Les adolescents aux prises avec
la violence sexuelle: Guide à l'intention des adolescents
Livrets d'information sur la violence sexuelle
Ce fascicule fait partie d'une série de
cinq livrets
Counselling en matière de violence sexuelle
Guide à l'intention des enfants et des
parents
Les enfants sexuellement agressifs
Guide pour parents et enseignants
Les jeunes garçons victimes de violence
sexuelle
Guide à l'intention des jeunes garçons
Les adolescents aux prises avec la violence sexuelle
Guide à l'intention des adolescents
Violence sexuelle
Que se passe-t-il lorsque tu en parles?
Remerciements
Initiatrice
Louise Doyle, VISAC
Coordonnateur
Léonard Terhoch
Rédacteur
John Napier-Hemy
Traducteur
Santé et Bien-être social Canada
Réviseures
Joanne Broatch (anglais)
Johanne Raynault (français)
Conception et montage
Jager Design Inc.
Composition
Baseline Type & Graphics
Impression
Broadway Printers Limited
Photographies
Image Finders, Vancouver
First Light, Toronto
Images B.C., Vancouver
Nous aimerions remercier tout particulièrement
le personnel de VISAC et toutes les autres personnes qui ont contribué
leurs idées et leur appui.
Ces livrets sont disponibles auprès du
Centre national d'information, Santé et Bien-être social
Canada, au 1-800-267-1291.
Ces livrets sont publiés par le Vancouver
Incest and Sexual Abuse Centre (VISAC), une division de Family Services
of Greater Vancouver. VISAC offre une gamme étendue de services,
sont le traitement des enfants victimes de violence sexuelle et de leur
famille, un programme de thérapie de groupe à l'intention
des adultes ayant été victimes de violence sexuelle dans
leur enfance, ainsi qu'un programme de soutien aux victimes de violence
sexuelle.
La réalisation de ces livrets a été
financée par la Division de la prévention de la violence
familiale, Santé et Bien-être social Canada. Les conclusion
et opinions qui y sont exprimées sont celles des auteurs et non
nécessairement celles de Santé et Bien-être social
Canada.
Droits de reproduction libres.
Tous autres droits réservés.
© Family Services of Greater
Vancouver, 1991
1616 West 7th Avenue
Vancouver, B.C. V6J 1S5
Quatrième impression: 1993
Financement assuré par la Division de la
prévention de la violence familiale,
Santé et Bien-être social Canada.
Ce livret aborde les sujets suivants:
- Pourquoi ce livret?
- Violence sexuelle
- Harcèlement sexuel
- Exploitation sexuelle
- Pourquoi existe-t-il des lois sur le sexe?
- Les articles à connaître
- Consentement ou pas?
- Qui sont les victimes?
- Et qui sont les coupables?
- Pourquoi les adolescents sont-ils exposés?
- Pourquoi dénoncer?
- Envie de ne pas tout dire?
- Pour retrouver la liberté
- Le choix de la personne
- Le counselling est-il nécessaire?
- Rôle du conseiller
- Peut-on guérir de la violence sexuelle?
Pourquoi ce livret?
Les journaux relatent presque tous les jours
l'histoire d'enfants ou d'adolescents victimes de violence sexuelle.
Ils racontent aussi l'histoire des contrevenants sexuels accusés
de violence sexuelle, qui seront probablement mis en prison. On ne sait
jamais trop si l'adulte qui agit ainsi envers un enfant est un «malade»,
un «fou» ou un «pervers».
Chose certaine, il peut causer
de graves problèmes émotifs aux enfants et aux adolescents.
La loi reconnaît comme un crime les actes du contrevenant sexuel
et le punit, généralement par l'emprisonnement. Si tu
as subi de la violence sexuelle, tu récupéreras plus rapidement
si tu considères le contrevenant comme un malfaiteur, et non
comme une personne malade. Si tu le prends pour un «malade»,
tu excuses son comportement.
Tous les jours, des adolescents
et des jeunes hommes sont victimes de violence sexuelle, de harcèlement
sexuel et d'exploitation sexuelle. Si tu es un adolescent
typique, tu auras probablement du mal à admettre que tu es une
victime. Peut-être les circonstances font qu'il est difficile
de dire si tu étais ou non une victime. Le présent livret
devrait t'aider à déterminer ce qui s'est réellement
passé et ce que tu peux faire à présent.
