuel, etc. On remet aux clients du matériel écrit ou un travail à effectuer avant la séance. La structure du groupe est flexible et la personne qui le dirige dit aux clients qu'ils peuvent demander au groupe de leur donner du temps pour s'occuper de leurs préoccupations personnelles en fonction de leurs besoins. Personne n'attend d'un membre du groupe qu'il parle de lui s'il n'en a pas envie.

Tous les clients du groupe psycho-éducationnel commencent et finissent le traitement de groupe en même temps. Cette structure donne aux nouveaux venus une occasion égale d'établir des rapports prévisibles et sans risque dans un contexte de groupe. Cela signifie aussi que les membres franchissent en même temps les diverses étapes de développement du groupe. La première séance porte sur les règles et procédures qui s'appliquent au groupe, les séances intermédiaires portent sur le matériel en rapport avec l'abus sexuel et le développement du travail de groupe et la dernière séance est une célébration du partage et de la croissance.

Cette façon d'aborder avec douceur le matériel lié à l'abus sexuel est une source de soutien et d'encouragement pour les clients. Elle donne aussi aux thérapeutes l'occasion d'évaluer pleinement la capacité des membres du groupe de faire face au travail de groupe dans le cadre d'une structure bien établie. Le groupe psycho-éducationnel permet aux clients qui ne sont pas encore prêts à se joindre à un groupe plus intense axé sur le processus de faire une expérience de groupe réussie. Ils peuvent ensuite se concentrer sur le renforcement de leurs aptitudes jusqu'à ce qu'ils soient vraiment prêts à participer à un groupe de traitement.

Le deuxième niveau exige davantage aussi bien des clients que des thérapeutes. Le groupe n'est pas structuré, c'est-à-dire que c'est aux clients de produire le matériel traité chaque semaine. Il est moins prévisible aussi bien pour les clients que pour les thérapeutes puisqu'il n'est pas possible de connaître l'ordre du jour à l'avance. Il est également plus souple et plus interactif que le groupe psycho-éducationnel. Les clients peuvent être invités à participer au travail les uns des autres et ils sont censés prendre une part active au processus de groupe.

Au deuxième niveau, le groupe est ouvert. Cela signifie que ce sont les clients qui décident combien de temps ils resteront dans le groupe en fonction de son utilité pour eux. Dans les groupes de survivants dirigés par les personnes qui ont contribué à la recherche, la durée moyenne du séjour des clients dans le groupe est habituellement d'un à deux ans. Comme les clients se joignent au groupe à des moments différents, les membres établis sont chargés de l'initiation et du soutien des nouveaux venus.

Les groupes axés sur l'abus sexuel sont basés sur un mélange de travail mutuel et de travail dirigé par la ou le thérapeute. Le partage et le soutien que les clients s'apportent mutuellement sont des composantes essentielles de la guérison. Cependant, à certains moments, les aptitudes de la ou du thérapeute, qui aide les clients à faire face aux situations abréactives ou à décoder leurs réactions de transfert, constituent des éléments indispensables de la guérison. Les thérapeutes doivent apprendre à discerner quand faciliter le processus de groupe et quand prendre du recul et laisser les participants prendre la relève.

Les groupes dirigés par les personnes qui ont contribué à la recherche comptaient entre six et dix membres. Un groupe de huit membres est idéal. Cependant, un ou deux membres de plus ou de moins ne modifie pas la qualité du service.

Les séances variaient en longueur, allant d'une heure à une heure et demie jusqu'à trois heures. Je recommande des séances de groupe de deux heures à deux heures et demie pour donner à tous les membres le temps de s'engager pleinement dans le processus. Les séances de groupe doivent avoir lieu une fois par semaine bien que les groupes de deuxième niveau puissent s'interrompre à plusieurs reprises au cours de l'année.

Pour ce modèle à deux niveaux, il est recommandé de réserver la participation au groupe aux hommes. Je pense qu'il est préférable pour la plupart des survivants, hommes et femmes, de commencer par travailler avec des membres du même sexe devant lesquels elles et ils peuvent plus facilement exprimer leur honte et leur embarras. Certaines personnes déclarent cependant travailler avec succès avec des groupes mixtes. Je pense qu'il est préférable de réserver les groupes mixtes aux clients qui veulent continuer à travailler en groupe après avoir terminé un groupe de deuxième niveau avec des hommes seulement. Les groupes mixtes pourront surtout aider les clients à l'étape thérapeutique du combattant.

RÈGLES DES GROUPES

Dans les groupes de premier comme de deuxième niveau, il faut établir un ensemble de règles afin de donner une structure au processus et d'en assurer la sécurité. Bien que beaucoup de règles soient les mêmes dans les différents groupes, chaque groupe doit veiller à ce que ses règles correspondent à ce qu'il a d'unique. Il est essentiel, au cours de la première séance des groupes psycho-éducationnels, de passer du temps à élaborer un ensemble de règles. Dans les groupes de deuxième niveau, il faut revoir les règles chaque fois qu'un nouveau membre se joint au groupe. Bien que certaines règles demeurent les mêmes pendant toute la vie d'un groupe, d'autres changent suivant son étape de développement.

Beaucoup de survivants auront d'abord du mal à formuler leurs besoins de sécurité. Ils ne sont pas habitués à penser à leurs besoins et n'ont guère eu l'occasion de les exprimer. La négociation en cas de conflit peut aussi représenter une expérience totalement nouvelle pour beaucoup de survivants. C'est pour cela qu'il faut revoir les règles de temps en temps pour s'assurer qu'elles restent appropriées et opportunes.

On trouvera ci-dessous certaines des règles clés utilisées par les personnes qui ont contribué à la recherche pour faire de leur groupe un milieu sans risque pour leurs clients. Il est très important que les chefs de groupe se servent des règles pour rappeler aux membres qu'ils sont responsables du processus. Les contraventions aux règles doivent être examinées. Beaucoup de survivants viennent de familles où régnait le chaos. L'établissement de limites prévisibles et cohérentes au sein du groupe est une étape essentielle de préparation du terrain pour permettre aux clients de prendre des risques et de commencer à guérir.

Confidentialité

Les participants doivent respecter le caractère confidentiel des renseignements fournis par les autres membres du groupe. Ils peuvent parler de leurs propres expériences dans le groupe à leurs amis ou à leur thérapeute mais ils ne doivent pas identifier les autres membres du groupe dans leurs conversations.

Frontières

Toute transgression des frontières d'un autre membre du groupe est inacceptable. Le contact physique ne peut se produire qu'avec l'accord des deux parties. Les rapports sexuels entre des membres du groupe sont interdits, au moins pendant la durée du groupe.

Expression affective

Tous les sentiments sont acceptables dans le groupe. Cependant, ils ne peuvent pas être exprimés d'une façon qui menace la sécurité de qui que ce soit - ni celle du survivant qui éprouve le sentiment ni celle de personne d'autre.

Participation active

Les membres sont censés participer activement au travail du groupe. Les problèmes qui se posent entre les membres doivent être traités au sein du groupe.

Présence

Les membres du groupe sont censés venir à toutes les séances. Si un membre ne peut pas venir à une séance, il doit prévenir les chefs de groupe avant la réunion. Si un client manque plus de deux séances consécutives, il doit renégocier son appartenance au groupe. Si un client décide de se retirer du groupe, on lui demande de l'annoncer au groupe et de revenir à la séance suivante pour dire au revoir.

Abstention

Tout membre du groupe peut choisir de ne pas participer à une partie ou à la totalité du travail de groupe. La seule chose obligatoire est la mise au point (voir ci-dessous). Le membre qui décide de ne pas participer est invité à déclarer « je passe » pour que les autres sachent qu'il s'agit d'un choix délibéré et non d'une dissociation ou d'un refus d'assumer ses responsabilités.

Sobriété

Les participants ne doivent pas venir aux séances après avoir consommé de l'alcool ou des drogues ou dans un état qui les rend incapables de participer au travail de groupe.

(On trouvera à l'annexe E, « Comportements qui renforcent le travail de groupe », une liste des règles élaborées par un organisme pour aider les membres des groupes à créer un environnement positif.)

THÉRAPIE DE GROUPE

Chacune des séances doit avoir un début, un milieu et une fin prévisibles. En faisant des séances des événements relativement prévisibles, on rend le milieu thérapeutique moins menaçant et plus bienfaisant.

La plupart des groupes commencent par une mise au point où chaque membre prend un moment pour parler au reste du groupe. Ce peut être l'occasion pour chacun de dire aux autres comment il s'est porté depuis la dernière séance ou d'annoncer ce dont il veut parler au cours de la séance présente. Certains facilitateurs commencent les groupes par des questions comme « Quel petit signe de guérison remarquez-vous? » ou « Quelle est la partie de votre corps que vous aimez le mieux et pourquoi? » et demandent à chaque membre du groupe de répondre dans le cadre de la mise au point. Les questions changent à chaque fois.

Quelle que soit la façon dont s'effectue la mise au point, elle doit être prévisible. Elle doit aussi être clairement limitée dans le temps et en termes de contenu pour que les membres ne l'utilisent pas pour commencer le travail thérapeutique. Les mises au point non maîtrisées qui deviennent le centre de la séance tout entière renforcent le comportement dysfonctionnel centré sur la crise. Même lorsqu'un client est en crise, le soutien que lui apporte la mise au point doit aussi le rétablir dans ses limites pour que tout le monde ait l'occasion de parler au groupe avant qu'une personne donnée ne retienne l'attention.

La portion intermédiaire de la séance variera suivant qu'il s'agit d'un groupe de premier ou de deuxième niveau. Dans un groupe de premier niveau, à moins qu'un client ait demandé du temps pour traiter une question particulière, le travail portera sur du matériel psycho-éducationnel. Bien qu'un certain travail affectif puisse se produire, ce n'est pas l'objectif premier du travail de groupe.

Les sujets utilisés avec des groupes de premier niveau par les personnes qui ont contribué à la recherche comprennent, entre autres :

  • aspects légaux et criminels de l'abus sexuel,
  • distribution typique des rôles dans les familles où se produit l'abus sexuel,
  • types d'agresseurs,
  • éducation sexuelle et information sur le développement sexuel normal,
  • intimité sexuelle et non sexuelle,
  • affirmation de soi,
  • types de relations - codépendance ou interdépendance,
  • résolution des conflits,
  • violence familiale - mauvais traitements physiques, sexuels et affectifs,
  • développement de l'enfant,
  • aptitudes parentales - conséquences ou punitions,
  • développement de l'amour propre,
  • techniques d'autoprotection et de réduction du stress,
  • comportements qui ont un effet contraire à l'objectif recherché.

Dans un groupe qui se réunit pendant huit à dix semaines, il est impossible de considérer tous les aspects des comportements liés à l'abus sexuel. Il faut demander aux membres des groupes de premier niveau de choisir les sujets qui les touchent de plus près et en faire les thèmes des séances.

Dans un groupe de deuxième niveau, l'étape intermédiaire de la séance est imprévisible. C'est en effet le moment utilisé pour travailler sur les questions identifiées par les clients au cours de la mise au point. La forme exacte que cela prendra dépendra du style et des compétences des chefs de groupe. Suivant le type de leadership du groupe, la nature de la question, le niveau de sécurité et de confiance au sein du groupe et la force du moi de chaque membre du groupe, on se concentrer sur la personne qui a soulevé la question ou on se servira de la question pour effectuer un travail de groupe.

Par exemple, si un client parle de ses sentiments de honte au cours de la mise au point, on peut suggérer qu'il travaille là-dessus individuellement. Cela signifie qu'il parlera des moments où il ressent de la honte et qu'on lui proposera des techniques pour l'aider à dépasser sa honte. Ces techniques pourront faire intervenir ou ne pas faire intervenir directement les autres membres du groupe. Par exemple, on peut demander aux membres du groupe de servir de miroir au client et de lui renvoyer à la fois son opinion de lui-même et l'opinion de lui qu'a chacune des autres personnes.

Une autre possibilité est de faire participer tous les membres du groupe à un exercice axé sur la honte. On peut leur demander de noter cinq de leurs expériences les plus honteuses sur des morceaux de papier séparés. Ces morceaux de papier sont placés dans une enveloppe que l'on fait circuler dans le groupe. On demande à chaque membre de tirer un papier et de le lire à voix haute. On travaille ensuite sur les réactions des hommes à ces révélations anonymes. Dans ce cas, l'attention ne porte pas sur un membre particulier du groupe et la question est traitée par le groupe dans son ensemble.

Quel que soit le style du groupe, il est important, après un travail intense, que tout le monde ait une chance de parler de son expérience personnelle. Il est essentiel de reconnaître l'importance de tous les membres du groupe, qu'ils parlent peu ou qu'ils parlent beaucoup, qu'ils soient au tout début ou à la fin de leur parcours personnel.

Dans un groupe de deuxième niveau, bien que le travail doive s'effectuer sans risque, il peut être une source d'inconfort. Leehan et Wilson (1985) remarquent que les membres du groupe forment des alliances ou définissent leur rôle dans le groupe sur la base du rôle qu'ils occupaient précédemment dans leur famille. Les chefs de groupe remettent en question ces tendances au transfert que les clients apportent dans le groupe. Les clients peuvent être très perturbés par la prise de conscience et la remise en question de leur façon habituelle d'établir des rapports avec les autres.

Les chefs de groupe doivent surveiller le type de question que les clients apportent dans le groupe et veiller à établir un équilibre raisonnable entre le travail intense axé sur le processus et les échanges sociaux agréables. Il faut partager et célébrer les succès des clients à égalité avec leurs souffrances. Le groupe ne doit pas seulement concentrer ses énergies sur la résolution des vieux traumatismes mais aussi sur l'acquisition de nouveaux comportements fonctionnels comme la reconnaissance des événements positifs et des résultats efficaces.

À la fin de chaque séance, on recommande que les clients participent à un rituel de conclusion. Les survivants ont besoin de temps pour se reprendre en main avant de quitter le groupe et de retrouver leur vie ordinaire. Si les membres du groupe (ou certains d'entre eux) ont effectué un travail intense, les clients ont besoin de temps pour intérioriser ce travail. Il est important de conclure un travail de groupe.

Des questions rituelles comme « Désirez-vous dire quelque chose avant de partir ce soir? » ou « Qu'est-ce que vous allez faire pour vous-même quand vous rentrerez chez vous? » peuvent faire partie de cette conclusion. Après un travail intense, certains groupes lâchent ensemble un grand cri de groupe ou un autre signal vocal approprié avant de clore la séance.

Certaines des personnes qui ont contribué à la recherche offrent une retraite à leurs groupes de deuxième niveau. Le groupe passe une fin de semaine ensemble dans un endroit confortable et une atmosphère détendue. Ce temps plus long passé ensemble permet aux membres du groupe de s'adonner ensemble à un travail émotionnel plus profond et plus soutenu. Tandis que les participants parlent de leur vécu d'abus sexuel, il arrive souvent que de nouveaux souvenirs et de nouveaux sentiments émergent. Dans un cadre temporel plus vaste, les membres du groupe peuvent participer à un travail expressif et symbolique puissant.

Lorsque vient le moment pour un client de terminer le travail de groupe, qu'il s'agisse d'un groupe de premier ou de deuxième niveau, il faut gérer son départ avec tact et intelligence. Les clients doivent être bien préparés pour la cessation du travail de groupe. Ils ont besoin de beaucoup de temps pour remplacer le soutien qu'ils ont reçu au sein du groupe par d'autres ressources. Ils doivent avoir la permission de faire de nouveau appel au groupe ou à d'autres interventions thérapeutiques s'ils en éprouvent le besoin. Ils doivent avant tout être conscients des changements que leur participation au groupe a produits et ils doivent célébrer leur succès. Beaucoup de clients hésitent à assumer pleinement leurs triomphes parce qu'ils craignent que cela ne soit une façon de tenter le destin. Sans s'en rendre compte, ils minimisent une victoire durement gagnée. Les chefs de groupe doivent tenir compte de cette réduction subtile et encourager les clients à honorer leurs réussites.

CHEFS DE GROUPE

Dans les groupes axés sur l'abus sexuel, il est important d'avoir deux chefs de groupe, particulièrement au deuxième niveau. Les survivants déclenchent des réactions en chaîne dans les groupes et il y a souvent trop de travail pour une seule ou un seul thérapeute. Si deux thérapeutes sont présents à chaque séance, la première ou le premier peut assumer le rôle de leader principal tandis que l'autre peut s'occuper des membres moins actifs. Les clients tranquilles peuvent en fait être en cours de dissociation et avoir besoin de soutien et d'aide pour revenir au travail qui se fait ici et maintenant.

Les deux chefs de groupe doivent avoir des connaissances et des compétences bien adaptées les unes aux autres. Ils doivent tous deux pouvoir rassurer, confronter et mettre au défi les clients en fonction des besoins. Ils doivent travailler en équipe parce que les membres du groupe essaieront souvent inconsciemment de les partager en bon thérapeute et mauvais thérapeute pour reproduire les anciennes tendances familiales.

Les deux thérapeutes doivent s'attendre de temps en temps à des réactions de transfert de la part des clients. Ceci peut aller de la haine à l'adoration. Les chefs de groupe doivent s'assurer qu'ils disposent du temps nécessaire entre les séances de groupe pour examiner ces réactions et travailler sur leurs propres contre-transferts. Une bonne supervision est essentielle pour aider les chefs de groupe à séparer les processus présents et actuels des transferts liés au passé.

Certaines des personnes qui ont contribué à la recherche soutiennent que les deux chefs de groupe doivent être des hommes alors que d'autres pensent qu'une équipe mixte homme et femme est un modèle plus approprié pour mener un groupe. Les deux points de vue ont leurs mérites. Une équipe mixte donne aux membres du groupe la possibilité de pratiquer l'autodévoilement avec les deux sexes et d'observer ce que sont des rapports mutuellement respectueux entre un homme et une femme. En fait, le modèle que représente un rapport de travail sain entre un homme et une femme est souvent cité comme l'un des avantages les plus importants d'un leadership mixte. Une équipe constituée de deux hommes est une façon de remettre en question ce que les membres du groupe pensent des hommes. En voyant deux chefs de groupe de sexe masculin travailler en collaboration et se montrer rassurants ou provocants en réponse à la situation, les clients sont amenés à remettre en question leurs idées préconçues sur le comportement masculin.

La plupart des personnes qui ont contribué à la recherche s'accordent sur le fait que l'aptitude des thérapeutes à travailler avec les questions en rapport avec l'abus sexuel constitue le facteur le plus important. Leur sexe a moins d'importance que le fait qu'ils travaillent bien en équipe et sont compétents et expérimentés. Avant de se joindre à un groupe, les membres potentiels devraient rencontrer les deux chefs de groupe. Si un client n'est pas préparé à travailler avec une équipe de deux hommes ou avec une équipe mixte, on peut l'aider à trouver d'autres possibilités de traitement.

