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Aliments et nutrition

Procédure de laboratoire
OPFLP-02

juin 2006
(Version PDF)

DIRECTION GÉNÉRALE DES PRODUITS DE SANTÉ ET DES ALIMENTS

OTTAWA

Isolement et identification des larves d'anisakidés dans les poissons

Brent R. Dixon
Bureau des dangers microbiens, Direction des aliments,
Repère postal : 2204A2
Santé Canada, Ottawa, Ontario, K1A 0L2

Courriel : Brent_Dixon@hc-sc.gc.ca

1. Application

Les méthodes de laboratoire décrites ci-après sont employées pour l'isolement et l'identification des anisakidés du 3e stade larvaire, des parasites communs de la chair et des viscères de divers poissons marins d'importance commerciale. Ces procédures à l’intention du personnel de laboratoire et d’inspection sont utilisées pour de petites quantités d'échantillons venant de plaintes de consommateurs aussi bien que pour des échantillons plus importants pris lors d'inspections de routine. Cette méthode révisée remplace la méthode ExFLP-1, datée de septembre 1995.

2. Principe

Préalablement à l'analyse, il faut séparer les parasites des tissus de poisson : cette séparation peut être faite à la main, par décantation ou par une méthode chimique. On peut utiliser des techniques non destructives (mirage et détection aux ultraviolets) ou destructives (élution et digestion). L'identification est fondée sur des caractères morphologiques macroscopiques qu'on peut observer au microscope chez des spécimens vivants ou préservés. Le mirage est actuellement la seule méthode utilisée pour les inspections courantes dans les usines assujetties à la réglementation fédérale. On peut aussi détecter les larves d'anisakidés présentes à la surface, ou près de la surface de la chair ou des viscères des poissons, par leur fluorescence à la lumière ultraviolette. Cette méthode de détection en laboratoire donne de meilleurs résultats avec une étape préliminaire de congélation et décongélation du spécimen bien qu'elle tue tous les parasites vivants.

La méthode d'élution par solution saline permet la migration d'une partie des parasites vivants, tandis que la digestion isole tous les parasites vivants ou morts. Le nombre total de parasites récupérés avec l'une ou l'autre de ces méthodes ne diffère pas significativement; toutefois, le nombre de parasites pathogènes (p. ex. Anisakis et Pseudoterranova) qu'on peut récupérer par la méthode de digestion peut être de 175 % supérieur au nombre récupéré avec l'élution (10.2). Il est possible d'améliorer le rendement dans une certaine mesure en combinant le mirage, l'élution et la digestion).

3. Caractéristiques générales des anisakidés

3.1 Cycle de vie

Les anisakidés sont des nématodes appartenant à des genres très proches dont le cycle évolutif, relativement complexe (Fig. 1), comprend un stade de vie libre et des hôtes multiples. À maturité, l'adulte produit des oeufs qui passent dans les matières fécales du mammifère marin lui servant d'hôte définitif. Les oeufs tombent au fond de l'eau où, selon la température, ils éclosent au bout de quelques jours ou de quelques semaines, libérant des larves du 2e stade larvaire devant être ingérées par des crustacés marins afin de faciliter leur développement jusqu'au 3e stade. Lorsqu'un crustacé infesté est dévoré par un poisson, ou un calmar, les larves migrent dans les tissus de ce deuxième hôte intermédiaire, se développant dans ses viscères ou ses muscles jusqu'au 3e stade larvaire, phase avancée du développement. Si le poisson ainsi infesté est alors mangé par un mammifère marin, hôte définitif, les larves sont libérées dans l'estomac ou dans l'intestin de ce dernier et y subissent d'autres mues avant d'atteindre le 4e stade larvaire et, finalement, l'état adulte. L'humain, qui ne peut être considéré qu'à titre d'hôte accidentel, n'a aucune influence sur la transmission de ces parasites.

3.2 Larves importantes en santé publique

La majorité des infections humaines mettent en jeu deux anisakidés, soit le ver du hareng (Anisakis simplex) et le ver du phoque (Pseudoterranova decipiens). On peut trouver des larves infectantes sur les viscères ou dans la chair d'un certain nombre d'espèces ichtyologiques d'importance commerciale, dont le saumon, la morue, le hareng et le maquereau ainsi que chez le calmar (10.1). P. decipiens se voit aussi chez l'éperlan et chez divers poissons plats. Enfin, deux autres anisakidés (Contracaecum osculatum et l’espèce Phocascaris), observés chez des poissons d'importance commerciale, pourraient causer des problèmes de santé publique.

