Points de vue des consommateurs canadiens sur
l'enrichissement des aliments
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Résumé
Vingt-trois groupes types se sont réunis du 19 au 22
juillet 2004, dans sept villes du Canada. La recherche visait
les objectifs suivants : comprendre les effets possibles de
l'enrichissement facultatif sur le comportement des
consommateurs; déterminer si ces derniers sont
généralement favorables ou réfractaires
à l'enrichissement facultatif et quelle perception
ils ont du rôle que Santé Canada devrait jouer
sur ce plan.
Les objectifs précis de la recherche étaient
les suivants :
-
Examiner les critères sur lesquels reposent les
choix alimentaires actuels des participants;
déterminer si ces derniers ont accès
à un éventail de choix suffisant, comment
ils pondèrent les divers facteurs nutritionnels
lors de leurs achats alimentaires; comment ils
intègrent les vitamines et les minéraux
à leur alimentation et s'ils se procurent des
aliments enrichis.
-
Déterminer si les participants sont
généralement au courant de
l'enrichissement des aliments et ce qu'ils en
pensent. Les participants ont été
invités à indiquer quels sont les aliments
offerts sur le marché qui sont enrichis; quelle
importance revêt pour eux l'enrichissement
lorsqu'ils choisissent un produit; quels sont les
éléments d'information dont ils ont
besoin pour acheter un produit enrichi; quels sont les
avantages tirés de l'achat d'un aliment
enrichi et si leurs choix alimentaires changeraient
s'ils avaient accès à un plus vaste
éventail d'aliments enrichis.
-
Connaître les divers points de vue sur
l'enrichissement alimentaire. Les participants ont
été invités à discuter de la
signification d'un énoncé de concept
stratégique qui leur a été lu;
à déterminer ses possibles
répercussions sur leurs décisions; quels
autres éléments d'information ils
devraient posséder; si l'enrichissement
facultatif est synonyme d'aliments plus sains; quels
sont les aliments qui selon eux devraient être
enrichis; s'ils aimeraient que les aliments à
faible valeur nutritionnelle le soient et quel type
d'étiquetage devrait figurer sur
l'emballage des aliments enrichis à la
discrétion des fabricants.
-
Discuter du rôle de Santé Canada dans le
dossier de l'enrichissement facultatif. Les
participants ont été invités à
indiquer leurs sources d'information nutritionnelle;
quel rôle doit jouer Santé Canada de
manière générale à
l'égard des aliments et d'une saine
alimentation; si l'enrichissement facultatif aurait
des répercussions sur la perception que l'on a
de Santé Canada et sur sa crédibilité
et quelles sont les sources qu'ils consulteraient pour
obtenir plus d'information sur le sujet.
Les lieux où se sont déroulés les tests
et les caractéristiques des participants
étaient les suivants :
Population générale
|
SSE faible*
|
SSE élevé**
|
Personnes âgées
|
Parents
|
Adol.
|
St John's, Terre-Neuve
|
10 quelques représentants du milieu rural
|
|
|
|
9
|
|
Trois-Rivières
|
4 quelques représentants du milieu rural et de
la catégorie de gens ayant un SSE faible
|
|
|
|
8
|
|
Montréal
|
9
|
9
|
8
|
9
|
7
|
7
|
Toronto
|
9
|
7
|
8
|
10
|
8
|
6
|
Winnipeg
|
10 quelques représentants de la population
autochtone
|
|
|
|
10 quelques représentants de la population
autochtone
|
|
Calgary
|
10
|
|
|
|
6
|
|
Vancouver
|
9
|
|
|
9
|
8
|
|
*SSE faible : Statut socio-économique faible -
Situation de ceux dont le revenu du ménage est de 30
000 $ ou moins et qui ont au plus un diplôme
d'études secondaires.
** SSE élevé : Statut socio-économique
élevé - Situation de ceux dont le revenu du
ménage est supérieur à 50 000 $ à
Montréal, et à 75 000 $ à Toronto, et
qui possèdent au moins un diplôme
d'études universitaires.
Les participants ont pris part à une discussion
dirigée sur les choix alimentaires, sur
l'enrichissement alimentaire en général et
sur l'enrichissement facultatif. L'animateur a suivi
un guide et enchaîné les thèmes et les
questions en se fondant sur les réponses du groupe
liées aux objectifs de la recherche.
Trois animateurs ont dirigé les discussions : un en
français à Trois-Rivières et à
Montréal, un à Winnipeg et dans les provinces
de l'Ouest, et un à St John's et à
Toronto.
