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Enseignement infirmier et prévention, détection et prise en charge de la violence a été préparé par Margaret M. Ross pour l’Unité de prévention de la violence familiale, Santé Canada

Also available in English under the title: Nursing Education and Violence Prevention, Detection and Intervention

Les opinions exprimées dans ce rapport sont celles de l’auteure et ne reflètent pas nécessairement les points de vue de Santé Canada.

Il est interdit de reproduire le contenu de ce document à des fins commerciales, mais sa reproduction à d’autres fins est encouragée, à condition que la source soit citée.

On peut obtenir, sur demande, la présente publication en formats de substitutions.

Pour obtenir plus de renseignements sur les questions de violence familiale, veuillez communiquer avec le :

Centre national d’information sur la violence dans la famille Unité de prévention de la violence familiale Division de la santé des collectivités

Direction générale de la santé de la population et de la santé publique Santé Canada Indice de l’adresse : 1907D1 7e étage, immeuble Jeanne-Mance, pré Tunney Ottawa (Ontario) K1A 1B4 CANADA

Téléphone : 1-800-267-1291 ou (613) 957-2938 Télécopieur : (613) 941-8930 ATME : 1-800-561-5643 ou (613) 952-6396 Site Web : http://www.hc-sc.gc.ca/nc-cn Courriel : national_clearinghouse@hc-sc.gc.ca

©Sa majesté la Reine du chef du Canada, représentée par le

Ministre des Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, 2002 Cat. H72-21/185-2002F

ISBN 0-662-86626-6


Enseignement infirmier et prévention, détection et prise en charge de la violence

Rapport préparé à l’intention de Santé Canada Unité de prévention de la violence familiale Division de la santé des collectivités

par

Margaret M. Ross, I.A., Ph.D. Professeure de sciences infirmières et chercheuse de carrière au ministère de la Santé de l’Ontario


Remerciements

L’auteure tient à souligner l’appui que lui ont apporté Katalin Kennedy et Lynn Austin dans la réalisation de ce projet. Elle remercie également Lee Ann Hoff et Judy Wuest de leur précieuse collaboration.


Table des matières    
     
     
Sommaire 1  
Conclusions et recommandations 2  
Objet 7  
Contexte 7  
Préparation des futures infirmières 7  
Possibilités d’intervention des infirmières 8  
Méthodes 9  
Recherches en ligne 9  
Demandes de renseignements 9  
Analyse préliminaire 9  
Validation et évaluation 9  
Constatations générales 10  
Élaboration de programmes 10  
Questions théoriques et contextuelles 10  
Caractéristiques clés de la formation professionnelle 11  
Importance primordiale de l’apprentissage par l’expérience 11  
Intégration de concepts empruntés à diverses disciplines 12  
Éléments de l’élaboration des programmes 13  
Élaboration d’un cadre conceptuel 13  
Détermination du contenu obligatoire 13  
Contenu obligatoire 14  
Connaissances 14  
Attitudes 15  
Compétences 16  
Niveaux de scolarité 16  
Interdisciplinarité 17  
Antécédents personnels des étudiantes 18  
Violence en milieu de travail 19  
Mise en œuvre des programmes d’études 20  
Réactions des étudiantes 21  
Recherche 22  
Cours, textes et autre matériel éducatif 25  
Recommandations d’ordre politique et pratique 31  
Bibliographie 35  


Sommaire

La violence interpersonnelle est un problème social de taille, qui a des répercussions sur la santé et le bien-être des individus. On dénombre au Canada environ 250 000 infirmières* autorisées, 75 000 infirmières auxiliaires autorisées et 5 500 infirmières psychiatriques. La vaste majorité d’entre elles travaillent dans des établissements, dans la collectivité et à domicile, des emplacements où elles entretiennent des rapports étroits avec une forte proportion de la population exposée à la violence. Dans bien des cas, l’infirmière est souvent le premier point de contact avec l’équipe de soignants et est en bonne position pour mobiliser les ressources nécessaires et amorcer une intervention. Elle est aussi extrêmement bien placée pour contribuer à la prévention et à la détection de la violence chez les enfants, les femmes et les personnes âgées et pour intervenir de manière sensible et efficace auprès des personnes ayant subi de la violence (ci-après appelées des « survivants »). Il est cependant indispensable qu’elles disposent de la formation voulue pour remplir ce rôle. En effet, si l’on se fie aux données empiriques et aux données issues de recherches, les infirmières se sentent mal préparées à faire face aux difficultés posées par la résolution de problèmes et la prise de décisions lorsqu’elles sont confrontées à des cas réels et possibles de violence. La violence entre individus a été relativement absente des programmes de formation préalable et de formation continue des infirmières.

Ce document offre un aperçu de la littérature récente (1995-2000) sur la formation des infirmières dans le domaine de la prévention, de la détection et de la prise en charge de la violence. L’objectif visé consiste à renseigner les éducateurs, les chercheurs et les décideurs sur les lacunes que présente la formation et sur les questions qui méritent de faire l’objet de recherches.

Des recherches en ligne ont été réalisées sur CINAHL, Medline, Sociofile et Psychfile, de vastes bases de données bibliographiques, à l’aide du moteur de recherche OVID et de termes clés. L’auteure a parcouru manuellement des listes bibliographiques pour obtenir d’autres articles publiés récemment ainsi que des articles parus avant 1995, qui semblaient particulièrement pertinents dans le domaine de l’enseignement infirmier. Des lettres ont aussi été adressées aux centres d’excellence pour la santé des femmes, aux centres de recherche sur la violence familiale et la violence faite aux femmes, aux doyens et aux directeurs d’écoles de sciences infirmières et à l’Association canadienne des écoles de sciences infirmières, les invitant à soumettre des documents et des rapports inédits portant sur la formation des infirmières dans le domaine de la violence. Un rapport préliminaire a été soumis à l’analyse critique d’un groupe d’experts en prévention, et des améliorations ont été apportées au document à la lumière de ses recommandations.

Il ressort de cette démarche que la littérature sur la formation des infirmières dans le domaine de la prévention, de la détection ou de la prise en charge de la violence est peu abondante. Les réponses aux lettres adressées aux milieux concernés ont révélé qu’il existe une collaboration entre les chercheurs des centres d’excellence pour la santé des femmes et des centres de recherche sur la violence familiale et la violence faite aux femmes et les membres du personnel enseignant des écoles de sciences infirmières. Aucun des projets en cours ou inédits qui ont été signalés, sauf un qui est mené par des étudiantes, ne portait sur la formation des infirmières.

* Dans le présent document, pour alléger le texte, nous avons opté pour le féminin des termes «infirmières » et « étudiantes ».

Une part importante de la littérature insiste sur :

  • la nécessité de définir un cadre théorique et conceptuel pour la formation des infirmières et les recherches en la matière
  • l’importance de l’apprentissage par l’expérience
  • l’intégration de concepts empruntés à diverses disciplines.

Conclusions et recommandations

1.
  
Les éducateurs en sciences infirmières doivent faire en sorte que toutes leurs étudiantes acquièrent des connaissances et des compétences solides dans le domaine de la prévention, de la détection et de la prise en charge de la violence, ce qui leur permettra d’intervenir de manière sensible et efficace auprès des survivants.
2.
  
Il est important d’adopter, sur les plans de l’enseignement et de l’apprentissage, une démarche systématique qui privilégie des stratégies tant didactiques qu’expérientielles et des méthodes de travail fondées sur des données probantes. En comparaison d’une démarche fortuite ou aléatoire, une démarche systématique se traduira par une meilleure compréhension de la violence et par une prise en charge plus sensible et efficace des survivants.
3.
  
L’instauration d’un milieu propice à l’apprentissage (en particulier, un cadre d’apprentissage clinique où les étudiantes n’hésitent pas à mettre à l’épreuve leurs connaissances et leurs compétences par la pratique) accroîtra l’estime de soi chez les étudiantes et leur assurance dans leur capacité d’intervenir de manière sensible et efficace auprès des survivants.
4.
  
Il est fortement recommandé que les éducateurs explorent la dimension « des émotions » comme point de départ de la formation des infirmières dans le domaine de la prévention, de la détection et de la prise en charge de la violence. Si l’on veut aider les étudiantes à prendre conscience de leurs attitudes face à la violence et à comprendre les valeurs et les croyances sur lesquelles elles reposent, il est essentiel de les amener à engager une réflexion personnelle sur le sujet.
5.
  
L’évolution d’une discipline suppose des assises théoriques solides. À quelques rares exceptions près, la littérature sur la formation des infirmières dans le domaine de la prévention, de la détection et de la prise en charge de la violence fait peu de place à la théorie. Comme les soins infirmiers sont une discipline essentiellement empirique, il est important d’emprunter aux domaines des sciences sociales et humaines, de la victimologie, de l’éthique ainsi que du féminisme et de la théorie critique des concepts qui serviront d’assises théoriques aux programmes de formation et aux activités de recherche.
6.
  
L’état de préparation des membres du corps enseignant est variable. Bon nombre d’éducateurs sont censés dispenser un enseignement dans le domaine de la prévention, de la détection et de la prise en charge de la violence alors que leur expérience de travail auprès des survivants est minimale. Il y a lieu de concevoir des programmes d’enseignement, de former les éducateurs et de tenir des ateliers d’évaluation des programmes à l’intention des membres du corps professoral qui dispensent de l’enseignement et qui offrent des modèles de fonction professionnelle dans ce champ de pratique.
7.
  
Comme l’enseignement infirmier repose sur les connaissances et les aptitudes acquises par l’expérience de travail auprès de clients, la mise à contribution des travailleurs communautaires et des personnes actives dans le domaine de la prévention de la violence aura pour effet d’enrichir le processus d’élaboration et de mise en œuvre des programmes d’enseignement. Il faut aussi, dans la mesure du possible, encourager la participation des survivants à la conception et à la mise en œuvre de programmes d’apprentissage. Les étudiantes ont beaucoup à apprendre des survivants et des travailleurs de première ligne qui possèdent une expérience de travail en prévention, en détection et en prise en charge de la violence.
8.
  
La littérature sur l’inclusion de questions liées à la prévention, à la détection et à la prise en charge de la violence dans les programmes d’enseignement en est à ses premiers balbutiements. Il faudrait inciter les éducateurs et les chercheurs en sciences infirmières à rendre compte par écrit des méthodes d’enseignement et d’apprentissage qu’ils empruntent et à les soumettre à des revues spécialisées destinées aux professionnels de la santé.
9.
  
La recherche sur la formation des infirmières dans le domaine de la violence n’est pas non plus très avancée, et elle est essentiellement de nature descriptive. Il faudrait réaliser des études sur l’inclusion de questions liées à la prévention, à la détection et à la prise en charge de la violence dans les programmes d’enseignement des écoles de sciences infirmières; sur les meilleures façons d’appuyer les membres du corps professoral qui s’efforcent d’enseigner dans un domaine où beaucoup ne possèdent pas une préparation suffisante et sur l’efficacité des démarches pédagogiques, notamment les approches didactiques et expérientielles; sur les perceptions, l’acquisition de connaissances et l’amélioration de compétences. Il faudrait aussi étudier les effets de la formation des infirmières dans le domaine de la violence sur la santé et le bien-être des survivants.
10.
  
Étant donné la forte incidence de la violence infligée à la population féminine en général et comme la majorité des étudiants en sciences infirmières sont des femmes, il est probable que certaines étudiantes aient déjà subi de la violence. En effet, il est possible que certaines soient confrontées à des situations de violence. Il faudrait entreprendre des recherches afin de déterminer la prévalence de la violence subie par les étudiantes et comment elles réagissent à cette réalité.
11.
  
Comme le problème de la violence infligée aux femmes, aux enfants et aux personnes âgées exige une collaboration entre les professionnels de la santé et les intervenants sociaux, il est indispensable que les étudiantes apprennent à travailler avec des membres d’autres disciplines afin de prévenir et de détecter les cas réels ou possibles de violence et d’intervenir efficacement. S’ils n’ont pas l’occasion de travailler ensemble en tant qu’étudiants, il est irréaliste de s’attendre à ce que, une fois leur diplôme en main, les infirmières et d’autres intervenants en santé et en services sociaux adoptent automatiquement une démarche fondée sur la collaboration et entretiennent des relations de travail efficaces.
12.
  
Des guides ont été conçus pour aider les éducateurs en sciences infirmières à concevoir et à mettre en œuvre des programmes destinés aux étudiantes à tous les niveaux de la pratique. Bon nombre de ces guides ont été élaborés au Canada, à l’aide de fonds fédéraux et provinciaux. Ils sont généralement bien connus dans le milieu des éducateurs en sciences infirmières. Il faudrait s’employer à diffuser ces documents à grande échelle auprès de tous ceux qui s’occupent de la formation préalable et de la formation continue des infirmières.
13.
  
Il est prouvé que les programmes d’enseignement visent, du moins en partie, à faire en sorte que les étudiantes et les infirmières soient préparées à passer les examens d’inscription et d’agrément. Les éducateurs et les administrateurs qui sont responsables de ces examens devraient y intégrer des questions relatives à la violence. Il s’agit là d’un moyen de reconnaître l’importance de cette question pour la santé et le bien-être et le rôle de l’infirmière en matière de prévention, de détection et de prise en charge de la violence.
14.
  