4. Matériel et équipements spéciaux

4.1 Mirage

4.1.1 table de mirage (décrite ci-après)
4.1.2 petites pinces et boîte de Pétri avec solution saline normale (0,85 g NaCl par 100 ml d'eau distillée)

4.2 Détection aux ultraviolets

4.2.1 lampe UV portative ou fixe
4.2.2 masque ou lunettes de protection (contre les UV)
4.2.3 petites pinces et boîte de Pétri avec solution saline normale

4.3 Élution

4.3.1 tamis standard U.S. no 4 (ou tamis de cuisine à maillage comparable)
4.3.2 entonnoir de grande capacité (500 mL ou plus) ou autre récipient
4.3.3 tube transparent et flexible avec pince pour obturer
4.3.4 anneau de support et statif
4.3.5 solution saline normale
4.3.6 pellicule d'emballage en plastique ou papier d'aluminium
4.3.7 bécher de 250 mL
4.3.8 microscope stéréoscopique ou loupe
4.3.9 pinces et boîte de Pétri avec solution saline normale

4.4 Digestion

4.4.1 solution de pepsine [15 g de pepsine (1/10 000, Sigma Chemical Co.) dissous dans 750 mL de solution saline normale]
4.4.2 bécher de 1,5 L, bécher de 250 mL
4.4.3 bain-marie à agitation (37oC) ou avec agitateur mécanique
4.4.4 pH-mètre ou papier indicateur de pH et HCl 6 N
4.4.5 papier d’aluminium
4.4.6 tamis standard U.S. no 18 (ou tamis de cuisine à maillage comparable)
4.4.7 récipient de grande capacité pour installer le tamis et recueillir les matériaux tamisés, ou tamis standard U.S. no 140
4.4.8 solution saline normale pour le rinçage du tamis
4.4.9 assemblage avec entonnoir comme pour l'élution
4.4.10 microscope stéréoscopique ou loupe
4.4.11 pinces et boîte de Pétri avec solution saline normale

4.5 Fixation et conservation

4.5.1 Fixateurs :
acide acétique glacial ou mélange alcool formol acide acétique (AFA) (85 mL d'éthanol à 85 %, 10 ml de formol, 5 ml d'acide acétique glacial)
4.5.2 Agents de conservation :
éthanol à 70 % ou mélange alcool-glycérol (9 parties d'éthanol à 70 % et 1 partie de glycérol)
4.5.3 Agents d'éclaircissement:
acide acétique glacial, ou glycérol, ou xylène

5. Détection et isolement

5.1 Mirage

5.1.1 Table de mirage

Pour le mirage, on recommande d'utiliser une table lumineuse munie d'au moins deux tubes fluorescents à lumière « blanche froide » de 20 watts (10.5). La source de lumière doit être montée sur un cadre rigide, sous une feuille d'acrylique blanc translucide ou d'un autre matériau adéquat d'une transparence de 45 à 60 %. Cette surface de travail doit mesurer environ 30 x 60 cm et de 5 à 6 mm d'épaisseur. À 30 cm au-dessus du centre de la feuille d'acrylique, l'éclairement moyen doit être de 1 500 à 1 800 lux. L'éclairement en surplomb doit être d'au moins 500 lux. Une table lumineuse de photographie donne aussi de bons résultats en laboratoire.

Le mirage peut se faire indifféremment sur des spécimens frais ou décongelés. L'efficacité de l'opération dépend en grande partie de l'épaisseur du filet examiné (10.5). Les filets larges et épais peuvent donc poser un certain problème, en raison de l'augmentation des coûts de production et de la perte de valeur encourue lorsqu'ils sont tranchés. Le mirage est une technique généralement considérée comme étant coûteuse et inefficace pour détecter et enlever les parasites des filets. Elle est aussi limitée en ce sens qu'elle ne peut distinguer les parasites morts des vivants.

5.1.2 Placer le filet sur la table lumineuse et rechercher les larves : étroitement enroulées sur elles-mêmes et encapsulées, ayant l'apparence de taches foncées. On peut aussi observer des larves non encapsulées à la surface du filet.

5.1.3 Au moyen de pinces, transférer tous les vers décelés dans une boîte de Pétri contenant de la solution saline normale.