Ce livret devrait t'aider
en :
1
Définissant la violence sexuelle,
2
Définissant le harcèlement
sexuel et l'exploitation sexuelle,
3
Résumant la loi qui régit
les relations sexuelles entre adolescents et entre adolescents et adultes,
4
Décrivant des situations où les adolescents risquent d'être
victimes de violence sexuelle,
5
Décrivant les effets de la violence sexuelle, et en
6
Indiquant comment tu peux obtenir de l'aide, pour toi comme pour un
ami.
Tu peux lire le livret par
toi-même, avec un ami ou un adulte en qui tu as confiance ou le
donner à un ami qui a besoin d'aide.
Violence sexuelle
La violence sexuelle est un abus de pouvoir,
c'est-à-dire qu'une personne ayant beaucoup de pouvoir l'utilise
contre une autre personne pour avoir des activités sexuelles.
Quand une personne plus vieille, plus forte ou plus expérimentée
que toi t'impose des activités sexuelles, tu es victime de violence
sexuelle.
Tu subis aussi de la violence
sexuelle si un adulte ou un adolescent que tu admires et que tu respectes
t'entraîne dans des activités sexuelles. Même si
ces gens n'utilisent pas la force, le geste reste un abus de pouvoir.
Même s'il n'y a pas eu de relations sexuelles ni d'attouchements,
il pourrait y avoir violence sexuelle. Ainsi, si on t'a forcé
à regarder des activités sexuelles ou des vidéos
pornographiques, tu as subi de la violence sexuelle.
Tu peux lire le livret par toi-même,
avec un ami ou un adulte en qui tu as confiance ou le donner à
un ami qui a besoin d'aide.
Certaines personnes ont plus
de pouvoir que d'autres et c'est naturel; ce qui ne va pas, c'est de
faire un mauvais usage de ce pouvoir.
Harcèlement sexuel
Le harcèlement sexuel, c'est une attention
qu'on te porte dans le but d'activités sexuelles, sans que tu
le veuilles ou le demandes. Si par exemple une enseignante de quatrième
secondaire dit à un élève qu'il a de «belles
fesses» ou qu'elle voudrait «faire l'amour» avec lui,
c'est du harcèlement. On entend parfois qu'un patron est accusé
de harcèlement sexuel envers une employée. Note bien que
même si, dans la plupart des cas, l'incident implique un patron
et une employée, il est important de comprendre que tant les
femmes que les hommes peuvent harceler les jeunes garçons.
Exploitation sexuelle
Il y a exploitation sexuelle quand une personne
profite personnellement de la sexualité ou de l'apparence attirante
d'une autre personne. Par exemple, l'adulte qui enregistre une vidéo
de toi en pleine activité sexuelle avec une autre personne pour
ensuite montrer la bande à ses amis ou la vendre, fait de l'exploitation
sexuelle.
Pourquoi existe-t-il des lois sur le sexe?
Le Code criminel du Canada contient des
articles (c'est-à-dire des paragraphes ou parties de loi) sur
les activités sexuelles afin de protéger les citoyens,
et particulièrement les jeunes, de l'exploitation et de la violence
sexuelle. La loi reconnaît que certaines personnes peuvent dominer
et utiliser les autres, simplement parce qu'elles ont plus de pouvoir.
Certains sont plus forts, plus grands, plus vieux, plus intelligents
ou plus riches que d'autres. Certains sont en position d'autorité
et ont généralement la confiance des autres, comme les
parents, les enseignants ou les entraîneurs. Certains ont des
armes. Les lois sur le sexe ont donc été votées
pour protéger les personnes plus faibles des personnes plus puissantes.
Les articles à connaître
Attouchements sexuels, article
151 : L'adulte ne doit toucher aucune partie du corps d'un enfant
de moins de 14 ans à des «fins sexuelles».
Invitation aux attouchements,
article 152 : L'adulte ne doit pas inviter l'enfant de moins de
14 ans à le toucher à des «fins sexuelles».
Exploitation sexuelle, article
153 : La personne adulte en position de confiance et de responsabilité
(par exemple, un enseignant, un entraîneur, un prêtre ou
un médecin) ne doit toucher aucune partie du corps d'un jeune
adulte (de 14 à 17 ans) à des «fins sexuelles»
ni inviter une jeune personne de 14 à 17 ans à la toucher
à des fins sexuelles.
L'exploitation sexuelle est
similaire aux attouchements sexuels et à l'invitation aux attouchements,
sauf que la jeune personne est plus vieille et que l'adulte est en position
de confiance. Ainsi, un conseiller de camp de vacances âgé
de 23 ans qui aurait des relations sexuelles avec un jeune élève
de 16 ans pourrait être mis en accusation pour exploitation sexuelle.
