Banque du Canada

Version intégrale >>
      

Publications et recherches

Périodiques

Rapport sur la politique monétaire

Janvier 2005

Mise à jour

Voir aussi : Rapports antérieurs

Le présent commentaire émane du Conseil de direction de la Banque du Canada. Il renferme une mise à jour du point de vue de la Banque sur les perspectives économiques, fondée sur l'information reçue au 25 janvier 2005.

Faits saillants
  • La Banque estime que l'économie canadienne fonctionnera en 2005 un peu plus en deçà de son potentiel qu'elle ne l'entrevoyait au moment de la livraison d'octobre du Rapport sur la politique monétaire.
  • L'atténuation du degré de détente monétaire au cours de la période de projection se fera vraisemblablement à un rythme plus lent qu'on ne l'envisageait en octobre dernier.
  • La Banque s'attend à ce que l'expansion s'accélère et dépasse légèrement 3 % en 2006.
  • Comme l'économie devrait tourner de nouveau à plein régime au second semestre de 2006, on prévoit que l'inflation mesurée par l'indice de référence rejoindra la cible de 2 % vers la fin de 2006.
  • Ces prévisions sont entachées de risques, aussi bien à la hausse qu'à la baisse, qui restent liés à l'ajustement de notre économie à l'évolution mondiale.

Télécharger le Rapport intégral (44 ko, PDF)

Les perspectives de l'économie canadienne continuent d'être façonnées par l'ajustement de cette dernière aux principaux changements en cours sur la scène mondiale, notamment la solide croissance de l'activité à l'échelle internationale, le réalignement des devises, y compris le dollar canadien; les variations des cours du pétrole brut et des produits de base non énergétiques ainsi que la montée en puissance de la Chine et de l'Inde. La politique monétaire menée au Canada facilite ce processus d'adaptation en visant à maintenir l'inflation au taux cible de 2 % et à faire tourner l'économie près des limites de sa capacité.

Les perspectives à court terme de l'économie mondiale se sont un peu tassées par rapport à ce que la Banque entrevoyait dans la livraison d'octobre du Rapport sur la politique monétaire; en revanche, on note maintenant un regain de confiance dans la vigueur de l'économie américaine en 2005.

Au Canada, l'expansion devrait avoir été un peu moins rapide au quatrième trimestre de 2004 qu'on ne s'y attendait en octobre, en partie parce que l'ajustement à l'appréciation passée du dollar canadien a été légèrement plus marqué que prévu. En outre, depuis la parution du dernier Rapport, notre monnaie s'est échangée à l'intérieur d'une fourchette supérieure à celle observée auparavant.

Compte tenu en grande partie de l'effet modérateur de cette récente appréciation du dollar sur la demande globale, la Banque estime que l'économie canadienne fonctionnera en 2005 un peu plus en deçà de son potentiel qu'elle ne l'entrevoyait en octobre. Pour 2006, la Banque s'attend à ce que l'expansion s'accélère et dépasse légèrement 3 %, ce qui permettra à l'économie de tourner de nouveau à plein régime au second semestre de l'année et à l'inflation mesurée par l'indice de référence de rejoindre la cible de 2 % vers la fin de l'an prochain.

À la lumière de ce nouveau scénario, l'atténuation du degré de détente monétaire au cours de la période de projection se fera vraisemblablement à un rythme plus lent qu'on ne l'envisageait en octobre dernier. Dans ce contexte, la Banque a décidé de laisser inchangé le taux cible du financement à un jour en décembre et en janvier (Graphique 1).

Ces prévisions sont entachées de risques, aussi bien à la hausse qu'à la baisse, et d'incertitudes. Si les risques à court terme planant sur les perspectives économiques à l'échelle du globe se sont atténués, il subsiste des risques à moyen terme appréciables liés à l'évolution des prix du pétrole, au rythme de l'expansion en Chine, à la façon dont les déséquilibres des paiements courants seront corrigés aux États-Unis et en Asie de l'Est, et au climat géopolitique.

Les incertitudes entourant les perspectives de l'économie canadienne demeurent associées aux ajustements qui s'opèrent en raison de changements à l'échelle mondiale, dont les variations du taux de change. Il est capital d'établir les causes de ces variations, car, selon leur nature, elles peuvent avoir des implications différentes pour la demande globale et, par conséquent, pour la politique monétaire (voir l'encadré).

