Banque du Canada

Version intégrale >>
      

Publications et recherches

La mise en oeuvre de la politique monétaire à l'ère du STPGV :
notions de base1

Introduction

La méthode utilisée par la Banque du Canada pour mettre en oeuvre sa politique monétaire est étroitement liée au système permettant de compenser et de régler quotidiennement les paiements. Parallèlement à la mise en service d'un nouveau système électronique (le Système de transfert de paiements de grande valeur ou STPGV) par l'Association canadienne des paiements, un nouveau cadre de mise en oeuvre de la politique monétaire a été adopté le 4 février 19992. Le présent document résume les objectifs et les principaux éléments du cadre qu'utilise la Banque du Canada pour mettre en oeuvre sa politique monétaire. Il comprend un tableau décrivant les principales caractéristiques du cadre en vigueur et le rôle qu'elles jouent au sein du STPGV, ainsi qu'un glossaire des termes relatifs aux opérations de politique monétaire.

Aperçu de la politique

La Banque du Canada établit un taux cible à l'intérieur d'une fourchette opérationnelle pour le financement à un jour (ou fonds à un jour) dans le but d'influer sur les autres taux d'intérêt à court terme et sur le taux de change (Thiessen, 1995). La capacité d'influer sur les autres taux à court terme découle en partie du fait que les stocks de titres du marché monétaire sont généralement financés par des fonds à un jour. Toutefois, d'autres facteurs, notamment l'évolution des attentes du marché et les mouvements du taux de change, influencent également la manière dont les autres taux d'intérêt, notamment pour les échéances relativement courtes, réagissent aux changements du taux cible.

Les modifications du taux visé pour le financement à un jour constituent la première étape du mécanisme par lequel les mesures de politique monétaire prises par la Banque du Canada se transmettent à la dépense globale et, au bout du compte, à l'inflation. En outre, la Banque peut modifier ce taux cible pour aider à stabiliser les marchés financiers dans certaines circonstances.

Principales caractéristiques du cadre opérationnel : le taux cible du financement à un jour, la fourchette opérationnelle et la gestion des soldes de règlement

Le taux cible du financement à un jour

La Banque du Canada annonce ses décisions concernant le taux cible du financement à un jour selon un calendrier de dates préétablies3. Les annonces sont faites à 9 h par voie de communiqué. Si le taux cible du financement à un jour est modifié, le nouveau taux entre en vigueur le jour où il est annoncé.

  • Pour renforcer le taux cible, la Banque du Canada intervient sur le marché des fonds à un jour à 11 h 45 afin d'effectuer au besoin des opérations d'open market au taux cible. L'intervention a lieu en milieu de journée afin d'inciter les opérateurs à négocier les uns avec les autres pendant la matinée, période durant laquelle se déroule une forte proportion des activités de financement journalières4.
  • Si les fonds à un jour se négocient généralement au-dessus du taux cible, la Banque procède à des prises en pension spéciales.
  • Si, au contraire, le taux à un jour se situe généralement au-dessous du taux cible, la Banque procède à des cessions en pension.
  • Si le taux à un jour s'établit généralement aux alentours du taux cible, il n'y a pas d'intervention.
  • Les contrepartistes de ces opérations sont les négociants principaux.
  • Un plafond est fixé à l'avance pour les prises en pension spéciales et les cessions en pension de chacun des contrepartistes.
La fourchette opérationnelle

Le principal outil dont dispose la Banque du Canada pour influencer le taux des fonds à un jour est la fourchette opérationnelle de 50 points de base fixée pour ce taux.

La fourchette opérationnelle et le taux officiel d'escompte sont aussi annoncés dans le communiqué sur le taux cible du financement à un jour. Toute modification de la fourchette opérationnelle et du taux officiel d'escompte entre en vigueur le jour où elle est annoncée.

  • La limite supérieure de la fourchette opérationnelle est le taux d'intérêt applicable aux prêts sur découvert (avances) accordés aux participants au STPGV lors du règlement final des paiements. Ce taux est le taux officiel d'escompte.
  • La limite inférieure de la fourchette est le taux d'intérêt servi par la Banque du Canada sur les soldes créditeurs après règlement des opérations dans le cadre du STPGV.
  • Le taux cible du financement à un jour établi par la Banque du Canada correspond au point médian de la fourchette opérationnelle.

Le taux des fonds à un jour s'établit généralement à l'intérieur de la fourchette puisque les participants savent qu'ils obtiendront sur leurs soldes créditeurs au minimum le taux d'escompte diminué de 50 points de base et qu'ils n'auront pas à payer, sur leurs soldes débiteurs, plus que le taux d'escompte, et ce, en vertu des facilités permanentes de crédit que leur offre la Banque du Canada.