L’Association des infirmières et infirmiers du Canada et un grand nombre d’associations provinciales d’infirmières et d’infirmiers ont conçu des énoncés de principe, des guides d’éthique et des normes de pratique qui prônent une intervention sensible et efficace du personnel infirmier auprès des survivants. Il faudrait inciter l’Association canadienne des écoles de sciences infirmières (ACESI) et les Collèges d’arts appliqués et de technologie à concevoir, de concert avec les doyens, les directeurs, les responsables d’associations professionnelles d’infirmières et des spécialistes du domaine, des politiques et des lignes directrices favorables à l’intégration du thème de la violence dans le programme de formation des infirmières.
15.
  
Il y aurait lieu d’inciter les centres d’excellence pour la santé des femmes et les centres de recherche sur la violence familiale et la violence faite aux femmes, qui œuvrent aux quatre coins du Canada et qui ont établi des liens de collaboration avec des membres du corps professoral d’écoles de sciences infirmières, à entreprendre ensemble des recherches sur l’influence de la formation sur les services de soins infirmiers et d’autres services de santé et services sociaux dans le domaine de la prévention, de la détection et de la prise en charge de la violence.
16.
  
L’obtention de fonds est essentielle à la mise en place et au maintien de programmes de formation systématiques en matière de violence, qui conviennent à différents types d’étudiantes, et offrent un contenu propre à la discipline et applicable à la collaboration avec d’autres disciplines. Comme le contenu des programmes d’enseignement est généralement chargé, et que les budgets globaux ne prévoient pas nécessairement les ressources humaines et matérielles requises, les programmes dépendent généralement de l’octroi de fonds par des sources externes. Les ministères fédéraux et provinciaux devraient envisager d’allouer des fonds à de tels programmes pour contribuer à faire en sorte que les infirmières soient bien préparées à bien remplir leur rôle de prévention, de détection et d’intervention face à ce problème de santé publique répandu.
17.
  
Cette étude n’a pas tenté de faire la lumière sur les programmes de formation en cours d’emploi et continue sur la prévention, la détection et la prise en charge de la violence qui ont été conçus à l’intention du personnel par les hôpitaux et des organismes de santé communautaire autres que ceux qui ont été recensés dans la littérature. D’après les réponses aux lettres envoyées aux doyens et aux directeurs d’écoles de sciences infirmières et aux directeurs généraux de centres d’excellence pour la santé des femmes et de centres de recherche sur la violence familiale et la violence faite aux femmes, il y aurait lieu d’entreprendre auprès de ces organisations des enquêtes permettant de brosser un tableau plus complet de la formation des infirmières dans ce secteur de la prestation de services.

Objet

Ce projet visait à réaliser un survol de la littérature récente sur la formation des infirmières dans le domaine de la prévention, de la détection et de la prise en charge de la violence. L’objectif était de renseigner les éducateurs, les chercheurs et les décideurs sur les lacunes que présente la formation et sur les questions qui méritent de faire l’objet de recherches.

Contexte

L’efficacité de la prise en charge des survivants par les infirmières passe nécessairement par la formation des infirmières dans le domaine de la prévention, de la détection et de la prise en charge de la violence. La violence est un sujet qui pose un défi particulier à la plupart des éducateurs chargés d’offrir aux infirmières un enseignement et un modèle de rôle.

En plus de renseigner ses étudiantes sur la complexité des soins de santé, l’éducateur doit leur faire prendre conscience du lien entre les valeurs et les traditions, lesquelles sont tributaires des modes de vie et des interactions sociales. Il importe de souligner que si beaucoup de gens considèrent les valeurs et les traditions comme sacrées, certains les jugent dangereuses. L’efficacité de la transmission de ce genre de messages par les éducateurs aura une incidence sur la façon dont les étudiantes les interpréteront et les appliqueront plus tard lorsqu’elles seront confrontées à des personnes vulnérables, notamment des femmes, des enfants et des personnes âgées. Si l’on se fie aux données empiriques et aux données issues de recherches, les infirmières se sentent mal préparées à faire face aux difficultés posées par la résolution de problèmes et la prise de décisions lorsqu’elles sont confrontées à des cas réels et possibles de violence. La préparation des futures infirmières dans le domaine de la prévention, de la détection et de la prise en charge de la violence est un rôle essentiel que doivent assumer les responsables de la formation des infirmières, mais il s’agit d’un rôle complexe.

La violence est un problème qui concerne tous les échelons du gouvernement. Au niveau fédéral, au cours des 15 dernières années, un certain nombre d’initiatives ont été menées contre la violence faite aux femmes, aux enfants et aux personnes âgées. Au nombre de celles-ci, figure l’initiative de lutte contre la violence familiale, un programme quadriennal (1991-1995) qui a affecté 136 millions de dollars à la lutte contre la violence familiale. En 1993, le Comité canadien sur la violence faite aux femmes a préparé son rapport final, qui renfermait plus de 500 recommandations sur un éventail de questions et un plaidoyer en faveur d’un programme d’enseignement obligatoire à l’intention des professionnels de la santé destiné à faire en sorte qu’ils possèdent les connaissances, les compétences et les attitudes voulues pour bien intervenir auprès des survivants. Le Centre national d’information sur la violence dans la famille a parrainé de nombreuses nouvelles publications qui, dans certains cas, s’adressent spécifiquement au secteur de la santé et des services sociaux. Ces initiatives et d’autres travaux ont servi de point de départ à la réalisation du présent rapport.

Préparation des futures infirmières

En 1989, Brendtro et Bowker ont signalé que malgré le rôle joué par les intervenants en santé, notamment les infirmières, dans la prise en charge et le traitement des survivants, ces derniers sont perçus comme les sources d’aide professionnelle les moins utiles. Un parcours de la littérature indique que même les intervenants bien informés bénéficient de peu de directives et de soutien lorsqu’ils cherchent à bien évaluer les cas et à intervenir de manière efficace en cas de crainte pour la sécurité et le bien-être physiques, psychologiques ou matériels des femmes, des enfants et des personnes âgées. Un tel état de choses pose problème tant pour la formation des infirmières que pour l’exercice de la profession infirmière.

Aux États-Unis, McBride (1992) a signalé que la violence infligée aux femmes a été relativement absente des programmes d’enseignement et elle a insisté sur la nécessité de lui faire une place privilégiée dans les programmes de formation des infirmières à l’avenir. Elle a aussi fait valoir avec insistance que la violence exercée contre les femmes devrait occuper une place de choix dans un programme de recherche en sciences infirmières. Elle a engagé vivement les chercheurs à prendre l’initiative d’aborder les questions liées à la prise en charge de la violence dans les travaux de recherche. De l’avis de McBride, le moyen de motiver les étudiantes, de les stimuler et de les inciter à faire preuve d’empathie dans leurs rapports professionnels avec les survivants consiste à les amener à connaître ces femmes en tant que personnes, comme elles-mêmes. Pour qu’elles réalisent leur plein potentiel, les étudiantes doivent être renseignées sur la prévalence de la violence et se voir offrir l’occasion d’améliorer leurs connaissances, leurs compétences et leur discernement afin d’intervenir de manière sensible et efficace face à ce grave problème de santé publique.

Possibilités d’intervention des infirmières

Les infirmières sont extrêmement bien placées pour contribuer à la prévention, à la détection et à la prise en charge de la violence. En raison de leur grand nombre, de la diversité des milieux où elles exercent leur profession et de la nature de leur travail, elles entretiennent des liens étroits avec une forte proportion de la population exposée à la violence et à ses répercussions. On dénombre

au Canada environ 256 544 infirmières autorisées, 75 000 infirmières auxiliaires autorisées et 5 500 infirmières psychiatriques (Statistique Canada, 2000). La grande majorité d’entre elles exercent leur profession. En plus d’être présentes en grand nombre dans les établissements de santé traditionnels et des milieux communautaires, elles travaillent dans les écoles publiques et, surtout, chez les gens. Dans bien des cas, elles représentent le premier point de contact avec l’équipe de soignants et sont extrêmement bien placées pour mobiliser les ressources et amorcer une première intervention.

La grande diversité du champ d’intervention des infirmières (éducation, recherche, politique, administration et services) se prête bien à une intervention aux niveaux primaire (prévention), secondaire (traitement) et tertiaire (réadaptation) (Ross & Hoff, 1995). Au niveau primaire, l’infirmière est en position idéale pour participer à des programmes éducatifs qui visent à mieux sensibiliser la population et les professionnels à la violence faite aux femmes, aux enfants et aux personnes âgées. Elles peuvent prendre part à l’établissement de politiques et de pratiques qui protègent les droits des individus et des familles dans les collectivités et les établissements de soins. Elles peuvent aussi participer à des recherches qui visent à déterminer les antécédents de conflits et de violence et leurs conséquences, à mettre à l’épreuve la validité et la fiabilité d’instruments d’évaluation et à évaluer l’efficacité d’interventions cliniques auprès des survivants. Au niveau secondaire, elles peuvent mettre sur pied des programmes de dépistage de la violence chez les individus à risque, participer au traitement médical de blessures entraînées par des actes de violence et coordonner les services communautaires de manière à assurer la continuité des soins. Au niveau tertiaire, elles peuvent faciliter la guérison et la réadaptation en offrant aux individus et aux familles des services de counselling, du soutien aux groupes de survivants et en les aidant à atteindre un niveau optimal de sécurité, de santé et de bien-être.

Méthodes

Recherches en ligne

Des stratégies de recherche informatisée et manuelle ont été utilisées pour parcourir certaines listes bibliographiques. Une recherche en ligne, à l’aide du moteur OVID, a été réalisée sur CANSIM, CINAHL, Current Contents, MEDLINE, Sociofile et Psychfile, de vastes bases de données bibliographiques, en vue de repérer des articles, des études et des rapports publiés de 1995 à 2000. Les termes clés suivants ont été utilisés seuls ou en association : prévention, détection, prise en charge de la violence, violence faite aux femmes, aux enfants et aux personnes âgées, femmes battues, enfance maltraitée, viol, agression sexuelle, suicide, intervention d’urgence, résolution de conflits et enseignement infirmier.

Demandes de renseignements

Des lettres ont été adressées aux directeurs généraux de l’Association canadienne des écoles de sciences infirmières, des centres d’excellence pour la santé des femmes, des centres de recherche sur la violence familiale et la violence faite aux femmes et à toutes les écoles de sciences infirmières, les invitant à soumettre des documents et des rapports inédits portant sur la formation des infirmières dans le domaine de la violence faite aux femmes, aux enfants et aux personnes âgées. On leur a aussi demandé si les programmes d’études supérieures en sciences infirmières offraient aux étudiantes la possibilité de se spécialiser dans le domaine de la prévention, de la détection et de la prise en charge de la violence, soit dans les travaux de cours soit dans la réalisation de thèses.

Analyse préliminaire

Tous les articles repérés par le biais des recherches en ligne et des demandes de renseignement ont fait l’objet d’une analyse préliminaire qui visait à déterminer s’ils présentaient de l’intérêt pour notre rapport. Un instrument a orienté la sélection des manuscrits retenus. Les critères de sélection consistaient à déterminer si l’étude a été publiée depuis 1995; si elle porte sur la formation des infirmières dans au moins un secteur associé à la lutte contre la violence; si elle s’inscrit dans le cadre d’un projet de recherche ou de l’élaboration ou de la mise en œuvre d’un programme ou si elle découle d’une expérience personnelle ou rend compte d’une opinion personnelle. On a parcouru manuellement les listes bibliographiques de certains articles afin de repérer des articles publiés avant 1995 pouvant présenter de l’intérêt pour ce projet. Seuls les articles portant sur la formation des infirmières dans le domaine de la prévention, de la détection et de la prise en charge de la violence et que l’on pouvait obtenir de l’Université d’Ottawa, du Collège Algonquin et de la Queen’s University ont été retenus et inclus dans ce survol.

Validation et évaluation

Une ébauche du survol a été distribuée à un groupe d’experts en matière de prévention, de détection et de prise en charge de la violence et de formation des infirmières, qui ont été invités à valider et à évaluer le document. L’évaluation reposait sur les critères suivants : clarté, intégralité, pertinence de la stratégie de recherche, des critères de sélection, du contenu pour les décideurs et les éducateurs et les chercheurs en sciences infirmières et qualité générale. Après la validation et l’évaluation, les observations des membres du groupe d’experts ont été examinées et intégrées au document, dont la version définitive a été choisie.

Constatations générales

La littérature sur la formation des infirmières dans le domaine de la prévention, de la détection et de la prise en charge de la violence est peu abondante. En 1996, Woodtli et Breslin ont signalé qu’à la lumière d’un survol de la littérature, peu de publications traitent de l’inclusion du sujet de la violence faite aux femmes, aux enfants ou aux personnes âgées dans le programme d’enseignement en soins de santé. Depuis, la situation a peu évolué. Trente-cinq articles ont été retenus pour les besoins de ce rapport parce qu’ils répondaient aux critères établis et concernaient directement ce projet. En outre, quelques documents publiés avant 1995 ont été inclus parce qu’ils présentaient un intérêt particulier pour la formation des infirmières dans le domaine de la violence. Les auteurs étaient majoritairement d’origine américaine, les autres étant essentiellement des Canadiens et des Britanniques.

