Relevé des maladies transmissibles
au Canada
Volume 31 DCC-6 le 15 juin 2005 Une déclaration d'un comité consultatif
(DCC) Déclaration sur la vaccination antigrippale
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Âge | Type de vaccin |
Dose (mL) |
Nbre de doses |
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6 à 35 mois | sous-unitaire |
0,25 |
1 ou 2* |
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3 à 8 ans | sous-unitaire |
0,5 |
1 ou 2* |
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9 ans | sous-unitaire |
0,5 |
1 |
L'administration intramusculaire est privilégiée. On recommande de pratiquer l'injection dans le deltoïde chez les adultes et les enfants de 12 mois et dans la région antérolatérale de la cuisse chez les nourrissons de < 12 mois.
Le vaccin contre la grippe ne peut pas causer la grippe, car il ne contient pas de virus vivant. Il se produit souvent une douleur au point d'injection pouvant persister jusqu'à deux jours chez les adultes, mais celle-ci perturbe rarement les activités quotidiennes. L'administration prophylactique d'acé-taminophène peut diminuer la fréquence de la douleur au point d'injec-tion(41). On n'a observé aucune augmentation de la fréquence de la fièvre ni d'autres symptômes généraux chez les adultes en bonne santé qui ont reçu le vaccin sous-unitaire par rapport à ceux qui ont reçu un placebo.
Les vaccins sous-unitaires contre la grippe sont sûrs et bien tolérés chez les enfants en santé. Des réactions locales bénignes, surtout une sensibilité au point d'injection, sont observées chez 7 % des enfants en santé de < 3 ans Une fièvre peut se produire après la vaccination chez 12 % des enfants vaccinés de 1 à 5 ans.
Plusieurs vaccins antigrippaux vendus au Canada contiennent d'infimes quantités de thimérosal, qui est utilisé comme agent de conservation(42). Des études rétrospectives de cohortes faites à partir de vastes bases de données sur la santé ont montré qu'il n'existe aucune association entre l'administra -tion durant l'enfance de vaccins contenant du thimérosal et des effets neu -rodéveloppementaux, notamment les troubles du spectre autistique(43,44). Néanmoins, en réponse aux inquiétudes de la population, les fabricants de vaccins antigrippaux au Canada s'efforcent actuellement de produire et de commercialiser des vaccins antigrippaux sans thimérosal.
Les réactions allergiques au vaccin antigrippal sont rares et résultent probablement d'une hypersensibilité à certains composants du vaccin, notamment aux infimes quantités de résidus de protéines d'ufs.
Le syndrome de Guillain-Barré (SGB) a été diagnostiqué chez des adultes à la suite de l'administration du vaccin contre la grippe porcine en 1976, et des données militent en faveur de l'existence d'une relation causale entre le vaccin et le SGB durant cette saison(45). Dans le cadre d'un vaste survol des études publiées depuis 1976, l'Institute of Medicine des ÉtatsUnis a conclu qu'on ne dispose pas de suffisamment de données pour confirmer ou infirmer l'existence d'une relation causale entre le SGB chez les adultes et les vaccins antigrippaux administrés après le programme de vaccination contre la grippe porcine en 1976(45,46).
Au Canada, l'incidence de base du SGB est estimée à un peu plus de 20 cas pour un million d'habitants dans une étude réalisée en Ontario et au Québec(47). Divers agents infectieux, tels que Campylobacter jejuni, ont été associés au SGB. On ne sait pas si l'infection par le virus de la grippe est en soi associée au SGB. On ignore également si la vaccination contre la grippe augmente le risque de récurrence du syndrome chez des personnes qui en ont déjà été atteintes. Il semble pour l'heure prudent d'éviter de vacciner contre la grippe les personnes qui ont souffert du SGB dans les 6 à 8 semaines suivant une vaccination précédente.
Le vaccin contre la grippe n'est pas reconnu comme un facteur prédispo -sant au syndrome de Reye.
Une conjonctivite ou des symptômes respiratoires à la suite de la vaccination antigrippale ont été signalés de façon sporadique avant 2000 au Canada, aux États-Unis et en Europe(48,49). Durant la saison grippale 2000-2001, Santé Canada a cependant reçu un nombre accru de rapports de symptômes et de signes associés au vaccin, qui ont par la suite été décrits comme un syndrome oculo-respiratoire (SOR)(47). La définition de cas (qui a été révisée en 2001) se lit comme suit : l'apparition d'une rougeur oculaire bilatérale ou de symptômes respiratoires (toux, respiration sifflante, oppression thoracique, difficulté à respirer, à avaler, voix rauque ou mal de gorge) et/ou oedème facial survenant dans les 24 heures qui suivent la vaccination antigrippale(50). L'évaluation de la gravité des symptômes du SOR se fonde sur la perception des symptômes par la personne : légers (facilement tolérés; présents mais ne causant pas de problème), modérés (nuisent aux activités de la vie quotidienne; dérangeants, nécessitent une modification des activités et peut-être une médication) ou graves (empêchent d'effectuer des activités de la vie quotidienne; empêchent de travailler ou de dormir). Le mécanisme physiopathologique sous-tendant le SOR demeure obscur.