L'évolution économique récente

Le PIB réel du Canada a progressé à un rythme annuel de 3,2 % au troisième trimestre de 2004 (Graphique 2), sous l'impulsion d'une hausse de la demande intérieure finale (Graphique 3). Les exportations, cependant, ont été beaucoup plus faibles qu'on ne l'avait escompté, ce qui a contribué à une accumulation des stocks plus importante que prévu. L'expansion économique devrait s'être ralentie aux alentours de 2 1/4 % au quatrième trimestre de 2004, les entreprises ayant commencé à corriger cette accumulation.

On estime donc que la croissance au second semestre de 2004 avoisinait 2 3/4 %, soit un niveau un peu moindre que celui projeté dans le Rapport d'octobre. Ce taux est aussi légèrement inférieur à l'évaluation que fait la Banque du rythme de progression de la production potentielle.

La politique monétaire et les variations du taux de change

Au cours des deux dernières années, le dollar canadien s'est apprécié d'environ 25 % par rapport au dollar É.-U., passant d'une moyenne de 65 cents É.-U. en janvier 2003 à une moyenne de 82 cents É.-U. en janvier 2005.

Il est important de comprendre les causes des fluctuations du cours de la monnaie, car les implications de telles fluctuations pour l'économie de notre pays dépendent essentiellement de leur origine; par conséquent, la politique monétaire peut devoir réagir aux mouvements du taux de change de façon différente selon leur cause. Pour les autorités monétaires, ces causes se répartissent en deux catégories : celles qui découlent d'une variation de la demande de biens et de services canadiens et celles qui n'en découlent pas. Les événements survenus au cours des deux dernières années illustrent bien ces deux catégories de forces.

Au titre de la première catégorie, mentionnons l'intensification de la reprise économique mondiale, qui a provoqué un renchérissement substantiel des produits de base et une forte demande étrangère de produits canadiens, en particulier de matières premières, faisant directement augmenter la demande globale au Canada. L'appréciation connexe du dollar canadien a atténué cet accroissement de la demande globale et facilité l'ajustement de notre économie en encourageant un déplacement de l'activité vers le secteur de l'exportation de produits de base. Si cet effet modérateur sur la demande globale devait contrebalancer entièrement la hausse directe de la demande, la politique monétaire n'aurait pas à réagir.

La deuxième catégorie de forces, qui n'est aucunement liée à la demande de biens et de services canadiens, concerne l'affaiblissement généralisé du dollar É.-U. par rapport à la plupart des grandes monnaies flottantes. Cet affaiblissement s'explique par une pénurie d'épargne aux États-Unis — due en partie au déficit budgétaire croissant du pays — et par une épargne excédentaire ailleurs dans le monde, principalement en Asie. L'appréciation connexe du dollar canadien contribue à réduire la demande étrangère de produits canadiens. Toutes choses égales par ailleurs, la politique monétaire doit alors adopter une orientation plus expansionniste qu'il n'aurait fallu autrement.

L'une des difficultés importantes auxquelles les autorités monétaires du Canada ont dû faire face au cours des deux dernières années a été de déterminer l'influence relative de ces deux grandes forces sur le dollar canadien et leur incidence nette sur la demande globale au pays. Au début de la période, les deux forces étaient à l'oeuvre, mais le raffermissement de la demande mondiale et le renchérissement des produits de base paraissaient donner au dollar l'essentiel de sa vigueur. Ces derniers mois, cependant, la dépréciation du billet vert semble être devenu le facteur prédominant, en particulier dans le contexte d'une stabilité générale des prix des produits de base.

Bien que les estimations de l'écart de production soient toutes empreintes d'une grande incertitude, la Banque juge néanmoins que l'économie fonctionne quelque peu en deçà des limites de sa capacité, ce qui concorde avec la mesure économétrique de l'écart de production qu'elle utilise habituellement (Graphique 4). En outre, cette évaluation cadre globalement avec les réponses données par les firmes à la question concernant les pressions sur la capacité, lors de la plus récente Enquête sur les perspectives des entreprises menée par la Banque. Certains indicateurs laissent toutefois entrevoir une marge de capacités excédentaires plus appréciable. Par exemple, les augmentations salariales sont restées très modérées et l'inflation mesurée par l'indice de référence s'est située en moyenne sous le point médian de 2 % de la fourchette cible depuis le milieu de 2003. À l'inverse, d'autres indicateurs, tels que l'utilisation des capacités dans le secteur des produits non agricoles, semblent révéler l'existence de pressions plus grandes sur la capacité.