CHAPITRE 9 - PROBLÈMES PARTICULIERS ASSOCIÉS AU TRAITEMENT DES SURVIVANTS

Ce chapitre traite de trois problèmes thérapeutiques critiques. On y présente les stratégies mises au point par les personnes qui ont contribué à la recherche pour inciter les survivants à entamer une thérapie. On y discute également de certaines impasses thérapeutiques typiques auxquelles se sont heurtées les personnes qui ont contribué à la recherche et l'on y présente, pour finir, différentes opinions sur la question complexe du sexe respectif du client et de la personne en charge de la thérapie.

Les personnes qui ont contribué à la recherche ont identifié plusieurs thèmes communs qui reviennent régulièrement dans leur travail avec les survivants. Beaucoup de clients potentiels ne cherchent pas à se faire aider parce qu'ils minimisent l'impact sur leur vie adulte de l'abus sexuel dont ils ont été victimes. Lorsque les survivants ont recours à des services professionnels, ils le font souvent dans l'espoir de trouver une solution toute faite à leurs problèmes et ils ne sont pas prêts pour le long processus d'examen de soi qui fait partie intégrante du rétablissement de l'abus sexuel.

Les transferts négatifs sur les personnes en situation d'autorité ou sur tous les adultes du même sexe que la personne qui a perpétré l'abus sexuel peuvent aussi contaminer le processus thérapeutique. Tant que ces dynamiques n'ont pas été examinées consciemment, les clients peuvent refuser d'entamer un traitement parce qu'ils généralisent les expériences négatives passées et les projettent sur un grand nombre d'autres situations, y compris la thérapie.

STRATÉGIES D'INCITATION AU TRAITEMENT

Il peut être difficile d'inciter des survivants de l'abus sexuel à entamer une thérapie. En fait, certaines des personnes qui ont contribué à la recherche ont dit que c'était souvent la tâche thérapeutique la plus ardue. Comme beaucoup d'hommes ne considèrent pas comme un abus sexuel l'expérience qu'ils ont eue dans leur enfance, ils ne font pas le rapport intellectuel avec leur vécu lorsqu'une ou un thérapeute utilise une terminologie associée à l'abus sexuel en réponse à leur histoire passée. Si le client n'a pas fait de rapport entre l'abus sexuel dont il a été victime et ses problèmes présents, la terminologie associée à l'abus sexuel lui semble incongrue. Si l'on soupçonne qu'un client est un survivant de l'abus sexuel mais qu'il n'est pas prêt à identifier son expérience comme un « abus » ou lui-même comme une « victime », il faut utiliser l'expression plus générale de « traumatisme subi dans l'enfance » lorsque l'on fait allusion au passé du client.

En expliquant aux survivants comment leurs sentiments de vulnérabilité (comme la souffrance, la tristesse, la perte et l'abandon) ne sont pas reconnus pour des raisons culturelles et en les encourageant à assumer complètement leur expérience personnelle, on leur donne la permission de redéfinir leur concept de masculinité.

Il faut du courage et de la conviction pour chercher à changer et pour accepter de faire face à ses blessures. Ces qualités correspondent aux modèles traditionnels de la masculinité. En insistant sur ces qualités chez le client, on facilite le processus d'incitation à la thérapie.

Pour des raisons évidentes, les survivants ont du mal à faire confiance aux autres. Les clients ont besoin d'entendre que la confiance n'est pas une condition préalable au rétablissement - en fait, c'est plus souvent un résultat du rétablissement. L'aptitude à discerner qui est digne de confiance et qui ne l'est pas et à retenir sa confiance jusqu'à ce que l'autre l'ait gagnée devrait se développer au cours de la thérapie. La sécurité, cependant, est une condition du succès de la thérapie. Il est essentiel que les thérapeutes et les clients passent des accords clairs et les thérapeutes ne doivent pas cesser d'encourager les clients à formuler explicitement leurs besoins en matière de sécurité. Comme il y a des chances pour que ces besoins changent bien des fois au cours de la thérapie, les clients doivent savoir que les questions liées à la sécurité sont toujours à l'ordre du jour.

En encourageant les clients à adopter une attitude de consommateurs à l'égard de la thérapie, on leur donne la permission de choisir la personne avec qui travailler. On peut suggérer aux clients, pour les rassurer, d'interviewer plusieurs thérapeutes avant de choisir définitivement celle ou celui avec qui ils décident de rester. Au cours de l'abus sexuel subi dans l'enfance, les victimes n'avaient qu'un choix - se soumettre à l'agresseur. En thérapie, les clients ont besoin de savoir qu'ils disposent d'un grand nombre d'options concernant la personne avec qui travailler, à quelles fins et pendant combien de temps.

Les thérapeutes doivent être prêts à ce qu'on leur pose des questions comme « Êtes-vous vous-même un survivant? Quelle est votre orientation sexuelle? Pourquoi faites-vous ce travail? ». Dans beaucoup de thérapies, on entraîne les thérapeutes à répondre à ces questions en les renvoyant au client. Bien que cette façon de réagir ait certainement sa place dans les thérapies avec les survivants, je suggère qu'avant de ramener l'attention au client, les thérapeutes donnent des réponses simples, directes et honnêtes à ces questions. Il y a des chances pour que les survivants mettent votre sincérité à l'épreuve. On peut habituellement renforcer le processus d'incitation à la thérapie en répondant simplement à des questions directes.

En prévenant les clients des choses qui peuvent arriver en thérapie, comme les périodes de stagnation ou les échecs réels, on les aide à accepter ces événements lorsqu'ils se produisent. Si l'on dit aux clients au départ que leur moi a différents aspects dont certains fonctionnent à un âge ou une étape qui ne correspond pas à leur âge chronologique, cela leur donne la permission de laisser émerger ces parties réprimées de leur moi. Il se peut que les clients régressent au cours des flashbacks ou des interventions hypnotiques. En normalisant et en prévoyant ces types d'incident, on les rend moins effrayants s'ils se produisent.

La plupart des survivants ont besoin de comprendre les avantages immédiats qu'ils peuvent tirer de thérapie. Les clients viennent chercher progrès et soulagement en thérapie. lis ne sont pas préparés pour les affects intenses et apparemment négatifs qui émergent au cours d'une thérapie axée sur l'abus sexuel. En expliquant les avantages présents et à venir de la thérapie, on peut aider les clients à tenir le coup lorsqu'ils se sentent découragés.

Certains clients n'ont guère d'expérience en thérapie et pensent que c'est la même chose qu'une visite chez le médecin. Ils s'attendent à ce qu'on leur offre une solution toute faite sans effort de leur part. Il est essentiel, au début de toute thérapie, d'expliquer aux clients en quoi consiste le processus thérapeutique et de les inviter à peser ses coûts et ses avantages.

Il faut, en particulier, donner aux clients une idée raisonnable du temps qu'ils devront sans doute passer en thérapie. Bien que la plupart des thérapies axées sur l'abus sexuel exigent un engagement d'au moins un an, le processus thérapeutique peut commencer par un court contrat de quatre à six séances. Cela permet au client d'évaluer l'utilité du processus et de se familiariser avec lui avant de décider de consacrer le temps et l'argent nécessaires à la thérapie. En passant avec les clients des contrats ciblés et limités dans le temps, on peut réduire de beaucoup la crainte qu'ils ont d'être submergés par le processus thérapeutique.

Une partie particulièrement importante de ce travail consiste à planifier le déroulement de la thérapie avec les clients en fonction de leurs ressources intérieures et extérieures. Ils doivent avoir suffisamment de ressources personnelles (p. ex., temps, argent, soutien social) pour s'engager dans le processus thérapeutique. Si la thérapie ajoute une pression supplémentaire aux ressources limitées d'un client, il risque d'être obligé d'y mettre fin prématurément, peut-être à l'étape du survivant pendant laquelle il est en fait plus vulnérable qu'il ne l'était avant d'entamer la thérapie.

Lorsqu'on commence une thérapie avec un survivant, il faut découvrir comment il traite généralement l'information et agir en conséquence. Si un client est très concret dans sa façon de procéder, la ou le thérapeute devra également être concret. Cela signifie que la thérapie avec les survivants commence souvent sur le plan intellectuel.

Au départ, certains survivants ont très peur et ne savent pas quoi attendre du processus thérapeutique. Pour aider ces clients à entamer une thérapie, il est important que les thérapeutes leur présentent des modèles de simplicité et de confort lorsqu'ils abordent des questions difficiles et leur donnent des renseignements qui ont un effet de normalisation.

D'autres clients débordent d'émotions lorsqu'ils abordent la thérapie. Au cours des séances initiales, il faut les aider à contenir leurs sentiments jusqu'à ce qu'ils aient établi un rapport plus ferme avec la ou le thérapeute et puissent donner cours sans risque à leur vulnérabilité.

Lorsqu'on questionne les clients sur leur passé d'abus sexuel, il est très important de donner à chacun la permission de raconter son histoire à son propre rythme. Si un client ne se sent pas suffisamment en sécurité pour parler de son vécu d'abus sexuel, il y a des chances pour qu'il devienne dissociant ou évasif, ce qui est contre-thérapeutique. Le dévoilement des événements explicites qui ont constitué l'abus sexuel est généralement un processus continu plutôt qu'un événement unique. Les parties de l'abus sexuel auxquelles le client a participé activement ou qui lui ont causé le plus de honte sont généralement les dernières à être dévoilées.

Dans Resolving Sexual Abuse, Yvonne Dolan parle de la façon dont elle invite ses clients à parler de leur passé :

La thérapeute doit communiquer un sentiment d'attention concernée qui, tout en évitant le voyeurisme dans son intérêt pour les détails, ne minimise ni ne rejette rien par inadvertance faute d'une exploration suffisante des faits réels de la victimisation. J'aime commencer par demander doucement à mon client de « bien vouloir me dire tout ce que vous estimez que je dois savoir pour que vous sachiez que je comprends. » (Dolan, 1991, p. 26)

Ce type d'interrogation respectueuse rassurera le client en lui montant que c'est parce que l'on s'intéresse à lui qu'on lui pose des questions susceptibles de provoquer de l'anxiété. En donnant au client la permission de « me dire juste ce qu'il faut pour que je comprenne ce qui vous est arrivé » la ou le thérapeute remet au client le pouvoir de décider quelles informations révéler.

Les hommes qui suivent une thérapie sont invités à ne pas modifier leurs relations personnelles tant qu'ils n'ont pas atteint l'étape du combattant à moins qu'il ne s'agisse d'une relation abusive. Habituellement, les relations sont renforcées par le processus de rétablissement à mesure que l'amour-propre et les aptitudes interpersonnelles du client s'améliorent.

Il est bon de dire aux clients qu'ils n'ont pas besoin d'être mieux pour commencer à profiter de la vie. Le plaisir de vivre doit être un processus continu et non un objectif à venir. La participation à des activités enrichissantes qui ne sont pas axées sur le rétablissement aide les clients à maintenir un équilibre dans leur existence.

IMPASSES THÉRAPEUTIQUES

Malgré tout ce que les thérapeutes peuvent faire pour inciter leurs clients à participer au processus thérapeutique, il arrive toujours que des clients rejettent la thérapie ou y mettent fin prématurément. Certains thèmes ont émergé lorsque l'on a demandé aux personnes qui ont contribué à la recherche d'identifier dans quelles circonstances les clients avaient tendance à abandonner la thérapie avant la fin.

Les thérapeutes expérimentés savent que, pour beaucoup de survivants, l'expérience de vie subjective empire au cours de la thérapie à mesure qu'ils reprennent possession de souvenirs et de sentiments qui étaient préalablement dissociés.

Le client n'a aucun moyen de savoir qu'une fois qu'il aura abandonné ses stratégies de défense mésadaptées et acquis des stratégies fonctionnelles, il trouvera la vie beaucoup plus satisfaisante. Au contraire, à court terme, il peut estimer que la thérapie fait empirer sa vie plutôt qu'elle ne l'améliore. En conséquence, beaucoup de clients abandonnent prématurément la thérapie pendant l'étape du survivant.

En prévenant le client à l'avance, on peut l'aider à faire confiance à son propre processus de rétablissement et à poursuivre la thérapie. Il peut être utile d'utiliser la métaphore du trapéziste. Un trapéziste doit abandonner un trapèze avant d'en attraper un autre. Pendant un moment, il se retrouve en l'air sans pouvoir s'accrocher à aucun des deux trapèzes. Il doit faire confiance à la vitesse acquise qui lui permettra d'arriver à destination. On peut étendre la métaphore en faisant remarquer que le rôle de la ou du thérapeute est de servir de filet tout au long du processus.

Certains clients manquent de réalisme. Ils attendent du processus thérapeutique qu'il compense toutes les peines et toutes les pertes passées. Lorsqu'ils se rendent compte que le traitement ne répond pas à ces attentes, ils mettent fin à la thérapie.

Certains survivants entretiennent de faux espoirs sur le temps qu'il faut pour effectuer des changements affectifs. Ils cherchent une solution toute faite à la dépression, par exemple, et abandonnent par désespoir lorsque cela ne se concrétise pas. Ils peuvent transférer leur colère sur la ou le thérapeute qui ne les « répare » pas. Il faut savoir identifier ce transfert et le ramener à ses racines traumatiques.

D'autres survivants confondent résolution de crise avec rétablissement et guérison. Ayant entamé une thérapie à cause des problèmes qui se posaient dans leur vie, comme la rupture d'une relation ou des difficultés avec les personnes en situation d'autorité au travail, ils abandonnent la thérapie dès que la crise immédiate associée à ce problème est résolue. Ils ne se rendent pas compte que, bien que les symptômes immédiats aient pu disparaître, la dynamique sous-jacente reste la même. La croyance que la disparition du symptôme correspond à la guérison amène beaucoup de clients à abandonner la thérapie prématurément. Cependant, si les problèmes réapparaissent, ce qu'ils font généralement, cela incite certains clients à décider d'explorer les éléments qui sont à la base de leur comportement. C'est pourquoi il est recommandé aux thérapeutes d'inviter clairement leurs clients dès le départ - sans les juger - à revenir en thérapie à tout moment.

Il y a une symétrie entre les injonctions (les ordres reçus dans l'enfance) qu'une victime a reçues dans le cadre de l'abus sexuel et son fonctionnement adulte. Lorsqu'un client n'est pas prêt à faire face à une injonction et à la changer, sa loyauté envers l'injonction peut l'amener à abandonner la thérapie. Par exemple, si la personne qui l'a agressé lui a dit que sa vie serait en danger s'il parlait de ce qui lui arrivait, le fait de parler de l'abus sexuel en thérapie peut lui causer tellement d'anxiété qu'il se retrouve incapable de continuer.

Lorsque le client a été victime d'abus sexuel grave ou rituel, les prohibitions peuvent réduire ses aptitudes à faire face au matériel associé à l'abus. Il peut s'avérer complexe et délicat d'inciter à la thérapie un client qui présente un trouble de personnalité multiple et dont le « moi persécuteur » reste loyal à l'agresseur. Dans le cas des clients qui ont souffert d'un abus sexuel moindre, il faut identifier les injonctions en termes à la fois de leur contenu et de la personne qui les a émises. L'examen intellectuel de la réalité et un travail expressif de validation permettent de remettre en question la vieille injonction et réussissent généralement à réduire son pouvoir.

Certains survivants ont tiré des gains secondaires de leur identité de victime et ils peuvent résister à la thérapie parce qu'ils ne veulent pas modifier leurs tendances dysfonctionnelles. S'ils ne voient pas les avantages du changement et n'ont conscience que de l'anxiété et de l'effort qui l'accompagnent, ils n'investiront pas dans le processus thérapeutique. Ces survivants ont souvent des aptitudes sociales et professionnelles inadéquates. Avant de pouvoir s'attendre à apporter des changements substantiels à leur vie, ils doivent acquérir les aptitudes qui serviront de soutien à ces changements. Par exemple, si un client a projeté la colère qu'il ressent envers son agresseur sur ses patrons et perd sans cesse son emploi parce qu'il n'arrête pas de se disputer avec ses employeurs, il se peut qu'il ait besoin d'apprendre à contrôler sa colère et à régler les conflits avant de stabiliser suffisamment son existence pour commencer une thérapie axée sur l'abus sexuel.

PROBLÈMES ASSOCIÉS AU SEXE DE LA PERSONNE EN CHARGE DE LA THÉRAPIE

Les clients qui ont été victimes d'abus sexuel projettent inconsciemment leur expérience passée dans le présent. Dans bien des cas, ils projettent sur la ou le thérapeute leurs rapports avec l'agresseur ou certains aspects de ces rapports. Il faut décoder et comprendre ces projections, ou transferts, pour aider le client à prendre conscience de ses tendances inconscientes. Les transferts peuvent être déclenchés par le sexe de la personne en charge de la thérapie ainsi que par son comportement personnel ou ses caractéristiques. Le transfert associé au sexe se présente de façon différente pour chaque client en fonction du sexe de la personne qui l'a agressé, de sa propre orientation sexuelle et des aspects particuliers de son expérience d'abus sexuel.

La question du sexe de la personne en charge de la thérapie fait l'objet de débats au sein de la communauté thérapeutique. Certains disent que les hommes qui ont été abusés par un homme doivent être traités par d'autres hommes pour retrouver un sentiment sain de masculinité. D'autres, et j'en suis, estiment que le sexe de la personne en charge de la thérapie est un problème mineur comparé à sa compétence.

Les thérapeutes qui estiment que les survivants sont mieux servis par des hommes avancent des arguments basés sur la théorie de l'apprentissage social et la politique des sexes. Ils estiment que les hommes qui ont été blessés par d'autres hommes ont besoin de guérir ces blessures grâce à l'attention et au soutien compétent d'une personne du sexe masculin. Lorsqu'un client travaille avec un thérapeute et que le thérapeute devient un modèle d'attention masculine appropriée et non abusive, il reçoit un message implicite de soutien masculin. Le thérapeute partage les expériences culturelles de son client en matière de sexe. Ces expériences informent son travail et cela fait de lui une source d'aide plus appropriée que ne le serait une femme. Les tenants de cette positon soutiennent que, lorsqu'un client travaille sur ses problèmes de vulnérabilité sexuelle ou d'identité sexuelle avec un homme, il peut résoudre plus profondément ses problèmes que s'il travaille avec une femme. (Les femmes thérapeutes qui travaillent avec des survivantes ont utilisé des arguments presque identiques à l'appui d'un modèle de traitement cliente/thérapeute de sexe féminin.)