Deux jeunes, l'un âgé
de 16 ans et l'autre, de 18 ans, qui décident d'avoir des relations
sexuelles lors d'un rendez-vous d'amoureux sont tout à fait en
loi, puisque le plus vieux des deux n'a pas sollicité le plus
jeune et n'en est responsable en aucune façon. C'est la nature
de la relation entre les deux personnes qui détermine s'il y
a ou non exploitation sexuelle.
Relations anales, article 159
: Il est interdit à deux personnes d'avoir des relations anales
(introduction du pénis dans l'anus d'une autre personne) si l'une
des deux a moins de 18 ans ou si l'une des deux ne donne pas son consentement.
Ces articles ne sont pas faits
pour interdire aux adolescents d'avoir des relations sexuelles. Ils
ont pour but de protéger les adolescents de l'exploitation sexuelle
exercée par les adultes. Ils existent en plus pour protéger
les enfants de moins de 14 ans de l'exploitation sexuelle par un adolescent
plus vieux ou par un adulte.
Quelques autres articles:
L'agression sexuelle, l'agression
sexuelle avec une arme, l'agression sexuelle grave et la transmission
consciente d'une maladie sexuelle sont des crimes graves.
L'inceste, article 155. Les
relations sexuelles entre les membres d'une même famille sont
un crime.
L'article 140 précise
que si tu as plus de 12 ans, tu commets un crime lorsque tu déclares
à la police une infraction d'ordre sexuel tout en sachant qu'elle
n'a pas été commise.
Consentement ou pas?
Quand une personne accepte d'avoir des activités
sexuelles avec une autre, la loi dit que cette première personne
a donné son consentement et que l'activité sexuelle
est légale. Toutefois, un certain nombre de situations font qu'une
personne ne peut pas donner légalement son consentement.
Il n'y a pas consentement:
1
Si une personne a moins de 14 ans et l'autre
est plus âgée de plus de deux ans;
2Si
une personne a entre 14 et 17 ans et l'autre est en position de pouvoir
et d'autorité;
3
Si l'une des deux personnes a plus de 17 ans et si l'autre use de son
pouvoir, de menaces, de paroles mensongères ou de la force pour
obtenir son consentement.
L'article sur l'exploitation
sexuelle s'applique peu importe si la jeune personne croit qu'il
on elle a donné son consentement.
So, There Are Laws About
Sex!, de Wendy Harvey et Thom McGuire, est un livre qui explique
ce qui est légal et ce qui ne l'est pas.
Il est vendu au Canada et
est facile à lire. Tu pourrais probablement le trouver dans un
centre d'aide aux victimes d'agression sexuelle ou chez un conseiller
en matière d'exploitation sexuelle. Si tu veux savoir quels sont
tes droits, demande à tes parents ou à un conseiller de
te recommander un avocat. Dans chaque province il v a un barreau, qui
leur donnera le nom des avocats qui se spécialisent dans les
cas de violence sexuelle.
Qui sont les victimes?
Chaque année, au Canada, des milliers
d'enfants et d'adolescents subissent de la violence sexuelle. Beaucoup
de conseillers spécialisés croient qu'il y a autant de
garçons que de filles parmi les victimes, même si les filles
sont plus nombreuses à le rapporter. Certains conseillers pensent
que beaucoup de garçons d'âge plus avancé sont trop
orgueilleux ou «machos» pour admettre qu'ils ont subi de
la violence sexuelle.
L'âge fait une différence.
Les jeunes garçons sont susceptibles de violence sexuelle infligée
par des membres de la famille et les personnes censées prendre
soin d'eux. Les adolescents sont plus souvent victimes des figures d'autorité
dont ils sont proches, par exemple, les enseignants, les entraîneurs
ou les chefs d'associations de jeunes.
Et qui sont les coupables?
Les adolescentes et les
femmes; les adolescents et les hommes.
L'histoire de Jean
Jean avait 15 ans quand son père est
mort; sa mère a alors commencé à prendre des chambreurs
pour arriver à payer ses comptes. Suzanne, 20 ans, a loué
une chambre; elle était nouvelle en ville. Elle cherchait un
emploi et se sentait seule. Un soir, elle a invité Jean dans
sa chambre et bientôt, ils ont eu des relations sexuelles. C'était
la première expérience sexuelle de Jean et il s'est senti
très fier. Mais Suzanne est devenue de plus en plus exigeante
et Jean a commencé à se sentir piégé. Il
prenait du retard dans ses travaux scolaires et aurait voulu passer
plus de temps à jouer avec ses copains, devant leurs jeux vidéo.