Les consommateurs étaient dans une certaine mesure
favorables à la politique d'enrichissement
facultatif proposée, en émettant toutefois
certaines réserves. Ils ont fait savoir que
l'enrichissement facultatif ne modifiera en rien leur
façon d'évaluer leurs choix alimentaires.
En substance, les participants ont adhéré
à l'idée d'un enrichissement des
aliments à la discrétion des fabricants, sous
réserve que Santé Canada fixe des limites quant
aux nutriments et aux quantités autorisés. On
peut parler dans ce cas d'appui conditionnel. Autrement
dit, avant d'accepter la politique, les participants
voulaient être renseignés sur un certain nombre
de points :
-
Si l'enrichissement aura un effet sur le coût et
le goût des aliments. Si l'un ou l'autre de
ces facteurs change de manière marquée, les
participants auront plus de difficulté à
accepter la politique et à choisir les produits
enrichis à la discrétion du fabricant.
-
Si un étiquetage obligatoire leur fournira
suffisamment d'information et les rassurera au sujet
du processus d'enrichissement, notamment en les
renseignant sur un apport excessif en nutriments et sur
les effets bénéfiques sur la santé de
l'adjonction de nutriments. Les participants
considèrent que l'étiquetage est un
aspect fondamental de cette politique. Beaucoup ont
indiqué qu'ils rejetteraient la politique si
l'étiquetage n'était pas obligatoire
et ne donnait pas suffisamment d'information. Selon
les participants, la possibilité pour le
consommateur de faire un choix éclairé
dépendra de l'honnêteté dans les
pratiques d'étiquetage, et c'est un
élément qui apparaît fondamental
à leurs yeux.
-
S'ils auront accès à l'information
nutritionnelle permattant de faire les bons choix
alimentaires. Ceux qui ont indiqué qu'ils
étaient ouverts à l'idée
d'aliments enrichis à la discrétion du
fabricant ont dit avoir besoin d'information,
notamment sur les avantages qu'ils ont personnellement
à tirer de l'enrichissement des aliments et sur
les risques d'un apport excessif en nutriments. Ils
s'attendaient à ce que Santé Canada joue
ce rôle en diffusant de l'information en
général et en exigeant que
l'étiquetage apporte cette information.
-
Si les fabricants feront l'objet d'une double
surveillance. Premièrement, les participants
veulent que Santé Canada surveille la
quantité de nutriments ajoutée et
vérifie cette information par rapport aux
allégations faites par les fabricants sur les
étiquettes. Deuxièmement, la surveillance
doit porter sur la qualité ou la source de
l'élément nutritif. Les participants
s'attendent à ce que Santé Canada veille
à ce que les nutriments proviennent de sources
sûres, naturelles et non chimiques.
Même si des réponses étaient
apportées à ces questions, les participants ont
indiqué qu'il est très probable que
l'enrichissement facultatif ne changerait pas
profondément leurs habitudes actuelles d'achat
alimentaire. Autrement dit, ces derniers ont fait savoir
qu'ils entendaient continuer de tenir compte de facteurs
tels que le sel, le « gras », le sucre,
l'apport calorique, le goût et le coût,
lorsqu'ils font leurs choix alimentaires, avant de
prendre en considération les éléments
nutritifs ajoutés, même s'il se trouve
qu'ils doivent être spécifiquement attentifs
à l'intégration d'une vitamine ou
d'un minéral précis dans leur alimentation.
De plus, s'ils avaient besoin de vitamines et de
minéraux, ils se tourneraient d'abord vers leurs
sources habituelles, notamment, les fruits, les
légumes et les suppléments de vitamines et de
minéraux. Le fait que les participants aient
exprimé l'intention de demeurer fidèles aux
critères qui guident leurs choix actuels montre
qu'actuellement, la plupart ne cherchent pas
expressément à se procurer des aliments
enrichis sur le marché.
L'enrichissement facultatif soulève toutefois
d'importantes questions d'ordre idéologique
qui ont des répercussions certaines sur l'appui
apporté à la politique.
Il est important de signaler que certains ne sont
manifestement pas favorables à la politique ou,
à tout le moins, considèrent qu'il y a lieu
de se montrer extrêmement prudent face à cette
question. Ces personnes ont fait état de questions
idéologiques soulevées par la politique, par
exemple le fait que Santé Canada devrait investir dans
la promotion d'une alimentation plus saine plutôt
que dans l'enrichissement facultatif, ou du moins,
entreprendre de diffuser des messages à
caractère éducatif percutants, qui situent
l'enrichissement alimentaire dans le contexte global de
l'alimentation (qui soulignent par exemple qu'un
aliment emballé enrichi n'est pas
nécessairement le choix alimentaire le plus sain).
