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Vie saine

Le tabagisme au travail : tendances, enjeux et stratégies

Tabagisme au travail : enjeux et tendances - Coup d'œil au-delà des tendances de la fréquence du tabagisme

Interaction avec les risques professionnels

Pour concevoir une stratégie féconde de réduction du tabagisme, il faut mieux comprendre ce qui sous-tend les variations professionnelles et industrielles de la fréquence de l'usage du tabac. Si la situation professionnelle sert de variable de prévision ou de contrôle dans certaines études du tabagisme, elle a été bien moins étudiée que d'autres facteurs socio-démographiques comme l'âge, le sexe ou l'instruction. En réalité, Sterling et Weinkam (1990:457) soutiennent que les études épidémiologiques du tabagisme ont tendance à négliger les aspects professionnels. C'est ainsi que les effets de confusion entre l'usage du tabac et d'autres risques spécifiques aux professions restent souvent dans l'ombre. Ces chercheurs se reportent aux données américaines de la National Health Interview Survey pour démontrer que les industries et les professions où les travailleurs étaient le plus exposés aux émanations toxiques et à la poussière étaient celles qui présentaient aussi la plus grande proportion de fumeurs et le taux le plus bas de renoncement au tabac.

On connaît bien les effets synergiques de la fumée de tabac et d'autres produits dangereux au travail (Douville, 1990). Ainsi, la bronchite chronique est liée à une exposition professionnelle au charbon, aux céréales, à la silice, aux polluants de la soudure et, dans une moindre mesure, à l'anhydride sulfureux et au ciment. Chez les fumeurs exposés, la bronchite est plus fréquente que chez ceux qui ne le sont pas. Les risques de cancer du poumon pour les fumeurs exposés à l'amiante s'accroissent d'un facteur supérieur à la somme des risques d'une seule exposition au tabac ou à l'amiante. Il y a aussi des indices que l'interaction de la fumée de tabac et des polluants professionnels favorise l'apparition du cancer du poumon chez les travailleurs des cokeries et des établissements gaziers, du cancer du pancréas chez les travailleurs des raffineries, du cancer de la rate chez les concierges, les préposés au nettoyage, les mécaniciens, les machinistes miniers, les opérateurs de presse, les travailleurs des mines métalliques, etc. Les travailleurs du caoutchouc risquent davantage de souffrir de déficience pulmonaire s'ils sont exposés à la fois aux particules et au tabac en milieu de travail. La byssinose et la bronchite sont plus fréquentes et plus graves chez les cotonniers qui fument que chez ceux qui ne fument pas.

Situation socio-économique et tabagisme

Les recherches au Canada consacrées aux liens entre les différentes professions et le risque de tabagisme sont restreintes. Les études sont étroites, puisqu'elles portent uniquement sur la fréquence des restrictions du tabagisme en milieu de travail selon des catégories d'ensemble (p. ex., Millar, 1988b, Krahn et van Roosmalen, 1991). Ces études descriptives n'en révèlent pas moins des variations frappantes du comportement d'usage du tabac selon la situation socio-économique. La profession est un indicateur clé de cette situation. Il est donc essentiel d'examiner l'ensemble complexe de facteurs économiques, écologiques, sociaux et culturels qui sont à la base du tabagisme comme comportement caractéristique d'une classe. Ainsi, Letourneay et Bujold (1990:28-29) ont vu, dans leurs recherches sur le tabagisme chez les francophones du Québec, les cols bleus moins instruits et à faible revenu comme un groupe à haut risque exigeant l'adoption de stratégies spéciales d'intervention en milieu de travail. Règle générale, une basse situation socio-économique - mesurée par l'instruction et le revenu - est un des meilleurs indices du tabagisme (Millar, 1988b, Millar et Hunter, 1990, Santé Canada, 1994).

Les éléments ethniques et culturels ont aussi des répercussions sur la fréquence du tabagisme et peuvent avoir une interaction avec la situation socio-économique. Même si la portée du présent rapport n'est pas d'examiner ces éléments, disons simplement que du point de vue de l'élaboration d'une politique anti-tabac au travail, il est important de comprendre comment la composition ethnique d'une main-d'œuvre en particulier peut avoir des répercussions sur les attitudes et le comportement envers le tabagisme. Au Canada par exemple, 59 % des Autochtones sont des fumeurs réguliers, comparativement à 11 % seulement des Asiatiques canadiens (Millar, 1992, voir aussi Lando, Johnson, Graham-Tomasi, McGovern et Solberg, 1992).

Conséquences sur le plan des politiques de lutte contre la FTA

Pour bien des travailleurs industriels, le tabagisme n'est qu'un des grands risques sanitaires qu'ils courent habituellement au travail. Cette indication peut être utile dans des campagnes de santé au travail visant à lutter contre le tabagisme, mais pour avoir du succès il ne suffira pas de reconnaître en soi l'usage du tabac comme le principal problème. Les syndicats qui représentent ces travailleurs pensent que l'on doit s'occuper de tous les risques professionnels, et non pas du seul tabagisme. En distinguant le tabagisme chez les travailleurs, on se trouve à « blâmer la victime », c'est-à-dire à laisser dans l'ombre la responsabilité qu'a l'employeur d'éliminer une foule d'autres polluants ou toxines en milieu de travail.

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