La gestion des soldes de règlement (la régulation des encaisses)

Le niveau cible des soldes de règlement dans l'ensemble du système financier a toujours été de zéro ou plus. Par conséquent, tout participant au STPGV dont le solde de règlement est excédentaire sait qu'il y a au moins un autre participant dont le compte affiche un déficit d'un montant égal à son excédent et avec qui il peut effectuer des transactions aux taux du marché.

Durant les premiers mois qui ont suivi la mise en place du nouveau cadre opérationnel, la Banque du Canada a le plus souvent gardé à zéro le niveau des soldes de règlement dans le système. Toutefois, les fonds à un jour se négociaient généralement au-dessus du taux cible, ce qui témoignait de l'existence d'une demande de soldes de règlement excédentaires. À la fin de chaque mois depuis septembre 1999, et tous les jours depuis novembre 1999, la Banque fournit généralement des soldes de règlement supplémentaires aux participants au STPGV; ces soldes ont avoisiné les 50 millions de dollars récemment, mais ils peuvent atteindre un montant un peu plus élevé lorsque des pressions techniques se font sentir.

Effet du transfert des dépôts du gouvernement sur le niveau des soldes de règlement

  • Pour maintenir les soldes de règlement au niveau désiré, la Banque doit neutraliser l'effet net des mouvements de fonds du secteur public entre les comptes à la Banque du Canada et ceux du système financier. (Ces mouvements de fonds se composent des encaissements et décaissements du gouvernement, des transactions que la Banque du Canada effectue pour son propre compte et des opérations qu'elle fait pour le compte de ses clients.)
  • Cette neutralisation (s'ajoute au montant de cette opération toute modification du niveau des soldes de règlement excédentaires) est effectuée par le transfert de dépôts du gouvernement du compte de ce dernier à la Banque du Canada vers les participants à l'adjudication des soldes de trésorerie du gouvernement et l'inverse.
  • Le transfert se fait au moyen de l'adjudication des encaisses du Receveur général (du gouvernement fédéral), qui se tient deux fois par jour, à 9 h 15 puis à 16 h 15.
  • La différence entre le montant total des dépôts qui est adjugé et celui qui vient à échéance correspond au montant de la neutralisation et de la modification du niveau des soldes de règlement excédentaires dans le système. Si, par exemple, le gouvernement recevait un montant net de 100 millions de dollars en impôts dans son compte à la Banque du Canada (le banquier de l'État), en l'absence de neutralisation, les soldes de règlement dans le système bancaire diminueraient d'un montant correspondant. Pour maintenir le niveau des soldes de règlement dans le système, la Banque devrait alors faire en sorte que le montant net des dépôts du gouvernement mis aux enchères augmente de 100 millions de dollars (ou de 200 millions de dollars, si l'on veut plutôt relever de 100 millions de dollars le niveau des soldes de règlement dans le système). Par contre, si la Banque effectuait pour 100 millions de dollars de prises en pension spéciales, le montant net des dépôts du gouvernement offerts à l'adjudication cette journée-là serait réduit de 100 millions de dollars (ou, si le montant des dépôts mis en adjudication demeurait inchangé, le montant net des soldes de règlement s'accroîtrait de 100 millions de dollars).

Période de négociation préalable au règlement

Après la clôture des opérations des clients par l'entremise du STPGV, à 18 h, les participants au système disposent d'une demi-heure pour conclure des transactions entre eux. Cela leur permet de réduire leur solde — résultant de leurs propres opérations et de celles de leurs clients — au sein du STPGV par des transactions conclues à des taux d'intérêt qui, généralement, ne dépassent pas les limites de la fourchette opérationnelle. En fait, les opérations sont habituellement conclues à des taux situés à l'intérieur de la fourchette opérationnelle, puisque cette pratique s'avère normalement plus avantageuse, tant pour le prêteur que pour l'emprunteur, que de recourir aux facilités offertes par la Banque du Canada à des taux correspondant aux limites de cette fourchette.

Effets de paiement sur support papier et effets de paiement électronique de petite valeur

Les effets de paiement sur support papier, tels que les chèques, et les effets de paiement électronique de petite valeur, comme les débits préautorisés et les dépôts directs, continuent d'être réglés par le Système automatisé de compensation et de règlement (SACR). Lorsque le STPGV a été introduit, la valeur des paiements traités quotidiennement par le SACR s'élevait à 40 milliards de dollars environ. Au premier trimestre de 2005, ce chiffre était tombé à quelque 16 milliards de dollars en moyenne.

Depuis le 1er novembre 2003, les résultats des paiements transitant par le SACR sont comptabilisés dans les livres de la Banque du Canada selon la formule du « règlement pour valeur le lendemain » (Tuer, 2003)5.

Comme la quasi-totalité des mouvements de fonds du secteur public et la majorité des transactions de gros liées au marché passent par le STPGV, la Banque s'intéresse uniquement à ce dernier aux fins de la conduite de sa politique monétaire.

