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Série de séminaires d'Environnement Canada en recherche sur les politiques

Plan B : Sauver une planète agressée et une civilisation en péril

Lester Brown
Dr. Donald Mackay
12 décembre, 2003

Dans la collectivité environnementale internationale, le Worldwatch Institute, fondé par Lester Brown, constitue un centre d'échange d'informations fiables unique en son genre et où l'on interprète les conditions physiques de chaque région de la Terre. Au cours des 30 dernières années, l'Institut a acquis une excellente réputation quant à ses rapports annuels State of the World portant de l'état de la planète et dans lesquels on interprète les tendances environnementales actuelles de façon approfondie.


Lester Brown, quant à lui, est reconnu pour ses prévisions, fondées sur des données, de ce que les tendances actuelles laissent présager en ce qui a trait à la santé de l'environnement et aux conditions de vie sur la planète. En 2001, il a fondé le Earth Policy Institute dans le but de sensibiliser davantage le public aux tendances qui nuisent à la planète et, éventuellement, de changer les mentalités du public à ce sujet. Grâce à son ton expressif et pragmatique ainsi qu'à sa logique transparente, il livre des messages qui sont parfois alarmants.

Pour son exposé à Environnement Canada, Lester Brown s'est inspiré des idées contenues dans son plus récent livre, Plan B, dans lequel il présente une solution de rechange au plan implicite qui gouverne notre consommation de ressources mondiales.

Lester Brown soutient principalement que la déforestation, le surpâturage et la désertification, le surpompage et la surpêche constituent une surexploitation du capital naturel de la Terre. Il prédit aussi que le premier signe de problèmes sérieux dans notre relation avec les écosystèmes dont nous dépendons sera la montée en flèche du prix des produits alimentaires d'ici deux ans.

Limites environnementales imminentes

Depuis plusieurs années, le mouvement environnementaliste tente de sensibiliser la population au fait que si l'utilisation actuelle des ressources est maintenue, les limites écologiques seront éventuellement atteintes. Toutefois, la nature des effets de ces limites sur nos vies et la rapidité à laquelle elles seront atteintes ne sont pas encore évidentes.

Dans son plus récent ouvrage, Lester Brown vient préciser ces prévisions : les limites environnementales se traduiront par une montée en flèche, à l'échelle internationale, du prix des produits alimentaires, et ce, d'ici deux ans. Au cours de son exposé, il a présenté certaines des plus récentes tendances environnementales, notamment l'abaissement des nappes phréatiques et l'augmentation des températures, qui influencent les tendances économiques, qui elles auront des conséquences géopolitiques. Il soutient que nous n'aurons bientôt plus le choix de faire face à certaines réalités que, jusqu'à maintenant, nous avons pu ignorer.

Double défi dans le secteur de l'agriculture

Les agriculteurs sont confrontés à deux nouvelles situations qui nuisent à leur productivité : la pénurie d'eau causée par l'assèchement des réservoirs aquifères et l'augmentation des températures.

1. Abaissement des nappes phréatiques aux quatre coins de la planète
L'arrivée des pompes à eau diesels et électriques a permis d'extraire l'eau souterraine à un rythme plus rapide que celui auquel les réservoirs sont naturellement alimentés. Le surpompage permet peut-être, à court terme, d'accroître la production alimentaire, mais, à long terme, il garantit presque sa diminution puisque les réservoirs aquifères finiront par se tarir.

Un nombre inquiétant de pays pratiquent le surpompage. Dans certaines parties des plaines du Nord de la Chine, les niveaux d'eau diminuent d'environ trois mètres (10 pieds) par année, ce qui est particulièrement inquiétant puisque cette région est responsable de la moitié de la production de blé et du tiers de la production de maïs de la Chine. Tous les états de l'Inde, sauf ceux du Nord-Est, pratiquent le surpompage. Cette pratique se fait aussi de manière intensive dans le Sud des grandes plaines des États-Unis. En fait, plus de la moitié de la population mondiale vit dans des pays où les nappes phréatiques s'assèchent.

2. Production alimentaire et changements climatiques
Le secteur agricole sera aussi confronté au défi que pose l'augmentation des températures moyennes. La plupart des modèles qui permettent de prédire les effets des changements climatiques sur l'agriculture sont conçus d'après des projections d'un modèle climatique et des hypothèses générales concernant les effets du réchauffement sur les cultures agricoles. Cependant, les recherches menées par l'Institut international de recherche sur le riz et le ministère américain de l'agriculture au cours des deux dernières années ont indiqué que pour chaque degré Celsius au-dessus de la température optimale observé au cours de la saison de croissance, le rendement en grains du blé, du riz et du maÏs diminue de 10 p. 100. Compte tenu de la chaleur et de la sécheresse, il n'est pas surprenant qu'au cours des deux dernières années, les récoltes internationales aient connu des baisses considérables. Par exemple, la vague de chaleur qui a frappé la région qui s'étend de la France à l'Ukraine en août 2003 a causé une chute importante des récoltes.