On avance parfois des raisons pratiques plutôt que théoriques à l'appui de la position que les clients sont mieux servis par des thérapeutes de sexe masculin. Comme beaucoup d'hommes, y compris les survivants, ont intériorisé des croyances culturelles sexistes ou misogynes, on soutient que les hommes abordent plus facilement le processus thérapeutique lorsqu'ils ont affaire à un autre homme. Dans cette perspective, une thérapeute ne jouira pas de la même crédibilité aux yeux du client et celui-ci aura tendance soit à rejeter le processus thérapeutique comme « une affaire de femme », soit à tenter de le transformer en rencontre sociale. Certains suggèrent que les survivants adolescents sont trop embarrassés pour parler de leur sexualité ou de l'abus sexuel avec une thérapeute et que ces clients sont mieux servis par des hommes.

Les thérapeutes qui estiment que le sexe de la personne en charge de la thérapie est une variable mineure ou sans conséquence dans le processus de rétablissement ont tendance à utiliser des arguments humanistes à l'appui de leur pratique. Leur position est basée sur la croyance que la sécurité, le respect, l'empathie, l'intégrité, l'ouverture, la compétence et l'expérience qu'une ou un thérapeute apporte dans son travail sont plus importants que son sexe. Pour ces thérapeutes, tout ce qu'un client présente apporte de l'eau au moulin de la thérapie. Que le transfert du client soit déclenché par un homme ou par une femme, il fournit du matériel intéressant avec lequel travailler.

Dans le cas des thérapies de groupe, les membres de cette école de pensée ont recours à un leadership mixte pour diriger le groupe parce qu'ils estiment que cela a l'avantage supplémentaire de servir de modèle de rapports appropriés entre un homme et une femme et que les deux chefs de groupe peuvent dispenser aux participants un soutien respectueux et encourageant indépendamment de leur sexe.

Les opinions sur l'importance du sexe respectif de la personne en charge de la thérapie et du client varient parmi les personnes qui ont contribué à la présente recherche. Certaines croient fermement que, bien que le processus thérapeutique puisse être plus lent au départ, un survivant dont l'agresseur était un homme sera finalement mieux servi si la thérapie est dispensée par un homme. Les autres sont persuadées que les questions de sexe sont politiques plutôt que thérapeutiques. Leur préoccupation dominante est que les clients bénéficient d'une bonne thérapie.

Les points de vue théoriques mis à part, c'est souvent à partir de considérations administratives plutôt que thérapeutiques que l'on décide quels clients vont travailler avec quelles ou quels thérapeutes. La situation financière d'un client peut limiter ses choix thérapeutiques. Certains organismes traitent les clients à mesure qu'ils se présentent et non en fonction de ce qui convient le mieux. Dans d'autres organismes, le seul personnel qui ait des connaissances dans le domaine de l'abus sexuel est constitué de femmes et, pour le meilleur ou pour le pire, ce sont elles qui traitent les survivants.

L'idéal serait que chaque client puisse choisir librement le sexe de la personne avec qui il effectuera sa thérapie. Les craintes, conscientes ou inconscientes, de revictimisation des clients et leur sentiment de sécurité avec une personne plutôt qu'une autre sont des éléments très personnels. Le client et la personne en charge de la thérapie ont tout deux besoin de faire confiance à l'intuition du client quant au sexe qui semble au départ offrir le plus de confort parce que la thérapie doit commencer avec le plus grand sentiment de sécurité possible.

Éventuellement, les survivants devront faire face aux deux sexes. Dans le cadre du processus de rétablissement, ils trouveront probablement utile de travailler avec des personnes du sexe avec lequel ils se sentent moins à l'aise. La seule règle à suivre est qu'un client ne doit jamais être obligé de travailler avec une personne qui ne lui donne pas un sentiment de sécurité soit à cause de son sexe, soit pour d'autres raisons, parce que cela répète la dynamique originale de l'abus sexuel.

L'idéal serait que le choix du sexe de la personne en charge de la thérapie soit basé sur les besoins du client. L'orientation sexuelle du client est aussi une autre variable dont il faut tenir compte lorsqu'on choisit une ou un thérapeute. La sous-culture gaie a des normes bien à elle qui régissent la sexualité et les relations. Étant donné la nature hétérosexiste de notre culture, beaucoup de thérapeutes ne sont pas familiers avec les habitudes et les nuances de la sous-culture gaie. Les thérapeutes qui travaillent avec des clients gais doivent être prêts à examiner leurs propres attitudes et leurs propres prémisses hétérosexistes et à se renseigner sur la sous-culture de leurs clients.

CHAPITRE 10 - COUNSELING DES SURVIVANTS ADOLESCENTS

Ce chapitre porte sur le traitement des adolescents qui ont survécu à l'abus sexuel. On y discute de la difficulté à inciter cette population à suivre un traitement et on propose divers moyens d'encourager le processus. On y traite également de la question de l'évaluation des adolescents, notamment, de leur niveau de motivation et de leur maturité. On y présente des directives pour travailler avec cette population et plusieurs interventions que les personnes qui ont contribué à la recherche ont mises au point à cette fin. On recommande enfin le traitement de groupe comme modalité de traitement préférée pour les adolescents parce que cela correspond à leur étape de développement.

Les survivants adolescents ne différent pas des survivants adultes dans la façon dont ils réagissent à l'abus sexuel. Les uns et les autres éprouvent des sentiments de trahison, de stigmatisation, de honte et de colère. Les uns et les autres se posent des questions sur leur masculinité et leur identité sexuelle. Du point de vue du développement, cependant, les survivants adolescents sont différents des adultes et la thérapie qui leur est dispensée doit refléter cette différence.

Les adolescents en sont encore à former leur identité sexuelle, psychologique et physique. Ils ont une persona plus facile à changer que les adultes et sont davantage prêts à expérimenter des styles psychosociaux différents et souvent opposés. Les adolescents sont très influencés par leurs camarades. Pour la plupart d'entre eux, l'essentiel est d'être acceptés par la culture des pairs. Les parties du moi avec lesquelles les adolescents s'identifient le plus consciemment reflètent généralement les valeurs de leur groupe de camarades du moment.

Les adolescents qui ont été victimes d'abus sexuel ne sont pas disposés à intégrer des expériences qu'ils considèrent déviantes (comme l'abus sexuel) à leur persona sexuelle. Ils ont tendance à accepter le mythe qui dit qu'ils doivent tout savoir sur les questions sexuelles quelles que soient les limites de leurs connaissances personnelles. Il n'est pas bien vu d'avoir des inquiétudes sur sa sexualité.

Pour beaucoup de survivants adolescents, le pouvoir des mythologies sanctionnées par la culture sur la sexualité et la masculinité l'emporte sur l'expérience personnelle. C'est à cause de cela que beaucoup nient leur victimisation. Ou bien ils répriment leurs souvenirs de l'abus sexuel ou bien ils récrivent leur histoire et présentent l'abus comme une chose à laquelle ils ont consenti. Comme beaucoup d'agresseurs ont l'art de se décharger de la responsabilité de leurs actions sur leurs victimes, cette fausse interprétation de la réalité bénéficie généralement aussi du soutien de l'agresseur. D'autres victimes voient clairement que l'abus sexuel était une forme d'exploitation mais nient qu'il ait eu un impact quelconque sur eux (Froning et Mayman, 1990).

L'ironie est qu'il est souvent plus facile pour les survivants adolescents de parler de leurs infractions sexuelles contre d'autres que de parler de leur propre victimisation parce que les comportements d'agression sont davantage conformes aux attentes culturelles sur le pouvoir et le contrôle masculins. Un grand nombre des survivants adolescents en cours de counseling se retrouvent dans un établissement de traitement pour infraction d'ordre sexuel. Les adolescents qui ne réagissent pas à l'abus sexuel dont ils ont été victimes par des comportements dangereux pour les autres ne sont souvent jamais traités, particulièrement si l'inconfort qu'ils éprouvent à l'égard de leur victimisation les empêche d'en parler.

Les adolescents ont tendance à se croire invincibles. Ils n'ont généralement pas conscience des circonstances et/ou des besoins de leur enfance qui les ont laissés vulnérables à l'abus sexuel. Ils se blâment pour leur victimisation. Encore à la recherche de leur identité, ils ne voient pas le rapport entre les difficultés qu'ils éprouvent dans leurs relations de couple ou leurs comportements dysfonctionnels et leur victimisation sexuelle. Ils n'ont pas encore de longue histoire de problèmes d'intimité qui les incite à remonter à la source de leurs difficultés. Ils ont davantage tendance à se voir comme souffrant d'un vice secret ou bien ils acceptent leurs difficultés comme des traits de caractère inévitables.

RÔLE DU COUNSELING DES ADOLESCENTS VICTIMES D'ABUS SEXUEL

La thérapie est une expérience contre-culturelle pour les adolescents. Le processus thérapeutique constitue une remise en question de l'autonomie et de l'indépendance masculines et des comportements basés sur l'action. Pour beaucoup d'adolescents, participer à une thérapie veut dire qu'on est « dingue » ou « malade ». La grande difficulté pour les thérapeutes consiste à gérer la thérapie de telle sorte qu'elle constitue une expérience utile et non stigmatisante pour les survivants adolescents.

L'expérience thérapeutique des survivants adolescents ne sera pas la même suivant que l'abus sexuel a eu lieu au sein de la famille ou à l'extérieur. Dans les deux cas, il faut faire participer la famille de l'adolescent au traitement s'il vit toujours à la maison. Si l'abus sexuel a eu lieu au sein de la famille, les autres membres de la famille devront également faire l'objet d'un counseling étendu. Si les membres de la famille veulent rester ensemble, le traitement comprendre une thérapie intensive sur le plan de l'individu, du groupe et de la famille. Même lorsque les familles réagissent de façon appropriée au dévoilement de l'abus sexuel, le rétablissement de l'adolescent sera renforcé par une thérapie familiale.

La thérapie familiale peut s'avérer impossible si les adolescents n'habitent pas avec leur famille. Les adolescents qui vivent en établissement ou dans des familles d'accueil et ceux qui vivent seuls doivent pouvoir compter sur un soutien dans leur communauté immédiate pour pouvoir faire face à leur victimisation. Si ce soutien n'existe pas ou s'il y a d'autres problèmes plus pressants qui préoccupent l'adolescent, il est contre-thérapeutique de faire porter le traitement sur l'abus sexuel. Pour que le processus thérapeutique réussisse, il est très important d'attendre que l'adolescent soit prêt à faire face à sa victimisation.

Un adolescent a besoin du soutien et de l'affection de sa famille et de sa communauté pour intégrer pleinement sa victimisation et la résoudre. La famille (ou la communauté) de la victime a également besoin d'aide. Si l'insuffisance de la supervision parentale a contribué à la victimisation du petit garçon, il faut s'occuper de ces questions, particulièrement s'il y a de jeunes enfants dans la famille. Certaines familles surprotègent les enfants qui ont été victimes d'abus sexuel. Elles excusent tous les comportements aberrants, quelle que soit leur origine, à cause de l'abus sexuel.

Le counseling des survivants adolescents n'a pas la même orientation que celui des adultes. On parle de counseling plutôt que de thérapie parce que le traitement vise l'acquisition de compétences plutôt que la résolution d'un traumatisme. Cela ne signifie pas qu'il n'y ait pas résolution du traumatisme. Cependant, avec les clients adolescents, on ne fait pas appel aux processus d'abréaction de la même façon qu'avec les survivants adultes. Très peu d'adolescents ont suffisamment de maturité ou un moi suffisamment bien développé pour se lancer dans un processus d'abréaction volontaire. Cependant, et cela est en leur faveur, les adolescents ont rarement développé les dissociations profondes qui causent les abréactions et ils peuvent donc souvent confronter leurs expériences d'abus sexuel de façon plus directe.

Les survivants adolescents ont besoin de faire face aux conséquences de l'abus sexuel qui ont un effet sur leur vie présente. Cela signifie que le traitement portera souvent sur des questions comme l'expression sexuelle et l'identité sexuelle. Il faut les aider à voir que la sexualité est en elle-même une force positive dans leur vie mais que des rapports sexuels sans consentement mutuel sont néfastes. Il faut les aider à distinguer entre contacts entre égaux et contacts basés sur le pouvoir dans les rapports sexuels. Il faut étendre leur compréhension de la sexualité au-delà de l'excitation sexuelle génitale.

Il faut aussi préparer les adolescents au fait qu'ils auront peut-être besoin de reprendre conscience de l'abus sexuel dont ils ont été victimes et de son effet sur leur vie à mesure qu'ils se développeront. Il ne faut cependant pas trop insister sur cette possibilité car cela pourrait l'inviter à se réaliser. Il arrive souvent, cependant, que les victimes d'abus sexuel réexaminent leurs expériences passées quand elles parviennent à maturité. Par exemple, lorsqu'un homme victime d'abus sexuel devient lui-même un père et comprend pleinement la vulnérabilité des enfants devant le pouvoir des adultes, cela peut réactiver son chagrin devant sa propre enfance perdue. C'est pourquoi le counseling doit être une expérience positive pour les clients adolescents afin de garder la porte ouverte à une thérapie à venir si le besoin s'en fait sentir.

ÉVALUATION DES ADOLESCENTS VICTIMES D'ABUS SEXUEL

L'évaluation des clients adolescents requiert tact et finesse de la part des thérapeutes. Pour que les évaluations fournissent des informations diagnostiques utiles, les clients doivent coopérer en donnant des réponses exactes et détaillées aux questions posées. Pour cela, les clients doivent avoir confiance dans le processus.

Certains adolescents réagissent bien lorsqu'on les invite à « poser le fardeau de secret » qui a entouré l'abus sexuel dont ils ont été victimes. S'ils voient dans le dévoilement de l'abus sexuel un moyen de soulager leur sentiment de stigmatisation et leur manque d'amour-propre, ils participeront plus facilement au processus d'évaluation.

La plupart des adolescents ne sont pas habitués à parler explicitement de leur sexualité avec des adultes. En lait, s'ils l'ont jamais fait, c'est généralement dans le contexte de l'abus sexuel. C'est pourquoi la personne qui procède à l'évaluation doit expliquer clairement à ses clients quel est son rôle et quelle est son intention pour qu'ils n'aient pas le sentiment que l'évaluation est une nouvelle procédure élaborée de préparation à l'abus sexuel.

La première grande étape de l'établissement d'un rapport de confiance consiste à expliquer au client adolescent la procédure d'évaluation et le rôle de la personne qui l'effectue. Ceci est particulièrement important si la personne qui procède à l'évaluation n'est pas la même que celle qui sera chargée de la thérapie. Les clients ont besoin de savoir à l'avance qu'ils seront évalués par une personne et traités par une autre.

En utilisant une analogie médicale, on peut aider les survivants adolescents à comprendre pourquoi ils doivent donner des renseignements intimes sur l'abus sexuel dont ils ont été victimes. La ou le thérapeute peut dire au client que si l'on amène à l'urgence quelqu'un qui souffre de graves maux de ventre, le médecin qui examinera cette personne aura besoin de savoir pourquoi elle a tellement mal avant de la traiter sinon il pourrait l'envoyer en chirurgie alors qu'en réalité il faut seulement la débarrasser de ses gaz. De la même façon, c'est l'évaluation qui permet à la ou au thérapeute d'intervenir avec adresse. Les renseignements qu'elle ou il reçoit du client l'aident à formuler un plan de traitement efficace.

Une bonne évaluation offre l'occasion de parler au client à la fois de l'abus sexuel et du processus de traitement. Comme les adolescents ressentent beaucoup de honte devant leur participation répétée à des pratiques abusives, il faut les rassurer sur la normalité de leur comportement. Si la personne en charge de l'évaluation dit au client que les victimes d'abus sexuel ont en général de très bonnes raisons de ne pas parier à quiconque de ce qui leur est arrivé et demande au client s'il avait lui-même des raisons de garder la chose secrète, cela soulage la honte qu'il ressent pour n'avoir pas parlé de l'abus sexuel quand il a commencé.

Les clients adolescents ont également honte d'avoir ressenti une excitation physique au cours de l'abus sexuel. Le partage de renseignements physiologiques de base peut faciliter le processus d'évaluation. Lorsqu'un adolescent comprend que si son pénis est stimulé, il se raidit, quelle que soit la personne qui le stimule et pourquoi, il ressent moins de honte à parler de son excitation. On peut rappeler avec humour à l'adolescent que son pénis n'a pas d'yeux ni de cerveau ni d'autre moyen de déterminer qui le stimule.

Il faut montrer aux adolescents que, lorsqu'un événement se produit, il peut être compris de bien des façons différentes. Ils ont pu interpréter leur réponse physiologique à l'abus sexuel en pensant « Je suis très sexy » ou « Je suis gai » ou « Je suis pervers ». Ces interprétations ont pu limiter leur compréhension de ce qui arrivait. En aidant les clients à voir comment ils ont interprété leur victimisation, on leur donne la permission de moins se blâmer pour la façon dont ils ont compris les événements. Ceci peut les aider à parler plus facilement de l'abus sexuel dont ils ont été victimes. Une simple analogie peut souvent aider les clients à voir comment l'interprétation change la façon dont nous comprenons un événement. Par exemple, si l'on attend un coup de téléphone d'un ami qui n'appelle pas, on réagira différemment suivant que l'on pense que l'ami a eu un accident ou qu'il est fâché.

Les clients adolescents ont besoin de savoir que la personne qui les évalue s'intéresse tout autant à leurs points forts qu'à leurs faiblesses. Le processus d'évaluation doit viser à recueillir des renseignements aussi détaillés que possible, y compris des renseignements sur les succès et les stratégies d'adaptation positives des clients.

Si un client présente des distorsions de la pensée, comme une tendance à beaucoup se blâmer, ceci doit être noté mais non remis en question au cours de l'évaluation. C'est à l'étape de la thérapie qu'il faut modifier les erreurs de jugement, non à l'étape de l'évaluation (Gerber, 1990). Si la personne qui pratique l'évaluation remet prématurément en question des tendances intellectuelles dysfonctionnelles, le client pourra avoir le sentiment qu'il n'a pas été entendu ou n'a pas été compris et, en conséquence, pourra cesser de donner des renseignements personnels.

Il arrive souvent que toutes les personnes qui entourent l'adolescent à l'exception de l'adolescent lui-même veuillent qu'il suive un traitement. Si l'adolescent n'est pas prêt lui-même à faire face à ses problèmes en rapport avec l'abus sexuel, le traitement ne fera que renforcer son expérience de rapports de pouvoir dysfonctionnels. Un client adolescent a besoin de savoir qu'il a son mot à dire dans le processus de traitement et que c'est à lui de décider de ce qu'il dira à la ou au thérapeute et du moment où il le dira.

