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Conseil consultatif national sur le troisième âge, 1980-2005

Expression

Éditorialiste invité

Les hommes et le vieillissement au Canada

Dans la Grèce Antique, on vénérait la beauté physique de l'homme jeune et on associait le vieil âge à la décrépitude physique, phénomène pire que la mort elle-même. Un livre 'sérieux' publié en 1962 déclarait par ailleurs que les hommes ont beaucoup de difficulté à laisser l'adolescence derrière eux, comme s'ils avaient peur de vieillir. Aujourd'hui, ces deux affirmations feraient réagir bien des hommes. On les voit de plus en plus ces têtes grisonnantes qui font du patin à roulettes ou s'attaquent aux pistes noires des centres de ski alpin. On les voit, porte-documents en main, choisir leur parfum préféré dans les boutiques, livrer la popote roulante aux aîné-e-s ou aider leur petit-fils à réparer sa voiture. Mitchell Sharp, à 82 ans, est le conseiller numéro un du premier ministre du Canada. Quel âge, pensez-vous, a le magnat Paul Desmarais? Et les chanteurs Robert Charlebois et Mick Jagger, n'ont-ils pas plus de 50 ans? Parfaitement! La population mâle du pays vieillit! En fait, les 1,4 million de Canadiens âgés de 65+ ans représentent 43% de la population âgée au pays.**1

Albénie Breau, maintenant âgé de 96 ans, pose avec son fils Ronald, son petit-fils Gérald et son arrière-petit-fils Alexandre. Les familles de quatre générations vivantes sont maintenant répandues au Canada.


Est-ce que les hommes de 65 ans et plus sont tous des aînés 'étonnants' et dynamiques? Non, bien sûr, plusieurs ne correspondent pas à ce portrait. Quelques-uns sont très malades, la minorité en fait, même chez les octogénaires, les nonagénaires et même chez les plus âgés. Certains sont des 'robineux', des intoxiqués de la télévision, des esseulés de différentes origines ethniques, d'anciens combattants handicapés vivant en institution de longue durée, des Autochtones très pauvres, etc. Ce sont là les hommes vieillissants qui s'éloignent de 'la norme', cet instrument utile à dresser des portraits-robot instantanés. Que savons-nous des hommes âgés et de leur expérience du vieillissement au Canada? Même si les gérontologues étudiaient surtout les hommes dans le passé et malgré l'adage que 'le vieillissement est une affaire de femmes', il n'en demeure pas moins qu'on ignore presque comment le vieillissement caractérise la vie des hommes. Et si c'était aussi l'affaire des hommes?
On peut présumer, sans peur de se tromper, que les facteurs génétiques, les expériences de jeunesse et de la vie affectent certainement le vieillissement. Quels sont en outre les effets du sexe, de la culture, de l'éducation et de tous les facteurs qui tissent la vie des gens? Est- ce que les valeurs et les expériences d'apprentissage spécifiques aux hommes les prédisposent à ne pas vouloir vieillir? A mal vieillir? Est-ce qu'on peut tirer profit de l'expérience de certains hommes? Les différences qui caractérisent le vieillissement des hommes et celui des femmes s'annulent peut-être dans l'ensemble. À court terme, ces différences n'ont peut-être pas d'importance. A long terme, toutefois, une meilleure connaissance des différences qualitatives du vieillissement entre les sexes pourrait peut-être aider toutes les personnes concernées à mieux s'adapter aux crises et aux divers passages de la vie. J'aimerais pouvoir penser que l'interprétation du vieil âge par le poète anglais Tennyson est la bonne et qu'elle s'applique aux deux sexes: «Des coeurs héroïques et d'une même trempe, affaiblis par le temps et le sort, mais forts par la volonté de lutter, de chercher, de trouver, et de ne pas plier».

Médard Soucy
Membre du CCNTA
Québec

Début

Le vieillissement des hommes au Canada

Les hommes nés en 1929 ont 65 ans aujourd'hui. Ceux de 80 ans ou plus sont nés en ou avant 1914. Ils ont vu leurs cravates et leurs parements de complets s'élargir et rétrécir plusieurs fois. Ces hommes ont connu d'autres changements: révolutions sociales et culturelles, périodes de grande prospérité, dépression économique, guerres, développements technologiques sans précédent, etc.
Ces hommes ont aussi connu une époque où les rôles étaient plus clairement définis et servaient de guides au fil de l'existence. Leur histoire de vie inclut probablement l'école mais pas le diplôme d'études secondaires, le mariage durant le temps de la Seconde Guerre mondiale, la recherche d'un emploi stable 'qu'on ne quitterait pas' et les enfants que les femmes, ménagères à temps plein, élevaient. La prospérité des années 1940 et 1950 rendit possible le rêve de la 'vieillesse dorée'. À la retraite, la division du travail demeure sensiblement ce qu'elle a été au cours du mariage, lui s'occupant des finances, de conduire l'auto et de l'entretenir, en plus de voir à l'extérieur de la maison, elle s'occupant du 'ménage' et des relations familiales et sociales. Si elle meurt, il a de bonnes chances de se remarier.