Pénurie alimentaire

Ce double défi rend la tâche encore plus difficile aux agriculteurs qui souhaitent augmenter leur production. En effet, au cours des quatre dernières années, la production céréalière mondiale n'a pas suffi à la demande - le manque à gagner a été de 16 millions de tonnes en 2000, de 27 millions en 2001, de 93 millions en 2002 et de 105 millions en 2003 (soit 5 p. 100 de la consommation céréalière mondiale). Depuis quatre ans, on puise dans les réserves céréalières, ce qui explique pourquoi elles sont à leur niveau le plus bas depuis 1972. Si les agriculteurs de l'ensemble de la planète ne produisent pas ce manque à gagner de 100 millions de tonnes par année, il n'y aura tout simplement pas assez de céréales pour répondre à la demande. La centaine de pays importateurs de céréales se livreront donc une forte concurrence, ce qui entraînera la montée en flèche des prix.

Céréales et importation d'eau

Compte tenu que le commerce des céréales se fait à l'échelle internationale, la pénurie d'eau, qui est habituellement un enjeu local, se transforme graduellement en problème outre-frontière. Certains pays épuisent peu à peu leurs réserves en eau, surtout les pays d'Afrique du Nord, du Moyen-Orient et la Chine, et répondent aux besoins grandissants de leurs milieux urbains en détournant l'eau de l'agriculture au profit des villes. C'est donc dire que d'éventuelles pénuries en eau entraîneront des pénuries en produits alimentaires.

L'importation sera nécessaire afin de pallier le manque à gagner découlant de la baisse de la production agricole. Les pays importeront non seulement des céréales, mais aussi de l'eau compte tenu qu'il faut mille tonnes d'eau pour produire une seule tonne de céréales. En effet, la façon la plus efficace d'importer de l'eau consiste à l'importer sous forme de grain.

Un nouveau joueur clé : la Chine

Lester Brown prédit qu'on prendra véritablement conscience du problème lorsque la Chine se tournera vers le marché mondial pour se procurer des quantités massives de céréales. La production céréalière chinoise, qui est miraculeusement passée de 90 à 392 millions de tonnes entre 1950 et 1999, a aujourd'hui baissé à 322 millions de tonnes. Cet écart de 70 millions de tonnes dépasse le volume de céréales récoltées au Canada. Afin de mettre les choses en perspective, il faut savoir qu'à l'heure actuelle, le plus grand importateur de céréales au monde est le Japon et il importe moins de la moitié de cette quantité (26 millions de tonnes) chaque année. Afin de pallier sa baisse de production, la Chine puise dans ses réserves, qui devraient être complètement épuisées d'ici un an. La Chine, le pays le plus populeux au monde, ne sera bientôt plus autosuffisant en ce qui a trait aux produits alimentaires et dépendra de manière considérable des marchés mondiaux.

C'est donc par nécessité que la Chine devra se tourner vers les États-Unis, qui sont responsables de près de la moitié des exportations mondiales de céréales. Un scénario géopolitique très intéressant se dessine à l'horizon : les consommateurs chinois, dont les excédents commerciaux avec les États-Unis atteignent les 100 milliards de dollars, somme suffisante pour acheter deux fois la totalité des céréales récoltées aux États-Unis, feront concurrence aux Américains pour leurs propres céréales. Cette forte concurrence entraînera certainement la montée des prix.

Au cours des dernières décennies, les États-Unis ont parfois réagi en limitant leurs exportations céréalières vers la Chine. Mais dans le contexte mondial actuel, les États-Unis ont avantage à préserver la stabilité politique de la Chine. En effet, l'économie chinoise est le moteur de l'économie de l'Asie et depuis les dernières années, elle est la seule économie mondiale importante à avoir connu une croissance rapide pendant de nombreuses années. C'est donc dire que la Chine est en voie de devenir un moteur économique international. En fait, si on compare la taille des économies mondiales en fonction de la parité des pouvoirs d'achat plutôt que des taux de change conventionnels, la Chine est maintenant au deuxième rang des puissances économiques, derrière les États-Unis.

Manque de prévoyance

Lester Brown s'inquiète du fait que les répercussions que pourrait avoir l'abaissement des nappes phréatiques n'ont pas encore convaincu les différents pays de déployer des efforts concertés afin d'accroître la productivité de l'eau et de ralentir la croissance des populations en vue de rétablir un certain équilibre.

Il croit aussi que, d'ici deux ans, on prendra pleinement conscience que les limites environnementales sont atteintes. Une inquiétante question demeure : Que pouvons-nous faire pour composer avec les limites environnementales imminentes?

Solutions : Plan B

Dans le livre qu'il a publié en 2003, Plan B: Rescuing a Planet Under Stress and a Civilization in Trouble, L. Brown propose un plan qui permet de faire face aux limites environnementales qui nous attendent.

Son " Plan B " est composé de trois volets :

1. Accroître la productivité de l'eau
L'eau doit être utilisée de manière plus productive dans l'ensemble des activités économiques et, principalement, dans le secteur de l'agriculture. Ce type d'approche est semblable à celle lancée au milieu du siècle dernier qui visait à augmenter la productivité des sols. Ainsi, de 1950 à 2003, le rendement en grains est passé de 1,1 à 2,8 tonnes par hectare.