Il est contre-thérapeutique de forcer un adolescent à suivre un traitement tant qu'il n'est pas prêt à le faire. La seule exception à cette règle concerne les cas où un adolescent agresse des enfants plus jeunes. Il faut alors le mettre en face de ses responsabilités pour qu'il ne continue pas à mettre les autres en danger.

Au cours du processus d'évaluation, il faut évaluer la force du moi et l'aptitude à faire face à l'anxiété du client adolescent. Si la confrontation avec l'abus sexuel dont il a été victime accroît son comportement destructeur envers lui-même ou envers les autres, il n'est pas conseillé de poursuivre. Beaucoup d'adolescents n'ont pas de stratégies de défense suffisamment sophistiquées pour contenir les émotions qui émergent lorsqu'ils se souviennent de ce qui leur est arrivé. Si c'est le cas, le traitement doit viser le renforcement de l'aptitude à l'autoprotection plutôt que le matériel directement lié à l'abus.

Il faut évaluer les tendances à la dissociation des clients adolescents avant le traitement. Les adolescents dissociatifs ont tendance à être autodestructeurs, à changer d'humeur brutalement et à s'extérioriser par des comportements qui sont sans rapport avec leur persona primaire. (On trouvera à l'annexe F, page 142, un test d'évaluation de la dissociation des adolescents intitulé le Dean Adolescent Inventory Scale.)

(On trouvera des renseignements plus détaillés sur l'évaluation des adolescents victimes d'abus sexuel, y compris des questions d'évaluation spécifiques, dans « The Assessment Interview for Young Male Victims » de Paul Gerber. Il est fait référence à cet article à l'annexe G.)

TRAITEMENT DES ADOLESCENTS VICTIMES D'ABUS SEXUEL

Les survivants adolescents présentent la même vaste gamme de symptômes et de points forts que les survivants adultes. Du fait de leur jeunesse, cependant, les adolescente n'ont pas eu autant d'occasions d'intérioriser des mécanismes de défense dysfonctionnels. Ils sont à une étape de développement qui encourage l'expérimentation et sont souvent davantage prêts que les adultes à essayer de nouveaux comportements à condition de ne pas se sentir embarrassés ou humiliés.

Style de la ou du thérapeute

Les thérapeutes qui travaillent avec les adolescents doivent être à l'aise avec ce groupe d'âge. Ils doivent être capables de faire face à des changements d'humeur et d'attitude déconcertants sans réagir comme des parents. Ils doivent avoir confiance dans ce qu'ils font sans faire preuve d'autoritarisme. Ils doivent être à l'aise avec le langage et le jargon des adolescents. Les styles de communication et la terminologie sexuelle des adolescents suivent des modes et les thérapeutes doivent se tenir au courant de ce qui se fait.

Sexe de la personne en charge de la thérapie

Les survivants adolescents sont en général plus à l'aise pour parler de leur sexualité avec un homme. Le niveau de confort du client est renforcé par le fait que le thérapeute avec qui il parle de sexualité partage la même réalité psychophysiologique que lui. Cependant, si un adolescent a été agressé par un homme, il se sentira peut-être plus en sécurité pour commencer avec une femme. Il est important de respecter et d'honorer les préférences des clients quant au sexe de leur thérapeute.

Définitions des frontières et des limites

Les thérapeutes doivent déclarer explicitement qu'au cours du counseling, les adolescents seront censés parler de leur sexualité mais que ce sera toujours à eux de décider de la quantité d'informations qu'ils seront prêts à dévoiler. Les thérapeutes qui travaillent avec des survivants adolescents doivent aborder la sexualité simplement, de façon directe et détendue.

En général, les clients adolescents mettent à l'épreuve l'aptitude de leur thérapeute à aborder les questions sexuelles. Ce sont les réactions de la ou du thérapeute qui détermineront dans quelle mesure le client participera au processus thérapeutique. Les thérapeutes peuvent s'attendre à ce que les clients ne dévoilent pas la totalité de l'abus sexuel dont ils ont été victimes tant qu'ils ne se sentiront pas suffisamment en sécurité pour ce faire. En posant des questions comme « Qu'est-ce qui est arrivé d'autre? » ou « Veux-tu me dire quelque chose de plus sur ce qui t'est arrivé? », on peut aider le client à faire une révélation complète. La question « Quels types d'expériences sexuelles as-tu eus? » est une façon non stigmatisante d'interroger le client sur son passé et produira généralement davantage de renseignements que les questions qui contiennent l'expression « abus sexuel ».

Non seulement la personne en charge de la thérapie doit prévenir clairement le client que l'on discutera de sa sexualité au cours du counseling, mais elle doit aussi définir clairement les autres frontières et limites thérapeutiques.

Les adolescents doivent savoir quelles sont les limites de la confidentialité de la personne en charge de la thérapie. Les thérapeutes doivent leur dire qu'ils cesseront de respecter la confidentialité thérapeutique s'ils craignent pour la sécurité du client ou de quelqu'un d'autre. Par exemple, si le client donne des informations sur d'autres incidents d'abus, la ou le thérapeute est tenu par la loi de les déclarer. Si d'autres membres de la famille du client sont également en traitement, le client doit savoir comment les renseignements seront partagés entre les différents pourvoyeurs de traitement. Il faut également établir clairement si le client sera mis au courant de ce qui se passe lors des séances de traitement des autres membres de la famille et vice-versa.

Processus de counselling

Le meilleur traitement des survivants adolescents est généralement un traitement à court terme. Il doit porter clairement sur les questions ou les problèmes qui touchent de plus près le client au moment du traitement. Une bonne stratégie à utiliser avec les survivants adolescents consiste à découper le traitement de façon à travailler avec un problème à la fois. En créant une succession de petits succès, on renforce l'amour-propre du client. Cela garantit aussi que le traitement constituera une expérience positive pour le client si bien qu'il aura plus facilement recours à des ressources thérapeutiques à l'avenir s'il en a besoin.

Par exemple, si un adolescent extériorise ses sentiments en se montrant agressif avec les personnes en situation d'autorité (en déplaçant inconsciemment sa colère envers son agresseur sur d'autres figures adultes), son contrat thérapeutique pourrait porter sur l'expression de la colère et l'acquisition de moyens sûrs et efficaces de gérer son agressivité. La ou le thérapeute pourrait tenter de relier sa colère présente avec sa trahison passée mais l'objectif premier de la thérapie serait d'aider le client à faire face à ses préoccupations actuelles. Une fois qu'il aurait appris et intégré ces nouvelles aptitudes, le contrat prendrait fin. La ou le thérapeute encouragerait le client à revenir en thérapie à l'avenir s'il avait de nouveaux problèmes psycho-sociaux ou présentait d'autres symptômes en rapport avec l'abus sexuel.

Les adolescents s'engagent souvent plus rapidement dans le processus thérapeutique s'ils peuvent aborder les questions directement associées à l'abus sexuel avec une certaine distance. Ceci peut se produire de différentes façons. Lune des méthodes consiste à utiliser des techniques d'extériorisation comme le dessin ou d'autres formes d'expression artistique.

En demandant à un survivant adolescent de dessiner ce qu'il aimerait faire à son agresseur, on peut lui donner l'occasion de discuter de la colère et des façons constructives de canaliser les sentiments intenses. Les garçons choisissent souvent des façons dangereuses ou socialement inacceptables d'exprimer leur colère (comme passer son poing par la fenêtre) et ils ont besoin de trouver des moyens de décharger cette émotion sans danger. Certains garçons ont tellement peur du pouvoir de leur rage qu'ils ont réprimé leur colère et l'on sublimée dans d'autres secteurs de leur existence. Ces clients ont tout particulièrement besoin d'apprendre à s'affirmer et à séparer colère et violence.

Le matériel psycho-éducationnel aide les clients adolescents à faire face à l'abus dont ils ont été victimes. Non seulement il comble les lacunes des clients en matière de connaissances mais il ouvre également la porte à des révélations plus personnelles. Par exemple, si un client n'est pas disposé à donner des renseignements sur les détails de l'abus qu'il a subi, on peut lui remettre un paquet de cartes-éclairs décrivant différentes formes de contact. (Les cartes peuvent comprendre des comportements comme l'étreinte, le baiser sur la joue, le baiser sur la bouche, le toucher des seins, la poignée de main, la fellation, le coup de poing, etc.) Demandez au client de partager les cartes en trois piles : contact acceptable, contact non acceptable et contact ambigu. On peut ensuite discuter de ses choix et des raisons de ses choix. On peut demander aux clients qui sont prêts à participer davantage de constituer leur propre liste des différents types de contact.

Il arrive qu'en lisant aux adolescents des histoires prévues pour des enfants plus jeunes, on puisse stimuler la discussion sur les événements de leur enfance. L'âge de développement du client est souvent inférieur à son âge chronologique. À condition qu'il ne ressente pas le fait qu'on lui lise une histoire comme une forme de condescendance, son enfant intérieur sera souvent stimulé par un matériel de lecture prévu pour des enfants plus jeunes. Ce type de stimulation peut « dégeler » des parties du moi qui se sont fermées à l'époque de l'abus sexuel. De même, la présentation de bandes magnétoscopiques et de films qui traitent de l'abus sexuel peut constituer une façon indirecte d'accéder au matériel en rapport avec l'abus. (On trouvera au chapitre 12 une liste de bandes magnétoscopiques et de ressources imprimées.)

Une première étape du travail d'intégration peut consister à séparer les parties du moi qu'un client accepte de celles qu'il rejette ou avec lesquelles il n'est pas à l'aise. Il est parfois bon de faire référence aux différentes parties du moi des clients comme « petit Louis triste », « petit Louis en colère » ou « petit Louis effrayé » et d'en parler comme si elles étaient séparées.

Pour redonner au comportement sexuel du client une forme plus appropriée à son âge, il sera souvent nécessaire de travailler avec ses fantasmes sexuels. À cet égard, il est parfois utile d'avoir recours à une visualisation guidée. Par exemple, après avoir placé votre client dans un état de détente profonde, demandez-lui d'imaginer un lieu où il se sent totalement en sécurité et qui est le plus bel endroit qu'il connaisse. Dites-lui qu'il est complètement seul dans ce lieu secret et demandez-lui de penser à ce qu'il aimerait faire sexuellement qui lui donnerait le plus d'excitation possible. Demandez-lui si cela fait intervenir quelqu'un d'autre. S'il dit oui, demandez-lui de noter le nom de la personne. (Veillez à ne pas spécifier d'âge ni de sexe afin de donner au client l'espace nécessaire pour développer pleinement son propre fantasme.) Demandez à votre client de remercier la personne de s'être jointe à lui et de la laisser quitter le fantasme le plus doucement possible. (On n'encourage pas le client à imaginer effectivement un rapport sexuel avec l'autre personne parce que cela ne fera que renforcer un comportement peut-être déviant.) On ramène ensuite graduellement le client dans la séance de counseling et on examine le fantasme et le rôle de la ou des personnes auxquelles il a fait appel dans son fantasme. Si les tendances à l'excitation du client sont basées sur des comportements déviants, on l'aide à trouver des associations plus orthodoxes à la stimulation sexuelle.

Il faut aider les clients adolescents à élaborer des plans de sécurité qui leur permettent de réduire les risques de revictimisation ou qu'ils pourraient mettre en œuvre s'ils étaient effectivement de nouveau victimes d'abus sexuel. Ceci est particulièrement important pour les clients qui ont été agressés au sein de leur famille et qui continuent à vivre à la maison. Dans les cas où l'abus a eu lieu au sein de la famille, tous les membres de la famille doivent participer à l'élaboration d'« exercices de sauvetage » à mettre en place si un membre de la famille est inquiet pour sa propre sécurité ou la sécurité de quelqu'un d'autre. Cela peut consister à veiller à ce que tous les membres de la famille, particulièrement la victime, aient une personne de confiance vers laquelle se tourner s'ils s'inquiètent pour leur sécurité. Dans certains cas, les exercices font intervenir des contrats familiaux qui définissent ce que certains membres de la famille sont prêts à faire les uns pour les autres. Quelle que soit la forme qu'ils prennent, ces plans de sécurité sont essentiels pour veiller à ce que les clients adolescents aient à leur portée des stratégies d'autoprotection à titre de prévention et en cas de crise.

Traitement de groupe

Le traitement de groupe est une forme de traitement particulièrement efficace pour les adolescents victimes d'abus sexuel. Étant donné que les adolescents sont orientés vers leurs camarades et que beaucoup ont des associations négatives vis-à-vis du contact individuel avec une ou un adulte à cause de leur victimisation, le traitement de groupe constitue une forme de traitement efficace et sans danger. Le processus de groupe brise l'isolement du survivant adolescent et l'aide à déstigmatiser sa victimisation. Le contact avec d'autres victimes encourage les survivants adolescents à reconnaître ouvertement leur expérience d'abus sexuel.

La formule du groupe permet aux clients de limiter ce qu'ils veulent révéler d'eux-mêmes du fait qu'ils ne sont pas l'objet unique de l'attention de la ou du thérapeute. Beaucoup de survivants adolescents sont plus à l'aise dans un groupe où la scène est occupée tour à tour par différentes personnes que dans un cadre de counseling individuel où ils sont toujours le centre d'attention. Le contrôle que cela leur donne augmente généralement leur sentiment de sécurité et leur permet de participer plus librement au traitement.

On recommande aux thérapeutes d'utiliser avec leurs clients adolescents le modèle de traitement à deux niveaux qui a été décrit à l'intention des survivants adultes au chapitre 8. Bien que la discussion au sein d'un groupe d'adolescents reflète les préoccupations associées à l'étape de développement de cette population, les questions thérapeutiques touchant l'évaluation et le travail de groupe sont les mêmes que pour les groupes d'adultes.

CHAPITRE 11 - QUESTIONS CONCERNANT LES THÉRAPEUTES

La thérapie étant un processus interactif, le bien-être et l'intégrité des thérapeutes ont un impact fondamental sur le développement de la thérapie du client. Les clients sentent intuitivement les inconsistances entre ce que dit une ou un thérapeute et ce queue ou il fait. On trouvera dans ce chapitre une description de certaines stratégies importantes d'autoprotection que les thérapeutes pourront intégrer à leur travail et à leur vie. On y propose également sept façons de reconnaître et de gérer les contre-transferts des thérapeutes. Enfin, je mentionne brièvement certains problèmes qui risquent de se poser spécifiquement aux thérapeutes qui sont eux-mêmes des survivants d'abus sexuel subi dans l'enfance.

Il est très grattant de dispenser une thérapie à des survivants. L'intimité du processus thérapeutique et la possibilité de participer à la croissance et au rétablissement des clients sont pour les thérapeutes une source de satisfaction à la fois professionnelle et personnelle. La confiance et l'efficacité des thérapeutes augmentent à mesure qu'ils développent les aptitudes spécialisées nécessaires pour travailler avec des survivants et qu'ils comprennent intuitivement de mieux en mieux comment les mettre en couvre.

Cependant, l'attention qu'ils consacrent à l'histoire des survivants rend les thérapeutes vulnérables à des expériences indirectes de traumatisme et de perte. L'ironie, comme le dit Briere (1989), est que l'empathie thérapeutique rend les thérapeutes particulièrement vulnérables au risque d'intégration du traumatisme exprimé par leurs clients, ce qui peut en faire des victimes secondaires.

Le phénomène du traumatisme par personne interposée ou par procuration est quelque chose que tous les thérapeutes qui travaillent beaucoup avec des clients traumatisés dans l'enfance doivent apprendre à gérer. Les thérapeutes doivent sans cesse rajuster l'équilibre entre l'attention aux événements révélés par les clients et la réponse thérapeutique à leur donner et la distance qu'ils doivent prendre vis-à-vis de cette information pour assurer leur propre protection.

Non seulement les thérapeutes font indirectement l'expérience du traumatisme de leurs clients mais ils peuvent être directement affectés si l'histoire d'un client active des problèmes non résolus dans leur propre passé. Certains thérapeutes déclarent avoir eu des rêves violents et troublants après avoir travaillé avec des survivants (Briere, 1989). Les thérapeutes qui travaillent avec des survivants ont besoin d'une supervision continue pour les aider à examiner leurs réactions à leurs clients. Dans certains cas, la thérapie personnelle est une composante importante de l'autoprotection de la ou du thérapeute.

Les thérapeutes qui travaillent avec des clients victimes d'abus sexuel redoublent souvent de vigilance à l'égard d'eux-mêmes et de leurs enfants. Plusieurs des personnes qui ont contribué à la recherche ont déclaré qu'après avoir travaillé avec beaucoup de survivants de l'abus sexuel, elles avaient une vision du monde moins confiante et plus cynique. Il y a certainement un prix à payer pour les thérapeutes qui font un travail intense avec des survivants.

La thérapie étant un processus d'interaction entre deux personnes, chacune est susceptible d'être influencée par l'autre. Étant donné la nature du contrat thérapeutique, il est donc essentiel que les thérapeutes adoptent des stratégies qui leur permettent de gérer leurs propres contre-transferts pour éviter de les extérioriser en thérapie. En outre, les thérapeutes doivent prendre conscience de leurs difficultés personnelles pour veiller à ne pas les projeter inconsciemment sur leurs clients.

On trouvera ci-dessous une description de certains contre-transferts courants parmi les thérapeutes et de certaines méthodes à utiliser pour réduire leur effet négatif à la fois sur le client et sur la ou le thérapeute.

LE CONTRE-TRANSFERT DANS LES THÉRAPIES À L'INTENTION DES SURVIVANTS

Tout comme les clients, les thérapeutes intériorisent les attitudes et les préjugés culturels en matière de sexe. Lorsqu'ils extériorisent inconsciemment ces attitudes et ces préjugés, ils risquent de les projeter sans le savoir sur leurs rapports avec les clients. Il faut savoir identifier, remettre en question et transformer cette contamination du processus thérapeutique. Tout comme ils aident leurs clients à remettre en question les comportements qui ne sont plus utiles, les thérapeutes ont eux-mêmes besoin d'être confrontés et soutenus afin de développer et de renforcer leurs compétences thérapeutiques.

Les émotions et les comportements dysfonctionnels que les survivants présentent peuvent susciter toute une gamme de réactions chez les thérapeutes. Il n'est pas rare que les thérapeutes commencent à adopter les mêmes types de défense que leurs clients au cours de leur travail commun. La dissociation, la minimisation, l'évitement, l'impuissance et d'autres processus similaires peuvent apparaître chez les thérapeutes.