Résumé

Dans le cadre du STPGV, la Banque du Canada influe sur les marchés financiers par l'entremise de son incidence sur le taux du financement à un jour, pour lequel elle se fixe une cible correspondant au point médian de la fourchette opérationnelle de 50 points de base applicable à ce taux, et d'un cadre visant à maintenir le taux du financement à un jour à l'intérieur de la fourchette fixée.

Mise en oeuvre de la politique monétaire à l'ère du STPGV
  STPGV
Taux cible du financement à un jour À 9 h, aux dates préétablies, la Banque annonce le taux cible du financement à un jour. Si le taux est modifié, le nouveau taux entre en vigueur le jour où il est annoncé.
Le taux cible du financement à un jour est renforcé au besoin, à 11 h 45, par des opérations à réméré sur l'open market conclues au taux cible; prises en pension spéciales (si les fonds à un jour se négocient à un taux supérieur au taux cible) ou cessions en pension (si les fonds à un jour se négocient à un taux inférieur au taux cible).
Fourchette opérationnelle de 50 points de base La limite supérieure de la fourchette représente le taux appliqué aux avances accordées par la Banque du Canada à la fin d'une journée de règlement (STPGV). Ce taux est le taux officiel d'escompte.
La limite inférieure représente le taux servi sur les dépôts à la Banque du Canada à la fin d'une journée de règlement (STPGV).
Le point médian représente le taux du financement à un jour visé par la Banque du Canada.
La fourchette opérationnelle et le taux officiel d'escompte sont aussi annoncés dans le communiqué sur le taux cible du financement à un jour. Toute modification de la fourchette opérationnelle et du taux officiel d'escompte entre en vigueur le jour où elle est annoncée. Ainsi, les participants au STPGV peuvent effectuer des transactions toute la journée en connaissant parfaitement les taux applicables à leurs soldes en fin de journée.
Régulation des encaisses Sert à :
  • neutraliser l'effet des mouvements de fonds de l'État au compte de ce dernier à la Banque (si le niveau des soldes de règlement est inchangé);
  • modifier le niveau des soldes de règlement.
Effectuée par des transferts de fonds de l'État entre la Banque du Canada et les participants au STPGV ainsi que d'autres participants aux adjudications du gouvernement.
Transfert, effectué le jour T pour valeur le jour T, des dépôts du gouvernement au moyen du processus d'adjudication, tenu deux fois par jour, des encaisses de l'État. Neutralisation des mouvements de fonds du secteur public et modification éventuelle du niveau des soldes de règlement excédentaires par la différence entre les montants mis aux enchères et les montants arrivant à échéance.

Glossaire

Avances

Une avance STPGV est un prêt sur nantissement que la Banque du Canada accorde à un participant au STPGV pour couvrir sa position débitrice en fin de journée au sein du STPGV. Le taux d'intérêt applicable à ce prêt à un jour est la limite supérieure de la fourchette opérationnelle du taux du financement à un jour (le taux officiel d'escompte).

Cessions en pension

Opérations de pension en vertu desquelles la Banque du Canada offre de vendre des titres du gouvernement du Canada à des contrepartistes désignés, en s'engageant à les racheter à un prix fixé à l'avance, le jour ouvrable suivant.

La Banque a fait appel pour la première fois aux cessions en pension en 1986 afin de compenser les pressions à la baisse non souhaitées s'exerçant sur le taux du financement à un jour. À partir du milieu de 1994 et jusqu'à l'entrée en fonction du STPGV, les cessions en pension ont servi à renforcer la limite inférieure de la fourchette opérationnelle et ont été conclues avec les grandes banques. Dans le cadre du STPGV, elles sont effectuées en milieu de journée si le taux des fonds à un jour est généralement inférieur au taux cible; les contrepartistes désignés sont les négociants principaux.

Négociants principaux

Il s'agit du sous-groupe des distributeurs de titres d'État avec lesquels la Banque du Canada traite lorsqu'elle effectue des prises en pension spéciales et des cessions en pension. Les négociants principaux ont plusieurs responsabilités, notamment celles de détenir une certaine part des marchés des titres du gouvernement canadien et de tenir ces marchés. Les désignations « distributeurs de titres d'État » et « négociants principaux » ont remplacé respectivement celles de « distributeurs principaux » et « agents agréés » utilisées par le passé. Pour obtenir plus de renseignements à ce sujet, voir le document intitulé Nouvelles règles régissant les adjudications de titres du gouvernement canadien et la surveillance de celles-ci par la Banque du Canada, daté du 11 août 1998.