2. Stabiliser la population
D'ici 2050, on prévoit que la population mondiale augmentera de 3 milliards de personnes, nombre qui se répartira principalement dans des pays où les réserves d'eau diminuent déjà et où les puits se tariront. Afin de prévenir de plus grandes contraintes attribuables à la population, il faut offrir des services de planification familiale et créer des conditions sociales qui permettront d'accélérer le virage vers l'éducation pour tous et des soins médicaux de base pour tous les jeunes, et plus particulièrement pour les jeunes femmes.

3. Stabiliser le climat
L. Brown propose de réduire les émissions de carbone de moitié d'ici 2015. Il donne plusieurs exemples de mesures qui permettraient de relever ce défi. Premièrement, le remplacement des ampoules à incandescence par des ampoules fluorescentes compactes, qui sont 33 p. 100 moins énergivores, permettrait de fermer des centaines de centrales thermiques alimentées au charbon. Deuxièmement, aux États-Unis, l'augmentation du rendement des carburants automobiles au niveau actuel de celui des véhicules hybrides permettrait de diminuer la consommation d'essence de moitié. À long terme, l'hydrogène doit être le carburant à privilégier. Les stations-services pourraient être adaptées de manière à ce qu'elles puissent produire leur propre hydrogène à partir de l'électricité, d'eau et d'un compresseur. Les moteurs à combustion interne peuvent facilement, et à peu de frais, être convertis à l'hydrogène. Troisièmement, le vent deviendra la source mondiale d'énergie par excellence compte tenu qu'il s'agit d'une ressource abondante, peu coûteuse, inépuisable, accessible à grande échelle, propre et sans effets nuisibles sur le climat. Le Canada est prêt à tirer avantage de l'énergie éolienne compte tenu du ratio élevé vent/population qui le caractérise.

Les défis qui nous attendent

Lester Brown compare le défi associé à nos habitudes de consommation excessives à un ballon qu'il faut dégonfler avant qu'il n'éclate. La principale question est : Pouvons-nous prendre ce virage? D'ici les prochaines années, nous pourrions devoir agir dans des délais records afin de relever les défis qui nous attendent en matière d'environnement.

Ce n'est pas la première fois que des réorientations massives des modèles de production économique et des habitudes de consommation sont nécessaires. Au début de 1942, le président américain Franklin Roosevelt a fixé des objectifs de production d'armes pour les États-Unis, c'est-à-dire 45 000 chars d'assaut, 60 000 avions, 20 000 canons antiaériens et 6 millions de tonnes de marchandise. À l'époque, l'industrie automobile américaine représentait la plus importante proportion du pouvoir industriel au monde. Roosevelt a convoqué les leaders de l'industrie automobile pour les aviser qu'ils étaient désormais les principaux producteurs de ces armes. Les leaders n'ont pas refusé, mais ils ont tout de même insisté sur le fait que c'était beaucoup demander que de produire ces armes, en plus des automobiles. La réponse de Roosevelt ne se fit pas attendre : " Vous ne comprenez pas. Nous allons interdire la vente d'automobiles à des particuliers aux États-Unis ". Et c'est exactement ce qui s'est produit. Du mois d'avril 1942 à la fin de 1944, la production d'automobiles a été pour ainsi dire inexistante aux États-Unis. L'ensemble de l'industrie a été convertie à la production d'armes. Cette transformation incroyable s'est effectuée non pas au cours de décennies ou d'années, mais bien dans l'espace de quelques mois.

Ils y sont arrivés, tout comme nous pouvons y arriver aussi. La menace qui nous guette pourrait par contre s'avérer plus importante que celle qui planait en 1942. Pour avoir une bonne idée de ce qui est réalisable, il faut savoir que le budget que les États-Unis ont alloué à la défense en 2002 atteignait 343 milliards de dollars (excluant les coûts des opérations en Irak).

Finalement, L. Brown soutient que, depuis le 11 septembre 2001, les chefs politiques et les médias ont tellement mis l'accent sur le terrorisme, et plus récemment sur l'Irak, qu'on en a presque oublié les tendances qui se dessinent en ce qui a trait à l'environnement et qui compromettent l'avenir. Il a terminé son exposé avec la réflexion suivante : Si Ossama ben Laden et ses acolytes ont réussi à détourner notre attention des tendances qui compromettent notre avenir, ils réussiront probablement à atteindre les buts qu'ils se sont fixés d'une manière qui dépasse notre imagination.

Partout dans le monde, le public continue d'exiger une bonne évaluation de tous les produits chimiques utilisés dans le commerce. Nous continuons de relever des défis dans l'évaluation des produits chimiques commerciaux en utilisant un cadre cohérent, transparent, praticable et de préférence rapide pour évaluer les impacts à la fois sur les humains et l'écosystème. L'application des modèles existants et l'élaboration de nouveaux modèles peuvent jouer un rôle essentiel dans cette tàche difficile.

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