Après la saison grippale 2000-2001, un plus petit nombre de cas de SOR ont été signalés à Santé Canada (50). La surveillance de tous les effets secon-daires associés aux vaccins (ESAV), y compris du SOR, se poursuit.
Environ 5 % à 34 % des patients qui ont déjà présenté un SOR peuvent connaître une récurrence à la suite du vaccin (50-56). Toutefois, la plupart des récurrences sont moins graves que l'épisode précédent. Les personnes revaccinées qui souffrent à nouveau d'un SOR ne connaîtront pas néces -sairement d'autres épisodes de SOR si elles reçoivent le vaccin dans l'avenir.
Les personnes qui ont manifesté des symptômes légers ou modérés du SOR ou un SOR sévère caractérisé par d'autres symptômes que ceux d'une infec -tion des voies respiratoires inférieures (rougeur oculaire bilatérale, toux, mal de gorge, voix rauque, oedème facial) peuvent recevoir à nouveau en toute sécurité le vaccin antigrippal. Les données sur les événements indésirables présentant un intérêt clinique ne militent pas en faveur d'un vaccin plutôt que d'un autre lors de la revaccination des sujets qui ont déjà souffert du SOR.
Il faudrait demander à un expert d'examiner les risques et les avantages de la vaccination dans le cas des personnes qui ont déjà présenté des symp-tômes graves d'infection des voies respiratoires inférieures (respiration sifflante, oppression thoracique, difficulté à respirer) dans les 24 heures suivant la vaccination, une réaction allergique apparente au vaccin ou tout autre symptôme (p. ex., constriction de la gorge, dysphagie) qui suscitent des craintes quant aux dangers de la revaccination. Ces conseils peuvent être fournis par les médecins hygiénistes locaux ou d'autres experts en maladies infectieuses, en allergologie/immunologie ou en santé publique. Les professionnels de la santé qui ne sont pas sûrs si une personne a déjà souffert du SOR ou a eu une réponse d'hypersensibilité médiée par des IgE devrait demander conseil. Compte tenu de la morbidité et de la mortalité très importantes associées à la grippe, un diagnostic d'allergie au vaccin antigrippal ne devrait être posé qu'après confirmation (notamment au moyen d'un test cutané) par un expert en allergologie/immunologie.
Le Guide canadien d'immunisation(57) donne plus de détails sur l'administra -tion du vaccin et le traitement des effets secondaires.
Il ne faut pas administrer le vaccin contre la grippe aux sujets ayant des antécédents de réaction anaphylactique à ce vaccin ou présentant une hypersensibilité (anaphylaxie) aux ufs qui se manifeste par de l'urticaire, un dème de la bouche et de la gorge, une gêne respiratoire, de l'hypotension ou un état de choc.
Les adultes atteints d'une maladie fébrile aiguë grave ne devraient pas normalement être vaccinés tant que leurs symptômes ne se sont pas atténués. Ceux qui souffrent d'une maladie fébrile bénigne (telle qu'une infection bénigne des voies respiratoires supérieures) peuvent recevoir le vaccin. On ne devrait pas perdre l'occasion d'immuniser une personne par suite du report non justifié de la vaccination.
Bien que le vaccin contre la grippe puisse inhiber la clairance de la warfarine et de la théophylline, des études cliniques n'ont pas démontré l'existence d'un quelconque effet secondaire attribuable à ces médicaments chez les personnes qui reçoivent ce vaccin.
Le traitement aux bêta-bloquants n'estpas une contre-indication de la vaccination antigrippale. Les sujets allergiques à des substances qui n'entrent pas dans la composition du vaccin ne risquentpas davantage de développer une allergie au vaccin contre la grippe.
Le vaccin contre la grippe peut être donné en même temps qu'un autre vaccin. On peut utiliser le même membre au besoin, mais un point d'injection différent sur le membre. Un dispositif d'administration (aiguille et seringue) différent doit être employé.
Il y a un chevauchement considérable des groupes principalement visés par les vaccins polysaccharidiques contre la grippe et le pneumocoque. Lorsqu'ils administrent le vaccin contre la grippe, les professionnels de la santé devraient en profiter pour vacciner les personnes admissibles contre le pneumocoque.
Le vaccin contre la grippe doit être conservé à une température de 2 °C à 8 °C et ne doit pas être congelé.