D'autres considérations idéologiques ont
été évoquées :
l'inquiétude suscitée par une
altération excessive des aliments; le message
réel qu'envoie un enrichissement accru au sujet de
la valeur nutritionnelle des aliments offerts sur le
marché; la source exacte des nutriments ajoutés
aux aliments; la possibilité de présenter des
aliments à faible valeur nutritionnelle comme des
aliments sains et les véritables instigateurs de cette
politique (les fabricants ou Santé Canada). De
manière générale, les tenants de telles
idées ont défendu leur point de vue avec
beaucoup de conviction et, dans certains cas, ont
réussi à faire changer d'idée ceux
qui étaient favorables à la politique.
Même si le sondage de groupes type n'est pas de la
recherche quantitative, à première vue, il
semble que les objections ou réserves d'ordre
idéologique soient exprimées haut et fort, mais
que ces idées ne sont pas aussi répandues parmi
les participants que ne l'est l'acceptation
conditionnelle de la politique.
Enfin, sur le plan idéologique, certains de ceux qui
se sont déclarés en faveur de la politique
estiment que l'enrichissement facultatif est une approche
proactive. Selon eux, Santé Canada s'emploie
à la fois à encadrer l'enrichissement
facultatif, à imposer aux fabricants des limites et
des conditions relatives à l'adjonction de
nutriments et à protéger le bien-être de
la population canadienne et à réduire les
coûts des soins de santé en aidant les Canadiens
à prévenir la maladie.
Les participants ont fait savoir qu'ils opteraient pour
un aliment enrichi s'il répondait aux
critères qui dictent actuellement leurs choix
alimentaires. Toutefois, même s'ils choisissaient
un aliment enrichi, ils ont déclaré que le
choix n'est pas l'enjeu de la politique.
Comme nous l'avons déjà signalé,
l'enrichissement facultatif ne modifiera pas
nécessairement les choix alimentaires. Les
participants ont toutefois indiqué que dans la
majorité des cas, ils opteraient pour un aliment
enrichi si tous les autres facteurs de décision
étaient égaux. Autrement dit, s'ils
voyaient un aliment enrichi qui répond à leurs
exigences actuelles, ils l'achèteraient et
auraient l'impression de bénéficier
d'une « valeur ajoutée ».
Là encore, cette réaction s'explique par la
façon dont les participants choisissent actuellement
leurs aliments emballés. Plus
précisément, ces derniers ont fait savoir
qu'ils ne considèrent pas les produits
emballés comme une source de vitamines et de
minéraux, et la la plupart ne commenceraient pas
à le faire même s'ils se voyaient offrir un
plus grand choix d'aliments enrichis.
Il importe également de souligner que les participants
ont été priés d'indiquer si,
à leur avis, la politique leur donnerait accès
à un plus grand choix de sources de vitamines et de
minéraux. Comme ils ne considèrent pas
actuellement les aliments emballés comme des sources
de vitamines et de minéraux, ils n'estiment pas
que le choix est l'enjeu de cette politique. Ce qui
ressort des discussions, cependant, c'est que les
participants veulent avoir la possibilité de ne
pas choisir un aliment enrichi, si tel est leur
désir. Cette position est motivée par des
craintes relatives à un apport excessif en nutriments,
ainsi qu'à une modification possible du goût
et du prix des aliments. En outre, ceux qui ont émis
des réserves idéologiques au sujet de
l'enrichissement facultatif réclament
énergiquement la possibilité de choisir les
mêmes aliments non enrichis.
L'enrichissement d'aliments à faible valeur
nutritionnelle compte certains partisans, même s'il
soulève une foule de questions, surtout chez les
parents.
Les participants estimaient que l'enrichissement d'un
aliment à faible valeur nutritionnelle leur
apporterait une valeur ajoutée, à condition de
ne pas entraîner une modification du goût, ce qui
rejoint en gros l'attitude générale
à l'égard de l'enrichissement. Les
participants ont signalé d'emblée
qu'ils ne se laisseraient pas convaincre d'acheter un
aliment à faible valeur nutritionnelle pour la simple
raison qu'il s'agit d'un aliment enrichi. Par
contre, ils ont déclaré que s'ils
décidaient de choisir ce type d'aliment, il ne
serait pas si mauvais qu'il soit enrichi.
Deux sujets de préoccupation ont toutefois
été exprimés. D'abord, une question
d'ordre général concernant la
commercialisation et l'étiquetage. Du point de vue
des participants, la question que pourrait soulever
l'enrichissement des aliments à faible valeur
nutritionnelle est celle de la commercialisation. Les
participants ne veulent pas que les fabricants se servent de
l'enrichissement comme outil de commercialisation, et
cette éventualité les inquiète beaucoup.