De façon générale, un changement de l'état affectif ou du comportement des thérapeutes est une indication qu'il y a contre-transfert. Certains thérapeutes, par exemple, ont tendance à s'endormir lorsque leurs clients discutent de choses qui font écho à leurs propres problèmes thématiques. D'autres dirigent l'attention de leur client vers du matériel moins chargé émotionnellement lorsque leur propre niveau d'anxiété commence à monter. Si une ou un thérapeute commence à redouter ses séances avec un client particulier ou à se sentir dépassé ou incompétent devant les problèmes d'un client, il y a probablement contre-transfert. Pour réduire l'effet négatif de ces dynamiques sur la thérapie, il faut apprendre à reconnaître ces indices et à les utiliser comme le signal qu'il est temps de procéder à un examen personnel.

Il y a également contre-transfert lorsque la ou le thérapeute commence à considérer un client comme « spécial » et méritant une attention particulière. Lorsqu'une ou un thérapeute allonge les séances sans faire payer le client davantage, rencontre ce dernier en dehors des séances prévues ou change d'une autre façon les frontières normales de la relation thérapeutique, cela indique la présence d'un contre-transfert qu'il faut examiner dans le cadre des séances de supervision.

Il est parfois nécessaire de modifier les frontières normales de la relation thérapeutique et d'allonger les séances ou de les rapprocher. Mais les thérapeutes doivent veiller à ce que ces changements soient le résultat d'un jugement clinique sain et non d'un contre-transfert inconscient. Chaque fois que le rapport d'une ou d'un thérapeute avec un client est régi par ses propres besoins plutôt que par les besoins du client, on court le risque de reproduire la dynamique de l'abus initial. Dans les thérapies avec les survivants, il est important d'être conscient de ce risque et de travailler à l'éviter.

COMMENT GÉRER LES CONTRE-TRANSFERTS

Suggestions des personnes qui ont contribué à la recherche pour gérer les contre-transferts et assurer sa propre protection :

  • vision de la thérapie comme d'un partenariat,
  • thérapie personnelle pour les thérapeutes,
  • identification de ses limites et frontières personnelles,
  • supervision,
  • soutien des pairs,
  • engagement social et
  • satisfaction dans sa vie personnelle.

Vision de la thérapie comme d'un partenariat

Les thérapeutes qui travaillent avec des survivants ont souvent besoin de se rappeler que la capacité de se rétablir d'un traumatisme subi dans l'enfance relève du client et non de la ou du thérapeute. Comme de bons jardinier, les thérapeutes peuvent fertiliser le terrain et favoriser la croissance de leurs clients. Ils peuvent aider à arracher les mauvaises herbes ou les autres obstacles à un rétablissement complot. Cependant, tout comme le jardinier avec les plantes, les thérapeutes doivent faire confiance à l'aptitude inhérente de leurs clients à réagir favorablement aux interventions appropriées.

C'est aux victimes de l'abus sexuel de choisir le rythme de leur processus de rétablissement. Les thérapeutes qui adoptent une attitude autoritaire avec les clients provoquent généralement des transferts contre-thérapeutiques. Les thérapeutes qui se voient comme des guides susceptibles de faciliter le rétablissement des survivants plutôt que comme des experts chargés de prescrire des cures ont plus de chances d'aider leurs clients. Non seulement le partage du pouvoir en thérapie constitue une composante essentielle du rétablissement de la capacité de prendre des décisions autonomes des clients mais l'abandon de la nécessité de contrôler le processus réduit le stress des thérapeutes.

Plusieurs des personnes qui ont contribué à la recherche ont insisté sur le fait que les thérapeutes doivent répondre à leurs clients et aux problèmes qu'ils présentent sans toutefois en prendre la responsabilité. Les clients doivent assumer la responsabilité totale de leurs actions, de leurs croyances, de leurs comportements et de leurs pensées. La tâche des thérapeutes est de répondre à tous les aspects des clients sans les juger. Les thérapeutes doivent éviter de jouer le rôle de parent avec les clients car cela ira généralement à l'opposé de l'effet recherché qui est d'accroître l'autonomie des clients.

Les thérapeutes indiquent qu'ils voient la thérapie comme un partenariat lorsqu'ils reconnaissent leurs propres imperfections et leurs propres insuffisances. Tous les thérapeutes font inévitablement des erreurs avec leurs clients. Par exemple, on peut mal choisir le moment d'une intervention ou interrompre un client prématurément avec les meilleures intentions du monde. Lorsque les thérapeutes reconnaissent ce type d'erreur, ils donnent à leurs clients un modèle d'interaction humaine honnête. L'intégrité personnelle des thérapeutes et la concordance entre leurs paroles et leurs actions influencent le succès de la thérapie tout autant que leurs connaissances et leur expérience professionnelle.

Thérapie personnelle pour les thérapeutes

Les thérapeutes qui travaillent avec des survivants adultes d'un traumatisme subi dans l'enfance doivent avoir eux-mêmes effectué une psychothérapie ou être en cours de thérapie et ceci pour plusieurs raisons importantes. La première est probablement qu'en se réconciliant avec leur propre scénario psychologique, les thérapeutes ont moins de chances de projeter leurs blessures personnelles sur les autres - et particulièrement sur leurs clients. Il est important de comprendre le processus de transformation thérapeutique et ceci non seulement intellectuellement mais aussi par l'expérience afin de travailler de façon authentique avec les clients.

Étant donné la nature intense du travail avec les survivants d'un traumatisme subi dans l'enfance, il y a des chances pour que les thérapeutes se retrouvent confrontés à un moment ou un autre à leur propre vulnérabilité psychologique. Chaque thérapeute a ses propres vulnérabilités qui sont activées par certains clients. Par exemple, un thérapeute peut se mettre à travailler davantage lorsque l'un de ses clients est très déprimé en réponse à son propre scénario familial sur la façon de faire face à la dépression. Un autre thérapeute peut ressentir de la colère ou de la peur lorsque ses clients identifient des questions qui lui rappellent le traumatisme qu'il a lui-même subi dans l'enfance, compromettant par là inconsciemment la sécurité du client devant ses problèmes.

La thérapie personnelle aide les thérapeutes à mieux séparer leurs processus personnels de ceux de leurs clients. Elle les aide à mieux identifier leurs propres zones de vulnérabilité et à mieux travailler avec les clients qui les provoquent.

Une bonne thérapie personnelle doit aider les thérapeutes à développer les aptitudes qui les rendent davantage présents aussi bien dans leur travail que dans leur vie personnelle. Elle doit leur donner les compétences nécessaires pour faire face à leur vécu personnel si un client déclenche sans le savoir une association qui pose problème. Par exemple, si au cours d'une séance, un client provoque le « moi enfant » de la ou du thérapeute, cette dernière ou ce dernier doit pouvoir tenir un bref dialogue avec son propre enfant intérieur et décider avec lui de s'occuper du problème après la séance. De cette façon, la séance de thérapie reste axée sur le client tout en respectant la personne de la ou du thérapeute.

Lorsque les thérapeutes traitent des clients tout en suivant une thérapie personnelle, il est essentiel qu'ils bénéficient d'une bonne supervision clinique pour séparer leurs problèmes personnels de ceux de leurs clients. Les thérapeutes doivent faire preuve de respect envers eux-mêmes et structurer leur temps de façon à se protéger. Par exemple, les séances de thérapie personnelle doivent être fixées à une heure où les thérapeutes peuvent s'occuper complètement d'eux-mêmes et ne pas devoir immédiatement revenir aux préoccupations des clients. Il peut y avoir des périodes où les thérapeutes ont besoin d'alléger leur charge de travail pour pouvoir travailler intensément sur leurs problèmes personnels.

Identification de ses limites et frontières personnelles

Les thérapeutes qui travaillent avec des survivants d'un traumatisme subi dans l'enfance ont besoin d'établir des frontières claires et prévisibles dans leur travail aussi bien pour eux-mêmes que pour leurs clients. Pour des raisons de sécurité et de prévisibilité, les clients ont besoin de savoir quelles sont les règles des thérapeutes sur des questions comme l'organisation de séances supplémentaires ou les honoraires non payés. Pour les thérapeutes, l'établissement de frontières claires est une forme d'autoprotection.

Les thérapeutes doivent avoir des politiques claires en ce qui concerne les rendez-vous manqués, les appels téléphoniques en cas de crise, la prolongation des séances, le paiement des honoraires, etc. Les décisions touchant l'organisation des vacances et la longueur d'une journée de travail typique doivent être adaptées au goût et au style personnel des thérapeutes.

D'autres frontières sont plus générales et concernant des questions plus vastes. Il est essentiel que les thérapeutes organisent leur charge de travail d'une façon qui respecte leurs propres besoins. Avant de décider des types de clients avec lesquels ils travailleront et de la taille de leur charge de travail, les thérapeutes doivent prendre le temps de réfléchir et de considérer avec réalisme leurs conditions de vie. En général, il est recommandé aux thérapeutes qui travaillent avec des survivants de l'abus sexuel de maintenir une charge de travail mixte. Les clients qui se rétablissent d'un traumatisme sexuel dans l'enfance sont habituellement des candidats à une thérapie à long terme. Il est rafraîchissant et vivifiant pour les thérapeutes d'avoir l'occasion de travailler avec des cas à court terme et avec une variété de problèmes.

Il est important que les limites que se fixent les thérapeutes soient suffisamment flexibles pour pouvoir changer en fonction des événements tout en restant assez rigides pour remplir l'objectif qui leur a été assigné. Pour que la thérapie soit un processus prévisible et sans danger, il est essentiel que les clients connaissent les limites de leur thérapeute en matière de travail.

Il est presque inévitable que les clients demandent aux thérapeutes pourquoi ils font ce genre de travail. Les thérapeutes qui choisissent de travailler avec des survivants de l'abus sexuel ont une multitude de raisons pour ce faire. Ces raisons, qui émergent souvent au cours de la propre thérapie de la ou du thérapeute, doivent être claires. Bien que les thérapeutes doivent faire preuve de jugement quant aux renseignements personnels à communiquer aux clients, ils doivent être prêts à répondre honnêtement aux demandes des clients sur les raisons qui les ont amenés à travailler avec des survivants de l'abus sexuel.

L'abus sexuel, par définition, a entraîné une violation des frontières personnelles du client. C'est pourquoi, dans le processus thérapeutique, les thérapeutes doivent veiller à respecter les frontières de leurs clients en même temps que les leurs propres. Il est essentiel que les clients et les thérapeutes puissent s'adonner au processus thérapeutique dans un milieu sans danger et il faut veiller à toujours maintenir des frontières bien définies pour éviter de compromettre cette sécurité.

Supervision

La supervision régulière par une ou un thérapeute qui connaît bien la dynamique de l'abus sexuel et du rétablissement de ce traumatisme est un aspect essentiel de l'autoprotection des thérapeutes. Plusieurs des personnes qui ont contribué à la recherche ont noté qu'indépendamment de la compétence qu'elles ont acquise dans les services thérapeutiques qu'elles dispensent aux survivants, elles continuent à suivre des séances régulières de supervision ou de consultation toutes les semaines ou deux fois par mois.

Une bonne supervision clinique a toute sortes de fonctions. C'est l'occasion pour les thérapeutes de partager leurs propres réactions aux problèmes de leurs clients et d'évaluer leurs propres besoins. Les superviseurs peuvent également refléter certains aspects du rapport thérapeutique (comme le contre-transfert et le transfert) dont les thérapeutes n'ont pas conscience. Compte tenu de l'intensité émotionnelle de la thérapie, les thérapeutes risquent de perdre l'aptitude à évaluer chaque cas objectivement. Les superviseurs, qui ne participent pas directement au traitement, peuvent jouer le rôle d'observateurs objectifs. Ils peuvent aider les thérapeutes à identifier les thèmes qui ont tendance à se répéter d'un cas sur l'autre. Ces thèmes peuvent refléter les problèmes personnels non résolus ou le style de travail de la ou du thérapeute plutôt que les besoins cliniques de son client. Par exemple, les clients se présentent souvent avec une attitude qui vise à « régler les choses au plus vite ». Les thérapeutes qui ont eux-mêmes ce besoin d'aller vite peuvent se faire complices de l'impatience du client même s'il est contre-thérapeutique de précipiter les choses et de faire un travail abréactif avant d'établir un bon rapport thérapeutique et de renforcer les aptitudes du client à l'autoprotection. Les superviseurs habiles peuvent aider les thérapeutes à reconnaître leur tendance à aller trop vite, aidant par là même à la fois la ou le thérapeute et le client. C'est ainsi que la supervision apporte aux thérapeutes des instructions, des idées et un soutien dans leur travail.

Soutien des pairs

Outre l'aide qu'apporte une supervision structurée, le soutien des pairs, structuré ou non, renforce les aptitudes et l'enthousiasme des thérapeutes. Les thérapeutes se sentent souvent isolés dans leur travail, surtout s'ils pratiquent dans le privé et n'ont pas d'équipe autour d'eux. Ils auront avantage à organiser des rencontres avec des pairs qui effectuent un travail similaire pour discuter des cas et de leur impact sur les plans personnel et professionnel. Un grand nombre des personnes qui ont participé à la recherche sont membres de groupes de soutien entre pairs qui se réunissent régulièrement. Elles ont déclaré que ces réseaux collégiaux leur sont très utiles.

Certains thérapeutes ont fait remarquer que, bien que le travail qu'ils effectuent soit sérieux, il n'a pas besoin d'être solennel. L'humour est un élément important à la fois du processus thérapeutique et des échanges avec les pairs. Plusieurs personnes ont remarqué qu'une caractéristique importante de leur groupe de soutien est qu'il leur offre un lieu sûr où s'exprimer avec humour ou faire des déclarations politiquement incorrectes sur leur travail. Le lait que ces thérapeutes puissent plaisanter au sujet de la thérapie dans un milieu sûr les aide à se décharger du stress lié à leur travail.

Engagement social

Dans bien des cas, l'intégration d'une composante préventive ou éducationnelle aux activités des thérapeutes permet d'équilibrer leur travail thérapeutique avec les clients. Lorsque les thérapeutes sont uniquement occupés à aider les clients individuels à se rétablir du traumatisme sexuel subi dans l'enfance, ils risquent de perdre de vue les aspects sociaux et culturels du problème. En cherchant des façons de contribuer au changement social, les thérapeutes renforcent les raisons politiques, éthiques ou spirituelles qui ont motivé leur choix de carrière.

L'engagement social des personnes qui ont contribué à la recherche prend des formes variées. Beaucoup travaillent à l'éducation du public : elles écrivent des articles et des livres sur les questions en rapport avec l'abus sexuel et présentent des ateliers sur le sujet au grand public ou à d'autres spécialistes. D'autres voient leur travail comme faisant partie de la lutte globale pour l'amélioration des droits de la personne et consacrent du temps et de l'énergie à des organisations politiques ou humanitaires. Quelle que soit la forme qu'il prend, le travail effectué au sein des réseaux sociaux pour lutter contre l'abus sexuel peut renforcer votre résolution et réaffirmer l'importance de votre travail.

Satisfaction dans se vie personnelle

Il est important que les thérapeutes qui travaillent avec des survivants d'un traumatisme subi dans l'enfance aient, à l'extérieur de leur travail, des moyens de renforcer leur amour-propre et leur image d'eux-mêmes. Sinon, ils risquent de chercher à satisfaire leurs besoins personnels dans leur travail, ce qui est contre-thérapeutique pour leurs clients.

Pour conserver leur énergie et leur vitalité et pour se sentir soutenus dans leur travail, les thérapeutes ont besoin de garder un équilibre entre leurs intérêts personnels et leurs intérêts professionnels. Les thérapeutes qui ne savent pas bien s'autoprotéger risquent d'avoir moins d'énergie à consacrer à la thérapie, ce qui peut devenir un problème clinique. Les clients se rendent tout de suite compte des dissonances entre les conseils d'une ou d'un thérapeute sur l'autoprotection et son propre comportement à cet égard. Ces dissonances font écho au déni et à l'hypocrisie qui ont entouré l'expérience d'abus sexuel du client et doivent donc être évitées.

Parmi les façons spécifiques de s'autoprotéger citées par les personnes qui ont contribué à la recherche, mentionnons :

  • lire des romans et écouter de la musique,
  • avoir beaucoup d'amis qui ne sont pas des thérapeutes,
  • s'occuper de ses besoins spirituels,
  • faire de l'exercice régulièrement,
  • avoir des relations intimes qui sont une source de soutien mais ne pas les utiliser pour se décharger du stress associé au travail,
  • faire une thérapie personnelle si nécessaire,
  • prendre des vacances régulièrement,
  • limiter sa semaine de travail à quatre jours par semaine,
  • faire du travail bénévole pour des organismes intéressants.

Il est évident que les intérêts des thérapeutes en matière de loisirs et de créativité changeront avec le temps. L'essentiel est que, quels que soient vos intérêts, ils soient entretenus et cultivés.

PROBLÈMES PARTICULIERS AUX THÉRAPEUTES QUI SONT EUX-MÊMES DES SURVIVANTS DE L'ABUS SEXUEL

Le fait d'être soi-même un survivant de l'abus sexuel représente à la fois un avantage et un inconvénient pour les thérapeutes. L'expérience personnelle du processus de rétablissement peut aider les thérapeutes à communiquer profondément avec leurs clients. Les clients ont souvent le sentiment qu'ils sont mieux compris lorsqu'ils partagent leur expérience avec un autre survivant. Cependant, il y un risque que la ou le thérapeute qui est aussi une survivante ou un survivant réagisse par une suridentification ou une sous-identification au vécu des clients dont l'expérience fait écho à son propre passé. C'est ainsi qu'elle ou il peut soit trop travailler soit ne pas travailler assez avec certains clients.

L'essentiel, pour les thérapeutes qui sont des survivants, est de ne pas projeter leurs propres problèmes sur leurs clients. Une bonne supervision clinique est essentielle pour permettre aux thérapeutes d'évaluer clairement quand il s'agit de leurs propres problèmes et quand il s'agit de ceux de leurs clients.

Il n'est pas recommandé aux thérapeutes qui sont des survivants de dispenser une thérapie à d'autres survivants tant qu'ils ne sont pas suffisamment conscients de leurs propres réactions psychologiques à l'abus sexuel pour pouvoir prédire le type de contre-transfert qui peut se produire. Les thérapeutes qui connaissent leurs vulnérabilités sont en mesure d'anticiper avec quels clients il leur sera particulièrement difficile de travailler. Si nécessaire, ces clients peuvent être référés à quelqu'un d'autre.

Les thérapeutes qui sont des survivants doivent adopter des stratégies d'autoprotection bien définies pour les aider s'ils découvrent que leur propre vécu est réactivé par l'expérience d'abus sexuel de leurs clients. Ces stratégies comprennent une gestion et une organisation bien pensée de leur charge de travail, des séances de supervision, des techniques de mise entre parenthèses des sentiments et des réactions personnelles au cours des séances avec les clients et un réseau intime et bien développé de soutien entre pairs.