5.2 Détection aux ultraviolets

5.2.1 Porter un masque ou des lunettes protégeant des rayons ultraviolets.

5.2.2 Travailler dans une salle non éclairée : tenir la lampe UV à environ 10 cm au-dessus de la surface du filet et rechercher les parasites, dont la présence est indiquée par la fluorescence. La couleur de la fluorescence peut permettre une identification préliminaire : les larves d'Anisakis et de Pseudoterranova sont d'un blanc bleuâtre éclatant et celles de Contracaecum sont jaunes (10.4). Comme dans la technique du mirage, cette procédure ne permet pas la distinction entre les parasites vivants et morts.

5.2.3 Au moyen de pinces, transférer tous les vers décelés dans une boîte de Pétri contenant de la solution saline normale.

5.3 Élution

5.3.1 Déposer jusqu'à 200 g de tissus de poisson sur un tamis standard U.S. no4 (ou un tamis de cuisine de maillage équivalent) placé dans un grand entonnoir ou un autre récipient. Raccorder un tube à l’embout de l'entonnoir et bloquer l'écoulement au moyen d'une pince.

5.3.2 Remplir l'entonnoir de solution saline normale (de façon à ce que les tissus soient complètement submergés). Couvrir avec un morceau de pellicule de plastique ou de papier d'aluminium et laisser le tout à la température de la pièce pendant une nuit. Les larves vivantes sortiront des tissus et tomberont par les mailles du tamis dans le tube de l'entonnoir (ou au fond du récipient).

5.3.3 Au bout de 16 à 18 heures, verser 100 ml du liquide décanté dans un bécher. Avec des pinces, transférer les vers dans une boîte de Pétri contenant de la solution saline normale et examiner soigneusement ce qui reste de la suspension au microscope stéréoscopique (120x) ou à la loupe pour déceler la présence de vers de plus petite taille.

5.4 Digestion

5.4.1 Dans un grand bécher, déposer environ 200 g de tissus de poisson et 750 ml de solution de pepsine à 37oC.

5.4.2 Placer le bécher au bain-marie à agitation, à 37oC, en veillant à ce que le niveau de l'eau soit à moins de 1 cm de celui du liquide du bécher. Laisser agiter à basse vitesse environ 15 min.

5.4.3 Ajuster le pH à 2 avec du HCl 6 N; couvrir le bécher de papier d'aluminium et poursuivre l'agitation pendant 24 heures (ou jusqu'à digestion complète des tissus).

5.4.4 Passer le digesta au tamis standard U.S. no 18 (ou un tamis de cuisine à maillage équivalent), au-dessus d'un récipient de capacité suffisante. Rincer le tamis avec de la solution saline normale et examiner le résidu par immersion du maillage dans une solution saline propre. Avec des pinces, transférer les vers dans une boîte de Pétri contenant de la solution saline normale.

5.4.5 Pour examiner le matériel non retenu sur le tamis, le verser dans un entonnoir à tube bouché et laisser décanter 1 heure; récupérer les sédiments décantants dans un bécher, comme pour l'élution. Vérifier la présence de vers de plus petite taille à l’aide du microscope stéréoscopique (120x) ou de la loupe.

5.4.6 D'une autre façon, le matériel digéré peut être passé à travers un nid de tamis U.S. normalisés no 18 sur no 140, lesquels sont ensuite séparés et partiellement immergés dans une solution saline normale. Recueillir et transférer dans un contenant de solution saline normale tout gros parasite retrouvé sur le tamis no 18 ainsi que les plus petits retrouvés sur le tamis no 140.

6. Enregistrement des résultats

Tous les parasites isolés d'un échantillon doivent être enregistrés comme vivants, morts (intacts) ou à l'état de fragments. Les parasites peuvent être considérés comme étant vivants s'ils affichent quelques mouvements durant les procédures d'isolation. Les larves d’anisakidés deviennent généralement plus actives lorsqu'elles s'approchent de la température de la pièce.

En plus du nombre de parasites présents par kg de produit, une identification préliminaire de ces parasites, ou une brève description, devrait être incluse aux données si possible. Les spécimens de poisson examinés, la source, le poids total de l'échantillon, ainsi que le poids et le nombre des échantillons individuels (filets) devraient également être enregistrés, et ce avec toute autre information pertinente.

7. Fixation et conservation des larves

Diverses méthodes ont été utilisées pour la conservation des nématodes. Les spécimens, vivants ou préalablement congelés, sont d'abord fixés à l'acide acétique glacial ou à l'AFA (1 min.), puis conservés dans de petits flacons en verre contenant de l'éthanol à 70 % ou, ce qui est préférable, une solution alcool glycérol. Si nécessaire, les vers peuvent être conservés dans la solution indéfiniment. Les flacons doivent être bien étiquetés (p. ex. identification du parasite, espèce de l’hôte, emplacement sur l’hôte, numéro d’échantillon, date de l’épreuve, nom de l’examinateur, etc.).