Même si les réponses aux lettres adressées aux milieux concernés ont révélé qu’il existe une collaboration entre les chercheurs des centres d’excellence pour la santé des femmes et des centres de recherche sur la violence familiale et la violence faite aux femmes et les membres du personnel enseignant des écoles de sciences infirmières, on n’a signalé aucun projet en cours ou inédit portant sur la formation des infirmières. Les doyens et les directeurs d’écoles offrant des programmes d’études supérieures ont indiqué que les étudiantes avaient la possibilité de choisir le domaine de la violence comme sujet de thèse dans la mesure où la surveillance de thèse pouvait être assurée par des membres du corps enseignant. Ils ont aussi déclaré que le sujet de la violence, surtout en ce qu’il a trait à la pédiatrie, à la psychiatrie et à la gérontologie, était intégré à leurs programmes d’enseignement du premier cycle. Une école a signalé que des étudiantes avaient réalisé une étude (Theriault, 1995) sur leurs expériences

personnelles de la violence et des mauvais traitements dans le cadre de leur programme d’études. De plus, les réponses fournies par les doyens et les directeurs révèlent une légère augmentation de la place faite à la violence dans les programmes d’enseignement du premier cycle au cours des dernières années. Toutes les écoles offrent aux étudiantes la possibilité de s’intéresser à la violence infligée aux femmes, aux enfants et aux personnes âgées comme sujet d’étude. Lorsque des membres du corps enseignant peuvent assurer la surveillance, les étudiantes des 2e et 3e cycles peuvent également axer leurs études et leurs recherches sur le domaine de la violence faite aux femmes, aux enfants et aux personnes âgées.

Élaboration de programmes

Questions théoriques et contextuelles

Les fondements théoriques de la violence faite aux femmes, aux enfants et aux personnes âgées a suscité énormément de discussions (Hoff, 1994). La démarche utilisée dans bon nombre de publications consiste à situer la violence dans le contexte d’actes sociaux lourds de conséquences pour la santé individuelle et publique, dont les auteurs sont jugés moralement responsables. Ce point de vue repose sur le postulat que la violence est un comportement acquis dans un milieu où règnent des inégalités sociales fondées sur l’âge, l’appartenance ethnique et le sexe. Le recours à la force physique et psychologique semble la principale méthode utilisée pour résoudre les conflits. S’il existe dans la littérature de nombreuses allusions à la violence familiale, il faut faire preuve de prudence lorsqu’on utilise cette expression qui masque les racines socio-culturelles de la violence, lesquelles débordent le cadre de la famille. Ces racines, on peut le constater, sont profondément ancrées dans les valeurs culturelles et les structures sociales traditionnelles qui privent les femmes et les personnes âgées de leur pouvoir d’agir (Hoff et Ross, 1994; Ross et Hoff, 1995).

L’expression « violence familiale » ne rend pas non plus compte de la violence exercée par les professionnels de la santé à l’intérieur et en dehors des établissements. De même, une bonne partie de la littérature fait allusion aux «victimes » de violence, plutôt qu’aux «survivants », terme qui véhicule davantage la notion de liberté d’action (Hoff, 2001).

Il semblerait également que les démarches pédagogiques qui insistent sur les principes des soins de santé primaire permettent d’ancrer l’exercice de la profession infirmière dans les réalités et les dimensions complexes de l’expérience vécue par les survivants (Ross et Hoff, 1995). Au nombre de ces principes figurent la participation maximale à la détermination des besoins des survivants, la prise de décisions concernant les types de services les mieux adaptés à ces besoins et l’accès à des services adaptés aux besoins, conviviaux et rentables.

Il faudrait aussi mettre au point des démarches pédagogiques qui transcendent les modèles traditionnels et qui améliorent les possibilités des survivants d’exercer un pouvoir accru sur leur situation et, de ce fait même, de bénéficier d’une meilleure qualité de vie. Selon Campbell (1992; 1998), l’accent mis sur les principes de la défense d’intérêts, de l’association, de l’esprit critique et de la transformation aidera à faire en sorte que les infirmières soient en mesure de dispenser aux survivants des soins axés sur l’habilitation et l’émancipation. Woodtli et Breslin (1996) et Woodtli (2000) préconisent l’emploi d’un modèle écologique de promotion de la santé comme assise théorique de programmes de formation des infirmières dans le domaine de la violence domestique. Ce genre de modèle permet d’intervenir auprès des individus, dans les relations interpersonnelles, dans les établissements, dans la collectivité et au niveau des politiques publiques. En outre, il est indispensable d’améliorer le recours à la

technologie et à la collaboration interdisciplinaire et intersectorielle. Le défi que doivent relever les éducateurs en sciences infirmières consiste à élaborer des programmes d’enseignement qui tiennent compte des réalités sociales et politiques des survivants et à employer des démarches qui permettent de sensibiliser systématiquement les futures infirmières et les infirmières en poste à ces réalités.

Caractéristiques clés de la formation professionnelle

La formation en sciences infirmières intègre des caractéristiques qui jouent un rôle clé dans le processus d’enseignement et d’apprentissage, notamment l’importance primordiale de l’apprentissage par l’expérience et l’intégration d’éléments empruntés à diverses disciplines (Ross et Hoff, 1995). Ces caractéristiques définissent le cadre de l’élaboration et de la mise en œuvre des programmes d’enseignement.

Importance primordiale de l’apprentissage par l’expérience

Les sciences infirmières sont une discipline appliquée. Bon nombre des connaissances associées aux soins infirmiers découlent de l’interaction avec des individus, des familles et des groupes dans des établissements et des cadres communautaires divers. Ces connaissances, qui prennent racine dans la pratique, s’accumulent au fil du temps, avec l’exercice d’une discipline appliquée (Benner, 1984; Ross et Hoff, 1995). Les étudiantes rencontrent des patients et des clients; elles prennent des décisions et entreprennent des tâches et des interventions sous la surveillance de spécialistes de l’éducation et de la profession. Elles acquièrent une expertise en vérifiant et en peaufinant des théories, des hypothèses et des prédictions fondées sur des principes, dans un cadre réel. Dans un tel contexte d’apprentissage par l’expérience, il est indispensable que les étudiantes aient la possibilité d’acquérir la culture du milieu clinique et d’avoir des rapports avec d’autres infirmières et professionnels de la santé. Il est aussi essentiel que les expériences cliniques choisies pour les étudiantes mettent en évidence les concepts que celles-ci sont censées acquérir, et qu’elles se voient offrir la possibilité de vérifier dans la pratique leurs connaissances et leurs compétences relatives à ces concepts.

En ce qui a trait à la violence, il est important que les étudiantes aient la possibilité de rencontrer dans leur cadre de travail des femmes et des enfants qui vivent des situations de violence ou qui sont à risque. Ce genre de rencontre ne devrait pas se dérouler uniquement dans des établissements de soins traditionnels, mais aussi dans le milieu familial, les centres d’aide, les foyers d’accueil pour femmes battues, etc.

Urbancic, Campbell et Humphreys (1993) ont décrit un stage clinique au cours duquel les étudiantes ont été placées dans des foyers d’accueil pour femmes battues, ce qui leur a permis de remplir des fonctions diverses, notamment la défense d’intérêts, le counselling, la prise en charge de cas et l’éducation sanitaire, et de s’intéresser aux grandes questions liées à la vie quotidienne. Les auteures ont conclu qu’une telle expérience offre aux étudiantes l’occasion de mieux se renseigner sur la violence interpersonnelle et d’améliorer leur aptitude à habiliter les gens et à faire preuve de compassion.

Les éducateurs devraient aussi inviter en classe des survivants qui veulent et peuvent partager leur expérience pour que les étudiantes puissent acquérir des connaissances directes sur la dynamique et les effets traumatisants de la violence (Brandt, 1997). Il importe en outre que les éducateurs se servent de ressources tels que les vidéos, les films et le matériel conçu pour l’auto-apprentissage, que l’on trouve de plus en plus facilement sur le marché.

Intégration de concepts empruntés à diverses disciplines

On trouve dans certaines publications l’idée selon laquelle le programme d’enseignement infirmier ne devrait pas être autonome, mais que des connaissances sur la violence devraient être mises à profit dans les cours et les expériences cliniques, surtout ceux qui ont trait à la santé mentale, aux soins primaires, à la santé communautaire, aux soins d’urgence et à la santé des femmes, des enfants et des personnes âgées (Brandt, 1997). Autrement dit, les étudiantes intègrent au programme d’enseignement des connaissances issues des sciences biomédicales et psychosociales ainsi que des arts et des sciences humaines. Elles mettent aussi à contribution divers niveaux d’expertise professionnelle et d’analyse critique.

L’apprentissage des étudiantes est facilité par des pairs, des enseignants et des intervenants en santé qui les aident à travailler et à collaborer avec d’autres dans la prestation de soins. Tout au cours du programme d’apprentissage, on fait appel à certains cours, connaissances ou concepts empruntés à d’autres disciplines qui s’appliquent aux dimensions de la profession étudiées à un stade précis de l’apprentissage.

Bien que l’examen de toutes les connaissances dont a besoin l’infirmière pour bien intervenir auprès des survivants déborderait le cadre de la présente étude, il faut préciser que si elles ne sont pas sensibilisées à la problématique homme-femme et informées des répercussions de la violence sur la santé et la société, les étudiantes seront très désavantagées dans l’exercice de leur profession. Enfin, comme aucune discipline ne permet à elle seule de résoudre tous les problèmes des femmes, des enfants et des personnes âgées maltraités et de répondre à tous leurs besoins, il importe d’intégrer les principes de l’interdisciplinarité aux programmes d’enseignement axés sur la prévention, la détection et la prise en charge de la violence.

Éléments de l’élaboration des programmes

Élaboration d’un cadre conceptuel

La conception d’un programme d’enseignement comporte l’élaboration d’un cadre qui permette de faire le lien entre des sujets, des études empiriques et des explications théoriques disparates. Le défi consiste à réunir des domaines où les degrés d’abstraction et les niveaux d’analyse et de complexité théorique et pratique diffèrent. Ross et Hoff (1995) préconisent un cadre éclectique et interdisciplinaire, qui table sur des concepts empruntés à la croissance personnelle, à l’analyse socioculturelle, à la théorie des crises, à la victimologie, à la recherche sur les événements de la vie et à la sociologie de la condition féminine. Un tel cadre permet de faire en sorte qu’une démarche théorique cohérente soit appliquée même si le contenu du programme est essentiellement dynamique et en constante évolution. De plus, selon Ross et Hoff, un cadre intégré permet de voir à ce que les questions ne soient pas abordées exclusivement dans des perspectives plus traditionnelles, comme les modèles axés sur la pathologie, qui situent la violence principalement dans le contexte d’un dysfonctionnement de la personnalité. En outre, ces auteures sont d’avis que les professionnels de la santé ne peuvent bien comprendre et prendre en charge la violence s’ils ne tiennent pas compte de facteurs sociologiques et politiques tels qu’une longévité accrue, des mouvements migratoires fréquents touchant de vastes régions géographiques, la pauvreté, la discrimination fondée sur l’âge, l’inégalité d’accès aux soins et d’autres réalités sociales et politiques.

Détermination du contenu obligatoire

Le contenu d’un programme d’enseignement infirmier axé sur la prévention, la détection et la prise en charge de la violence doit être établi à la lumière des principes suivants : pertinence, applicabilité, intégration et diversité.

Pertinence

Les infirmières évoluent dans un monde pragmatique. Les concepts leur sont utiles dans la mesure où ils les guident dans l’exercice de leur profession et ont une incidence sur les soins infirmiers. Si des concepts théoriques contribuent à la connaissance d’un phénomène, les concepts pragmatiques facilitent l’application des connaissances.

Applicabilité

Il importe de présenter les concepts de manière à bien faire ressortir leur application pratique.

Intégration

Il importe de faire le lien entre les concepts relatifs à la violence et d’autres concepts empruntés au domaine biomédical, aux sciences psychosociales et aux sciences humaines.

Diversité

L’enseignement infirmier se donne dans divers cadres et à des niveaux différents (formation préalable et formation continue). C’est pourquoi il importe, lorsqu’on élabore des programmes d’enseignement, d’y intégrer des concepts, des méthodes et des ressources qui ont une utilité pour divers programmes et niveaux de pratique.

Contenu obligatoire

Un programme d’études de base comprend des cours ou des modules d’apprentissage obligatoires pour toutes les étudiantes qui obtiennent un diplôme d’un établissement d’enseignement, sans lesquels les exigences scolaires ne seraient pas remplies. Un tel apprentissage suppose l’acquisition de connaissances, d’attitudes et de compétences à divers niveaux de la formation (Ross et Hoff, 1995; Brandt, 1997).