Le changement et la continuité ont jusqu'à maintenant caractérisé la vie de la plupart des hommes âgés au Canada. Est-ce que les tendances changeront pour les retraités de l'avenir? Le manque de recherche sur les hommes et leur rôle au sein des relations interpersonnelles, de même que l'incapacité de prédire comment la société intègre les changements font qu'il est difficile de répondre à cette question. Toutefois, le présent numéro d'Expression fournit une esquisse des hommes et du vieillissement au Canada et, nous l'espérons, des réponses aux questions les plus fréquentes, de même qu'un meilleur éclairage sur l'avenir.

Tous des Alain Delon ou des John Wayne? Début

Les cheveux s'amincissent et semblent se reloger dans les oreilles, dans les narines et sur les épaules; l'ouïe commence à diminuer dans la vingtaine; même chose pour la vue et l'odorat; les tissus graisseux se répartissent autour de l'abdomen vers la trentaine; les os faiblissent dans la quarantaine et la masse musculaire se dégonfle. Voilà quelques signes révélateurs du vieillissement des hommes, bien que la vitesse de vieillissement physique varie énormément d'un individu à l'autre.
La maladie fait aussi son apparition, les affections cardiovasculaires venant en tête et augmentant rapidement comme cause de décès après 35 ans. Ainsi, pour les aînés mâles, les principales causes de décès en 1986 étaient les infarctus, le cancer du poumon, les accidents cérébro-vasculaires, la bronchite chronique, l'emphysème et l'asthme, quoique les première et troisième causes aient diminué de façon significative au cours des dernières années. Le cancer cause 1,5 plus de décès chez les hommes que chez les femmes et la différence augmente encore plus chez les 85+ ans. Le cancer de la prostate arrive en deuxième place des cancers et on prévoit que son incidence dépassera celle du cancer du poumon au cours de la prochaine décennie. Chez les hommes, les cancers du colon, de l'estomac, du système lymphatique et du cerveau sont aussi fréquents.2
Plusieurs facteurs expliquent ces maladies fatales chez les hommes. L'âge en est un. Par exemple, l'incidence du cancer de la prostate--diagnostiqué en moyenne vers les 73 ans--augmente constamment avec l'âge. Quant aux maladies coronariennes et au cancer du poumon, les mauvaises habitudes alimentaires, le manque d'exercice et le tabagisme contribuent à accroître les risques. Le tabagisme est aussi associé aux décès causés par l'emphysème, la bronchite et l'asthme. Un autre facteur de risque est que 'les vrais hommes ne vont pas chez le docteur': certains hommes ne font appel au médecin ou ne prennent rendez-vous pour un examen général que s'ils sont poussés par leur femme, leur fille ou d'autres personnes concernées.
Les hommes souffrent aussi de maladies chroniques, mais moins que les femmes. L'ostéoporose, par exemple, n'affecte qu'un homme sur six, surtout après 75 ans. L'hypertension, la surdité, l'arthrite, la sinusite chronique et l'ischémie par contre sont des conditions communes. Des handicaps divers font aussi partie du vieillissement physique des hommes. Ainsi, environ 75% des hommes de 85+ ans contre 7,7% des 55 ans et moins voient diminuer leur mobilité et leur agilité.3
Tout compte fait, à la naissance, les hommes peuvent s'attendre à vivre jusqu'à 73,1 ans, et s'ils atteignent 65 ans, jusqu'à 79,9 ans. Tentent-ils d'éviter le vieillissement? Est-ce que le fait de vieillir physiquement les tracasse? Pour le genre Alain Delon, le vieillissement peut exiger plus d'ajustement. Les psychologues ont différentes théories pour expliquer pourquoi certains hommes voient le vieillissement physique comme une catastrophe et d'autres pas. Après avoir comparé des dessins d'aîné-e- s institutionnalisés et non institutionnalisés, M. Lakin, par exemple, a conclu que c'est la perception que quelqu'un a de son statut--et non l'âge comme tel--qui est le facteur principal affectant le changement de perception de l'image corporelle.4 Le mot 'contrôle' semble être clé.
Autre mot clé: la 'santé'. C'est prouvé, les hommes sont plus conscients du rôle de l'exercice physique dans la protection de la santé: une enquête nationale de 1988 révélait que 50% des hommes de 65+ ans faisaient des activités aérobiques 30 minutes ou plus à tous les deux jours et que 75% passaient trois heures par semaine à faire de l'exercice pour se récréer, score inégalé par les femmes âgées. Plus des deux tiers de ces hommes évaluaient leur santé comme étant bonne ou très bonne,5 facteur étroitement associé à la satisfaction de vivre.
Une saine approche philosophique aide aussi. «Ma santé est moins bonne, dit un veuf de 82 ans, mais ça ne m'obsède pas. Il faut bien jouer avec les cartes qu'on vous a données.» Cet homme nous invite à remettre en question nos notions de 'vieillissement réussi': handicapé par l'arthrite, il met une heure et demie chaque matin à s'habiller.