Pourtant, quand il l'a dit à Suzanne, elle s'est fâchée
et a menacé de prévenir sa mère. Déjà,
Jean avait peur que sa mère découvre le tout; il a donc
continué de venir dans la chambre de Suzanne. Puis, Suzanne a
rencontré un homme de son âge. Dès qu'elle a commencé
à sortir avec lui, elle a dit à Jean qu'elle n'avait plus
de temps à perdre avec un «enfant».
Jean était humilié et pouvait
difficilement croire qu'elle était soudain devenue si froide
avec lui. L'incident a ébranlé sa confiance et pendant
longtemps, il a craint d'avoir une copine.
Même quand il est devenu adulte, il
avait du mal à maintenir longtemps ses relations avec une copine,
parce qu'il ne pouvait faire confiance à aucune femme.
La chose la plus importante à dire
aux adolescents est «Parles-en».
La violence sexuelle par une
femme fait rarement l'objet d'une dénonciation, même si
la victime perçoit le tort qu'on lui fait. En tant qu'adolescent,
tu sens que la société et tes pairs t'incitent fortement
à accomplir des «exploits» sexuels. On t'a peut-être
souvent dit qu'avoir une expérience sexuelle avec une femme plus
âgée était une excellente façon d'apprendre
la sexualité. Ou encore, qu'un «vrai homme» ne laisse
jamais passer une occasion et que si tu te plaignais, on douterait de
ta virilité.
Si tu as subi de la violence sexuelle, tu
n'es pas le seul. C'est beaucoup plus courant que tu le crois et ça
arrive aux garçons et aux filles.
Il aurait mieux valu que Jean
puisse consulter un conseiller quand la violence sexuelle a pris fin.
Mais jean refusait d'admettre qu'il avait souffert, sexuellement et
émotivement. Il sentait qu'il ne serait pas un vrai homme s'il
allait raconter les faits. De toute façon, beaucoup de ses amis
considéraient qu'une relation sexuelle avec une femme avait de
quoi rendre fier.
Beaucoup d'adolescents ont
la même attitude que Jean. Ces idées font que vous avez
du mal à admettre que vous vous sentez victimes d'une femme plus
âgée ou exploités par elle. Pourtant, si tu ne peux
exprimer ces sentiments maintenant, tu pourrais te méfier encore
des femmes quand tu seras plus vieux.
L'histoire de Michel
Michel faisait partie de l'équipe de
soccer de l'école. Un jour après une partie que l'équipe
avait gagnée contre une autre école secondaire, le directeur
a invité les jeunes joueurs dans son bureau. Il les a tous félicités,
mais particulièrement Michel, qui avait marqué le but
vainqueur.
Le directeur lui a demandé de rester
avec lui quelques minutes une fois tout le monde parti. Il a alors dit
à Michel que ce dernier avait un grand avenir comme joueur de
soccer et lui a raconté avoir lui-même joué quand
il était à l'école secondaire.
Michel se sentait fier; il était loin
de soupçonner ce que le directeur voulait en réalité.
Ce dernier lui a donné un whisky pour célébrer.
Il a dit à Michel qu'il le trouvait bien bâti et que toutes
les filles devaient courir après lui. Puis il a commencé
à caresser le pénis de Michel jusqu'à ce qu'il
ait une érection. Il a qualifié leur relation de «spéciale»
et a invité Michel à passer au bureau quand il voudrait,
pour boire un verre.
Michel était confus en quittant le
bureau du directeur. Quand les effets de l'alcool se sont atténués,
il a eu honte : honte d'avoir accepté le whisky, honte d'avoir
eu une érection quand le directeur l'a touché et honte
d'être considéré comme un ami par le directeur.
Après tout, certains élèves faisaient des blagues
grossières sur le directeur. Parfois, ils écrivaient même
des graffiti à son sujet sur la clôture de l'école.
Qu'arriverait-il si quelqu'un s'apercevait de quoi que ce soit et écrivait
des graffiti à leur sujet?
Puis Michel a eu une pensée horrible.
Peut-être que le directeur était homosexuel? Pire encore,
peut-être que Michel lui-même était homosexuel? Michel
a donc décidé de cacher à tout prix l'histoire
à son père. Hier encore, son père avait fait des
blagues sur les homosexuels. Se pouvait-il que son père le croie
homosexuel et fasse des blagues à son sujet? De toute façon,
il ne pouvait pas dénoncer le directeur. Qui le croirait?