Connaissances

On dénombre deux grandes catégories de concepts essentiels que doivent maîtriser les infirmières : 1) les concepts qui concernent spécifiquement la prévention, la détection et la prise en charge de la violence et les répercussions physiques et psychologiques de la violence et 2) les concepts relatifs à la violence qui ont déjà été abordés dans le programme d’études, mais qui doivent être développés de manière plus approfondie pour qu’ils puissent s’appliquer à la prévention, à la détection et à la prise en charge de la violence. Ainsi, bien qu’ils ne s’appliquent pas exclusivement aux personnes ayant subi de la violence, les concepts tels que le stress, le traumatisme, la prévention primaire, les situations de crise, le changement social et la diversité culturelle, sont utiles à une intervention auprès de cette population. Les concepts liés aux fondements théoriques de l’état de santé et de la prestation de services de santé jouent également un rôle clé : le phénomène, l’incidence et le contexte socio-culturel de la violence; la prévention et la protection; et les questions liées à la pratique clinique.

Le phénomène, l’incidence et le contexte socio-culturel de la violence

La prise en compte de données épidémiologiques et démographiques concernant la violence et la victimisation, comme l’âge, le sexe, la catégorie sociale, la race, l’identité sexuelle, la capacité ou l’incapacité physique, le statut d’immigrant et le secteur géographique, est essentielle à une compréhension de toutes les dimensions de la violence. Il est aussi indispensable que les étudiantes apprennent à établir le lien entre la violence et les écarts entre les revenus et d’autres désavantages fondés entre autres sur l’âge, l’origine ethnique et les rapports entre les sexes. Pour qu’elles puissent situer la violence dans le contexte général des rapports de pouvoir qui sont à la base des situations de violence, il faut que les étudiantes connaissent la dynamique familiale, la théorie des rôles, les stéréotypes sexuels et les rapports de force, notamment dans une perspective féministe et selon la théorie du changement social. Il importe aussi qu’elles comprennent les concepts rattachés au multiculturalisme, au relativisme culturel et à la variabilité des tendances observées d’une culture à l’autre sur les plans de la violence, de la victimisation et du rétablissement pour qu’elles puissent intervenir de manière efficace dans des situations différentes de celles auxquelles sont généralement confrontées les infirmières dans leurs études et dans l’exercice de leur profession. La stigmatisation, les préjugés et leur possible contribution à l’instauration d’un climat de violence sont aussi des facteurs importants qui doivent être intégrés à l’acquisition des connaissances nécessaires à la compréhension du contexte socioculturel de la violence.

Prévention de la violence

Il est indispensable que les infirmières connaissent les principes de la prévention primaire, secondaire et tertiaire pour être en mesure de prévenir la violence, de protéger les gens contre ce phénomène et de bien intervenir auprès des personnes ayant subi des mauvais traitements. En outre, il est essentiel qu’elles soient bien renseignées sur les grandes questions éthiques et juridiques (formes de protection prévues par la loi, limites des restrictions légales, déclaration obligatoire, devoir de mise en garde, droits et responsabilités des défendeurs) qui servent d’assises à une intervention en soins de santé, axée sur la prévention et la réduction de la violence.

Concepts cliniques

La prévention de la violence et la prise en charge de situations de violence supposent une compréhension de la dynamique de la violence, notamment de ses ramifications sociales, culturelles, économiques, psychologiques, comportementales et biophysiques. Elles exigent en outre une compréhension des liens entre la violence et la victimisation associées aux toxicomanies, à l’état de santé physique, à la dépression, au risque suicidaire et à d’autres troubles de santé mentale. Il importe que les étudiantes en sciences infirmières mesurent l’expérience du stress traumatique et ses répercussions sur l’estime de soi, la santé et le bien-être. Il faut aussi qu’elles soient renseignées sur les critères qui servent à reconnaître les survivants aux points d’accès aux services de santé et aux services sociaux (triage) et à évaluer les traumatismes associés à la victimisation, notamment la possibilité que les épisodes de violence évoluent vers l’homicide. De plus, une intervention pertinente auprès des survivants passe nécessairement par une connaissance de la théorie qui sous-tend l’intervention d’urgence et les stratégies de soutien social conçues pour les survivants, les familles et les agresseurs (Hoff, 2001).

Attitudes

Il est important que les éducateurs ne se contentent pas d’enseigner des faits, mais qu’ils s’attaquent aux attitudes. S’il l’on s’attend à ce que les étudiantes en sciences infirmières préviennent la violence et interviennent auprès des survivants, il faut commencer par leur offrir, dans le cadre de leur formation, des possibilités d’apprentissage en matière de croissance humaine et personnelle. Il est aussi important de les sensibiliser aux idées politiques et sociales qui dévalorisent les femmes, les enfants et les personnes âgées. Comme d’autres membres de la société, les infirmières peuvent être influencées par des valeurs sociales dominantes qui ont toujours accentué les difficultés des survivants. C’est pourquoi une réflexion sur les valeurs individuelles et sociales doit nécessairement faire partie de la formation des infirmières qui ont un rôle à jouer auprès des survivants (Hoff, 1994).

Un deuxième facteur important c’est la reconnaissance par les membres du corps enseignant que le point de vue que l’on a toujours adopté jusqu’ici, et qui présume de l’objectivité ou de la neutralité des professionnels face à des questions comme la violence, n’est plus valable. Il ressort clairement d’analyses féministes et multiculturelles que les scientifiques et les infirmières ne sont pas imperméables aux valeurs de la culture dans laquelle ils vivent, enseignent et exercent leur profession (Hoff, 2001). Il est important de reconnaître que les valeurs et l’idéologie ont une incidence non seulement sur l’exercice de la profession infirmière, mais aussi sur la violence que l’on observe dans la société en général. Une enquête menée auprès des écoles de sciences infirmières de l’Ontario (Hoff et Ross, 1995) a mis en évidence le défi que représente une réflexion sur les attitudes et les valeurs relatives à la violence. Elle établit des parallèles entre les sujets abordés dans l’enseignement infirmier et les réactions de la société face à la violence. En comparaison de la violence faite aux enfants et aux femmes, la violence infligée aux personnes âgées était le sujet le plus négligé, et le seul à avoir été exploré par plus d’un répondant uniquement par le biais de lectures, plutôt que dans le cadre d’un cours ou d’un programme structuré. Les auteures ont conclu que le plus grand défi qui attend à la fois les enseignants et les étudiantes, c’est non pas l’aspect de la formation qui a trait aux connaissances et aux compétences, mais celui qui concerne les attitudes, qui nécessite une remise en question fondamentale des valeurs profondément ancrées.

Compétences

Au nombre des compétences essentielles à l’application de stratégies d’intervention auprès des survivants figurent les techniques d’intervention en situation de crise, soit la détection, l’évaluation (des traumatismes liés à la victimisation, le risque suicidaire, la violence envers d’autres personnes, etc.), la planification, la mise en œuvre et l’évaluation (Hoff et Adamowski, 1998). Parmi les autres compétences nécessaires, on pourrait citer la communication par l’écoute active, une intervention discrète et empathique, et la capacité d’offrir une orientation et des conseils judicieux. Il est important que les infirmières possèdent d’autres compétences, entre autres la capacité :

  • d’apprendre aux gens à reconnaître les symptômes du stress
  • d’apprendre aux survivants à évaluer les cas d’agression/de violence
  • d’apprendre à la personne à nommer le problème et sa source, et à éviter l’autoculpabilisation.

Il est aussi primordial que les étudiantes en sciences infirmières apprennent à informer les survivants de leurs droits fondamentaux età les mettre en contact avec les ressources juridiques qui les aideront à éviter de redevenir des victimes. Elles doivent apprendre à bien mobiliser les ressources juridiques et communautaires et les formes de protection nécessaires (comme régler les formalités d’admission à un refuge, trouver des traducteurs pour les immigrants, offrir du soutien aux dispensateurs de soins). Il importe aussi qu’elles aient les compétences voulues pour mettre en œuvre les politiques des organismes concernant l’obligation de signalement et la tenue de dossiers exacts, pour que ces éléments d’information ne puissent être utilisés contre les survivants mais qu’ils leur soient utiles plus tard dans le cadre de poursuites. Les étudiantes doivent aussi apprendre à utiliser le processus de consultation, autrement dit, savoir à qui s’adresser dans tel type de circonstances et le faire. Enfin, les infirmières doivent posséder d’autres compétences comme apprendre à suivre les différentes étapes de la gestion de crises et à assurer un suivi auprès des cas sans juger la victime ni lui imposer leurs valeurs, mettre en œuvre des stratégies de promotion de la santé et de prévention de la maladie et collaborer avec des organismes communautaires.

Niveaux de scolarité

Il existe de nombreux niveaux de formation en sciences infirmières. La littérature donne certaines indications concernant la formation à offrir aux infirmières et à d’autres intervenants en santé, adaptés à différents niveaux d’intervention. Hoff (1994) offre des conseils relatifs à la planification de cours et de séminaires. Elle divise le contenu global des études que doivent suivre les intervenants en santé pour posséder les connaissances et les compétences voulues en trois niveaux de formation professionnelle : débutant, intermédiaire et avancé. Au niveau débutant, l’accent est mis sur la description des comportements individuels et des exigences relatives au rôle de l’étudiante, ainsi que sur la prévention primaire. La formation vise à présenter à l’étudiante le sujet de la violence et à la sensibiliser à ce problème de manière à éviter de l’accabler, mais à véhiculer le message qu’elle a un rôle important à jouer dans la prévention de la violence. Au niveau intermédiaire, la formation insiste sur l’analyse, l’application clinique de stratégies et une analyse critique du rendement en milieu clinique à la lumière des principes décrits dans la littérature. Il s’agit d’amener l’étudiante à comprendre et à appliquer des stratégies d’évaluation et d’intervention dans divers cadres cliniques. L’idée sous-jacente ici, c’est que les étudiantes ne rencontreront pas tous les types de survivants, qu’elles acquerront les stratégies de base dans le cadre de leurs propres recherches et études et d’autres expériences d’apprentissage. Au niveau avancé, l’accent est mis sur la synthèse des concepts et le perfectionnement des compétences acquises aux niveaux de formation antérieurs. On part ici du principe que les étudiantes ont saisi les concepts essentiels de l’intervention d’urgence et du traitement des survivants et qu’elles ont prévu des occasions de travailler auprès de personnes confrontées à des situations de violence ou susceptibles de l’être.

Brandt (1997) préconise différents niveaux de formation adaptés aux différents niveaux d’intervention : soins infirmiers généraux, soins infirmiers en milieu clinique, soins infirmiers spécialisés, counselling, recherche et éducation. L’auteur décrit les objectifs généraux et spécifiques des cours adaptés aux différents niveaux d’intervention. Un cours de base sur les soins généraux met l’accent sur l’acquisition d’attitudes, de connaissances et de compétences de base nécessaires au dépistage, au diagnostic et à l’aiguillage des cas. Un cours intermédiaire axé sur les soins spécialisés, insiste sur une évaluation et une prise en charge complètes, ciblées et spécialisées des survivants. Les

facteurs qui nuisent à l’exercice de la profession y sont abordés, tout comme les aspects juridiques des soins. Un cours de niveau avancé porte essentiellement sur la recherche et l’enseignement relatifs à la violence et sur les compétences nécessaires au counselling.

Selon Woodtli (2000), la formation des étudiantes en sciences infirmières dans le domaine de la violence familiale devrait commencer par insister sur la dimension interpersonnelle (les émotions). Elle considère qu’il est essentiel d’explorer les attitudes face à la violence familiale pour aider les étudiantes à reconnaître leurs propres attitudes et à comprendre les valeurs et les croyances qui les sous-tendent. Une formation qui table sur la dimension interpersonnelle met l’accent sur les interventions fondées sur des théories, notamment, la divulgation de renseignements concernant des cas de violence familiale de nature délicate. Cette auteure s’est aussi intéressée à l’acquisition de connaissances et de compétences générales et spécifiques. Toutes les infirmières doivent appliquer des connaissances et des compétences générales à n’importe quelle situation; quant aux connaissances et aux compétences spécifiques, elles sont utiles aux infirmières face à des cas particuliers de violence domestique.

Interdisciplinarité

La plupart des spécialistes du domaine de la violence s’entendent sur la nécessité d’adopter une démarche interdisciplinaire en prévention de la violence et dans le cadre de programmes de traitement conçus pour les personnes ayant besoin de soins (Hoff, 1994, 2001; Ross et Hoff, 1995; Woodtli, 2000). Un tel point de vue ne se reflète pas toujours dans la pratique. De plus, en règle générale, les professions de la santé s’occupent chacune de son côté d’élaborer et de mettre en œuvre des programmes d’enseignement même s’il existe de nombreux dénominateurs communs entre les connaissances, les attitudes et les compétences propres à chaque discipline (Brandt, 1997). Il est possible que cette démarche soit concluante dans certaines situations d’apprentissage, mais pas dans le domaine de la violence. D’autres auteurs ont décrit les difficultés posées par la création de programmes de formation interdisciplinaire (Byrne, 1991; Hanvey et Rowe, 1997). Une analyse détaillée de la littérature traitant de la formation interdisciplinaire d’infirmières et d’autres professionnels de la santé déborderait le cadre de notre étude; par contre, nous rendrons compte des résultats d’une étude réalisée au Canada auprès de cinq centres de sciences de la santé. Voici ce qui ressort des résultats de cette étude menée par Ross et ses collaborateurs (2000) :

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la majorité des étudiants ayant répondu à l’enquête (78 %) ont indiqué que la question de l’interdisciplinarité de la démarche de travail est abordée dans leur programme d’études;
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les deux-tiers des étudiantes en sciences infirmières (66 %) et plus de la moitié des étudiants en médecine (60 %) ont affirmé que leur programme d’études font une place à cette question;
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une plus forte proportion d’étudiants en santé bucco-dentaire (85 %), en pharmacie (92 %) et en réadaptation (92 %) ont fait une déclaration semblable.