Tous des Casanova? Début

Le mythe que les aîné-e-s n'ont pas de sexualité est en train de disparaître. Des études montrent que 99% des gens de 60+ ans aimeraient avoir des relations sexuelles s'ils avaient une ou un partenaire consentant. Des chercheurs de l'Université de San Francisco ont trouvé que 88% des hommes de 80 à 102 ans rêvent encore d'avoir des liens affectifs et intimes avec une autre personne.6

De fausses notions entourent également la ménopause masculine, phénomène aussi appelé andropause ou viropause. La ménopause masculine fait référence à une série de changements physiques et psychologiques qui se produisent chez l'homme à mesure qu'il vieillit. Elle n'a rien à voir avec la fertilité: bien des hommes continuent à procréer tard dans la vie. Elle n'est pas non plus due entièrement au processus naturel du vieillissement, quoique l'impotence soit définitivement reliée à l'âge. L'auteure Gail Sheehy dit que ce 'passage innommable' est un véritable syndrome multifactoriel. Ses ingrédients en seraient l'âge, l'activité hormonale, le niveau général de santé, la signification de ce qu'est 'être un homme' à mesure que la force décline et le changement de statut occupationnel.7 Si les résultats de l'étude sur le vieillissement masculin au Massachusetts sont exportables, l'andropause serait la norme pour la moitié des hommes au Canada au cours de la deuxième portion de leur vie adulte.
Les causes de l'andropause déroutent encore les médecins et les préjugés des spécialistes sur la façon d'en traiter les problèmes abondent. Sheehy, par exemple, écrit que les 'plombiers' aux solutions mécaniques passent à côté de l'essentiel, soit la question existentielle du besoin qu'a l'individu mâle de changer ses attentes face à lui-même lorsqu'il vieillit.

Il semble raisonnable de penser que la santé et d'autres facteurs, incluant les attentes, conditionnent les niveaux d'activité sexuelle; cela pourrait expliquer pourquoi des couples qui avaient des relations sexuelles cinq fois par semaine ont rapporté le même taux de stabilité matrimoniale que ceux qui n'en avaient pas eues pendant 15 ans.8 Il faut dire aussi que sexualité n'égale pas accouplement.
Malgré l'andropause, la plupart des hommes âgés ont un avantage net par rapport aux femmes quant à l'expression de leur sexualité: il y a d'habitude plus de femmes que d'hommes chez les groupes plus âgés; les normes sociales permettent aux hommes de courtiser des femmes beaucoup plus jeunes qu'eux, alors que le contraire fait encore réagir; et les hommes ont généralement plus d'argent pour faire la cour à quelqu'un.