Michel a gardé le secret pendant près
de deux ans. Puis le directeur a été accusé de
violence sexuelle. En fait, il avait imposé le même genre
de traitements à beaucoup d'autres élèves, pas
seulement à Michel. Michel était soulagé, parce
qu'enfin il était capable de faire part de sa propre histoire
au conseiller spécialisé. Mais quand le directeur est
allé en prison, Michel s'est senti triste. Après tout,
il avait beaucoup appuyé l'équipe de soccer.
Michel était très embrouillé.
Il ne comprenait pas comment il pouvait être si fâché
contre le directeur, mais en même temps, être si triste
de le perdre.
Les adolescents peuvent subir
de la violence sexuelle imposée par des hommes ou des adolescents
plus âgés. Ces contrevenants sexuels sont généralement
des pédophiles. Les pédophiles sont des hommes
ou des adolescents sexuellement attirés par les jeunes garçons.
Ils occupent souvent des positions de confiance comme les conseillers
de camps de vacances, les enseignants et les prêtres, Beaucoup
sont mariés et pères ou beaux-pères des garçons
qu'ils agressent. Ils sont attirés par les jeunes adolescents
pour les mêmes raisons que les jeunes enfants les attirent. Ils
sont sexuellement excités par la jeunesse et par le fait qu'ils
peuvent exercer leur pouvoir sur leurs victimes.
Un grand nombre de gens souvent ce que c'est
que d'avoir été victime de violence sexuelle et peuvent
te comprendre lorsque tu leur parle franchement.
Beaucoup de jeunes hommes
à qui des hommes imposent de la violence sexuelle éprouvent
les mêmes sentiments confus que Michel. Si tu étais victime
d'un contrevenant sexuel, peut-être craindrais-tu de devenir homosexuel,
particulièrement si l'incident excitait ta sexualité,
comme c'est arrivé à Michel. Tu pourrais craindre le pouvoir
du contrevenant et refuser par conséquent de rapporter l'histoire.
De plus, si le coupable allait en prison, comme le directeur, peut-être
serais-tu triste de perdre une personne qui aurait joué un rôle
important dans ta vie. Pire encore, tu craindrais que les gens rient
de toi, tout comme Michel avait peur que son père se moque de
lui s'il avait découvert la chose.
L'histoire de Richard
Richard était en cinquième secondaire
et avait hâte à la fin des études. Il travaillait
en outre dans un restaurant-minute afin de ramasser de l'argent pour
s'acheter des vêtements et sortir avec sa copine. Un jour, un
homme en Mercedes est venu au restaurant et a dit à Richard que
ce dernier était trop intelligent pour travailler à cet
endroit et qu'il pouvait facilement lui trouver un emploi plus payant
après l'obtention de son diplôme.
L'homme a dit à Richard que lui-même
avait eu sa chance grâce à un vieux protecteur et qu'en
retour, il serait heureux d'être le protecteur de Richard. Richard
aimait les vêtements et la voiture de l'homme et était
curieux de voir comment il pourrait réussir sans travailler trop
dur.
L'homme a invité Richard à un
party où il a rencontré plusieurs autres garçons
de son âge. Certains allaient à la même école
que lui. Il a aussi rencontré l'homme qui possédait l'appartement.
Un rapide coup d'oeil alentour a permis à Richard de se rendre
compte que tout ce monde était riche. Les deux hommes avaient
beaucoup d'esprit et parlaient beaucoup d'art et de poésie. L'alcool
coulait à flot et ils ont fini par présenter de la cocaïne.
L'hôte est venu saluer Richard et lui
demander s'il avait «vraiment exploré sa sexualité»
et si ses parents «respectaient son besoin d'indépendance».
Richard était excité par l'alcool, la cocaïne et
la conversation de son hôte. Ce dernier a invité Richard
à voir quelques estampes dans sa chambre. Une fois là,
il a descendu les pantalons de Richard et a pratiqué sur lui
«l'amour oral».
De nombreux adolescents en parlent à
un grand parent, à une tante ou à un oncle parce que ceux-ci
ont davantage le temps de les écouter.
Le jour suivant, après le party, Richard
s'est aperçu qu'il avait été piégé
et s'est senti honteux. Il a toutefois continué d'aller aux partys.