Même si ces constats sont encourageants, les heures consacrées à ce genre de contenu étaient peu nombreuses. Seule une minorité de répondants (41 %) ont fait état de plus de quatre heures d’enseignement; les autres ont estimé ce nombre à trois (12 %), deux (13 %) ou un (9 %). Neuf pour cent ont déclaré que c’est uniquement par les lectures qu’ils abordaient les questions liées à l’interdisciplinarité de la méthode de travail. Le contenu des programmes était essentiellement didactique et englobait des questions telles que la structure des équipes, le travail d’équipe, les valeurs de la discipline, la résolution de conflits et le règlement de problèmes à l’intérieur des groupes. Les étudiants se voient offrir peu d’occasions de mettre à l’épreuve leurs connaissances et leurs compétences dans un cadre réel, avec la collaboration de professionnels de la santé issus d’autres disciplines.

Les travaux de Laschinger et Weston (1995) peuvent orienter les éducateurs en sciences infirmières qui cherchent à faire en sorte que les étudiantes puissent travailler de concert avec d’autres intervenants en santé et en services sociaux. Ils montrent que la collaboration suppose de multiples capacités d’interaction, notamment des aptitudes avancées en communication, une habileté particulière en négociation et une connaissance approfondie de la forme et de la raison d’être des disciplines professionnelles. En outre, Weilichowski et ses collaborateurs (1999) ont décrit un modèle de collaboration en enseignement infirmier et en formation médicale dans le contexte de la violence familiale, qui offre des exemples précis d’objectifs de programmes et de méthodes d’enseignement.

Antécédents personnels des étudiantes

Étant donné la forte incidence de la violence physique et de l’agression sexuelle dans la population féminine en général (Statistique Canada, 1993) et puisque les étudiants en sciences infirmières sont majoritairement de sexe féminin, il est logique d’en déduire qu’il existe des cas d’agression parmi les étudiantes et les membres du corps enseignant. De plus, il est possible que certaines soient aux prises avec ce genre de situation pendant que se déroule la formation. Si le traumatisme associé à la violence n’a pas été surmonté, le contenu parfois dérangeant du cours peut susciter des réactions imprévues. Les facteurs qui peuvent nuire à la capacité d’intervention de ces personnes auprès des survivants peuvent alors faire surface. Au tout début de leur formation, les étudiantes en sciences infirmières devraient être mises en garde contre le caractère potentiellement dérangeant de certains sujets comme la violence et ses possibles répercussions sur leur propre situation de vie. Une telle mise en garde pourrait les inciter à consulter un professionnel afin de régler des problèmes non résolus. En cas d’échec d’une telle démarche, il convient que les membres du corps enseignant interviennent auprès des étudiantes désemparées et les orientent vers un professionnel.

Une récente étude (Theriault, 1995) a mis en lumière les situations de violence et d’agression vécues par les étudiantes en sciences infirmières dans les écoles de sciences infirmières des quatre coins du Canada. Les répondantes ont décrit un milieu où les attentes sont élevées, l’individu se sent impuissant, a une faible estime de soi, doute de sa compétence clinique et entretient des rapports éloignés avec les enseignants, autant de facteurs qui contribuent à son impression de vulnérabilité. Un certain nombre de changements à apporter au programme d’enseignement sont recommandés dans l’étude, entre autres, renforcer l’estime de soi des étudiantes, améliorer les liens entre les étudiantes, les enseignants et les précepteurs et instaurer un cadre propice à l’apprentissage clinique.

Violence en milieu de travail

La violence est un problème qui concerne aussi bien les infirmières que les patients. Selon les études, la violence dirigée vers les intervenants en santé, y compris les infirmières et les étudiantes en sciences infirmières, est un problème endémique, considéré comme un risque professionnel (Calvert, 1996; Whitly, Jacobson et Gawrys, 1996). Une récente étude concernant la violence vécue par des infirmières pendant qu’elles travaillaient dans des hôpitaux de la Colombie-Britannique et de l’Alberta (Duncan, Estabrooks et Reimer, 2000) révèle que près de la moitié (46 %) de toutes les infirmières avaient éprouvé au moins une forme de violence au cours de leurs cinq derniers quarts de travail. Une proportion inquiétante, soit 70 %, n’avait pas signalé l’incident. La violence psychologique (37,6 %), les menaces d’agression (19 %) et la violence physique (18,1 %) étaient les principales formes de violence subies par les infirmières. Dans la vaste majorité des cas, les auteurs étaient des patients, mais les médecins et les collègues étaient aussi cités comme des sources importantes de violence psychologique.

La majeure partie de la littérature qui traite de la violence en milieu de travail met l’accent sur les soins psychiatriques, les soins d’urgence, les soins de longue durée et les soins à domicile (Brown, 1998; Featherstone, 1999; Lewis et Dehn, 1999; Rice, 1998; Rose, 1997; Fédération des infirmières et infirmiers du Québec, 1995). Plus ça va, plus la sécurité des infirmières et des étudiantes en sciences infirmières est perçue comme un problème critique pour la profession (Whitly, Jacobson et Gawrys, 1996). Ces auteurs ont entrepris une analyse de la littérature qui traite de l’incidence de la violence infligée aux infirmières, des facteurs qui sont liés à l’apparition de la violence, de la prise en charge de la violence dans des situations potentiellement dangereuses et des effets de la violence sur les infirmières.

Selon une enquête sur la violence en milieu de travail réalisée par Williams (1995), 64 % des infirmières autorisées ont déclaré des antécédents personnels de harcèlement de nature sexuelle. Les agresseurs étaient le plus souvent des patients (72,8 %), suivis des médecins (57,9 %). Ce sont les infirmières qui travaillaient dans le secteur des soins communautaires et des soins à domicile (64,7 %) et de la santé au travail (60,7 %) quiétaient le plus souvent agressées. Dans le milieu hospitalier, les agressions avaient surtout lieu dans la salle d’opération, dans l’aire réservée aux soins médicaux-chirurgicaux et dans la salle d’urgence. Environ le tiers de celles qui ont été agressées sexuellement ont aussi été physiquement maltraitées. Moins de 40 % (38,5 %) des répondantes savaient que leur employeur appliquait une politique relative aux agressions sexuelles; environ la moitié (47,6 %) n’en étaient pas sûres. L’auteure a conclu qu’il est nécessaire d’élaborer des programmes de formation qui aideront les infirmières à réagir aux problèmes de violence et d’agression sexuelle vécus dans le milieu de travail.

Dans un énoncé de politique (1996), l’Association des infirmières et infirmiers du Canada invite les infirmières à accroître leurs connaissances et leurs compétences dans le domaine de la violence pour être en mesure d’y réagir de manière proactive en refusant de tolérer la violence et le harcèlement. Selon l’énoncé, il est important de pouvoir évaluer les situations qui pourraient dégénérer en violence et de désamorcer ou de prendre en charge des situations qui se dégradent. Il faut aussi que les infirmières soient renseignées sur les politiques appliquées dans l’établissement et, s’il n’en existe pas, elles doivent pouvoir en élaborer de concert avec le personnel administratif. L’Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario a par la suite conçu un outil d’apprentissage à l’intention des infirmières, intitulé Mauvais traitements infligés au personnel infirmier : Guide de prévention et de gestion (1999).

Les infirmières commettent aussi des actes de violence. D’après un sondage réalisé en 1997 par l’Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario auprès de 1 000 infirmières, 48 % avaient été témoins d’au moins un cas de violence infligée à un patient au cours des trois années précédant l’enquête, et 11 % avaient eu connaissance d’au moins un incident de ce genre. Les remarques humiliantes ou les propos blessants, la brutalité ou les cris et les jurons constituent les formes de violence les plus répandues. L’Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario a récemment mis à jour un programme d’apprentissage qui a généralement reçu un accueil très favorable. Il s’intitule Un, c’est un de trop (1999), et vise à prévenir les mauvais traitements infligés aux patients par les infirmières. Des normes de pratique et des lignes directrices déontologiques ont été élaborées par l’Association des infirmières et infirmiers du Canada (1992, 1996) et bien d’autres associations d’infirmières, notamment la Registered Nursing Association of Nova Scotia (1997) et l’Association des infirmières et infirmiers de l’Ontario (1995). Ces publications visent à orienter l’aspect de la formation qui concerne les liens entre l’infirmière et le patient et, par le fait même, elles contribuent à prévenir les relations de violence et à faire en sorte que les rapports entre l’infirmière et le patient soient thérapeutiques et non dommageables.

Mise en œuvre des programmes d’études

Les méthodes d’application des programmes d’études sont variées; elles comprennent aussi bien des cours magistraux que des séminaires conçus pour de petits groupes, des ateliers et des classes dirigées (Ross et Hoff, 1995). La démarche classique consiste à offrir des cours indépendants uniques ou facultatifs. Si une telle méthode semble particulièrement séduisante, les programmes d’études sont déjà surchargés, et la formule comporte des inconvénients pour les étudiantes qui ne possèdent pas les bases théoriques ou pratiques voulues pour maîtriser le thème de la violence dans le cadre d’un cours unique. De plus, le recours aux cours facultatifs ne permet pas de veiller à ce que le thème soit systématiquement abordé auprès de toutes les étudiantes. L’approche de l’enchaînement de l’enseignement (« fil conducteur ») permet d’éliminer certains inconvénients des cours uniques. Toutefois, elle suppose une collaboration entière et une vigilance constante de la part du personnel enseignant si l’on veut éviter de « perdre le fil » à un moment donné (entre le cours individuel et l’enchaînement du programme).

Une série de cours abrégés - approche qui est à mi-chemin entre le cours indépendant unique et l’enchaînement de l’enseignement -met l’accent sur certains aspects de la matière de base (connaissances, attitudes et compétences), sur les niveaux d’intervention (introduction, élaboration et synthèse) et sur le milieu où les soins seront dispensés (communauté, domicile, établissement). Un apprentissage centré sur la résolution de problèmes, stratégie utilisée dans certaines écoles de sciences infirmières, peut présenter le contenu de base sous forme d’études de cas requises. Ces études de cas sont abordées dans de petits groupes, sous la direction de tuteurs, et par le biais de stages cliniques, dans divers milieux. Une telle approche a l’avantage d’être centrée sur l’apprenant et de privilégier l’interaction (Hoff, 1994). En outre, elle se prête bien aux programmes de formation continue et aux cas où le facteur temps compte beaucoup.

L’analyse de cas réels de violence est une autre méthode utilisée pour accroître l’exposition aux problèmes posés par l’évaluation et l’intervention. Les réunions d’étude de cas et les conférences de cas auxquels participent les médecins, les infirmières et d’autres intervenants en santé offrent la possibilité de passer en revue les cas des survivants. Quelle que soit la méthode utilisée, il est essentiel que les étudiantes en sciences infirmières aient accès aux meilleures recherches et au meilleur matériel clinique qui existent sur le sujet.

Il est préférable de recourir aux lignes directrices, à la persuasion et aux incitatifs plutôt qu’aux mandats et aux sanctions pour amener les éducateurs en sciences infirmières à mettre au point des programmes d’apprentissage qui mettent l’accent sur la prévention, la détection et la prise en charge de la violence (Brandt, 1997). Il est aussi indispensable d’obtenir l’appui d’organisations professionnelles clés (l’Association des infirmières et infirmiers du Canada, les associations provinciales d’infirmières, l’Association canadienne des écoles de sciences infirmières, les Collèges d’arts appliqués et de technologie) et le soutien des doyens et des administrateurs si l’on veut faire accepter l’idée de la réforme des programmes d’études (élaboration et mise en œuvre) au sein des écoles de sciences infirmières. Aux États-Unis, l’American Association of Colleges of Nursing (AACN) a publié un document de principe qui vise à aider les éducateurs en sciences infirmières à aborder le thème de la violence dans tous les programmes d’enseignement infirmier (AACN, 1999). Il est aussi recommandé de mettre au point des projets pilotes dans quelques écoles clés où le programme d’enseignement peut être mis à l’essai et amélioré. En outre, il faudrait intégrer le thème de la violence aux examens d’entrée et d’agrément des spécialistes.