Ont-ils tous besoin d'un Freud? Début

Les facteurs de risque liés à la maladie mentale comprennent la détérioration de la santé physique, la pauvreté, l'isolement social, le deuil et la dépression causée par les pertes multiples. Même si plusieurs hommes connaissent ces situations, ils s'en tirent mieux que les gens plus jeunes au plan de la santé mentale. Ils s'en tirent également mieux que les femmes du même groupe d'âge à certains égards. Par exemple, environ 5% des aînés, contre 10 % des aînées, ont des problèmes sérieux d'anxiété, condition causée par plusieurs peurs: peur de la dépendance, de la sénilité, de l'institutionnalisation, etc. Toutefois, l'alcoolisme est plus répandu chez les hommes âgés que chez les femmes, de même que le suicide, surtout chez les 75+ ans. En fait, une enquête québécoise menée en 1989 a montré qu'il y avait 10 fois plus de suicides chez les hommes de 75+ ans que chez les femmes du même groupe d'âge.9
Dans leur quête pour expliquer la santé mentale, les chercheurs étudient divers facteurs, y compris ses liens avec l'état matrimonial. Selon Barbara Payne, de l'Université du Manitoba, une donnée qui revient constamment est le bas taux de maladie mentale chez la population mariée.10 Toutefois, il semble exister deux types de mariage: celui de l'homme et celui de la femme. Par exemple, de dire Payne, on a remarqué que les femmes mariées et les hommes divorcés sont plus susceptibles dans l'ensemble de connaître des problèmes de santé mentale. Sa propre étude sur les sentiments de solitude et de dépression chez les aîné-e-s a révélé que la majorité des aîné-e-s de tous les groupes matrimoniaux ont une bonne santé mentale. Les veufs étaient ceux qui se sentaient les plus seuls; suivaient les veuves, puis les femmes et les hommes séparés/ divorcés. Les gens mariés avaient les scores les plus bas. Quant aux sentiments de dépression, il n'y avait aucune différence significative selon l'état matrimonial.
D'autres études suggèrent que l'éducation que les hommes ont reçu tôt dans la vie sur la façon de s'exprimer de manière agressive a un effet sur leur santé mentale. Le Comité sur la santé mentale du Québec, par exemple, a montré que les hommes adoptent des comportements plus dangereux et que, face à un bouleversement émotif, ils tendent à s'auto-détruire, alors que les femmes deviennent plus déprimées.11
L'importance de l'éducation fait également surface dans le moment au regard de la maladie d'Alzheimer, forme la plus répandue de la démence. La scientiste Joan Lindsay de Santé Canada explique que des études antérieures avaient montré les femmes comme deux fois plus susceptibles que les hommes de souffrir de cette maladie, mais que la différence disparut lorsqu'on a tenu en compte les niveaux d'éducation. Bien que l'âge et l'hérédité demeurent les principaux facteurs de risque associés à la maladie d'Alzheimer, cette nouvelle découverte permet de croire que l'éducation et l'activité intellectuelle sont les meilleures formes de prévention. Cette maladie affecte 5,1 % des 65+ ans au Canada, toutes les démences réunies en affectant 8%.

Tissés serrés - la famille et les ami-e-s Début

Même aujourd'hui, plus de 92 % des Canadiennes et des Canadiens se marient au moins une fois. Chez les hommes de 65+ ans, 75 % sont mariés et vivent dans un ménage privé--le plus souvent dans leur propre maison--avec leur épouse. Un autre 14 % d'entre eux vivent seuls et une petite proportion vit en institution ou autrement. Le mariage est donc central dans la vie de bien des hommes.
Les études sur la qualité des mariages de longue date sont toutefois déroutantes: certaines identifient une détérioration continue au fil du temps, déclin souvent précipité lorsque l'époux s'ajuste mal à la retraite. D'autres concluent à une amélioration, surtout après le départ des enfants.12
D'autres études mettent l'accent sur les relations pratiques et émotives à l'intérieur et à l'extérieur du mariage. Les aînés mariés reçoivent en général l'aide de leur épouse surtout pour effectuer les activités quotidiennes. (Les exceptions existent. À preuve, dans la région rurale du Bas-Saint-Laurent, ce sont les célibataires, des hommes à 80 %, qui prennent soin des parents âgés et sont à la base du système d'aide naturelle.)13 Les hommes ont aussi tendance à compter d'abord sur leur épouse pour obtenir l'appui social et émotif. Pour ces raisons, le veuvage est souvent perçu comme étant plus difficile à vivre pour les hommes, perception fort discutable selon Joan Norris, de l'Université de Guelph en Ontario. D'aucuns disent que les veufs ont peut-être moins 'besoin' d'un réseau social et peut-être trouvent-ils la satisfaction émotive dans la camaraderie et le partage d'intérêts communs. Les veufs étant plus rares que les veuves--20% contre 50 % de la population âgée--et perçus comme étant relativement 'incompétents' au plan domestique, il se peut, selon Norris, que l'aide [pratique] vienne à eux.14 La plus grande incidence de remariage chez les veufs que chez les veuves (15 % contre 6 %) suggère que le mariage est une stratégie d'adaptation plus populaire pour les hommes que pour les femmes. Tout compte fait, on ne nie pas ici le besoin de relations d'aide chez les veufs, mais on dit que la quantité et la qualité de cette aide est peut-être une question individuelle.
Parallèlement, une donnée de l'Enquête sur l'autonomie et le vieillissement révèle que 75 % des aîné-e-s sont satisfaits de leurs liens de famille et d'amitié, peu importe leur sexe ou leur état matrimonial. Toutefois, Barbara Payne ajoute que les hommes séparés/divorcés de 65+ ans étaient beaucoup moins susceptibles de dire qu'ils sont satisfaits de leur vie. Est-il possible que la faiblesse des réseaux sociaux, des liens familiaux et des relations de réciprocité des hommes divorcés soient l'ancre qui manque à leur vie?