Les thérapeutes qui sont des survivants devront réfléchir à la question de l'autodévoilement. Il est fréquent que les clients veuillent savoir si leur thérapeute a été elle-même ou lui-même victime d'abus sexuel dans son enfance. Les thérapeutes doivent se demander « Quel sera le gain thérapeutique pour mon client si je lui donne des informations sur moi-même? ». Les thérapeutes doivent limiter ce qu'ils dévoilent en fonction de l'utilité que cela présente pour leur client. En général, des réponses brèves et honnêtes satisferont le besoin d'information du client et on pourra de nouveau concentrer toute son attention sur lui.

CHAPITRE 12 - RESSOURCES

Le dernier chapitre identifie les ressources que les personnes qui ont contribué à la recherche ont utilisées pour les aider dans leur travail avec les survivants et qu'elles recommandent à leurs clients qui se rétablissent de l'abus sexuel. Il est divisé en trois sections : bandes magnétoscopiques, documents imprimés et possibilités de formation. La section sur les documents imprimés comprend du matériel à l'intention à la fois des thérapeutes et des clients.

Cette liste n'est nullement exhaustive car de nouvelles ressources apparaissent constamment. En outre, un grand nombre des ressources qui ont été élaborées à l'intention des survivantes de l'abus sexuel peuvent s'avérer des outils efficaces pour les hommes.

Pour que les listes ne soient pas trop longues, seuls les documents écrits qui étaient recommandés par deux personnes ou plus ont été retenus.

BANDES MAGNÉTOSCOPIQUES

(Ordre d'information - titre et description suivis par le distributeur)

Abuse

Jeff, un garçon de dix-neuf ans, décrit l'abus sexuel dont il a été victime et qui a commencé avant qu'il ait cinq ans. Grâce à l'aide professionnelle qui lui a été dispensée, il peut maintenant jouir de la vie et est en train de retrouver son amour-propre. L'histoire de Jeff montre comment des mauvais traitements continus peuvent gravement altérer l'image de soi et compromettre l'aptitude à établir des rapports sains avec les autres. Ce programme définit quatre types de mauvais traitements : mauvais traitements physiques, émotionnels et sexuels et négligence. (20 minutes)

Kidsrights
10100 Park Cedar Drive
Charlotte, North Carolina 28210

Tél : 704-541-0100 ou 1-800-892-KIDS

Big Boys Don't Cry

Cet excellent documentaire fait pour la télévision examine la vie de plusieurs membres d'un groupe de survivants adultes et l'impact qu'a eu sur eux l'abus sexuel subi dans l'enfance. Les participants partagent des informations sur les changements qu'ils ont apportés à leur vie depuis qu'ils ont commencé une thérapie. Le film sur les adultes est entrecoupé de scènes d'un groupe de victimes/agresseurs adolescents pour renforcer l'importance de l'intervention précoce. (60 minutes)

Public Affairs
KWG TV
1501 South West Jefferson Street
Portland, Oregon 97201

Tél : 503-226-5000

Both Sides Of The Coin

Bande magnétoscopique innovatrice qui réunit un adulte victime d'abus sexuel dans l'enfance et une personne reconnue coupable de pédophilie. Le résultat est un examen pénétrant, intelligent et équilibré des causes et des effets de l'abus sexuel des enfants. Deux hommes explorent l'impact de l'abus sexuel d'un enfant sur leurs vies respectives. (47 minutes)

Kinetic Inc.
408 rue Dundas est
Toronto (Ontario)
M5A 2A5

Tél : 416-963-0653

Breaking Silence

Ce documentaire personnel et émouvant présente des adultes victimes d'abus sexuel dans leur enfance qui s'efforcent d'accepter un passé qu'ils avaient longtemps gardé secret. Bien que seuls des adultes soient interviewés, leurs histoires sont entrecoupées de photographies de leur enfance. Le film traite de certaines réalités de l'abus sexuel des enfants comme la fréquence de la transmission du comportement d'agression d'une génération à l'autre. Le documentaire montre les difficultés auxquelles les enfants abusés doivent faire face dans la vie adulte pour intégrer leurs expériences douloureuses. (58 minutes)

Video and Film Rental Library
American Psychiatric Association
1400 K Street Northwest
Washington, D.C. 20005

Tél : 202-682-6173

Coming Home: A Spiritual Recovery from Satanic Ritual Abuse

Cette bande magnétoscopique en quatre parties est une version abrégée d'un atelier sur la guérison spirituelle parrainé par le Grace Institute. Le sujet de l'abus rituel satanique est examiné à la fois du point de vue personnel et du point de vue théologique. Une survivante de l'abus satanique parle de son expérience de la redécouverte du sacré. (120 minutes)

Varied Directions International
69 Elm Street
Camden, Maine 04843

Tél : 207-236-8506 ou 1-800-888-5236

Dr. Frank Ochberg on Victimization and PTSD

Cette bande magnétoscopique est une présentation du stress post-traumatique par le Dr Frank Ochberg, psychiatre et expert de la victimisation et du stress post-traumatique connu dans le monde entier. C'est un excellent programme pour les gens qui souffrent de ce syndrome, leurs collègues et les membres de leur famille. (15 minutes)

Varied Directions International
69 Elm Street
Camden, Maine 04843

Tél : 207-236-8506 ou 1-800-888-5236

Four Men Speak Out On Surviving Child Sexual Abuse

Quatre survivants, certains victimes d'agressions violentes et isolées et d'autres d'attentats à la pudeur continus, parlent de l'abus sexuel subi dans leur enfance et de leur processus de rétablissement. Les agresseurs comprennent un père, des adultes connus en qui l'enfant a confiance et d'autres adolescents. Les hommes parlent de leur homophobie, de leur peur de devenir des agresseurs et des problèmes auxquels ils se heurtent dans leurs relations intimes à l'âge adulte. Ces quatre hommes reconnaissent que le rétablissement est à la fois une source de confusion, de souffrance et de soulagement et parlent de ce qui les a aidés dans leur propre processus de guérison. (28 minutes)

Varied Directions International
69 Elm Street
Camden, Maine 04843

Tél : 207-236-8506 ou 1-800-888-5236

Healing Sexual Abuse: The Recovery Process

Dan Sexton, directeur de Child Help, U.S.A., et Ellen Bass, co-auteure de The Courage To Heal, parlent de sujets comme la dissociation, les toxicomanies, le rétablissement de la confiance, la confrontation avec l'agresseur et le chagrin. Cette bande magnétoscopique est recommandée aux survivants à la fois hommes et femmes. (60 minutes)

Varied Directions International
69 Elm Street
Camden, Maine 04843

Tél : 207-236-8506 ou 1-800-888-5236

Partners In Healing

Cette bande magnétoscopique examine, à diverses étapes de la thérapie, la dynamique des couples qui travaillent ensemble à guérir des blessures émotionnelles causées par l'inceste. Elle peut aider les survivantes et survivants de l'inceste et les thérapeutes à comprendre l'effet de l'inceste sur la sexualité, la façon dont les deux membres du couple sont touchés par les problèmes qui se posent au niveau de l'intimité en conséquence de l'inceste et la façon dont ils peuvent œuvrer ensemble à la guérison. (43 minutes)

Varied Directions International
69 Elm Street
Camden, Maine 04843

Tél : 207-236-8506 ou 1-800-888-5236

DOCUMENTS IMPRIMÉS

(Outre les livres dont la liste figure ci-dessous, on est prié de se reporter à l'annexe G - Références, qui offre une bibliographie sur les survivants de l'abus sexuel.)

POUR LES THÉRAPEUTES ET LES CLIENTS

Abused Boys - The Neglected Victims of Sexuel Abuse. Mic Hunter, (Fawcett Columbine, 1990).

Ce livre est divisé en deux sections. La première partie porte sur les aspects théoriques de l'abus sexuel et du rétablissement et, dans la seconde, treize survivants apportent un témoignage personnel sur la question. Le livre est écrit à la fois pour les clients et les thérapeutes.

POUR LES THÉRAPEUTES

Grown-Up Abused Children. James Leehan et Laura Pistone Wilson, (Charles C. Thomas Publishers, 1985).

Ce livre est une présentation concise et facile à lire de l'expérience clinique des auteurs et des questions qui se posent dans le travail de groupe avec des adultes des deux sexes victimes d'abus sexuel. Il comprend une description de la dynamique typique inter et intra-psychique des victimes quand elles grandissent, de la façon dont cette dynamique apparaît et s'exprime dans les groupes de thérapie et des interventions de groupe qui peuvent aider les clients à changer.

Healing The Incest Wound: Adult Survivors In Therapy. Christine Courtois, (W.W. Norton and Company, 1988).

Le livre de Christine Courtois présente un examen sérieux et éloquent de la dynamique de l'abus sexuel au sein de la famille et du traitement de l'inceste. Il traite des victimes de sexe féminin. Cependant, une grande partie des renseignements théoriques qu'il contient est également applicable aux hommes et aux femmes.

Resolving Sexual Abuse. Yvonne Dolan, (W.W. Norton & Co., 1991).

Ce livre bien documenté et facile à lire discute des approches ericksoniennes et axées sur les solutions du travail avec les survivants. Bien que les exemples fassent généralement appel à des femmes, les méthodes et les techniques ne sont pas associées à un sexe particulier.

The Sexually Abused Male, Volumes 1 end 2. Mic Hunter (éd.), (Lexington Books, 1990).

Ce travail en deux volumes est un examen exhaustif qui étudie de plusieurs points de vue l'abus sexuel subi par les hommes. On y présente des renseignements théoriques et appliqués sur la dynamique et le traitement de l'abus sexuel. L'une des grandes forces de cet ouvrage en deux tomes est que les chapitres sont écrits par des auteurs différents si bien que toute une gamme de renseignements et de styles thérapeutiques y est présentée.

Therapy For Adults Molested As Children: Beyond Survival. John Briere, (Springer Publishing Company, 1989).

Ce livre est un document très utile pour les thérapeutes qui travaillent avec des victimes d'abus sexuel des deux sexes. Il offre une analyse bien pensée de l'impact de l'abus sexuel subi dans l'enfance et une discussion détaillée des modèles et des méthodes de traitement. Il comprend des sections intéressantes sur la question du sexe des thérapeutes par rapport à celui des clients et sur l'autoprotection des thérapeutes.

POUR LES CLIENTS

Adults Molested As Children: A Survivor's Manuel For Men And Women. Euan Bear avec Peter Dimock, (Safer Society Press, 1988).

Ce livre est un manuel simple et clair à l'intention des survivants adultes qui les aide à faire le rapport entre leurs comportements présents et les événements passés. Il comprend d'excellents conseils sur la façon de choisir une ou un thérapeute.

Allies In Healing. Laura Davis, (Harper Collins, 1991).

Ce guide essentiel et excellent à l'intention des partenaires des adultes qui ont été victimes d'abus sexuel contient également un grand nombre de renseignements utiles pour les survivants.

Broken Boys/Mending Men. Stephen Grubman-Black, (Ballintine Books, 1990).

Ce livre personnel et bien documenté traite des questions auxquelles les survivants doivent faire face pour passer d'une enfance brisée à une vie adulte restaurée. Le style de l'auteur est ouvert, familier et facile à lire.

The Courage to Heal: A Guide for Women Survivors of Child Sexual Abuse. Ellen Bass et Laura Davis, (Harper & Row, 1988).

Bien qu'écrit à l'intention des survivantes, ce livre est devenu une bible aussi bien pour les hommes que pour les femmes victimes d'abus sexuel dans leur enfance ainsi que pour leurs thérapeutes. C'est un document complet fait pour redonner confiance à ses lecteurs qui décrit clairement comment les défenses de l'enfance peuvent devenir dysfonctionnelles dans la vie adulte. Le ton du livre est amical et ouvert.

The Courage to Heal Workbook: For Women and Men Survivors of Child Sexual Abuse. Laura Davis, (Harper & Row, 1990).

Cet excellent manuel de travail autonome peut être utilisé seul ou de concert avec une thérapie. Il offre des exercices aux survivants pour les aider sur le chemin de la prise de conscience de soi et de la guérison. Les survivants apprécient généralement le format du manuel de travail et sa présentation structurée.

Don't Call It Love: Recovery From Sexual Addiction. Patrick Carnes, (Bantam Books, 1991).

Ce livre décrit à la fois les activités et les processus de guérison des obsessions sexuelles. Il comprend des exercices que les clients peuvent utiliser pour augmenter leur conscience d'eux-mêmes et apporter des changements positifs dans leur vie.

Male Sexuality. Bernie Zilbergeld et John Ullman, (Little Brown, 1978).

Ce livre examine certains mythes sur la sexualité masculine et présente des renseignements différents pour aider les hommes à trouver leur identité sexuelle authentique. Son contenu dépasse la sexualité pour traiter de la dynamique des relations intimes et du rôle de la sexualité dans la création de l'intimité. L'inconvénient de ce livre est qu'il ne traite que des rapports hétérosexuels.

Once Upon A Time… Therapeutic Stories. Nancy Davis, (Psychological Associates of Oxon Hill, 1990).

Inspiré par les méthodes thérapeutiques ericksoniennes, ce livre contient des histoires qui ont pour but de restaurer le sentiment de pouvoir personnel, la santé, l'intégrité et la joie des clients. Les histoires visent des populations spécifiques, par exemple, les victimes qui deviennent des agresseurs ou les enfants qui ont été victimes d'abus rituel. Les histoires sont écrites à l'intention des adolescents et des enfants mais, avec certaines adaptations, on peut les utiliser avec des adultes.

Outgrowing The Pain: A Book For and About Adults Abused As Children. Eliana Gil, (Dell Publishing, 1983).

Ce petit livre de poche décrit l'abus sexuel et ses effets en termes concis et lisibles. Il décrit aussi brièvement les mesures que peuvent prendre les survivants pour faciliter leur guérison. Il s'agit d'une excellente ressource pour les clients aux étapes initiales de la thérapie.

Victims No Longer: Men Recovering From Incest and Other Sexual Child Abuse. Mike Lew, (Nevraumont Publishing Company, 1988). (Réédité par Harper & Row, Publishers, Inc., New York, 1990.)

Ce livre bien documenté et facile d'accès traite spécifiquement des victimes d'abus sexuel de sexe masculin. Les histoires personnelles des survivants sont accompagnées d'une discussion des effets de l'abus sexuel subi dans l'enfance et du processus de rétablissement. Ce livre peut devenir un compagnon des survivants tout au long du processus de rétablissement.

DOCUMENTS IMPRIMÉS EN FRANÇAIS

Un certain nombre d'articles et d'ouvrages en français ont été découverte au cours de la traduction du présent ouvrage. Les auteurs figurent ci-dessous.

Beltrami, E., N. Couture et F. Gagné, « Abus sexuel d'enfants : inceste père-fils comparé à la pédophilie homosexuelle », dans Enfance et sexualité, éd. J.M. Samson, (Montréal : Études Vivantes, 1980), p. 694-704.

Gouvernement du Canada, Les infractions sexuelles à l'égard des enfants : rapport du Comité sur les infractions sexuelles à l'égard des enfants et des jeunes (Comité BADGLEY), (Ottawa : Gouvernement du Canada, ministère de la Justice, ministère du Procureur général du Canada, ministère de la Santé nationale et du Bien-être social, 1984), 2 volumes.

Jeliu, G., « Le syndrome de l'enfant maltraité : perspectives », dans L'enfant, Explorations récentes en psychologie du développement, éd. J.F. Saucier, (Montréal : Presses de l'Université de Montréal, 1980), p. 85-98.

Lamontagne, Y. et C. Lacerte-Lamontagne, L'attentat sexuel contre les enfants, (Montréal : Éd. La Presse, 1977).

Miller A., L'enfant sous terreur, (Paris : Aubier-Montaigne, 1986).

Rusch, F., Le secret le mieux gardé. L'exploitation sexuelle des enfants, (Paris : Denoël-Gonthier, 1983).

Sgrol, S.M., éd., L'agression sexuelle et l'enfant. Approche et thérapies, (Saint-Laurent : Editions Trécarré, 1986).

FORMATION

Les possibilités de formation à l'intention des thérapeutes qui travaillent avec des victimes de sexe masculin de l'abus sexuel sont encore rares. Cependant, deux conférences internationales qui portent exclusivement sur l'abus sexuel subi par les hommes se tiennent chaque année aux États-Unis. Pour se renseigner sur le congrès de quatre jours intitulé « National Male Survivors Conférence », qui a lieu depuis 1989, écrire à l'adresse suivante :

Shunomi Creek Consultants

2801 Buford Highway
Suite 400
Atlanta, Georgia 30329

Tél : 404-321-4954

Pour se renseigner sur le congrès de trois jours intitulée « It Happens To Boys Too... » prendre contact avec

M. Daniel P. Moriarty
Administrator For Personnel and Training
St. Aloysius Home
40 Austin Avenue
Greenville, Rhode Island 02828

Tél : 401-949-1300

ANNEXE A - QUESTIONNAIRE

SURVIVANTS DE L'ABUS SEXUEL

Veuillez répondre aux questions suivantes en cochant (ü ) la réponse appropriée ou en notant votre réponse dans l'espace prévu à cet effet. Utilisez les marges ou le dos de la feuille si vous avez besoin d'espace supplémentaire.

Le terme « clients » désigne les survivants de l'abus sexuel.

SECTION I : RENSEIGNEMENTS SUR LES THÉRAPEUTES

1. Nom :
2. Profession/poste :
3. Employeur (le ces échéant) :
4. Adresse :  Téléphone(s) :

5a. Nombre d'années d'expérience avec des survivantes et des survivants de l'abus sexuel :

____0-2 ans
____3-5 ans
____6-8 ans
____plus de 8 ans
 
 

5b. Nombre d'années d'expérience directs avec des survivante de l'abus sexuel :

____0-2 ans
____3-5 ans
____6-8 ans
____plus de 8 ans
 
 

6a. Modalités de traitement dispensées aux survivante de l'abus sexuel :

____thérapie individuelle
____thérapie de groupe
____thérapie de couple
____thérapie familiale
____autre (veuillez spécifier)
 

6b. En principe, dense quel ordre classeriez-vous les modalités de traitement ci-dessus (voir question 6a) pour les survivants de l'abus sexuel? En pratique, modifiez-vous souvent cet ordre? Veuillez répondre ci-dessous.
 