Il se faisait croire que ces orgies ne faisaient pas de mal, puisque
les organisateurs étaient riches et cultivés et qu'il
y rencontrait d'autres garçons de son âge.
Peu à peu, les autres aspects de la
vie de Richard se sont détériorés. Ses résultats
scolaires ont baissé, il a perdu son emploi parce qu'il était
toujours en retard et fatigué et il a cessé de parler
à ses parents. Sa grand-mère a senti que quelque chose
n'allait pas et lui a parlé. Richard lui avait toujours confié
ce qu'il ne disait pas à ses parents; il lui a donc raconté
les orgies. Sa grand-mère a prévenu la police, qui a fait
irruption dans l'appartement, un soir, et arrêté les organisateurs.
Les contrevenants sexuels
qui sont principalement attirés par les adolescents plus âgés
sont parfois appelés «pédérastes».
Les adolescents plus âgés les attirent, pour le sexe, mais
aussi parce qu'ils ont besoin d'admirateurs. Ils tentent d'impressionner
leurs jeunes victimes avec leur intelligence, leurs talents et leur
argent. Ils veulent parfois devenir les guides ou les conseillers de
leurs victimes et même les aider à démarrer une
carrière.
Les gens croient généralement
que les adolescents sont en mesure de veiller eux-mêmes à
leur vie sexuelle et que s'ils subissent de la violence sexuelle, c'est
bien leur faute. En réalité, beaucoup de grands adolescents
sont victimes d'hommes plus vieux, sans être responsables d'aucune
façon.
Comme Michel, Richard a parfois
cru que ses expériences avec un adulte le rendraient homosexuel.
Il a redoublé d'ardeur sexuelle avec ses amies pour leur prouver
(et se prouver à lui-même) qu'il n'était pas homosexuel.
La grand-mère de Richard et sa jeune amie l'ont pressé
de consulter un conseiller spécialisé pour l'aider à
surmonter l'insécurité qu'il éprouvait en matière
de sexualité.
«Le conseiller me disait toujours que
je n'étais pas responsable. Après un bout de temps, je
me suis aperçu que c'était vrai et je me suis senti beaucoup
mieux».
Pourquoi les adolescents sont-ils exposés?
L'adolescence amène de nombreux changements
physiques et émotifs; tu éprouves alors de nombreux besoins.
Les contrevenants sexuels
tirent parti de tes besoins :
1
Les adultes expérimentés
peuvent exploiter les besoins qu'a l'adolescent de se trouver un guide,
un adulte qui a réussi dont il pourrait copier le modèle.
Un artiste, par exemple, peut facilement exploiter ton rêve de
devenir toi-même artiste.
2Parvenu
à l'adolescence, tu souhaites te soumettre au «rite de
passage», devenir un homme. Vivre des expériences sexuelles
constitue sans doute le plus puissant des rites de passage. Les contrevenants
sexuels, tant de sexe masculin que de sexe féminin, exploitent
tes besoins de connaissances sur la sexualité.
3
Même en vieillissant, tu as besoin de l'amour et de l'approbation
d'un parent de sexe masculin presque autant que quand tu étais
plus jeune. Mais les pères sont maintenant souvent occupés
ou carrément absents. Le contrevenant de sexe masculin vient
combler ce vide.
4
Les contrevenants profitent du besoin
que tu as que quelqu'un reconnaisse ta maturité sexuelle et ton
besoin de t'en sentir maître. L'hôte de la rencontre à
laquelle Richard a assisté, par exemple, lui a dit qu'il vivait
son indépendance sexuelle et Richard l'a cru.
5Les
contrevenants t'offrent souvent des drogues et de l'alcool, ce qui répond
à ton besoin de nouveauté.
Pourquoi dénoncer?
1
Dire à quelqu'un ce qui t'est arrivé, c'est en partager
le poids. Ces personnes prendront soin de toi et voudront t'aider.
2La
seule façon d'obtenir le bon type de counselling est de confier
ton histoire à quelqu'un. Tu auras besoin de ces consultations
pour surmonter tes craintes et le sentiment de culpabilité que
tu ne manqueras pas d'éprouver, même quand la violence
sexuelle aura pris fin.
3
Si tu as été victime de violence sexuelle quand tu étais
plus jeune, peut-être es-tu à ton tour tenté de
faire subir le même traitement à des enfants plus jeunes.
Cette nouvelle expérience te donne un sentiment de puissance
sur une autre personne, exactement ce que le contrevenant ressentait
vis-à-vis toi. Pour obtenir de l'aide, tu dois dire à
quelqu'un ce que tu as fait aux jeunes enfants et admettre qu'une personne
a abusé de toi. C'est la seule façon de t'arrêter
de faire du mal aux autres.