Et la retraite? Début

La participation à la vie active des Canadiens de 65 à 69 ans a diminué de 4,3 % entre 1981 et 1991, et de 1,4% chez les 70+ ans. Peu importe les raisons de cette diminution--meilleure planification, meilleures pensions, moins d'emplois ou agisme--les hommes prennent maintenant leur retraite vers l'âge de 62 ans. Quelques-uns, incluant les cultivateurs, ne prennent pas vraiment de retraite; d'autres, surtout les professionnels, acceptent des assignations temporaires rémunérées bien qu'‘officiellement' retraités. Pour quelques-uns, la retraite est une crise impliquant la perte de leur rôle principal, alors que pour d'autres, c'est à peine un moment critique de leur vie.15 Est- ce que les hommes s'y préparent?
Une récente étude révèle que plus de 75 % des hommes de 65+ ans se préparent financièrement à la retraite. Ils accumulent des économies, paient leur hypothèque et évitent de s'endetter. Un nombre moindre se prépare d'autres façons: 34 % adoptent de nouveaux passe-temps, 24 % entreprennent de nouvelles activités physiques et 10 % s'inscrivent à des cours de préparation à la retraite.16 Un aîné interrogé à ce propos disait: «Le jour suivant ma retraite, j'étais debout dans le salon et je pleurais comme un grand bébé. J'avais un compte en banque bien rempli mais je ne savais pas comment j'allais remplir toutes ces heures!» La peur de l'inconnu, le manque d'habitude à planifier les activités de 'non-travail' de la vie et la peur de la mort sont quelques-unes des raisons invoquées pour ne pas se préparer psychologiquement.

Que ce soit par conviction personnelle, en vertu d'une planification ou à cause des circonstances, certains hommes âgés remplacent les rôles occupationnels ou familiaux par le bénévolat. Cela est avantageux pour le Canada, car si les activités bénévoles étaient payées, elles coûteraient quelque 12 $ milliards chaque année! Les hommes âgés, surtout les 65-69 ans, sont le plus souvent bénévoles auprès d'organismes, font le taxi pour les ami-e-s et les voisin-e-s, et aident leurs enfants dans les tâches d'entretien de la maison et du terrain. Plusieurs d'entre eux y voient des avantages: diminution du sentiment d'avoir perdu un rôle important, interaction sociale, maintien ou augmentation de leurs compétences et, finalement, exutoire à leurs intérêts politiques.
Les hommes plus âgés ne passent cependant pas tout leur temps à faire du bénévolat: en 1991, un Canadien sur deux de 45+ ans disait préférer se récréer par la lecture, la marche, en regardant la télévision et en rencontrant la famille et les ami-e-s.17 Ces résultats concordent avec les nouvelles données sur le 'travail ayant une valeur économique' qu'a calculées Leroy Stone de Statistique Canada. Il a trouvé, par exemple, que les hommes mariés de 65 à 74 ans et sans enfant de moins de 19 ans à la maison passent en moyenne 4,9 heures par jour à faire du travail ayant une valeur économique. (Le travail ayant une valeur économique est celui qui a un extrant identifiable qui puisse être utile au consommateur et être acheté dans le commerce. Il inclut l'activité bénévole.) Stone suppose que les hommes sont éduqués dès le jeune âge à croire que seul le travail rémunéré a de la valeur.18