L'inflation mesurée par l'indice de référence est demeurée près de 1,5 % entre août et décembre (Graphique 5). La présence de capacités excédentaires modestes au sein de l'économie canadienne pendant la majeure partie de 2003 et les premiers mois de 2004 a contribué à maintenir l'inflation mesurée par l'indice de référence en deçà du taux attendu à long terme. Le fléchissement des prix d'un bon nombre de biens à forte teneur en importations, attribuable en partie à l'appréciation du dollar canadien, a aussi continué de tirer vers le bas l'inflation mesurée par l'indice de référence au second semestre de 2004.

Parallèlement, la progression sur 12 mois de l'IPC global s'est établie à un peu plus de 2 % en moyenne, sous l'effet surtout d'une importante majoration des prix de détail de l'essence et du mazout par rapport aux niveaux où ils se situaient un an auparavant.

L'ajustement à l'évolution mondiale

Au premier semestre de 2004, l'expansion de l'économie mondiale a été à l'origine d'une relance étonnamment vigoureuse des exportations canadiennes. Résultat, malgré l'appréciation antérieure du dollar canadien, la production a augmenté considérablement de décembre 2003 à août 2004 dans un certain nombre de secteurs très ouverts au commerce international.

Le volume des exportations canadiennes a diminué au troisième trimestre de 2004, et la production dans les secteurs fortement exposés à la concurrence internationale a quelque peu baissé en septembre et en octobre. La nouvelle appréciation qu'a enregistrée le dollar canadien depuis le milieu de 2004 et le léger tassement de la croissance de la demande mondiale pèseront sans doute plus lourdement sur ces secteurs en 2005.

De nouveaux signes témoignent plus clairement d'un ajustement des sociétés canadiennes à l'appréciation passée et récente du dollar. Selon la dernière Enquête sur les perspectives des entreprises, menée par la Banque de la mi-novembre à la mi-décembre, la distinction entre les firmes défavorisées par cette appréciation et celles qui ne le sont pas est marquée. Alors que ces dernières affichent maintenant un plus grand optimisme quant à l'évolution des ventes, les premières — essentiellement des fabricants, des exportateurs et leurs fournisseurs — sont devenues nettement pessimistes.

Les résultats de cette enquête indiquent que beaucoup d'entreprises s'efforcent d'améliorer leur productivité et d'abaisser leurs coûts, en réaction non seulement à l'appréciation du dollar canadien, mais aussi à la concurrence accrue livrée par des fournisseurs asiatiques. Un nombre croissant choisissent de comprimer leurs coûts en augmentant leurs importations d'intrants et de produits finis d'Asie. Quelques-unes s'ajustent à l'appréciation en délaissant les produits et marchés peu rentables pour se tourner vers ceux offrant de meilleures perspectives de profits. D'autres encore projettent d'accroître leurs investissements en machines et matériel. Contrairement à ce qui a été observé lors des enquêtes précédentes, ces dernières comprennent maintenant des firmes qui déclarent avoir été défavorisées par l'appréciation du dollar canadien.

Les perspectives économiques

Les cours mondiaux du pétrole ont baissé depuis la fin d'octobre. Le niveau actuel des cours à terme du pétrole donne à penser que le prix du baril de West Texas Intermediate (WTI) se situera en moyenne aux alentours de 47 dollars É.-U. au premier semestre de 2005, avant de redescendre à environ 42 dollars É.-U. dans la deuxième moitié de 2006 (Tableau 2). Ce scénario constitue une certaine révision à la baisse comparativement à celui envisagé dans le Rapport d'octobre, ce qui fait en sorte que les perspectives de croissance de l'économie mondiale reposent sur des bases un peu plus prometteuses.

L'appréciation de l'euro et du yen par rapport au dollar É.-U entraînera un déplacement de la demande du Japon et de la zone euro vers la Chine ainsi que vers les États-Unis. Dans ce pays, le dynamisme des investissements des entreprises et la vigueur continue des dépenses de consommation, appuyées par les gains réalisés au chapitre de l'emploi, alimenteront l'expansion économique, qui devrait, par conséquent, s'établir juste au-dessous de 4 % en 2005 et 2006.

Au Canada, on s'attend à ce que la poursuite de la forte croissance de la demande intérieure finale contribue de façon importante à une expansion de l'économie cette année et l'an prochain (Tableau 1). Les investissements des entreprises devraient augmenter sensiblement sous l'effet de la vigueur soutenue de l'expansion économique à l'échelle mondiale, du maintien concomitant des cours des produits de base à de hauts niveaux, des conditions financières favorables ainsi que des réductions en cours des prix des machines et du matériel importés. On pense que de nouveaux gains au chapitre des revenus réels alimenteront une solide hausse des dépenses de consommation. Les investissements dans le logement ne devraient toutefois pas contribuer davantage à l'avance de la demande intérieure, compte tenu de la forte progression qu'ils ont affichée au cours des dernières années.