4Tu
risques de contracter le SIDA du contrevenant qui t'aurait forcé
à des expériences sexuelles à haut risque. Il y
a plusieurs façons de contracter le SIDA, mais les relations
anales sans condom sont la plus risquée.
Envie de ne pas tout dire?
Plusieurs raisons font que tu pourrais avoir
envie de ne pas tout dire.
1
Peut-être es-tu gêné.
Tu crois peut-être que tu as été stupide ou que
d'autres le penseront. L'intelligence n'a rien à voir là-dedans.
Le contrevenant arrive à convaincre les plus brillants. Il est
plus vieux que toi et a probablement une longue expérience dans
la séduction des jeunes gens.
2Si
tu es victime de violence sexuelle en même temps qu'un groupe
d'autres adolescents, peut-être te sens-tu obligé de rester
et de continuer à faire ce qu'ils font. Ils t'y inciteront, parce
que si tu quittes le groupe, ils seront en mauvaise posture.
3
Peut-être, enfin, crois-tu que le
fait de parler à la police, aux travailleurs sociaux ou à
tes parents est une dénonciation du ou des contrevenants et des
autres adolescents qui faisaient partie du groupe. Sache bien que quiconque
menace ta santé mentale ou physique ne mérite pas ta protection.
Pour retrouver la liberté
Si tu es victime de violence sexuelle par un
adulte ou un autre adolescent et si tu te sens piégé,
la première étape consiste à admettre que tu as
un problème et que tu as besoin d'aide. Si le contrevenant t'a
fait croire que tu as toi-même choisi la situation, tu auras probablement
du mal à croire qu'on t'a piégé.
Il te faudra du courage pour
admettre que tu as été victime de violence sexuelle. Mais
ton estime de toi-même, maintenant tout comme quand tu seras devenu
adulte, dépend de cette première étape, vitale.
Le choix de la personne
S'il y a eu crime, tu dois alerter
la police. Le problème, c'est que les adultes ne croient
pas toujours les adolescents. Si l'agent qui t'interroge comprend le
problème et possède déjà d'autres renseignements
sur le contrevenant, l'entrevue se déroulera assez bien. Si l'agent
croit au contraire que les adolescents sont responsables de tout ce
qui leur arrive, tu auras plus de mal. Mais tu dois prendre le risque.
Si tu vis dans une grande
ville, essaie de trouver le nom d'un agent qui s'occupe généralement
des entrevues en ce domaine. Si tu vis dans un village, ou une petite
ville, tu n'auras peut-être pas ce choix.
Tes parents devraient être
les meilleurs confidents, mais tout dépend de tes relations avec
eux. Si tu crois que l'un des deux ou les deux pourront comprendre et
t'aider, dis-leur. Si tu crois que tu ne peux pas compter sur eux, parle
à un autre adulte en qui tu as confiance. La personne que tu
choisis doit rapporter les faits à la police; tes parents seront
donc certainement au courant un jour.
Si tu as un ami fidèle
auquel tu peux te fier, que ce soit un garçon ou une fille, pense
à lui ou à elle. Peut-être seras-tu d'abord gêné
et peut-être cet ami aura un choc. Mais s'il ou si elle tient
vraiment à toi, c'est peut-être ta meilleure chance. Beaucoup
de personnes savent ce que signifie être victime de violence sexuelle
et compatiront avec toi si tu fais honnêtement part de tes sentiments.
Pense à une personne qui
joue un rôle important dans ta vie: un professeur, quelqu'un
de la parenté ou un conseiller.
Quand tu auras dit la vérité,
tu ne seras plus seul. Si tu persistes dans le mensonge, c'est-à-dire
à croire que tu n'es pas victime, tu es réellement coincé.
La vérité allégera le poids sur tes épaules.
Elle te donnera l'énergie nécessaire pour avancer, changer
de comportement et poursuivre ta vie.
«Je croyais qu'on parlerait tout le
temps de violence sexuelle, mais mon conseiller et moi parlons de jeux
vidéo, de hockey, de tout quoi! D'est bien».
Le counselling est-il nécessaire?
Le counselling est certainement nécessaire.
Il est important d'exposer d'abord les faits à la police ou à
tes parents si tu crois être victime de violence sexuelle, mais
c'est seulement le début. Tu éprouves un certain nombre
de peurs que tu dois admettre et affronter avant de pouvoir te ressaisir.