Réactions des étudiantes

Le thème de la violence a été négligé dans la formation de nombreuses étudiantes (Theriault, 1995; Sword et coll., 1998). À quelques exceptions près, la littérature renferme peu de descriptions de résultats obtenus par des étudiantes qui suivent des cours sur la prévention, la détection et la prise en charge de la violence. Mandt (1993) décrit la réaction d’une étudiante à un cours sur la violence. Celle-ci a expliqué qu’après le cours, elle n’a plus jamais eu l’impression qu’il ne lui appartenait aucunement de demander directement à une personne si elle avait été battue par un conjoint ou un partenaire. Auparavant, elle pensait tout simplement que si la femme voulait lui en parler, elle le ferait. Ce cours lui a appris qu’il n’en est pas ainsi. Une autre étudiante a parlé des enseignements qu’elle a tirés dans un refuge pour femmes battues. Cette expérience l’a amenée à comprendre que les femmes vivent un deuil et à quel point elles ont de la difficulté à se couper définitivement d’une situation de violence. Elle a pu observer que beaucoup de femmes se sentent totalement désemparées, n’ont pas d’emploi, n’ont aucun moyen de subvenir à leurs besoins et ne considèrent pas qu’elles ont le pouvoir le changer leur situation. Elles ne font que se laisser berner par la promesse que l’homme changera.

Dans une étude sur l’opinion d’étudiantes en sciences infirmières sur la violence interpersonnelle, Kiner (1995) a constaté que les étudiantes ayant des antécédents professionnels en soins de santé s’entendent généralement pour dire que la recherche, l’éducation et les lois pourraient contribuer à réduire la violence, point de vue que ne partageaient cependant pas les étudiantes ne possédant pas de tels antécédents. Sword et ses collaborateurs (1998) signalent que la plupart des étudiantes sont très peu exposées au thème de la violence, surtout de la violence faite aux femmes, dans leur programme d’études. Toutefois, dans les réponses fournies au questionnaire, les étudiantes se sont montrées sympathiques à la cause. Ainsi, il ressort des données recueillies auprès de 155 étudiantes en sciences infirmières (19-55 ans) que celles qui ont une perception plus égalitaire des rôles assignés à chacun des sexes et qui ont un plus grand sentiment de maîtrise sur les événements sont généralement plus sympathiques au sort des femmes battues que les autres.

Recherche

Tilden et ses collaborateurs (1994) ont mené une étude régionale auprès de 1 571 praticiens qui exercent dans six disciplines, notamment en sciences infirmières. Plus du tiers des sujets qu’ils ont interrogés ont dit que le thème de la violence faite aux femmes, aux enfants et aux personnes âgées n’était nullement abordé dans leur programme d’études. Les chercheurs sont parvenus à la conclusion qu’il y a lieu de remédier à cette lacune.

Kingston, Penhale et Bennett (1995) se sont penchés sur la place relative faite à la violence infligée aux enfants, aux conjoints et aux personnes âgées dans les programmes d’enseignement en service social, en sciences infirmières et en médecine. D’après les réponses fournies par les écoles de sciences infirmières, 98 % avaient intégré à leur programme d’enseignement le thème de la violence faite aux enfants, 81 %, celui de la violence faite aux personnes âgées et 60 %, celui de la violence familiale en général. La majorité des membres du corps enseignant (65 %) considérait qu’il était très important d’inclure le sujet de la violence domestique dans le programme d’études. L’éventail des sujets abordés variait d’un programme à l’autre, mais il englobait généralement l’incidence et la prévalence de la violence familiale en général; les indicateurs physiques, sociaux et psychologiques de la violence; les conflits familiaux, les attitudes de la société; l’appartenance ethnique et les mauvais traitements; les stratégies de communication et la politique des autorités sanitaires.

Hoff et Ross (1995) rendent compte des résultats d’une enquête menée auprès d’écoles de sciences infirmières de l’Ontario en vue de déterminer la façon dont le thème de la violence est abordé dans les programmes d’enseignement et les besoins du corps enseignant en matière d’élaboration de programmes. Au total, 93 % desétablissements interrogés ont répondu. Ils ont rendu compte de plusieurs types de programmes : huit programmes au niveau du baccalauréat, 32 programmes menant à un diplôme et trois programmes de maîtrise. Tous les établissements ont signalé que le thème de la violence était abordé dans leur programme d’enseignement, ne serait-ce que dans les lectures. Les trois quarts d’entre eux ont indiqué qu’une formation clinique était prévue dans le cadre de leur programme non pas systématiquement, mais de manière fortuite. La majorité des répondants étaient d’avis que le sujet de la violence n’était pas traité de manière satisfaisante parce que le temps alloué à cette matière était insuffisant, lorsqu’on tenait compte des autres exigences du programme d’enseignement. En outre, ils ont indiqué que le manque d’expertise du corps enseignant dans ce domaine nuisait à l’inclusion du thème de la violence dans le programme d’enseignement. Les auteurs ont aussi mis en lumière plusieurs questions stratégiques qui, selon eux, sont essentielles à l’élaboration du programme d’enseignement, et décrit une série de six ateliers tenus partout en Ontario en vue d’aider les éducateurs en sciences infirmières à aborder systématiquement le sujet de la violence dans le programme de formation des infirmières. Au nombre des participants à l’atelier figuraient des membres du corps enseignant, des précepteurs et des experts en prise en charge des victimes et des survivants, œuvrant en milieu communautaire. De l’avis des auteurs, les ateliers représentent un premier pas en avant dans le sens de l’inclusion du thème de la violence dans les programmes de formation des infirmières.

Woodtli et Breslin (1996) ont réalisé une enquête auprès d’écoles de sciences infirmières des États-Unis pour en savoir plus long sur la place accordée à la violence faite aux femmes, aux enfants et aux personnes âgées dans les programmes d’enseignement et

sur les membres du corps enseignant responsables de l’intégration de ce thème. Cette étude nationale reposait sur un cadre écologique qui mettait l’accent sur les facteurs intrapersonnels, interpersonnels, et sur les facteurs liés aux établissements, aux collectivités et aux politiques publiques. Elle était fondée sur un questionnaire inspiré d’un modèle mis au point par Hoff et Ross (1995), et comprenait 35 questions sur les données démographiques, le contenu des cours et l’élaboration des programmes d’enseignement. Les responsables de 298 (48 %) des programmes visés par l’enquête ont répondu au questionnaire. Il ressort des réponses que la plupart des programmes abordaient le sujet de la violence faite aux femmes, aux enfants et aux personnes âgées; que chaque sujet était présenté en moins de deux heures et que les possibilités de stage clinique étaient essentiellement offertes de manière fortuite. Cinquante-trois pour cent des répondants étaient d’avis que le sujet était bien traité et 68 % ont recommandé la tenue d’ateliers permettant d’aborder les questions posées par l’intégration du sujet de la violence dans le programme d’enseignement. Dans une étude de suivi, Woodtli et Breslin (2002) ont constaté que le dossier de l’intégration du thème de la violence dans le programme de formation en sciences infirmières avait très peu progressé.

Lachapelle et Forest (1997) ont évalué les résultats d’un cours obligatoire sur les aspects sociaux de la violence, offert à l’Université du Québec à Rimouski. Le cours visait à promouvoir un changement d’attitude et à améliorer les capacités d’intervention des infirmières appelées à faire face au problème de la violence domestique. Les résultats ont montré qu’avant de suivre le cours, les infirmières percevaient la violence domestique comme un problème personnel et qu’à mesure que le cours avançait, elles devenaient de plus en plus conscientes de la dimension sociale du problème. Les auteures en ont conclu que la formation dans le domaine de la violence domestique peut contribuer à modifier les perceptions et à aider les infirmières à acquérir les capacités d’intervention nécessaires.

Sword et ses collaborateurs (1998) ont sondé 150 étudiantes en sciences infirmières de l’Université McMaster sur leur niveau d’exposition aux survivants et sur leurs attitudes face à ceux-ci. Les étudiantes ont répondu à deux questionnaires, le « Student Exposure to Woman Abuse Questionnaire » et l’« Inventory of Beliefs about Wife Beating ». Elles ont déclaré avoir été très peu exposées au problème des femmes battues dans le cadre de leur formation structurée, mais qu’elles étaient sensibles à cette question. Les auteurs ont conclu qu’il est important que les étudiantes s’interrogent sur leurs propres attitudes face à la violence infligée aux femmes, et que le programme d’enseignement soit conçu de manière à accroître les connaissances et les compétences dans les domaines précis, notamment la détection, l’intervention et l’aiguillage des cas.

Ross, Hoff et Coutu-Wakulczyk (1998) ont présenté les conclusions d’une enquête nationale réalisée auprès d’écoles de sciences infirmières du Canada (n = 155) en 1995, qui a déterminé la place faite à la violence dans les programmes de formation en sciences infirmières. Le taux de réponse à l’enquête était de 88 %. Dans toutes les écoles de sciences infirmières, le sujet de la violence faite aux femmes et aux enfants et du suicide comme réaction à la violence était abordé en théorie dans le programme d’enseignement, ne serait-ce par le biais des lectures. C’est à la violence faite aux enfants et au suicide qu’ont été consacrées le plus grand nombre d’heures d’enseignement (4,0 heures). Viennent ensuite la violence faite aux femmes (3,6 heures), l’agression sexuelle (3,4 heures) et la violence infligée aux personnes âgées (2,7 heures). Les facultés universitaires de sciences infirmières consacrent au sujet de la violence faite aux femmes plus d’heures d’enseignement (4,8 heures) en comparaison des autres types d’écoles (collèges communautaires : 3,5 heures; cégeps : 3,5 heures; hôpitaux : 3,7 heures). En moyenne, les écoles de l’Ouest canadien et celles du Canada Atlantique offrent plus d’heures d’enseignement sur la violence faite aux femmes (4,3 heures dans chaque cas) par rapport aux établissements des autres régions du Canada (Ontario : 3,5 heures; Québec : 3,1 heures). La majorité des facultés universitaires de sciences infirmières (62 %) offrent une formation pratique dans le domaine de la violence, mais cette possibilité est peu offerte dans les autres types d’établissements d’enseignement. Les auteures ont conclu que si, d’après les réponses fournies, les répondants semblaient conscients de la nécessité d’inclure le thème de la violence dans les programmes d’enseignement, la démarche utilisée sur ce plan était généralement fortuite, et dépendait surtout des intérêts du corps enseignant.

Robinson (1999) a réalisé une série d’entrevues auprès d’étudiantes en sciences infirmières psychiatriques à Londres, en Angleterre, en vue de déterminer la pertinence du contenu des cours sur la prévention et la prise en charge de la violence. D’après les réponses fournies, les étudiantes se sentaient bien préparées d’un point de vue théorique, mais ne possédaient pas les compétences voulues pour faire face à des cas de violence. Elles ont recommandé que l’on fasse une place plus grande au thème de la violence, que les liens entre le milieu de l’enseignement et les dispensateurs de services soient renforcés et que l’on prévoie un stage pratique auprès de survivants, dans un cadre sûr.

Woodtli (2000) a mené des entrevues auprès de 13 informateurs clés afin de définir et de décrire les connaissances et les compétences dont ont besoin les infirmières pour dispenser des soins efficaces et attentionnés dans des cas de violence familiale. Elle insiste sur les répercussions possibles des sentiments des infirmières sur leurs actes et met en doute l’efficacité de leur capacité d’intervention lorsque leur perception des survivants et des agresseurs repose sur des attitudes personnelles défavorables. Les informateurs ont reconnu la nécessité de préparer les étudiantes à adopter une démarche interdisciplinaire; à coordonner et à gérer les soins destinés aux populations vulnérables et à mettre en pratique des normes professionnelles et des exigences relatives à la défense d’intérêts et aux comptes à rendre. Les éléments d’information fournis par les entrevues peuvent constituer un corpus de données empiriques qui servira à l’examen de stratégies de formation et du contenu des programmes d’enseignement actuels, ce qui sera utile à l’élaboration de programmes de formation.

Ross, Hoff et Bunn (2000) ont réalisé une étude auprès de cinq centres de sciences de la santé des quatre coins du Canada afin de déterminer dans quelle mesure le sujet de la prévention, de la détection et de la prise en charge de la violence est intégré aux programmes d’enseignement des futurs dispensateurs de soins de santé. Ils ont également recueilli des données sur les possibilités prévues d’apprentissage d’une démarche interdisciplinaire. Parmi les disciplines visées par l’enquête figuraient les sciences infirmières, la médecine, les sciences de l’activité physique, l’ergothérapie, la physiothérapie, la pharmacie et le service social. Les sciences infirmières ont été très bien cotées en comparaison d’autres disciplines : la majorité des étudiantes en sciences infirmières ont indiqué que les sujets suivants étaient abordés dans leur programme d’études : violence faite aux enfants (77 %), violence faite aux femmes (91 %), violence faite aux personnes âgées (84 %), agression sexuelle (57 %), suicide/comportement autodestructeur (93 %), résolution de conflits (71 %), intervention d’urgence (71 %) et démarche interdisciplinaire (66 %). Seule une faible proportion, cependant, a indiqué qu’une formation clinique était prévue dans ce champ de pratique.