 
 

7. Veuillez décrire brièvement le(s) modèle(s) et/ou la (les) théorie(s) qui décrivent le mieux votre approche thérapeutique avec les survivante de l'abus sexuel :
 
 
 

8. Sur la base de votre expérience clinique, veuillez discuter brièvement de l'impact du sexe de la ou du thérapeute par rapport au sexe du client dans le travail avec les survivante de l'abus sexuel.
 
 
 

9. À quel type d'éducation ou de formation avez-vous eu recours pour soutenir votre travail thérapeutique avec les survivants de l'abus sexuel :

__formation autodidacte (c.-à-d. lecture de journaux professionnels, de livres, etc.) __séances de formation et ateliers offerts par d'autres professionnels
__congrès professionnels
__formation officielle en classe
__autre (veuillez spécifier)
 

10. Veuillez énumérer les ressources (documentation écrite, bandes magnétoscopiques, films, cassettes sonores, programmes de formation, présentation d'ateliers, congrès, groupes de consultation entre pairs, consultations entre paire, etc.) qui vous ont apporté un soutien particulier dans votre travail avec les survivante de l'abus sexuel :
 
 
 

11. Veuillez indiquer comment vous évaluez l'efficacité de votre travail thérapeutique avec vos clients :

____méthodes d'évaluation systématiques (veuillez spécifier)
____méthodes d'évaluation non systématiques (veuillez spécifier)
 

SECTION II : RENSEIGNEMENTS SUR LE CLIENT

12. Veuillez indiquer le groupe d'âge des survivants de l'abus sexuel avec lesquels vous travaillez :

____âge préscolaire (0-5 ans)
____période de latence (6-12 ans)
____adolescents (13-19 ans)
____jeunes adultes (20-25 ans)
____adultes (25 ans et plus)
 

13. Veuillez décrire les problèmes que vous rencontrez le plus souvent chez les survivants de l'abus sexuel (p. ex., difficultés dans las relations intimes, manque de confiance dans les autres, toxicomanie, problèmes d'identité sexuelle) en cours de thérapie :
 
 
 

14. Veuillez énumérer les ressources (documentation écrite, bandes magnétoscopiques, film, musique, cassettes sonores, etc.) que vous utilisez dent votre travail clinique avec les cliente ou que vous leur recommandez d'utiliser par eux-mêmes :

SECTION III : AUTRES RENSEIGNEMENTS

15. Veuillez utiliser l'espace ci-dessous pour ajouter tout commentaire sur votre travail avec les survivante de l'abus sexuel non inclus dans les réponses aux questions qui précèdent :
 
 
 

Merci d'avoir rempli ce questionnaire. Veuillez le retourner dans l'enveloppe ci-jointe à Adrienne Crowder, B.A., M.S.W., Services à la famille et aux enfants de la région de Waterloo, 200 avenue Ardelt, Kitchener (Ontario) N2C 2L9.

ANNEXE B - LISTE DES PERSONNES QUI ONT CONTRIBUE A LA RECHERCHE

M. Paul Antrobus 1-306-585-5444
Collège Luther
Université de Regina
Regina (Saskatchewan)
S4S 0A2

Dr Dick Berry 1-416-326-0647
Safe-T
Centre régional Thistletown
51, Panorama Court
Rexdale (Ontario)
M9V 4L8

Dr George Bilotta 1-415-664-5007
2306, Taraval Street
Suite 102
San Francisco (California) 94116

Mme Debbie Bruckner 1-403-297-4020
Conseillère principale
Collège professionnel Alberta
332, Sixième avenue SE
Calgary (Alberta)
T2G 4S6

M. Leonard Burnstein 1-613-722-6521
Hôpital Royal d'Ottawa
1145, avenue Carling
Ottawa (Ontario)
K1Z 7K4

M. Ray Chapman 1-604-936-9460
1753, avenue Dansey
Coquitlam (Colombie-Britannique)
V3K 3J4

M. Lou Coppola 1-705-742-4258
Services de counseling familial de Peterborough
318, rue Stewart
Peterborough (Ontario)
K9J 3M1

M. Harry Dudley 1-403-233-2370
Bureau du service à la famille de Calgary
Bureau 200
707-10e avenue SO
Calgary (Alberta)
T2G 0B3

M. Grant Fair 1-416-224-2227
161, avenue Franklin
Willowdale (Ontario)
M2N lC6

M. Paul Gerber 1-612-949-4500
Hennepin County Home School
Juvenile Sex Offender Program
14300, County Highway 62
Minnetonka (Minnesota) 55345

M. Peter Goodman 1-902-422-3760
Eastwind Associates
2176, rue Windsor
Halifax (Nouvelle-Écosse)
B3K 5B6

M. Charlie Greenman 1-612-825-2409
Rape and Sexual Assault Centre
2431, Hennepin Avenue S
Minneapolis (Minnesota) 55405

Mme Anne Gresham 1-612-427-7964
Family Life Mental Health Center
1428, 5th Avenue S
Anoka (Minnesota) 55303

M. Stephen D. Grubman-Black 1-401-792-4743
PO Box 1504
Wickford (Rhode Island) 02852

Mme Judith Halpern 1-703-534-1633
First Virginia Plaza
64, Arlington Blvd
Suite 634
Falls Church (Virginia) 22042

M. Doug Harder 1-306-242-1010
Cardwell Human Resources
Bureau 200
Centre Regency
333-25e rue Est
Saskatoon (Saskatchewan)
S7K 0L4

M. Arthur Harold 1-705-742-4258
Services de counseling familial de Peterborough
318, rue Stewart
Peterborough (Ontario)
K9J 3M1

M. Rob Hawkings 1-416-385-9483
94, chemin Clifton Downs
Hamilton (Ontario)
L9C 2P3

Mme Bobbi Hoover 1-408-496-6464
544, Mansion Park Drive
Santa Clara (California) 95054

M. Mic Hunter 1-612-649-1408
2469, University Avenue West
Upper Northeast Suite
St. Paul (Minnesota) 55114

M. Michael Irving 1-416-469-4764
274, avenue Rhodes
Toronto (Ontario)
M4L 3A3

Dr David Jackson 1-306-934-0272
Services de Psychiatrie
Saskatoon City Hospital
701, rue Queen
Saskatoon (Saskatchewan)
S7K 0M7

M. Peter E. Johnson 1-403-297-4085
Collège professionnel Alberta
332, Sixième avenue SE
Calgary (Alberta)
T2J 4S6

M. Merlin Kobsa 1-416-826-3242
Halton Sexual Abuse Program
461, chemin North Service ouest
Unité B6
Oakville (Ontario)
L6M 2V6

M. Len Kushnier 1-619-434-8461
Superviseur
Services à la famille et aux enfants
BP 848
Succursale B
London (Ontario)
N6A 4Z5

Mme Joan Lee 1-705-742-4258
Administratrice générale
Services de counseling familial de Peterborough
318, rue Stewart
Peterborough (Ontario)
K9J 3N1

M. Mike Lew 1-617-332-6601
The Next Step Counselling
10, Langley Road
Suite 200
Newton centre (Massachusetts) 02159

M. Donald L. Mann 1-503-228-1939
Clinical Social Worker
811, NW 20th Street
Suite 102
Portland (Oregon) 97209

M. Michael McGrenra 1-415-664-5007
2306, Taraval Street
Suite 102
San Francisco (California) 94116

M. Paul McIntosh 1-519-432-9385
424, av Princess
London (Ontario)
N6B 2B1

Mme Mary Meining 1-206-284-3125
200, West Mercer
Suite 202
Seattle (Washington) 98119

Mme Karen Nielson 1-403-423-2831
Family Service Association of Edmonton
9912, rue 106
Edmonton (Alberta)
T5K 1C5

Mme Kay Rice 1-612-642-1709
2469, University Avenue
St. Paul (Minnesota) 55114

Mme Deb Ruppert 1-519-744-6549
Community Justice Iniatives
39, avenue Stirling nord
Kitchener (Ontario)
N2H 3G4

M. Jack Rusinoff 1-612-641-5584
PHASE
425, Aldine Street
St. Paul (Minnesota) 55104

M. John Stasio 1-617-859-8827
75, Rutland Street
Boston (Massachusetts)
02118-1525

M. Paul Sterlocci 1-612-642-1709
City Line Association Psychotherapists
2469, University Avenue
St. Paul (Minnesota) 55114

Dr Robert Timms 1-404-321-5533
Atlanta Centre for Integrative Therapy
Suite 508
20, Executive Park West
Atlanta (Georgia)

M. Timothy Wall 1-204-784-4090
Coordinateur du counseling
Centre de santé communautaire Klinic
870, rue Portage
Winnipeg (Manitoba)
R3G 0P1

M. Steve Wardikowski 1-306-757-6675
Bureau du service familial de Regina
2020, rue Halifax
Regina (Saskatchewan)
S4P 1T7

M. Don Wright 1-604-682-6482
Vancouver Society for Male Survivors of Sexual Abuse
847, rue Hamilton
Vancouver (Colombie-Britannique)
V6B 2R7

ANNEXE C - DES

DES

Eve Bernstein Carlson, Ph.D.   Frank W. Putnam, M.D.

INSTRUCTIONS

Le présent questionnaire contient vingt-huit questions sur certaines expériences susceptibles de vous arriver dans votre vie quotidienne. Nous aimerions déterminer la fréquence de ces expériences. Il est important, cependant, que vos réponses indiquent la fréquence de ces expériences lorsque vous n'êtes pas sous l'influence de l'alcool ou des drogues. Pour répondre aux questions, veuillez indiquer dans quelle mesure l'expérience décrite dans la question s'applique à vous par un trait à l'endroit approprié comme indiqué sur la ligne ci-dessous.

Exemple :

0 % | ________________/_________________ | 100 %

Date : ____________ Age : ________ Sexe : M F _______

  • Il arrive que certaines personnes conduisent une voiture et se rendent compte tout à coup qu'elles ne se souviennent pas de ce qui est arrivé pendant la totalité ou une partie du trajet. Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

     

    0 % | _____________________ | 100 %



  1. Il arrive que certaines personnes écoutent quelqu'un parler et se rendent compte tout à coup qu'elles dont pas entendu une partie ou la totalité de ce qui a été dit. Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

  2.  

     
     

    0 % | _____________________ | 100 %




  3. 0 % | _____________________ | 100 %



  4. Il arrive que certaines personnes se retrouvent habillées avec des vêtements qu'elles ne se souviennent pas avoir mis. Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

  5. 0 % | _____________________ | 100 %



  6. Il arrive que certaines personnes trouvent des choses neuves parmi leurs affaires qu'elles ne se souviennent pas avoir achetées. Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle réquence.

  7. 0 % | _____________________ | 100 %



  8. Certaines personnes trouvent parfois qu'elles sont abordées par des gens qu'elles ne connaissent pas qui affirment qu'ils les ont déjà rencontrées ou les appellent par un autre nom. Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

  9. 0 % | _____________________ | 100 %



  10. Certaines personnes ont parfois le sentiment d'être à côté d'elles-mêmes ou de se regarder faire quelque chose et elles se voient effectivement comme si elles regardaient une autre personne. Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

  11. 0 % | _____________________ | 100 %



  12. Certaines personnes se font dire que, parfois, elles ne reconnaissent pas leurs amis ou les membres de leur famille. Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

  13. 0 % | _____________________ | 100 %



  14. Il arrive à certaines personnes de ne pas se souvenir de certains événements importants de leur vie (p. ex., un mariage ou une remise de diplôme). Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

  15. 0 % | _____________________ | 100 %



  16. Il arrive à certaines personnes d'être accusées de mentir alors qu'elles ne pensent pas avoir menti. Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

  17. 0 % | _____________________ | 100 %



  18. Il arrive à certaines personnes de se regarder dans une glacé et d'avoir le sentiment de ne pas se reconnaître. Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

  19. 0 % | _____________________ | 100 %



  20. Il arrive à certaines personnes d'avoir l'impression que les autres gens, les objets ou le monde autour d'elles ne sont pas réels. Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

  21.  

     
     

    0 % | _____________________ | 100 %


  22. Il arrive à certaines personnes d'avoir l'impression que leur corps ne leur appartient pas. Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

  23. 0 % | _____________________ | 100 %


  24. Il arrive à certaines personnes de se souvenir parfois si clairement d'un événement passé qu'elles ont l'impression de revivre cet événement. Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

  25. 0 % | _____________________ | 100 %



  26. Il arrive a certaines personnes de ne pas savoir si les choses dont elles se souviennent sont réellement arrivées ou si elles ont rêvé. Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

  27. 0 % | _____________________ | 100 %


  28. Il arrive à certaines personnes de se retrouver dans un lieu familier mais de le trouver étrange et inconnu. Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

  29. 0 % | _____________________ | 100 %


  30. Certaines personnes trouvent que, lorsqu'elles regardent la télévision ou un film, elles se laissent tellement absorber par l'histoire qu'elles ne sont pas conscientes des événements qui se produisent autour d'elles. Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

  31. 0 % | _____________________ | 100 %


  32. Certaines personnes trouvent qu'elles sont tellement prises par un fantasme ou par un rêve éveillé qu'elles ont le sentiment que ces choses arrivent réellement. Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

  33. 0 % | _____________________ | 100 %


  34. Certaines personnes trouvent qu'elles sont parfois capables d'ignorer la souffrance. Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

  35. 0 % | _____________________ | 100 %

  36. Certaines personnes trouvent qu'elles restent parfois assises à regarder dans le vide et à ne penser à rien et perdent la notion du temps. Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

  37. 0 % | _____________________ | 100 %


  38. Certaines personnes trouvent que, lorsqu'elles sont seules, elles se parlent tout haut. Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

  39. 0 % | _____________________ | 100 %


  40. Certaines personnes trouvent qu'elles peuvent agir de façon si différente dans une situation par rapport à une autre situation qu'elles ont presque l'impression d'être deux personnes différentes. Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

  41. 0 % | _____________________ | 100 %


  42. Certaines personnes trouvent que, parfois, dans certaines situations, elles sont capables de faire des choses qu'elles trouvent habituellement difficiles (p. ex., sports, travail situations sociales, etc.) avec une facilité et une spontanéité incroyables. Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

  43. 0 % | _____________________ | 100 %


  44. Certaines personnes trouvent parfois qu'elles ne peuvent pas se souvenir si elles ont fait quelque chose ou simplement pensé à le faire (p. ex., ne pas savoir si on a juste posté une lettre ou si on a seulement pensé à la poster). Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

  45. 0 % | _____________________ | 100 %


  46. Certaines personnes trouvent des preuves qu'elles ont fait des choses qu'elles ne se souviennent pas avoir faites. Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

  47. 0 % | _____________________ | 100 %


  48. Certaines personnes trouvent parfois des écrits, des dessins ou des notes dans leurs affaires dont elles doivent être l'auteur mais dont elles ne se souviennent pas. Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

  49. 0 % | _____________________ | 100 %


  50. Certaines personnes trouvent parfois qu'elles entendent des voix dans leur tête qui leur disent quoi faire ou font des commentaires sur ce qu'elles font. Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

  51. 0 % | _____________________ | 100 %


  52. Certaines personnes ont parfois l'impression qu'elles regardent le monde à travers un brouillard si bien que les gens et les objets leur semblent lointains et brouillés. Indiquez sur la ligne, en pourcentage de temps, si cela vous arrive et à quelle fréquence.

  53. 0 % | _____________________ | 100 %

ANNEXE D - INTERVENTION VISANT À GÉRER LES FLASHBACKS ET INTERVENTION VISANT À AIDER LES CLIENTS À PRENDRE CONSCIENCE D'EUX-MÊMES DANS LE PRÉSENT

Les interventions suivantes ont été présentées par Yvonne Dolan à un congrès organisé à Baltimore, Maryland, en novembre 1992.

Intervention visant à gérer les flashbacks

(Approche en quatre étapes en réponse aux flashbacks qui se produisent dans la vie quotidienne)

Les quatre étapes suivantes aideront la cliente à mieux comprendre et donc à mieux contrôler ses expériences de flashback à l'intérieur et à l'extérieur du milieu thérapeutique :

  1. « Décrivez ce que vous ressentez. Quand avez-vous déjà ressenti cela? Dans quelle situation étiez-vous la dernière fois que vous avez ressenti cela? »*
  2. « En quoi la situation actuelle et la situation passée se ressemblent-elles? Par exemple, est-ce que le lieu, l'époque de l'année ou ce que vous voyez, ce que vous entendez ou ce que vous ressentez sont semblables d'une façon ou d'une autre à la situation passée où vous avez éprouvé la même chose. Si cela fait intervenir une autre personne, cette personne ressemble-t-elle à une personne du passé qui a suscité des sentiments similaires? »,/li>
  3. « En quoi votre situation actuelle est-elle différente de la situation passée où vous avez éprouvé la même chose? En quoi êtes-vous différente, en quoi votre expérience sensorielle, les circonstances de votre vie actuelle et vos ressources personnelles sont-elles différentes? En quoi le milieu est-il différent? Si la situation fait intervenir une ou plusieurs autres personnes, en quoi sont-elles différentes de la ou des personnes de la situation passée? »
  4. « Voulez-vous prendre des mesures, et lesquelles, pour vous sentir mieux dans la situation actuelle? » Par exemple, un flashback peut indiquer qu'une personne est de nouveau dans une situation qui présente un certain danger. Si c'est le cas, il faut prendre des mesures d'autoprotection pour modifier la situation actuelle. Par ailleurs, un flashback peut simplement indiquer qu'un vieux souvenir a été déclenché par une ressemblance sans conséquence mais hautement évocatrice avec le passé comme une certaine couleur, une odeur, un son, etc. Dans ce cas, il faut donner des messages correcteurs rassurants et réconfortants au moi pour neutraliser les vieux souvenirs traumatisants. On peut utiliser à cette fin des signaux associatifs évocateurs de confort et de sécurité.

  5. * Si la cliente est incapable d'identifier quand elle a ressenti la même chose dans le passé, on peut faire appel aux ressources de l'inconscient pour l'aider à accéder à l'information et à la compréhension nécessaires à la résolution.

Intervention visant à aider les cliente à
prendre conscience d'eux-mêmes dans le présent

Cette intervention utilise l'hypervigilance des clients pour les aider à se détendre et à se centrer dans le présent.

Les clients qui sont dissociés ou qui veulent induire une détente physique sont invités à faire ce qui suit :

  • Nommez 5 choses que vous voyez
  • Nommez 5 choses que vous entendez
  • Nommez 5 choses que vous sentez
  • Nommez 4 choses que vous voyez
  • Nommez 4 choses que vous entendez
  • Nommez 4 choses que vous sentez
  • Nommez 3 choses que vous voyez etc.
  • Nommez 2 choses que vous voyez etc.
  • Nommez 1 chose que vous voyez etc.