Ce scénario suppose que les dépenses de tous les ordres de gouvernement augmenteront à peu près au même rythme que les recettes, les administrations publiques s'efforçant toujours de maintenir l'équilibre budgétaire.

L'expansion continue à l'étranger se traduira vraisemblablement par une hausse de la demande d'exportations canadiennes, mais celle-ci devrait être plus que contrebalancée par un essor des importations. On estime que l'appréciation passée et récente du dollar canadien limitera la croissance des exportations et stimulera les importations à l'horizon considéré. Cependant, une grande incertitude continue de planer sur les projections quant à la contribution des exportations nettes à l'expansion du PIB. L'analyse des facteurs fondamentaux déterminant l'évolution du volume des échanges extérieurs du Canada s'est révélée particulièrement difficile au cours des deux dernières années, en raison de la volatilité des données sur le commerce, des révisions auxquelles celles-ci sont sujettes et de l'évolution inusitée de ces échanges dans un contexte de changements structurels majeurs au sein de l'économie mondiale1.

La Banque estimait que le niveau élevé des cours du pétrole pris pour hypothèse dans sa livraison d'octobre du Rapport aurait de faibles répercussions négatives sur la demande globale au Canada en 2005, avant que son effet incitatif sur les dépenses d'investissement et la production des entreprises productrices d'énergie ne se manifeste en 2006. Comme les hypothèses relatives à ces cours sont révisées à la baisse dans la présente Mise à jour, l'effet modérateur à court terme sur la croissance provenant du renchérissement du pétrole et du gaz naturel depuis la fin de 2003 devrait être relativement plus limité.

Dans son scénario de référence, la Banque prévoit que la demande globale de biens et de services canadiens augmentera en moyenne, à l'horizon projeté, un tout petit peu plus rapidement que la production potentielle, dont le taux de croissance est évalué à 3 %. Compte tenu des répercussions de l'appréciation passée et récente du dollar canadien, la Banque estime que l'expansion du PIB réel sera en moyenne légèrement inférieure à 3 % en 2005 et quelque peu supérieure à ce taux en 2006, avec une contraction des exportations nettes légèrement plus prononcée que projeté au moment du Rapport d'octobre, et une progression de la demande intérieure plus soutenue (Tableau 1). Ce scénario de croissance suppose une augmentation de l'offre excédentaire en 2005 et un retour de la production à son plein potentiel au second semestre de 2006.

Les perspectives en matière d'inflation

L'inflation mesurée par l'indice de référence devrait se situer en moyenne juste au-dessus de 1,5 % au premier semestre de 2005, puis remonter progressivement à la cible de 2 % vers la fin de 2006 (Tableau 2).

Les prévisions relatives aux capacités de production excédentaires et aux ressources inutilisées sur le marché du travail donnent à penser que l'inflation mesurée par l'indice de référence restera en deçà du taux attendu à long terme tout au long de 2005 et pendant la majeure partie de 2006. Comme l'économie devrait revenir à son plein potentiel au second semestre de l'an prochain et que les attentes d'inflation demeurent bien ancrées, la Banque estime que l'inflation mesurée par l'indice de référence augmentera progressivement pour atteindre 2 % à l'horizon projeté. Elle s'attend aussi à ce que l'appréciation passée et récente du dollar canadien fasse légèrement pression à la baisse sur l'inflation mesurée par l'indice de référence pendant cette période.

Les perspectives concernant le taux d'accroissement sur 12 mois de l'IPC global seront influencées encore dans une large mesure par le comportement des cours du pétrole brut. Selon les prévisions implicites dérivées des cours à terme du pétrole, le rythme d'augmentation de l'IPC global devrait demeurer un peu au-dessus de 2 % au premier semestre de 2005, puis chuter au second semestre avant de remonter vers celui de l'indice de référence en 2006.

1. Rapport sur la politique monétaire, octobre 2004, Note technique 3, page 28.

Pour recevoir des exemplaires du Rapport sur la politique monétaire ou de la Mise à jour, veuillez communiquer avec la Banque du Canada.

Téléphone : 613 782-8248; adresse électronique : publications@banqueducanada.ca