La clé des portes du Temps Début

Plusieurs auteurs soulignent que l'éducation et ses multiples facettes sont des éléments marquants de la vie des hommes. David Gutmann, psychologue à l'Université Northwestern, explique, par exemple, que les hommes plus jeunes doivent 'contrôler' les ressources dont dépendent leur sécurité physique et celle de leur famille19 et qu'ils sont obligés de réprimer leurs propres besoins d'être dodichés et soignés au profit de la cellule familiale. Les hommes apprendraient leur rôle dès la petite enfance. De même, les jeunes épouses abandonneraient leur côté agressif au profit de leur maternage. Lorsque la période de soins aux enfants est passée, les deux parties se réapproprient les aspects réprimés de leur nature. Les hommes plus vieux, les 55 à 95 ans, deviennent plus sensibles aux relations humaines, plus dépendants, plus sensuels et plus compréhensifs. À l'opposé, les femmes s'affirment plus et deviennent plus dominantes et moins sentimentales; chaque sexe entre alors dans «le monde unisexe normal de la vie d'adulte âgé.» Gutmann continue en expliquant comment ces transformations du développement de la vie des pères, des fils et des mères finissent soit par s'intégrer, ou pas.

S'agit-il là d'un renversement du rôle des sexes à la vieillesse? Selon John Cavanaugh, de l'Université Bowling Green, cette acceptation des traits de personnalité caractéristiques des hommes et des femmes décrit mieux les adultes âgés qu'un renversement des rôles sexuels.20

Plusieurs ont tenté de trouver la fontaine de jouvence, sans succès. Une clé des portes du Temps, tant pour les hommes que pour les femmes, pourrait être simplement l'éducation prise au sens le plus large: la capacité de progresser avec chaque étape du développement de l'individu. La vie offre peut-être moins de guides qu'autrefois, le vieillissement peut encore être un terrain inexploré pour les hommes, mais il existe plusieurs suggestions et il y a de plus en plus d'exemples de 'succès':21

• Phil Latulipe, 73 ans, ancien marathonien de Québec, qui court maintenant sur de longues distances pendant 24, sinon 48 heures au profit d'oeuvres de charité

• Nil Hoas, 66 ans, chemineau retraité de White Rock, C.-B., qui joue au baseball, au golf, au curling et qui profite pleinement de la vie

• Ahab Spence, 82 ans, professeur autochtone cri, qui se remet d'un infarctus et a hâte de retourner enseigner

• Robertson Davies, 80 ans, auteur, qui a le nez constamment pointé vers l'avenir

• Grand-père, 82 ans, cet handicapé par l'arthrite qui s'habille toujours lui- même.

Des faits et des chiffres *

• Le rapport homme-femme est de 1: 1,4 chez les 65+ ans, et de 1:2 chez les 85+ ans.
• Les anciens combattants constituent environ 25 % des Canadiens âgés de 50+ ans. Quelque 88 % d'entre eux ont 65+ ans. Rathbone-McCuan, E. et B. Havens (éd.). North american elders - United States and Canadian perspectives. New York: Greenwood Press, 1988. p. 184.
• La prévalence numérique d'un sexe chez les aîné-e-s dépend de plusieurs facteurs, incluant l'ethnie. Par exemple, la moitié de 18 grands groupes ethniques en Ontario étaient majoritairement des hommes en 1971. Santerre, R. «Vieillesse, monde de femmes un mythe?» Revue canadienne du vieillissement, 6, 4, (hiver 1987): 304-317.
• En 1991, 74 % des hommes de 65+ ans étaient mariés; 13 %, veufs; 6 %, séparés ou divorcés; et 7 % ne s'étaient jamais mariés.
• Les hommes de 60+ ans sont 3,5 fois plus susceptibles de se marier ou de se remarier que les femmes.
• En 1984, les familles dont le chef était aîné avaient deux fois plus (80 %).de chances d'être propriétaires que les aîné-e-s seuls ( 41 %).
• Les hommes constituent 28 % de tous les aîné-e- s vivant en institution.
• En 1991, le revenu annuel moyen des hommes seuls âgés de 65+ ans était de 20 259 $, comparativement à 17 304 $ pour les femmes et à 40 036 $ pour les familles dont le chef était aîné. Statistique Canada. Revenu après impôt, répartition selon la taille du revenu au Canada. N° de cat. 13-210. Ottawa: 199 1. Tableau II.
• Entre 1980 et 1990, le pourcentage d'aînés seuls vivant sous le seuil de pauvreté a diminué de 53 % à 26 %. En 1990, 33 % des hommes de 65+ ans ont reçu un Supplément de revenu garanti, un indicateur de pauvreté.
• 63 % des aînés seuls contre 33 % des aînées avaient une automobile en 1987.
• Environ 44 % des hommes de 65+ ans ont un handicap physique ou mental quelconque.
• Les maladies coronariennes ont chuté de 30 % chez les aînés entre 1971 et 1986.