Chaque fois que le client identifie quelque chose qu'il voit, qu'il entend ou qu'il sent, il doit dire, « Je vois ..., je vois ..., je vois ..., je vois ..., je vois ..., j'entends ..., j'entends ..., j'entends ..., etc. » Cette répétition rythmique apporte calme et détente.

Il est tout à lait acceptable de nommer le même objet, le même son ou la même sensation deux ou plusieurs fois de rang. On peut faire l'exercice en silence ou à haute voix. On peut le répéter aussi souvent que nécessaire. Il arrive que le client ne sache plus où il en est dans l'exercice. Il recommence simplement là où il pense qu'il a abandonné.

Cette technique réussit surtout si le client est assis ou tranquille. On peut la pratiquer dans un environnement calme ou mouvementé. Il ne faut pas l'utiliser lorsqu'on conduit un véhicule.

ANNEXE E - COMPORTEMENTS QUI FAVORISENT LE PROCESSUS DE GROUPE

LES BONNES EXPÉRIENCES DE GROUPE NE SE PRODUISENT PAS PAR ENCHANTEMENT! Elles sont le résultat de l'engagement et de la participation des personnes présentes. Nous allons passer un certain nombre d'heures ensemble. Vous serez libre de parler beaucoup ou peu de vous, à votre gré. Aucun d'entre vous ne sera forcé de parler de lui plus qu'il n'en a envie. Vous êtes donc invité à lire les pages qui suivent, à y réfléchir et à discuter des qualités qui sont à la base d'un bon travail de groupe.

  1. LE PARTAGE EST ESSENTIEL. Vos pensées, vos sentiments et vos expériences constituent la vie même du groupe. Nous en avons tous besoin pour faire des découvertes, approfondir les choses et faire du chemin ensemble.
  2. Exprimez des SENTIMENTS, pas simplement des idées. Les sentiments sont les meilleurs indicateurs de ce à quoi les gens accordent de l'importance. Pour cela, il faut être en contact avec ses sentiments. Prenez le temps d'y réfléchir et essayez de les identifier clairement.
  3. L'expression de SENTIMENTS NÉGATIFS peut, à l'occasion, être également utile. Les sentiments non exprimés créent des blocs ou s'écoulent bêtement sans servir à rien.
  4. Faites preuve de respect, d'attention et de SOUTIEN VIS-À-VIS DE CHAQUE PERSONNE PRÉSENTE DANS LE GROUPE. Plus chacun ressent de confiance, plus l'anxiété diminue et plus profondément on peut explorer les questions qui se posent à nous.
  5. LE SOUTIEN A BESOIN D'ÊTRE EXPRIMÉ. Ne vous dites pas que les gens savent bien que vous les soutenez. Ils ne le savent pas tant que vous ne l'aurez pas montré.
  6. EN RABROUANT LES GENS, ON LES INCITE À SE FERMER et on va à l'encontre de l'effet recherché

  7. .
  8. LA CONFRONTATION POSITIVE EST ACCEPTABLE et nécessaire. Confronter quelqu'un, c'est lui présenter une idée nouvelle ou opposée aux fins de reconnaissance, d'accord, de contradiction ou de clarification. La confrontation permet d'identifier où se situent les gens et ce à quoi ils accordent de l'importance.
  9. Confrontez les gens avec leurs POINTS FORTS non utilisée tout autant qu'avec leurs faiblesses. Confrontez-les afin de les aider à grandir.
  10. L'accusation et le ridicule ne feront que susciter l'HOSTILITÉ et créer des blocs. Évitez-les.
  11. ÉVITEZ DE CHERCHER À IMPOSER VOTRE POINT DE VUE PAR L'ARROGANCE ou par des barrages d'arguments

  12. .
  13. LE BUT DE NOTRE GROUPE N'EST PAS DE GAGNER MAIS DE GRANDIR. Vous n'avez pas besoin d'adoucir vos opinions mais vous pouvez les affirmer d'une façon qui donne aux gens l'espace nécessaire pour manœuvrer et répondre de façon positive.
  14. Essayez d'ÉVITER DE DEVENIR DÉFENSIF. Prenez conscience du fait que vous êtes entre amis. Voyez les confrontations comme une invitation à l'exploration de soi.
  15. Pour porter des fruits, la discussion requiert que l'on soit OUVERT AUX CHANGEMENTS

  16. .
  17. NE VOUS ÉLOIGNEZ PAS DU SUJET. Ne partez pas dans tous les sens.
  18. PARLEZ POUR VOUS. Évitez d'utiliser « nous » lorsque vous voulez dire « je ». Ne partez pas pour le groupe sans offrir aux autres une chance d'être ou de ne pas être d'accord.
  19. N'UTILISEZ PAS DES SUBSTITUTS POUR « JE » comme « on penserait » ou « tout le monde est d'accord ». Assumez la responsabilité de ce que vous dites.
  20. PARLEZ SURTOUT DE VOUS. Il y a croissance essentiellement lorsque les membres du groupe appliquent le sujet de la discussion à leur propre vie.
  21. ADRESSEZ-VOUS INDIVIDUELLEMENT AUX PERSONNES PRÉSENTES. Les séries de monologues adressés au groupe tout entier peuvent être mortelles.
  22. AIDEZ LES AUTRES À EXPLORER ET À DÉVELOPPER les idées et les sentiments qu'ils expriment.
  23. VOUS N'ÊTES NI UN THÉRAPEUTE NI UN JUGE. Votre rôle n'est pas de remettre les autres sur le bon chemin ou de résoudre leurs problèmes mais de partager, d'aider et d'encourager.
  24. EXPRIMEZ VOS DÉSACCORDS COMME REPRÉSENTANT VOS IDÉES et non la vérité absolue. Trouvez des points communs et des secteurs d'accord avant d'exprimer votre opposition.
  25. DITES CE QUE VOUS AVEZ À DIRE AU GROUPE. Les choses que vous dites à vos amis sur le groupe, avant, après ou entre les réunions sont souvent les choses mêmes qui devraient être exprimées dans le groupe. Il ne doit y avoir qu'une conversation à la fois dans le groupe.
  26. VENEZ AUX RÉUNIONS. Si une personne manque une réunion, la dynamique du groupe est modifiée. Il arrive souvent que la personne qui s'est absentée ne puisse pas rattraper ce qui s'est passé parce qu'elle n'a pas fait l'expérience de ce qui est véritablement arrivé. Le groupe a besoin de votre présence.
  27. AMUSEZ-VOUS. La vie est trop courte pour que l'on passe du temps à faire ce que l'on n'aime pas. Aidez les autres à être heureux par votre chaleur, votre amitié et votre attention.

(Élaboré par le Halton Sexual Abuse Treatment Program d'Oakville, Ontario.)

ANNEXE F - QUESTIONNAIRE DEAN A L'INTENTION DES ADOLESCENTS  


Entourez d'un cercle votre réponse
  1. J'ai eu peur de parler à quiconque de certaines de mes expériences.VRAI FAUX
  2. J'entends quelquefois des disputes dans ma tête et cela me trouble. VRAI FAUX
  3. Quand j'étais très jeune, je prétendais avoir un compagnon de jeu que personne ne connaissait.VRAI FAUX
  4. Quelquefois, quand j'écris, j'ai l'impression que quelqu'un d'autre me guide la main.VRAI FAUX
  5. Il arrive souvent, quand je regarde dans la glace, que la couleur de mes cheveux semble changer.VRAI FAUX
  6. Quand je mange, il arrive que « je » n'arrive pas à goûter la nourriture.VRAI FAUX
  7. Quand je fais du sport avec des amis, il m'arrive de jouer vraiment bien pendant un match et, la fois suivante,

  8. j'ai l'impression que je n'ai jamais joué de ma vie. VRAI FAUX
  9. Quelquefois, quand je dors la nuit, j'ai l'impression d'être éveillé et d'avoir une conversation avec des gens. VRAI FAUX
  10. Je suis troublé quand des gens insistent sur le fait qu'ils me connaissent alors que je ne les ai jamais rencontrés. VRAI FAUX
  11. Mon écriture change souvent. VRAI FAUX
  12. J'ai regardé dans la glace et j'ai vu quelqu'un d'autre que moi. VRAI FAUX
  13. Quelque chose de terrible m'est arrivé mais je ne sais pas ce que c'était. VRAI FAUX
  14. Je ne me souviens pas d'un grand nombre de choses que les gens disent m'être arrivées. VRAI FAUX
  15. Il m'arrive d'être avec des amis et de ne pas me souvenir comment j'ai fait pour être là. VRAI FAUX
  16. J'ai l'impression d'avoir complètement perdu une partie de ma mémoire. VRAI FAUX
  17. Quand je m'habille, j'ai du mal à décider quoi porter parce qu'il me semble que certaines parties de moi veulent porter quelque chose de différent de ce que moi je veux porter. VRAI FAUX
  18. J'ai entendu dire que les gens qui entendent des voix dans leur tête sont fous et je pense quelquefois que je suis peut-être fou parce que j'ai entendu des voix aussi. VRAI FAUX
  19. J'ai le sentiment que personne n'a jamais été capable de m'aider. VRAI FAUX
  20. J'ai de graves maux de tête et personne n'a pu découvrir pourquoi. VRAI FAUX
  21. J'ai l'impression qu'il m'est arrivé des choses dont je ne pourrai jamais parler à personne mais je ne sais pas ce que c'est. VRAI FAUX
  22. Mes jambes et mes bras et quelquefois mes mains bougent et moi je ne les bouge pas. VRAI FAUX
  23. Je me suis regardé faire des choses et parler à des gens mais je ne pouvais pas parler. VRAI FAUX
  24. Pour moi le temps est discontinu. VRAI FAUX
  25. Je fais des quantités de choses à la fois et je ne comprends pas vraiment comment c'est possible. VRAI FAUX
  26. J'ai été accusé de voler mais je sais que je n'ai jamais rien volé. VRAI FAUX
  27. Des choses sont apparues dans ma chambre que j'ai été accusé d'avoir volées mais je sais que je ne les ai pas volées. VRAI FAUX
  28. Mes parents me disent que je mens tout le temps. VRAI FAUX
  29. J'aime mentir. VRAI FAUX
  30. J'ai volé des choses pour mettre mes parents en colère. VRAI FAUX
  31. J'aime causer des problèmes aux gens. VRAI FAUX
  32. Quelquefois, je me regarde faire quelque chose qui va me causer des ennuis mais je ne peux pas m'arrêter. VRAI FAUX
  33. Ma vision change tout le temps mais personne ne me croit. VRAI FAUX
  34. J'ai mangé des repas entiers sans me souvenir d'avoir mangé. VRAI FAUX
  35. J'ai des choses favorites dans ma chambre à la maison mais j'ai l'impression que certaines appartiennent à quelqu'un d'autre. VRAI FAUX
  36. Mes parents m'ont accusé de parler tout seul. VRAI FAUX
  37. J'ai été maltraité par beaucoup de gens. VRAI FAUX
  38. Quelquefois, quand je vais à l'école, je ne sais pas de quoi l'enseignante ou l'enseignant parle, comme si j'avais perdu

  39. une partie du cours. VRAI FAUX
  40. À l'école, j'ai une mauvaise mémoire pour certains sujets que je pensais bien connaître. VRAI FAUX
  41. Il y a en moi une partie violente dont je n'ai pas parlé au médecin. VRAI FAUX
  42. Quelquefois, j'ai l'impression que j'ai peut-être fait quelque chose de terrible mais je ne sais pas ce que ça pourrait être. VRAI FAUX
  43. Je me retrouve dans un état de panique lorsque je suis près de certaines personnes et je ne sais pas pourquoi. VRAI FAUX
  44. Il m'est arrivé plusieurs fois de ne pas savoir qui j'étais ni même comment je m'appelais. VRAI FAUX
  45. Quelquefois, je me donne un autre nom. VRAI FAUX
  46. Je prétends que je me rappelle certaines choses alors que je ne peux pas vraiment m'en souvenir. VRAI FAUX
  47. Quelquefois, je parle à un ami et je ne sais pas comment mais je disparais et j'apparais plus tard ailleurs. VRAI FAUX
  48. Les gens me disent que j'ai souvent le regard fixe. VRAI FAUX
  49. À l'école, les enseignants me rappellent sans cesse à l'ordre. VRAI FAUX
  50. Il arrive souvent, quand les gens me parlent, que j'aie l'impression qu'ils parlent à quelqu'un d'autre. VRAI FAUX
  51. Une fois, j'ai vraiment vu une personne tuer quelqu'un. VRAI FAUX
  52. Je me cache des choses à moi-même tout le temps. VRAI FAUX
  53. Mes amis ne m'aiment pas vraiment parce qu'ils ne savent pas vraiment qui je suis. VRAI FAUX
  54. J'ai vu mourir quelqu'un en vrai. VRAI FAUX
  55. Je n'aime pas parler des choses qui me troublent parce que, quelquefois, ça me fait disparaître en moi-même. VRAI FAUX
  56. Quand je disparais en moi-même j'entends les gens qui m'appellent mais je n'ai pas la possibilité de répondre et cela me fait très peur. VRAI FAUX
  57. J'ai été violé et je ne peux pas en parler. VRAI FAUX
  58. Ma plus grande peur est que quelqu'un me fasse mal. VRAI FAUX
  59. Quelquefois, je suis en train de faire quelque chose et tout d'un coup, je ne peux plus du tout penser à ce que je fais parce que mon esprit est complètement vide. VRAI FAUX
  60. J'ai été rempli de rage et je n'ai pas compris pourquoi. VRAI FAUX
  61. On m'a dit que je roulais des yeux. VRAI FAUX
  62. Quelquefois, je veux faire quelque chose et mon corps semble vouloir faire quelque chose d'autre. VRAI FAUX
  63. Si j'arrive jamais à découvrir ce qui ne va pas chez moi, je travaillerai dur à me guérir. VRAI FAUX
  64. Il y a des gens qui pensent que je suis un problème pour la société mais ils ne peuvent pas m'aider non plus. VRAI FAUX
  65. Il m'arrive quelquefois de manger des choses que je n'aime pas. VRAI FAUX
  66. Je ne peux pas toujours sentir les odeurs même quand je n'ai pas de rhume. VRAI FAUX
  67. Quelquefois, je réponds aux questions des examens et je ne sais pas d'où vient la réponse. VRAI FAUX
  68. J'ai participé à des activités de culte et j'ai pour de l'admettre. VRAI FAUX
  69. On m'a menacé de devoir garder un gros secret. VRAI FAUX
  70. J'ai perdu des jours à la fois et je ne peux pas expliquer comment. VRAI FAUX
  71. La plupart des gens qui ont essayé de m'aider ne me posent pas les bonnes questions sur moi-même. VRAI FAUX
  72. J'ai été constamment présent pendant l'administration de ce test. VRAI FAUX
  73. Il y a une partie de moi qui est enfantine et je suis embarrassé quand les gens me disent que j'ai agi de nouveau comme un enfant. VRAI FAUX
  74. Quelqu'un en moi m'a dit de faire des choses que je ne veux pas faire. VRAI FAUX
  75. Je vois rarement des choses qui ne sont pas là. VRAI FAUX
  76. Les voix dans ma tête sont quelquefois tellement claires qu'elles me font peur. VRAI FAUX
  77. J'aime bien répondre à ce test parce que j'ai l'impression que vous pourriez m'aider. VRAI FAUX
  78. Quelquefois j'ai l'impression que je suis fait de beaucoup de parties différentes. VRAI FAUX
  79. Je suis troublé quand je me mets très en colère avec quelqu'un que j'aime et je ne peux pas expliquer ce qui s'est passé parce que je ne

  80. sais pas. VRAI FAUX
  81. J'ai essayé de prendre des drogues pour couvrir mes expériences. VRAI FAUX
  82. Il y a une partie de moi qui veut prendre des drogues et j'essaie d'en garder le contrôle. VRAI FAUX
  83. J'ai entendu des voix dans ma tête qui m'ont convaincu de me tuer. VRAI FAUX
  84. Quelquefois j'éclate de rire et je ne peux pas arrêter. VRAI FAUX
  85. Je me retrouve en train de pleurer et je ne comprends pas pourquoi j'ai les yeux mouillés parce que ce n'était pas « moi » qui pleurait. VRAI FAUX
  86. Il arrive souvent que je n'aie pas de sensations dans certaines parties de mon corps et je ne peux pas expliquer pourquoi. VRAI FAUX
  87. J'ai trouvé des lettres que je ne me souviens pas avoir écrites mais elles étaient signées de moi. VRAI FAUX
  88. La question qui m'a le plus troublé était la question nº___. VRAI FAUX
  89. Je ne me souviens pas avoir déjà répondu à ce test. VRAI FAUX
  90. Ma plus grande peur aujourd'hui est que personne ne découvre ce qui ne va pas chez moi car je penserai alors que je suis vraiment fou. VRAI FAUX
  91. Je crois que, quand j'étais petit, il m'est arrivé quelque chose qui explique pourquoi je fais ces choses bizarres. VRAI FAUX
  92. Il faut me rappeler plusieurs fois les choses que je devrais faire et que je pensais avoir faites. VRAI FAUX
  93. Il y a des gens dont je ne dois pas m'approcher parce que j'ai pensé à les tuer. VRAI FAUX
  94. J'ai été gravement battu. VRAI FAUX
  95. Il arrive qu'une partie de mon corps fonctionne et que je ne puisse pas amener l'autre partie à bouger. VRAI FAUX
  96. Je mens beaucoup parce que je ne sais plus où est la vérité. VRAI FAUX
  97. Je ne pense pas que personne ait fait les mêmes expériences que moi et cela me fait peur. VRAI FAUX
  98. Je sais que je ne mens pas à mes parents mais ils me disent que je mens tout le temps. VRAI FAUX
  99. Quelquefois, j'ai l'impression d'avoir dormi toute la journée et qu'une autre partie de moi a pris la relève et a vécu à ma place. VRAI FAUX
  100. Je serai très heureux si vous découvrez ce qui ne va pas chez moi. VRAI FAUX
  101. Je ne veux pas que mes amis soient au courant de mon problème. VRAI FAUX
  102. Je n'ai jamais éprouvé de sentiment. J'ai juste fait semblant. VRAI FAUX
  103. J'ai l'impression d'avoir perdu le contrôle de moi-même et j'ai besoin d'aide. VRAI FAUX

Veuillez écrire, si vous le désirez, ce que vous voulez que votre médecin sache de vos expérience.
 

Date de naissance : _________________

Sexe : M  F

Taille : ___________________________

Poids : ___________________________

Dernière année d'école : _____________

Date du test : ______________________

Gwen L. Dean, Ph.D.

(213) 373-1630

© Gwen L. Dean, Ph.D., 1985

ANNEXE G - RÉFÉRENCES

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Dernière mise à jour : 2002-11-06