8. Identification des parasites

Pour l'examen au microscope, il peut être nécessaire d'appliquer un agent de clarification, comme le xylène, rendant la cuticule des nématodes plus transparente. On peut faire une préparation temporaire sur lame, puis remettre les parasites dans la solution de conservation. En général, les nématodes ne sont pas colorés pour l'examen au microscope.

En général, les larves d'A. simplex et de P. decipiens du 3e stade larvaire se distinguent par leur taille et leur couleur. On peut faire une identification positive par la morphologie interne de l'extrémité antérieure de la larve (10.3), qu'on voit sans problème au microscope stéréoscopique chez les larves à l'état frais ou préservées (fig. 2). La larve d'A. simplex du 3e stade larvaire est un petit ver blanc de 9 à 36 mm dont l'extrémité antérieure du système digestif est droit et comprend l'oesophage, un ventricule, et l'intestin. P. decipiens est généralement d'un brun rougeâtre, mesure de 9 à 58 mm et présente un caecum intestinal projeté antérieurement. Les larves des espèces Contracaecum et Phocascaris du 3e stade se distinguant très mal les unes des autres au point de vue morphologique, on les traite souvent comme un seul groupe. Par contre, on distingue facilement les larves de 3e stade du complexe Contracaecum/Phocascaris de celles d'A. simplex et de P. decipiens. En effet, les larves du complexe sont d'un brun verdâtre, mesurent de 7 à 30 mm et possèdent un caecum intestinal projeté antérieurement et un appendice ventriculaire projeté postérieurement (10.3).

9. Interprétation

S'il est cru ou insuffisamment cuit à l'ingestion, on peut considérer que le poisson frais infesté par un anisakidé présente un risque sanitaire. Il n’existe actuellement aucune ligne directrice de la DGPSA quant aux parasites des poissons. Toutefois, des lignes directrices ont été établies par d’autres organismes réglementaires au Canada et devraient être consultées. Les limites de tolérance ne sont pas inclues dans la présente puisqu’elles sont susceptibles de modification.

S'il y a des doutes quant à la conformité du lot, s'adresser à la Division de l'évaluation du Bureau des dangers microbiens, Direction des aliments, Direction générale des produits de santé et des aliments, Santé Canada, téléphone : (613) 957-0349 ou téléc. : (613) 952-6400.

10. Références

10.1 ADAMS, A. M., MURRELL K. D. et J. H. CROSS, 1997. Parasites of fish and risks to public health, Rev. sci. tech. Off. int. Epiz. 16: pp. 652-660.

10.2 JACKSON, G. J., BIER, J. W. , PAYNE, W. L. et collab.. 1981. Recovery of parasitic nematodes from fish by digestion or elution. Appl. Environ. Microbiol. 41: pp. 912-914.

10.3 OLSON, A. C., LEWIS, M. D. et M. L. HAUSER. 1983. Proper identification of anisakine worms. Am. J. Med. Technol. 49: pp. 111-114.

10.4 PIPPY, J. H. C., 1970. Use of ultraviolet light to find parasitic nematodes in situ. J. Fish. Res. Bd. Can. 27: pp. 963-965.

10.5 VALDIMARSSON, G., EINARSSON, H. et F. J. KING, 1985. Detection of parasites in fish muscle by candling technique. J. Assoc. Off. Anal. Chem. 68: pp. 549-551.

Figure 1. cycle évolutif des anisakidés (schéma général)

Figure 1. cycle évolutif des anisakidés (schéma général)

Figure 2. Extrémité antérieure de larves d'anisakidés du 3e stade larvaire. A. Anisakis simplex; B. Pseudoterranova decipiens; C. Complexe Contracaecum/Phocascaris; e, oesophage; v, ventricule; i, intestin; ic, caecum intestinal; va, appendice ventricular. (Tiré d'Olson et al. 1983).

Figure 2. Extrémité antérieure de larves d'anisakidés du 3e stade larvaire. A. Anisakis simplex; B. Pseudoterranova decipiens; C. Complexe Contracaecum/Phocascaris; e, oesophage; v, ventricule; i, intestin; ic, caecum intestinal; va, appendice ventricular. (Tiré d'Olson et al. 1983).

Mise à jour : 2006-07-18 Haut de la page