Constat intéressant, il existait un décalage entre les réponses des membres du corps enseignant et celles des étudiantes au sujet de l’inclusion du thème de la violence dans le programme d’enseignement. Par rapport aux étudiantes, les membres du corps enseignant ont systématiquement indiqué que la place faite au thème de la violence était moindre. Il est possible que les enseignants connaissent bien la matière qu’ils intègrent à leurs propres cours, mais pas celle qui est incorporée à d’autres cours faisant partie du programme d’études des étudiantes. De l’avis des auteurs, il est important que les membres du corps enseignant soient parfaitement renseignés au sujet de l’ensemble du programme d’enseignement et de la façon dont leurs cours s’insèrent dans le cadre de l’ensemble. Les résultats de cette étude viennent compléter ceux d’autres études puisqu’ils comprennent des éléments d’information sur des stratégies d’intervention précises, comme l’intervention d’urgence et la résolution de conflits.

Cours, textes et autre matériel éducatif

Cours

Beech (1999) a décrit un programme de formation de trois jours sur l’agression et la violence, offert à toutes les futures infirmières et sages-femmes de la Keele University, au Royaume-Uni. Robinson (1999) a décrit un cours obligatoire sur la violence domestique offert à l’Université du Québec à Rimouski.

Brandt (1997) a élaboré trois cours sur la violence familiale, destinés aux infirmières, aux médecins et aux dentistes. Le cours 101 porte sur un ensemble de connaissances, d’attitudes et de compétences de base que doit maîtriser tout professionnel de la santé au niveau des études du premier cycle, peu importe la profession, la spécialité ou le champ de pratique. Le cours 201 est un cours offert au niveau de l’enseignement universitaire supérieur, en soins primaires et en soins spécialisés. L’accent est mis non plus sur l’acquisition de connaissances, d’attitudes et de compétences de base, mais sur des compétences plus approfondies en diagnostic, en traitement et en orientation. Le cours 301 facilite l’intégration des connaissances, des attitudes et des compétences dont ont besoin les professionnels de la santé qui se spécialiseront ou deviendront des chefs de file, des enseignants et des chercheurs dans le domaine de la violence familiale. L’acquisition d’une démarche interdisciplinaire et les efforts axés sur les politiques publiques sont des éléments clés qui doivent être intégrés à ce stade.

Ireland et Powell (1997) se sont intéressés à un cours d’initiation à la protection de l’enfant, conçu par une école de sciences infirmières et d’obstétrique de la Grande-Bretagne. Ils ont décrit le travail de collaboration qui a mené à la création du cours et fait ressortir ses effets bénéfiques. Le cours a attiré des participants issus de milieux de soins divers; il est réputé être très populaire et est bien coté. Les praticiens qui l’ont suivi déclarent que lorsqu’ils ont réintégré leur milieu de travail, ils étaient davantage sensibilisés au problème de l’enfance maltraitée et étaient plus conscients de la nécessité d’adopter une démarche proactive en matière de protection des enfants.

Mandt (1993) a élaboré un cours sur les soins infirmiers et l’intervention d’urgence auprès des personnes ayant subi de la violence familiale, un cours de formation clinique de niveau supérieur destiné aux personnes qui possèdent déjà un diplôme d’infirmière autorisée. Il met l’accent sur l’intégration de concepts biologiques, psychologiques sociaux et de concepts et principes propres aux sciences infirmières, qui aideraient les infirmières à dispenser des soins aux personnes en période de crise, confrontées à la violence familiale. La partie didactique du cours insiste sur les théories relatives à la violence, au deuil et à l’intervention d’urgence, intégrées à la théorie relative aux soins infirmiers. Les étudiantes ont appliqué ces théories dans divers milieux non traditionnels, comme les refuges pour femmes battues et leurs enfants, les centres d’accueil pour personnes ayant subi des agressions sexuelles et les centres téléphoniques d’aide et d’écoute. Étant donné la forte charge émotive associée au contenu du cours, beaucoup de temps a été consacré aux discussions en groupe. De plus, les étudiantes ont entrepris individuellement un projet de recherche et présenté des exposés sur certains sujets liés à la violence familiale.

Kerr (1992) a décrit l’intégration du thème de la violence infligée aux femmes à un programme d’études de premier cycle à la Capital University. Elle a relevé dix objectifs du programme d’enseignement et décrit deux cours, qui portent sur la croissance et le développement humains et sur les soins infirmiers dans une perspective psychosociale, où est abordé le thème de la violence faite aux femmes. Kerr indique que les milieux cliniques comprennent un département de soins intensifs psychiatriques, des services de consultation externe, comme un refuge pour femmes maltraitées et leurs enfants, un foyer d’hébergement et un centre d’intervention d’urgence pour adolescents fugueurs, et un programme de traitement de la toxicomanie en établissement et à l’externe, axé sur la famille. Parmi les méthodes d’enseignement utilisées figuraient certaines lectures et bandes vidéo, des discussions sur les cas cliniques, des conférences, le jeu de rôle, les inscriptions dans un journal et une visite à un organisme communautaire choisi par l’étudiante. Une évaluation des objectifs du programme a montré à quel point ces objectifs importent pour les expériences et l’apprentissage en classe et en milieu clinique. L’auteure a conclu qu’il est essentiel que les étudiantes en sciences infirmières soient renseignées sur la violence et acquièrent des stratégies d’intervention appropriées car l’infirmière est, dans bien des cas, le premier professionnel de la santé à détecter un cas de violence et à prendre en charge les survivants.

Textes

Parsons et Moore (1997) ont parcouru des ouvrages importants en sciences infirmières, en obstétrique, en gynécologie et en soins primaires afin de déterminer la place faite au sujet de la violence familiale, notamment, la violence conjugale, le viol, l’enfance maltraitée, l’agression sexuelle pendant la grossesse et la violence faite aux personnes âgées. L’étude portait sur 19 ouvrages en sciences infirmières, publiés entre 1990 et 1996. Une cote a été attribuée à l’ouvrage selon la place faite à la violence familiale, la cote maximale étant de 12. Les auteurs ont constaté que 63 % des ouvrages en sciences infirmières faisaient une certaine place à la violence, mais 10 % seulement ont reçu une cote de 9 à 12. Ils ont conclu que l’accès à l’information sur la violence familiale dans les ouvrages en sciences infirmières et dans d’autres disciplines est limité. Il existe néanmoins d’autres moyens d’initier les étudiantes au sujet de la violence. Campbell (1992) propose de recourir aux romans comme moyen d’exposer les étudiantes à la violence avant qu’elles ne soient réellement confrontées à des survivants. Elles peuvent ainsi se renseigner sur le sujet tout en pouvant prendre un certain recul par rapport à celui-ci en refermant le livre au besoin. L’auteure recommande les lectures suivantes : The Color Purple (La couleur pourpre) (Walker, 1984), Beloved (Morrison, 1987), The Handmaid’s Tale (La servante écarlate) (Atwood, 1987) et The Prince of Tides (Le prince des marées) (Conroy, 1988).

L’ouvrage interdisciplinaire de Hoff (2001), publié en plusieurs éditions, aborde la question de la violence dans deux chapitres, dans le cadre d’une intervention d’urgence intégrée. Le cadre théorique de cet ouvrage s’inspire de recherches poussées auprès de femmes battues. Les cas cliniques font ressortir les compétences essentielles que doivent posséder les infirmières et d’autres intervenants pour la prévention, la détection, la prise en charge et le suivi des situations de violence et des situations critiques vécues au cours d’une vie.

Autres ressources

Guide du programme d’études en sciences infirmières :

En 1991, le ministère des Collèges et Universités de l’Ontario a alloué 1,8 million de dollars à des initiatives liées à la prévention de la violence faite aux femmes. L’École des sciences infirmières de l’Université d’Ottawa a réussi à obtenir des fonds dans le cadre de cette initiative pour publier un Guide du programme d’études en sciences infirmières (Hoff et Ross, 1994). Pour la première fois dans l’histoire de l’éducation sanitaire au Canada et à l’étranger, le Guide définit les questions théoriques (stress, conflit, sexe) et pratiques (évaluation, résolution de problèmes, intervention) qui s’appliquent aux soins infirmiers et à la prise en charge des femmes et des enfants battus. Le Guide offre aussi des conseils pour intégrer la victimologie au programme d’enseignement des écoles de sciences infirmières.

Le cadre analytique qui sous-tend le Guide est éclectique et multidisciplinaire et s’inspire de notions tirées de la théorie de la gestion des crises, de la victimologie, du féminisme et de l’analyse socioculturelle. Le Guide fait ressortir de grands concepts empruntés à des disciplines telles que la sociologie, les sciences politiques, les études féministes et l’économie, et les rattache aux cadres d’études en sciences infirmières. Il met en lumière les connaissances, les attitudes et les compétences essentielles que doivent posséder les infirmières pour intervenir de manière efficace et sensible auprès des femmes et des enfants maltraités. Comme la formation en sciences infirmières se donne dans divers cadres, le Guide propose des concepts, des méthodes et des ressources applicables à divers programmes et niveaux de prestation de soins infirmiers, notamment des programmes de formation préalable et continue. Il discute du rôle que peut jouer le personnel infirmier dans la prévention et la prise en charge des victimes et des survivants et de leur famille. Élément primordial, le Guide propose des lignes directrices et des ressources qui aideront les éducateurs en sciences infirmières, tant dans les établissements d’enseignement que dans des milieux cliniques, à traiter du thème de la victimisation et de la violence non plus de façon fortuite, mais de façon systématique, dans les programmes d’enseignement et de formation.

Guide de formation inter-disciplinaire :

Hoff (1994) a élaboré, sous les auspices de Santé Canada et dans le cadre de l’Initiative de lutte contre la violence familiale, un guide interdisciplinaire intitulé Les questions relatives à la violence : Un guide de formation interdisciplinaire à l’intention des professionnelles et des professionnels de la santé. Ce guide étend aux autres disciplines de la santé le contenu du Guide du programme d’études en sciences infirmières (Hoff et Ross, 1993). Le Guide de formation interdisciplinaire met en relief un facteur clé, à savoir que la violence, sous toutes ses formes, et qui sévit dans tous les groupes d’âge, concerne tous les intervenants en santé. Il offre des conseils relatifs aux programmes de formation dans des disciplines de la santé précises, notamment en sciences infirmières, et montre comment les membres d’équipes interdisciplinaires travaillent en collaboration dans l’intérêt des survivants. Il cite des exemples ethnographiques de situations de violence et souligne leurs conséquences sur les programmes d’enseignement. Les stratégies de mise en œuvre concernent la conception de programmes, l’enseignement théorique et les travaux pratiques. Même si le guide est distribué à grande échelle auprès des éducateurs en sciences de la santé de partout au Canada, une étude récente révèle que peu d’enseignants étaient au courant de son existence (Ross et coll., 2000). Parmi ceux qui l’avaient utilisé, la majorité ont affirmé l’avoir trouvé extrêmement utile.

Principles of Effective Anti-violence Education :

Burkell et Ellis (1995) ont décrit l’élaboration de programmes de lutte contre la violence à la lumière de principes qui ont fait leurs preuves. Elles ont passé en revue l’évaluation de programmes de prévention primaire mis en œuvre dans divers domaines, dont la violence faite aux femmes, la toxicomanie, l’agression sexuelle et la promotion de la santé. Les principes généraux soulignés établissent des liens entre les connaissances, les attitudes et les comportements, la pertinence individuelle et les faits empiriques. Les auteures se sont intéressées à la prévention en milieu scolaire, aux programmes mis en œuvre dans les collèges et les universités et aux programmes destinés aux associations de professionnels et à l’intervention dans la collectivité. Voici quelques recommandations concernant l’élaboration de programmes d’enseignement de lutte contre la violence :

-
  
tous les programmes d’enseignement devraient comprendre un volet évaluation;
-
  
les programmes devraient être conçus de manière à répondre de manière optimale aux besoins de chacun;
-
  
le contenu des programmes devrait être adapté au niveau d’intérêt;
-
  
il y aurait lieu de prévoir une formation axée sur l’acquisition d’aptitudes comportementales précises.

Enfin, selon les auteures, les programmes de lutte contre la violence gagneraient à avoir des assises théoriques.

Violence Education: Towards a Solution :

Bien qu’il soit conçu pour les médecins de famille, ce guide (Hendricks-Matthews, 1992) peut orienter les efforts des éducateurs en sciences infirmières et d’autres disciplines de la santé. Il aborde les sujets suivants : problématique homme-femme, femmes battues, hommes auteurs de mauvais traitements, agression sexuelle, adultes ayant subi des actes d’agression sexuelle, agression sexuelle contre les enfants, violence psychologique exercée auprès des enfants, mauvais traitements physiques infligés aux enfants, violence faite aux personnes âgées, homicide chez les Afro-américains, violence exercée contre les gais et les lesbiennes, violence et toxicomanie, violence et sévices corporels, prévention et répercussions psychologiques de l’intervention auprès de survivants. Chaque chapitre offre une analyse de facteurs sociologiques, psychologiques et médicaux importants et des conseils aux médecins concernant l’évaluation et la prise en charge de la violence. Il contient un résumé du chapitre et un guide de formation.