(* Les données proviennent des Vignettes sur le vieillissement du CCNTA, à moins d'indications contraires.)

Conseils pratiques Début

Aux hommes à propos de la retraite

• Adoptez un nouveau passe-temps ou une nouvelle cause, quelque chose de complètement différent de vos occupations précédentes. Étendez votre vision du monde.
• Faites du bénévolat. Vous contribuerez ainsi à la société, rencontrerez de nouvelles gens et ajouterez à la structure de votre vie. C'est aussi une façon d'obtenir respect et reconnaissance.
• Retournez à l'école, au collège ou à l'université. Les frais sont réduits pour les aîné- e-s. De plus, les enseignant-e-s sont toujours heureux de voir des visages plus âgés dans leur classe.
• Assumez certaines tâches domestiques quotidiennes, plutôt que les tâches occasionnelles d'entretien extérieur. Cela donnera du temps libre à votre conjointe pour 'aller jouer dehors' avec vous.
• Si l'andropause vous préoccupe, informez-vous et discutez-en. Rappelez-vous qu'elle n'est pas uniquement d'ordre physique.

Aux hommes à propos de la santé mentale Début

• Essayez de faire de nouvelles rencontres ou de renouer d'anciennes amitiés. L'isolement accroît la vulnérabilité à la dépression.
• Sortez de chez vous! Allez au restaurant, allez faire des courses bref, incluez le monde extérieur dans votre vie.
• Participez à des activités que vous aimez et qui sont significatives pour vous, surtout celles qui vous font rencontrer des gens.
• N'ayez pas peur de demander de l'aide. C'est le signe de quelqu'un en possession de ses moyens.
Aux hommes à propos de la santé physique Début

• Faites des exercices qui vous plaisent, c'est tout! Consultez votre médecin pour déterminer combien d'exercice est approprié pour vous. Essayez de passer au moins deux heures debout par jour. Cela renforce les muscles et les os.
• Ayez une alimentation pauvre en gras et en calories, riche en fibres et consommez de l'alcool avec modération.
• Prenez vos médicaments tel que prescrits. Dans le doute, demandez à votre pharmacien ou à un-e spécialiste de la santé.
• Mangez à des heures régulières le plus possible--c'est plus facile pour la digestion.
• S'il vous arrive de ne pouvoir dormir, levez-vous, lisez, regardez la télévision et préparez-vous une boisson chaude. Ne vous inquiétez pas de l'insomnie à moins que ce ne soit fréquent; si ça l'est, consultez votre médecin.



Notes Début

** Toutes les données utilisées dans le présent numéro proviennent des publications du CCNTA, à moins d'indication contraire.

1 Canada. Les aîné(e)s. Autonomie et vieillissement: aperçu d'une enquête nationale.
Ottawa: Santé et Bien-être social Canada, 1991: 6, 7.
Statistique Canada. Le quotidien, (7 mai 1992): 2.

2 Santé et Bien-être social Canada. Maladies chroniques au Canada, 9, 5, (sept. 1988): 80, 90; 10, 4, (juil. 1989): 64; 13, 5, (automne 1992): 19; 11 , 1 , (janv. 1990): 1, 4. Johnston, G. et al. Cancer of the prostate in Nova Scotia.
Rapport final d'un projet pilote. Halifax: Université Dalhousie, sept. 1991: ii.

3 Santé et Bien-être social Canada. Maladies chroniques au Canada, 13, 5, (automne 1992): 89.
Statistique Canada. Un portrait des aînés au Canada. Projet des groupes cibles, Ottawa: 1990: 7.

4 Janelli, L.M, "The realities of body image." Journal of Gerontological Nursing, 12, 10: 2 23-27.

5 Stephens, T. et C.L. Craig. The well-being of Canadians - Highlights of the 1988 Campbells Survey.
Ottawa: Canadian Fitness & Lifestyle Research lnstitute, 1990: 7, 8, tableau 18.

6 Wolkomir, J. et R. Wolkomir. "Love and longevity." Longevity, 1 , 4, (janv. 1989): 32

7 Sheehy, G. "The unspeakable passage. Is there a male menopause?" Vanity Fair, (avril 1993): 164-167, 218-227.

8 Garza, J. et P. Dressel. "Sexuality and later-life marriages." In Brubaker, T. (éd.), Family relationships in later life. Beverly Hills, CA: Sage Publications, 1983: 94, 99.

