Aide sur des dispositifs d'accessibilité Sauter au menu du côté gauche
 

Histoire de l'assurance-chômage - Évolution entre les deux guerres

précédent | menu principal | suivant

C'est en 1789, à Bâle (Suisse), qu'est créé par un syndicat le premier régime d'assurance-chômage. Mais c'est à la fin du XIXe siècle que l'on voit apparaître les premiers régimes fonctionnels : il s'agit de régimes obligatoires élaborés en Suisse, en France et en Belgique par les administrations locales et régionales. Au Royaume-Uni, le premier régime national obligatoire remonte à 1911. En 1920, il couvrait la plupart des travailleurs et devenait un modèle pour les autres pays.

Malgré ces tendances, la politique canadienne traduisait toujours dans les années 1920 la conviction que le fait de trouver et de garder un emploi et de pourvoir aux besoins essentiels de la vie était en grande partie une affaire personnelle. Elle partait également du principe général que l'Acte de l'Amérique du Nord Britannique (AANB) n'accordait qu'aux administrations provinciales le pouvoir de créer des programmes sociaux.

On avait déjà procédé à plusieurs études : la Commission royale d'enquête sur les relations de travail de 1919 avait proposé de créer un régime gouvernemental d'assurance sociale pour les chômeurs involontaires. Ce principe fut entériné par un comité parlementaire en 1929, mais l'assurance-chômage prit la deuxième place par rapport à la réinsertion des anciens combattants de la Première guerre mondiale, à l'aide aux personnes à la charge de ceux qui étaient morts pendant la guerre et aux pensions de vieillesse.

La Crise des années 1930 obligera les Canadiens et leurs gouvernements à changer d'attitude à l'égard des chômeurs. Il n'était plus possible de traiter ceux-ci de paresseux et de mauvais sujets, ou de laisser entendre qu'il y avait quelque chose de digne dans la pauvreté. L'évolution rapide des attitudes sociales et l'exemple de la réaction des gouvernements de Grande-Bretagne, d'Europe, des États-Unis et d'ailleurs à la Crise poussèrent les gouvernements du Canada à agir. On se rendit compte du même coup que les provinces n'avaient guère les moyens de financer ce genre de régime, même si le pouvoir leur en revenait théoriquement.

Le gouvernement du Premier ministre R.B. Bennett élabora une série de programmes sociaux dont faisait partie la Loi sur le placement et les assurances sociales, qui fut promulguée en juin 1935. On s'était inspiré du régime en vigueur en Grande-Bretagne. Il devait s'agir d'un système d'assurance-chômage obligatoire financé par des cotisations des employés, des employeurs et de l'État. Mais le régime canadien devait fournir des prestations qui seraient fonction de la rémunération au lieu des prestations fixes assurées par la législation en vigueur en Grande-Bretagne.

Pour tenter de devancer la question de la compétence constitutionnelle, le préambule de la loi indiquait que pour la paix, l'ordre et le bon gouvernement du Canada, il fallait pourvoir à un Service national de placement, à une assurance contre le chômage et à d'autres formes d'assurance sociale (par exemple l'assurance-maladie) ainsi qu'au maintien du commerce interprovincial et international sur des bases équitables. C'est la formulation que le gouvernement avait adoptée pour faire admettre que l'ampleur de la crise économique l'autorisait à agir en vertu des pouvoirs que lui conférait l'AANB.

L'opposition libérale, dirigée par William Lyon Mackenzie King, appuya le principe d'un Régime d'assurance-chômage et d'un Service national de placement, mais rejeta la législation pour des motifs essentiellement constitutionnels. Les députés appartenant à la Fédération du Commonwealth coopératif trouvaient que la loi était trop limitée dans son application, insuffisante du point de vue des prestations et trop rigide dans ses restrictions. On estimait qu'il serait difficile d'appliquer le système à tout le Canada étant donné la variation des caractéristiques du marché du travail, les fluctuations saisonnières de l'emploi, la distance éventuelle entre les travailleurs et les bureaux publics et l'absence d'ententes avec les provinces.

Plus tard cette année-là, King fut élu Premier ministre : son programme prévoyait des changements législatifs qui permettraient à terme d'établir un système fédéral d'assurance-chômage et plus immédiatement de collaborer avec les provinces et les municipalités en vue de créer des emplois et de venir en aide aux chômeurs. King déféra la loi de son prédécesseur à la Cour suprême du Canada pour obtenir un avis sur sa constitutionnalité.

En 1936, la Cour tranchait : la loi débordait les pouvoirs du gouvernement fédéral. La question était dans le même temps portée à l'attention du Comité judiciaire du Conseil privé d'Angleterre, qui était à l'époque l'ultime tribunal d'appel en droit canadien. Le Comité confirma en 1937 le jugement de la Cour canadienne, et la proposition de Bennett n'alla pas plus loin.

C'est cette même année que le gouvernement nomma la Commission royale des relations entre le Dominion et les provinces (Commission Rowell-Sirois), chargée d'examiner le partage des pouvoirs entre les gouvernements fédéral et provinciaux. La Commission recommanda l'adoption d'un programme fédéral d'assurance sociale pour régler la question du chômage. Puis le gouvernement chercha à obtenir l'appui des provinces pour modifier l'AANB afin d'accorder au gouvernement fédéral le pouvoir exclusif de légiférer dans ce domaine.

précédent | menu principal | suivant