Woman Abuse Curriculum: A Multidisciplinary and Community Based Approach to Knowledge Facilitation for Students in Health Science and Social Work :

Ce document, élaboré en 1994 par le Women’s Health Office, Faculty of Health Sciences, McMaster University, vise à sensibiliser les étudiantes inscrites à des programmes de formation professionnelle aux besoins des femmes agressées par leur partenaire et aux effets que peuvent avoir leurs expériences sur la prestation de services et dans la pratique. Le projet a été mis au point à partir d’expériences réellement vécues par des survivantes et d’évaluations faites de leurs propres besoins, et non pas d’après les idées de professionnels sur la question.

A Case Study for Problem Based Learning :

Cette étude de cas, élaborée par Bishop et Lent (1993) à l’University of Western Ontario, s’inscrit dans le cadre du projet « Educating Future Physicians for Ontario » et visait à intégrer les questions relatives à la santé des femmes au programme de formation médicale du premier cycle. Bien qu’elle ait été conçue pour les médecins, cette étude de cas peut être utile aux infirmières et aux éducateurs en sciences infirmières.

Un, c’est un de trop :

L’Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario (OIIO) a mis au point un programme d’apprentissage qui vise à mieux sensibiliser le personnel infirmier au problème des mauvais traitements infligés aux patients. Le programme insiste sur les signes avant-coureurs de violence et sur l’obligation qu’a l’infirmière d’intervenir lorsqu’elle est témoin d’un cas de violence faite à un patient. Conçu au départ en 1994, lorsque le gouvernement a exigé de tous les ordres de professionnels de la santé qu’ils diffusent auprès de leurs membres de l’information sur la violence, le programme a été révisé en 1999. La nouvelle version tient compte des recherches sur la violence réalisées par l’OIIO et propose un certain nombre d’instruments améliorés que peuvent utiliser les infirmières pour se renseigner sur la violence et pour la prévenir. Elle comprend aussi un nouveau guide qui vise à prévenir les mauvais traitements infligés au personnel infirmier. La trousse d’apprentissage renferme trois éléments : un vidéo, un guide d’animation et un guide d’apprentissage autonome. Le vidéo est un docudrame dans lequel des infirmières et des clients, ainsi que des comédiens, mettent en scène, parfois de manière très bouleversante, des cas véridiques de mauvais traitements. Des infirmières expertes partagent aussi leurs expériences et leurs meilleures pratiques. Le programme a été abondamment utilisé aux quatre coins de l’Ontario et est très réputé auprès des éducateurs comme des infirmières.

Creating Excellence in Crisis Care :

S’inspirant des meilleures pratiques qui existent aux États-Unis et au Canada, Hoff et Adamowski (1998) montrent, à l’aide d’exemples clairs, qu’une démarche holistique, interdisciplinaire et concertée est la meilleure façon de répondre aux enjeux qu’implique une intervention auprès de personnes qui vivent une situation critique. L’ensemble du texte propose un cadre vérifié dans la pratique et une méthode systématique à utiliser pour intégrer le thème des situations de crise (événements critiques de la vie, violence, victimisation, suicide et urgences psychiatriques) à la formation structurée destinée aux professionnels de la santé et des services sociaux. Le livre expose aussi les critères à appliquer pour élaborer des programmes et des protocoles qui tiennent compte des besoins sociaux, psychologiques et médicaux des personnes en détresse.

En plus d’offrir des conseils sur la formation et l’élaboration de programmes, les auteures apportent une contribution unique à la littérature en faisant ressortir le lien entre les événements de la vie normaux, mais générateurs de stress, et les événements catastrophiques comme des troubles psychologiques et mentaux graves, la violence et les sinistres. Elles montrent comment ces éléments d’information peuvent contribuer à la mise au point d’une démarche plus efficace en matière d’intervention d’urgence. Rédigé sous forme de guide destiné aux éducateurs, aux administrateurs, aux superviseurs et aux responsables de la formation clinique, Creating Excellence in Crisis Care renferme une mine de renseignements et de ressources sur un éventail de sujets, notamment la diversité, l’élaboration de politiques, la reconnaissance professionnelle, la collecte de fonds, les normes internationales, le réseautage et bien d’autres questions.

Recommandations d’ordre politique et pratique

Voici les recommandations qui découlent de l’analyse de la littérature qui précède :

1.
  
Les éducateurs en sciences infirmières doivent faire en sorte que toutes leurs étudiantes acquièrent des connaissances et des compétences solides dans le domaine de la prévention, de la détection et de la prise en charge de la violence, ce qui leur permettra d’intervenir de manière sensible et efficace auprès des survivants.
2.
  
Il est important d’adopter, sur les plans de l’enseignement et de l’apprentissage, une démarche systématique qui privilégie des stratégies tant didactiques qu’expérientielles et des méthodes de travail fondées sur des données probantes. En comparaison d’une démarche fortuite ou aléatoire, une démarche systématique se traduira par une meilleure compréhension de la violence et par une prise en charge plus sensible et efficace des survivants.
3.
  
L’instauration d’un milieu propice à l’apprentissage (en particulier, un cadre d’apprentissage clinique où les étudiantes n’hésitent pas à mettre à l’épreuve leurs connaissances et leurs compétences par la pratique) accroîtra l’estime de soi chez les étudiantes et leur assurance dans leur capacité d’intervenir de manière sensible et efficace auprès des survivants.
4.
  
Il est fortement recommandé que les éducateurs explorent la dimension « des émotions » comme point de départ de la formation des infirmières dans le domaine de la prévention, de la détection et de la prise en charge de la violence. Si l’on veut aider les étudiantes à prendre conscience de leurs attitudes face à la violence et à comprendre les valeurs et les croyances sur lesquelles elles reposent, il est essentiel de les amener à engager une réflexion personnelle sur le sujet.
5.
  
L’évolution d’une discipline suppose des assises théoriques solides. À quelques rares exceptions près, la littérature sur la formation des infirmières dans le domaine de la prévention, de la détection et de la prise en charge de la violence fait peu de place à la théorie. Comme les soins infirmiers sont une discipline essentiellement empirique, il est important d’emprunter aux domaines des sciences sociales et humaines, de la victimologie, de l’éthique ainsi que du féminisme et de la théorie critique des concepts qui serviront d’assises théoriques aux programmes de formation et aux activités de recherche.
6.
  
L’état de préparation des membres du corps enseignant est variable. Bon nombre d’éducateurs sont censés dispenser un enseignement dans le domaine de la prévention, de la détection et de la prise en charge de la violence alors que leur expérience de travail auprès des survivants est minimale. Il y a lieu de concevoir des programmes d’enseignement, de former les éducateurs et de tenir des ateliers d’évaluation des programmes à l’intention des membres du corps professoral qui dispensent de l’enseignement et qui offrent des modèles de fonction professionnelle dans ce champ de pratique.
7.
  
Comme l’enseignement infirmier repose sur les connaissances et les aptitudes acquises par l’expérience de travail auprès de clients, la mise à contribution des travailleurs communautaires et des personnes actives dans le domaine de la prévention de la violence aura pour effet d’enrichir le processus d’élaboration et de mise en œuvre des programmes d’enseignement. Il faut aussi, dans la mesure du possible, encourager la participation des survivants à la conception et à la mise en œuvre de programmes d’apprentissage. Les étudiantes ont beaucoup à apprendre des survivants et des travailleurs de première ligne qui possèdent une expérience de travail en prévention, en détection et en prise en charge de la violence.
8.
  
La littérature sur l’inclusion de questions liées à la prévention, à la détection et à la prise en charge de la violence dans les programmes d’enseignement en est à ses premiers balbutiements. Il faudrait inciter les éducateurs et les chercheurs en sciences infirmières à rendre compte par écrit des méthodes d’enseignement et d’apprentissage qu’ils empruntent et à les soumettre à des revues spécialisées destinées aux professionnels de la santé.
9.
  
La recherche sur la formation des infirmières dans le domaine de la violence n’est pas non plus très avancée, et elle est essentiellement de nature descriptive. Il faudrait réaliser des études sur l’inclusion de questions liées à la prévention, à la détection et à la prise en charge de la violence dans les programmes d’enseignement des écoles de sciences infirmières; sur les meilleures façons d’appuyer les membres du corps professoral qui s’efforcent d’enseigner dans un domaine où beaucoup ne possèdent pas une préparation suffisante et sur l’efficacité des démarches pédagogiques, notamment les approches didactiques et expérientielles; sur les perceptions, l’acquisition de connaissances et l’amélioration de compétences. Il faudrait aussi étudier les effets de la formation des infirmières dans le domaine de la violence sur la santé et le bien-être des survivants.
10.
  
Étant donné la forte incidence de la violence infligée à la population féminine en général et comme la majorité des étudiants en sciences infirmières sont des femmes, il est probable que certaines étudiantes aient déjà subi de la violence. En effet, il est possible que certaines soient confrontées à des situations de violence. Il faudrait entreprendre des recherches afin de déterminer la prévalence de la violence subie par les étudiantes et comment elles réagissent à cette réalité.
11.
  
Comme le problème de la violence infligée aux femmes, aux enfants et aux personnes âgées exige une collaboration entre les professionnels de la santé et les intervenants sociaux, il est indispensable que les étudiantes apprennent à travailler avec des membres d’autres disciplines afin de prévenir et de détecter les cas réels ou possibles de violence et d’intervenir efficacement. S’ils n’ont pas l’occasion de travailler ensemble en tant qu’étudiants, il est irréaliste de s’attendre à ce que, une fois leur diplôme en main, les infirmières et d’autres intervenants en santé et en services sociaux adoptent automatiquement une démarche fondée sur la collaboration et entretiennent des relations de travail efficaces.
12.
  
Des guides ont été conçus pour aider les éducateurs en sciences infirmières à concevoir et à mettre en œuvre des programmes destinés aux étudiantes à tous les niveaux de la pratique. Bon nombre de ces guides ont été élaborés au Canada, à l’aide de fonds fédéraux et provinciaux. Ils sont généralement bien connus dans le milieu des éducateurs en sciences infirmières. Il faudrait s’employer à diffuser ces documents à grande échelle auprès de tous ceux qui s’occupent de la formation préalable et de la formation continue des infirmières.
13.
  
Il est prouvé que les programmes d’enseignement visent, du moins en partie, à faire en sorte que les étudiantes et les infirmières soient préparées à passer les examens d’inscription et d’agrément. Les éducateurs et les administrateurs qui sont responsables de ces examens devraient y intégrer des questions relatives à la violence. Il s’agit là d’un moyen de reconnaître l’importance de cette question pour la santé et le bien-être et le rôle de l’infirmière en matière de prévention, de détection et de prise en charge de la violence.
14.
  
L’Association des infirmières et infirmiers du Canada et un grand nombre d’associations provinciales d’infirmières et d’infirmiers ont conçu des énoncés de principe, des guides d’éthique et des normes de pratique qui prônent une intervention sensible et efficace du personnel infirmier auprès des survivants. Il faudrait inciter l’Association canadienne des écoles de sciences infirmières (ACESI) et les Collèges d’arts appliqués et de technologie à concevoir, de concert avec les doyens, les directeurs, les responsables d’associations professionnelles d’infirmières et des spécialistes du domaine, des politiques et des lignes directrices favorables à l’intégration du thème de la violence dans le programme de formation des infirmières.
15.
  
Il y aurait lieu d’inciter les centres d’excellence pour la santé des femmes et les centres de recherche sur la violence familiale et la violence faite aux femmes, qui œuvrent aux quatre coins du Canada et qui ont établi des liens de collaboration avec des membres du corps professoral d’écoles de sciences infirmières, à entreprendre ensemble des recherches sur l’influence de la formation sur les services de soins infirmiers et d’autres services de santé et services sociaux dans le domaine de la prévention, de la détection et de la prise en charge de la violence.
16.
  
L’obtention de fonds est essentielle à la mise en place et au maintien de programmes de formation systématiques en matière de violence, qui conviennent à différents types d’étudiantes, et offrent un contenu propre à la discipline et applicable à la collaboration avec d’autres disciplines. Comme le contenu des programmes d’enseignement est généralement chargé, et que les budgets globaux ne prévoient pas nécessairement les ressources humaines et matérielles requises, les programmes dépendent généralement de l’octroi de fonds par des sources externes. Les ministères fédéraux et provinciaux devraient envisager d’allouer des fonds à de tels programmes pour contribuer à faire en sorte que les infirmières soient bien préparées à bien remplir leur rôle de prévention, de détection et d’intervention face à ce problème de santé publique répandu.
17.
  
Cette étude n’a pas tenté de faire la lumière sur les programmes de formation en cours d’emploi et continue sur la prévention, la détection et la prise en charge de la violence qui ont été conçus à l’intention du personnel par les hôpitaux et des organismes de santé communautaire autres que ceux qui ont été recensés dans la littérature. D’après les réponses aux lettres envoyées aux doyens et aux directeurs d’écoles de sciences infirmières et aux directeurs généraux de centres d’excellence pour la santé des femmes et de centres de recherche sur la violence familiale et la violence faite aux femmes, il y aurait lieu d’entreprendre auprès de ces organisations des enquêtes permettant de brosser un tableau plus complet de la formation des infirmières dans ce secteur de la prestation de services.

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Dernière mise à jour : 2006-03-27