9 George, L. "Gender, age and psychiatric disorders." Generations, XIV, 3, (été 1990). 22, 26.
Pérodeau, C. "Peurs et anxiété chez les aîné-e-s." In Conseil consultatif national sur le troisième âge (éd.), Santé mentale et vieillissement. Ottawa: le Conseil, 1991.
Mishara, B. "Le suicide chez les aîné-e-s." In Conseil consultatif national sur le troisième age (éd.), Santé mentale et vieillissement. Ottawa: le Conseil, 1991.
Lapierre, S. et al, Identification des facteurs de risques suicidaires des aîné(e)s. Document présenté à Montebello, Qc, le 20 mai 1992. Trois- Rivières: Département de psychologie, Université du Québec, 1992.

10 Payne, B.J. "La séparation et le divorce au troisième âge." In Conseil consultatif national sur le troisième âge (éd.), Les perturbations matrimoniales au troisième âge. Ottawa: le Conseil, 1994.

11 Comité de la santé mentale du Québec. Le défi de l'égalité. La santé mentale des hommes et des femmes. Par N. Guberman et al. Montréal: Gaétan Morin éditeur, 1993.

12 Ade-Ridder, L. et T. Brubaker. "The quality of long term marriages." in Brubaker, T. (éd.), Family relationships in later life. Beverly Hills, CA: Sage Publications, 1983: 2 1-30.

13 Santerre, R. Support masculin des parents âgés. Document présenté lors de la réunion annuelle de l'ACG, Montréal, Qc, 1993. Québec: Faculté des sciences sociales, Université Laval, 1993.

14 Norris, J.E. "Le veuvage chez les aîné-e-s." In Conseil consultatif national sur le troisième âge (éd.), Les perturbations matrimoniales au troisième âge. Ottawa: le Conseil, 1994.

15 McDonald, P. L. et R.A. Wanner. Retirement in Canada. Toronto: Butterworths, 1990: 73.

16 Canada. Les aîné(e)s, op.cit.: 115. McDonald et Wanner, op.cit.: 75,

17 Statistique Canada. Le quotidien, (7 mai 1992): 3.

18 Stone, L. "La place du travail dans la vie des hommes." lnfo-Âge
[Conseil consultatif national sur le troisième âge], 10, (mars 1994).

19 Gutmann, D. The family in later life. Document présenté lors de l'assemblée annuelle de l'ACFAS, Moncton, N.-B., 1988. 13 p.

20 Cavanaugh, J.C. Adult development and aging. Belmont, CA: Wadsworth Publishing Co., 1990: 279.

21 Nemeth, M. Amazing greys. Maclean's, (10 janv, 1994): 26-34.

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Comité de la santé mentale du Québec. Le défi de l'égalité. La santé mentale des hommes et des femmes. Par N. Guberman et al. Montréal: Gaétan Morin éditeur, 1993.

Gutmann, D. The family in later life. Document présenté lors de l'assemblée annuelle de l'ACFAS, Moncton, N.-B., 1988. 13 p.

Kaye, L. et J. Applegate. "Men as elder caregivers: A response to changing families." American Journal of Orthopsychiatry, 60, 1, (janv. 1990): 86-95.

McDonald, P.L. et R.A. Wanner. Retirement in Canada. Toronto: Butterworths, 1990.

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Plouffe, L. et L. Plamondon. Sexualité et vieillissement: actes du 7e colloque de l'Association québécoise de gérontologie. Montréal: Méridien, 1989.

Santerre, R. "Vieillesse, monde de femmes: un mythe?" Revue canadienne du vieillissement, 6, 4, (hiver 1987): 304-317.

Sheehy, G. "The unspeakable passage. Is there a male menopause?" Vanity Fair, (avril 1993): 164-167, 218- 227.

Weisse, A.B. The man's guide to good health. Yonkers, NY: Consumer Reports Books, 1991.


Expression est publié 4 fois l'an par le

Conseil consultatif national sur le troisième âge,

Ottawa, Ontario KlA OK9,

(613) 957-1968, télécopieur: (613) 957-9938.

Les opinions exprimées ne sont pas nécessairement celles du CCNTA.

ISSN 0822-8213

Recherche: Nancy Gnaedinger
Rédaction: Francine Beauregard

   
   
Mise à jour : 2005-02-17 9:00
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