La personne la mieux placée pour t'aider est un conseiller spécialisé,
spécialement formé aux problèmes sexuels. S'il
n'y a pas de conseiller spécialisé dans ta collectivité,
songe à tout autre adulte qui serait le plus apte à t'aider.
Il peut s'agir d'un travailleur social, d'un prêtre ou d'un conseiller
non professionnel. Ce dernier est un adulte qui, sans diplôme
universitaire, a toutefois une certaine formation et une certaine compétence
en counselling.
Rôle du conseiller
Un conseiller expérimenté
pourra t'aider à surmonter ces craintes courantes :
1
Crainte de devenir«gai» ou homosexuel. Si la violence sexuelle
t'a été infligée par un homme, tu pourrais croire
que tu vas devenir homosexuel. Toutefois, l'orientation sexuelle est
établie très tôt dans la vie et n'est pas modifiée
par le fait d'avoir ou non des expériences homosexuelles ou d'avoir
été victime de violence sexuelle. Si toutefois tu es homosexuel,
un conseiller t'aidera à comprendre et à accepter ton
orientation sexuelle. L'homosexualité et l'hétérosexualité
sont des caractères naturels, et non le résultat de mauvais
traitements sexuels.
2
Crainte d'être considéré comme une poule mouillée.
De nombreux adolescents ayant subi de la violence sexuelle croient qu'ils
doivent s'efforcer de prouver leur virilité, c'est-à-dire,
par exemple, faire constamment l'amour avec les filles ou se battre.
Un conseiller t'aidera à te sentir plus à l'aise.
3
Crainte d'avoir contracté le SIDA. Un conseiller t'aidera à
traiter ces craintes de façon réaliste.
4Crainte
de devenir toi-même un contrevenant sexuel. Beaucoup de contrevenants
sexuels ont eux-mêmes subi de la violence sexuelle, soit quand
ils étaient adolescents, soit quand ils étaient enfants.
Toutefois, la plupart, hommes ou femmes, ne deviennent pas contrevenants
à leur tour. Plus tu pourras parler de ton expérience
en consultation, moins tu risques de devenir agresseur.
5Crainte
que tout le monde soit au courant, qu'on parle de toi et qu'on te rejette
en secret. Un conseiller spécialisé en matière
de violence sexuelle comprendra ces craintes, qui surviennent généralement
peu de temps avant ou après que tu ne rapportes les faits.
6Crainte
que le contrevenant ne cherche à se venger à sa sortie
de prison. Rares sont ceux qui le font.
7Peur
que le fait de rapporter l'expérience soit une mauvaise idée,
particulièrement si le contrevenant est une personne que tu admirais
et respectais. Peut-être serais-tu triste d'avoir appris ainsi
brutalement que les gens ne sont pas toujours ce qu'on croit qu'ils
sont. Les conseillers expérimentés connaissent l'existence
de toutes ces peurs et peuvent t'aider à les surmonter. Ils peuvent
t'aider aussi si tu éprouves des problèmes de drogue ou
d'alcool qui pourraient t'empêcher de recouvrer la santé.
Ils peuvent enfin t'aider à préparer ta comparution en
cour s'il y a un procès.
Le plus important, c'est que
le conseiller peut te soutenir en prenant la responsabilité de
ta guérison, en commençant par le signalement de tes expériences.
Le conseiller pourra en outre t'aider en te rappelant que l'infraction
elle-même est la faute du contrevenant.
Peut-on guérir de la violence sexuelle?
On peut certainement guérir
de la violence sexuelle. Des milliers d'hommes ont subi de mauvais
traitements sexuels pendant l'adolescence ou l'enfance et ont maintenant
une vie productive et heureuse. Les deux éléments qui
les ont le plus aidés sont le soutien familial et un bon counselling.
Les souvenirs, les pensées
et les sentiments que tu éprouves au sujet de l'expérience
peuvent ne pas s'atténuer quand tu auras atteint l'âge
adulte, mais l'aide que le counselling t'apporte maintenant te donnera
un certain pouvoir sur l'expérience. Ton choix est celui-ci:
ou tu permets à cette mauvaise expérience de diriger ta
vie ou tu vis malgré la violence sexuelle que tu as subie.
Bibliographie
Harvey, Wendy, LL.B. et McGuire, Thom, travailleur
social accrédité, So, There Are Laws About Sex!
Vancouver, Butterworths Canada Ltd., 1989.
|