Participants

Il s'agit de membres de l'Association canadienne des paiements (ACP) qui participent au STPGV et qui règlent leurs opérations directement par des inscriptions dans les livres de la Banque du Canada. L'appellation « adhérents » continue à désigner les membres de l'ACP qui participent au SACR et qui tiennent un compte de règlement à la Banque du Canada. Tous les adhérents participent au STPGV.

Prises en pension spéciales

Opérations de pension en vertu desquelles la Banque du Canada offre d'acheter des titres du gouvernement du Canada à des contrepartistes désignés en s'engageant à les leur revendre à un prix fixé d'avance, le jour ouvrable suivant.

La Banque du Canada a fait appel pour la première fois aux prises en pension spéciales en 1985 afin d'atténuer les pressions temporaires et non désirées à la hausse s'exerçant sur le taux du financement à un jour. L'adjectif « spécial » indiquait que la Banque pouvait y recourir de façon discrétionnaire, à la différence des prises en pension ordinaires, qui étaient conclues, dans des limites déterminées, à l'initiative des courtiers en valeurs mobilières admissibles (les agents agréés du marché monétaire). À partir du milieu de 1994 et jusqu'à l'entrée en fonction du STPGV, les prises en pension spéciales ont servi à renforcer la limite supérieure de la fourchette opérationnelle et ont été conclues avec les agents agréés. Dans le cadre du STPGV, elles sont effectuées en milieu de journée si le taux des fonds à un jour est généralement supérieur au taux cible; les contrepartistes désignés sont les négociants principaux.

SACR

Le SACR (Système automatisé de compensation et de règlement de l'ACP) est le système au moyen duquel sont échangés les effets de paiement sur support papier, tels que les chèques, et les effets de paiement électronique, comme les débits préautorisés et les dépôts directs, et sont calculés les montants nets à payer et à recevoir. Le déficit ou l'excédent net final de compensation est réglé au compte que l'adhérent concerné tient à la Banque du Canada, par un virement débiteur ou créditeur effectué en milieu de journée, selon la formule du « règlement pour valeur le lendemain ». Avant l'entrée en fonction du STPGV, tous les effets de paiement passaient par le SACR.

Taux d'escompte

Taux minimum auquel la Banque du Canada accorde des avances à court terme aux membres de l'ACP. Depuis le 22 février 1996, le taux d'escompte correspond à la limite supérieure de la fourchette opérationnelle du taux du financement à un jour.

Taux du financement à un jour

Taux d'intérêt auquel les fonds sont empruntés ou prêtés pour un jour ouvrable. En raison de différences tenant notamment à la forme prescrite et aux dispositions de nantissement, les taux d'intérêt à un jour peuvent varier légèrement d'un instrument à l'autre. Cependant, les principaux taux à un jour évoluent tous de façon très voisine en raison des opérations d'arbitrage effectuées sur le marché, et les faibles écarts observés entre eux sont insignifiants du point de vue de la politique monétaire. Les fonds à un jour sont obtenus au moyen d'opérations à réméré (pensions), de prêts à vue et de swaps de devises. Pour estimer le taux des fonds à un jour, la Banque du Canada calcule la moyenne pondérée du coût des opérations de financement à un jour conclues par les grands courtiers. Le taux des opérations de pension à un jour au Canada (CORRA) est une autre mesure utilisée. Il existe aussi un marché à un jour pour les dépôts de gros et les dépôts interbancaires, qui ne donnent pas lieu à un nantissement et ne sont pas pris en compte dans la mesure de la Banque ni dans la mesure CORRA.

Bibliographie

Howard, D. (1998). « La mise en oeuvre de la politique monétaire à l'ère du STPGV : notions de base », Revue de la Banque du Canada (automne), p. 57-66.

Thiessen, G. (1995). « L'incertitude et la transmission de la politique monétaire au Canada », Revue de la Banque du Canada (été), p. 41-58.

Tuer, E. (2003). « Note technique : L'élimination du règlement rétroactif dans le SACR », Revue de la Banque du Canada (automne), p. 41-45.

1. Mise à jour de l'article de Howard (1998).

2. Pour plus de détails à ce sujet, voir le document ayant pour titre Le cadre de mise en oeuvre de la politique monétaire après l'entrée en fonction du système de transfert de paiements de grande valeur, 31 mars 1999.

3. La Banque se réserve la possibilité de prendre des mesures de politique monétaire entre deux dates préétablies; cependant, elle ne se prévaudra de cette option que dans des circonstances exceptionnelles.

4. Dans des circonstances exceptionnelles, la Banque peut aussi recourir à des opérations à réméré additionnelles.

5. Entre juillet 1986 et le 1er novembre 2003, le règlement dans le SACR s'effectuait à midi, le lendemain du jour où les effets étaient présentés à la compensation, mais les résultats du règlement étaient comptabilisés dans les livres de la Banque du Canada le jour précédent, conformément au mode de règlement « rétroactif » (Dingle 1986).