L'autre question est soulevée par les parents qui
s'inquiètent pour leurs enfants. La
majorité des parents estiment qu'à
l'heure actuelle, ils maîtrisent bien les habitudes
alimentaires de leurs enfants et que la situation demeurera
la même avec l'implantation de l'enrichissement
facultatif. Ce qui les préoccupe davantage, c'est
l'idée que leurs enfants auront besoin
d'être davantage renseignés, soit par eux
soit par l'école, sur l'alimentation si la
politique de l'enrichissement facultatif est
appliquée. Autrement dit, les parents ont
déclaré qu'ils devront expliquer à
leurs enfants qu'un aliment qui est enrichi n'est de
ce fait même ni plus ni moins sain par rapport à
d'autres caractéristiques, comme la teneur en
« gras », en sucre et en sel. De plus, ils
estimaient devoir expliquer pourquoi il est
préférable de choisir les fruits et les
légumes, plutôt que les grignotines, comme
sources de vitamines et de minéraux. Certains parents
étaient disposés à fournir ce genre
d'explications à leurs enfants; d'autres ne
voulaient pas envisager la possibilité même que
la question se pose.
Santé Canada doit jouer un rôle sur les plans de
l'éducation et de la réglementation
Les participants ont fortement insisté sur la
nécessité que Santé Canada renseigne
abondamment la population au sujet de l'enrichissement
facultatif. Plus précisément, ils souhaitaient
connaître :
-
La raison d'être exacte de la politique
-
Les effets bénéfiques sur la santé de
l'adjonction de nutriments aux aliments
-
Le risque d'un apport excessif et les quantités
acceptables.
-
Si Santé Canada assurera une surveillance
auprès des fabricants, autrement dit, s'il
vérifiera la quantité de nutriments
ajoutés et veillera à ce que les fabricants
ne fassent pas un usage abusif de l'enrichissement
comme instrument de commercialisation.
-
Si Santé Canada établira des lignes
directrices rigoureuses en matière
d'étiquetage de telle sorte que les Canadiens
aient accès à tous les
éléments d'information dont ils ont
besoin.
Dans l'ensemble, les participants croient que
l'enrichissement n'aura aucune incidence sur la
crédibilité de Santé Canada.
Santé Canada voulait déterminer si
l'enrichissement facultatif aurait des
répercussions sur la perception qu'ont les
Canadiens de sa crédibilité. Dans
l'ensemble, la crédibilité de Santé
Canada face à la question de l'enrichissement
facultatif n'a pas été mise en doute,
même lorsque les participants ont été
invités à se prononcer directement sur
l'autorisation de l'enrichissement d'aliments
à faible valeur nutritionnelle. En ce qui a trait
à l'enrichissement facultatif, les participants
ont une perception favorable de Santé Canada,
l'impression générale étant que le
Ministère cherche à promouvoir la santé
de la population canadienne en poursuivant une telle
politique et fait tout pour adopter une démarche
proactive en mettant en place des mécanismes de
surveillance qui imposeraient aux fabricants des limites
à respecter pour des raisons de sûreté.
La recherche a toutefois fait ressortir un problème de
confiance sous-jacent à l'égard des
fabricants de produits alimentaires. Dans ses communications
au sujet de l'enrichissement facultatif, il faut que
Santé Canada fasse preuve d'ouverture et de
franchise au sujet de l'influence qu'ont pu avoir les
fabricants sur la décision. Dans la plupart des
groupes, les participants ont déclaré trouver
normal que les fabricants aient leur mot à dire sur la
question de l'enrichissement et qu'ils influent sur
les décisions en la matière. Ce qu'ils
veulent entendre et croire, c'est que Santé Canada
veille aux intérêts supérieurs des
consommateurs, et non des fabricants. C'est là un
minimum si l'on veut que la crédibilité de
Santé Canada ne soit pas mise en doute.
Il importe de signaler que ce qui compte aux yeux des gens,
c'est davantage les actes que les paroles de Santé
Canada dans le dossier de l'enrichissement facultatif.
Plus précisément, si l'on perçoit
que Santé Canada avalise la commercialisation des
aliments à faible valeur nutritionnelle (au lieu
d'exercer une surveillance/de fixer des limites), on
supposera sans doute que le Ministère, quoi qu'il
dise, défend davantage les intérêts des
fabricants que ceux des Canadiens en général.
Une telle situation risque d'ébranler la
crédibilité de Santé Canada.
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