L'efficacité du vaccin antigrippal varie selon l'âge et l'immunocompétence de la personne vaccinée ainsi que selon le degré de similitude entre la souche virale utilisée dans le vaccin et celle qui circule pendant la saison grippale. Lorsque le vaccin est bien assorti, il a été établi qu'il prévient la grippe confirmée en laboratoire chez environ 70 % ou plus des personnes en bonne santé. Les études ont également montré que, dans ces circon-stances, la vaccination permet de prévenir 70 % des hospitalisations dues à la pneumonie et à la grippe chez les personnes âgées vivant dans la collectivité. Des études réalisées auprès de personnes âgées vivant en maison de santé ont fait ressortir que la vaccination antigrippale permet de prévenir de 50 % à 60 % des hospitalisations et des pneumonies et jusqu'à 85 % des décès, bien que l'efficacité potentielle contre la grippe soit d'à peine 30 %.
Il est reconnu que la vaccination constitue le moyen le plus efficace de prévenir ou d'atténuer la grippe chez les personnes qui courent un grand risque d'être très malades ou même de mourir des suites d'une infection grippale ou de ses complications. Les programmes de vaccination antigrip-pale devraient viser à vacciner au moins 90 % des candidats admissibles.
Néanmoins, seulement de 70 % à 91 % des résidents des établisse-ments de soins de longue durée (ESLD) et de 20 à 40 % des adultes et des enfants souffrant des maladies déjà énumérées reçoivent le vaccin antigrippal chaque année(58-62). Des études récentes ont révélé que les taux de vaccination se situaient entre 26 % et 61 % chez les TS des hôpitaux et des ESLD(59-61,63).
Ce faible taux d'utilisation tient au fait que le système de santé n'offre pas le vaccin et que les sujets qui devraient être vaccinés refusent de l'être parce qu'ils craignent les effets secondaires de cette mesure ou sont à tort con -vaincus de son inefficacité ou de son inutilité. Les TS et leurs employeurs ont le devoir de promouvoir activement, de mettre en uvre et de respecter les recommandations relatives à l'immunisation antigrippale afin de réduire le risque d'infection et de complications au sein des populations vulnérables dont ils s'occupent (64). Les programmes d'éducation à l'intention des TS et du grand public devraient traiter des préoccupations courantes au sujet de l'efficacité du vaccin et des effets secondaires qu'il provoque. Celles-ci englobent la croyance des patients à risque, des TS et d'autres fournisseurs de services qu'ils ont rarement la grippe, la crainte des effets secondaires du vaccin et enfin les doutes quant à son efficacité.
La recommandation faite par un dispensateur de soins joue un rôle primordial dans la décision de se faire vacciner. Comme la plupart des sujets à risque élevé sont déjà suivis par un médecin, il y a lieu de les vacciner à l'automne, lors d'une consultation régulière. Au nombre des stratégies qui permettent d'accroître la couverture vaccinale de la popula -tion, mentionnons les suivantes :
Le virus de la grippe se transmet d'une personne à l'autre par l'entremise surtout de gouttelettes respiratoires projetées lors des éternuements, de la toux et des conversations. La grippe peut se transmettre entre adultes à partir de la journée précédant l'apparition des symptômes jusqu'à 7 jours après. Les enfants peuvent excréter le virus à compter du jour précédant l'apparition des symptômes jusqu'à 10 à 14 jours après le début de la maladie.
La transmission de la grippe entre des TS infectés et leurs patients vulné-rables est à l'origine d'une morbidité et d'une mortalité importantes (65). Des études ont démontré que les TS atteints de la grippe continuaient souvent à travailler et pouvaient ainsi transmettre le virus à des patients comme à des collègues(66). Dans une étude britannique, 59 % des TS atteints d'une infection grippale sérologiquement confirmée ne pouvaient se rappeler avoir été malades, ce qui donne à penser que nombre d'entre eux avaient eu une infection infraclinique(65). Ces personnes ont continué à travailler, risquant ainsi de transmettre l'infection à leurs patients. L'absentéisme des TS atteints de la grippe entraîne en outre des coûts économiques excessifs et, dans certains cas, risque de mettre en péril la prestation des soins à cause de la rareté des remplaçants.
Il a été démontré que la vaccination des travailleurs des établissements de santé réduisait la mortalité totale chez les patients, les syndromes grippaux et les cas de grippe sérologiquement confirmés(66). Les programmes de vaccination antigrippale à l'intention des TS pourraient également se traduire par des économies et une réduction de l'absentéisme, lesquelles dépendent de divers facteurs dont l'existence de mesures visant à dissuader les employés de prendre des congés de maladie, la virulence de la souche et la correspondance entre la souche infectante et le vaccin(67-69).
Pour les besoins du présent document, un TS est défini comme une personne qui dispense des soins directs aux patients et comme une personne qui dispensent des services de santé de manière indirecte, par exemple qui effectue des tâches administratives. Cette dernière peut tout de même venir en contact avec des patients en partageant des aires communes dans les établissements, comme les cafétérias et les salles d'attente. Le terme « soins directs au patient » désigne les activités où la transmission de la grippe entre les TS et le patient est possible. Le CCNI estime que l'administration du vaccin antigrippal aux TS qui ont des contacts directs avec les patients constitue un élément essentiel des normes de conduite pour la prévention de la grippe chez leurs patients. Les TS qui ont des contacts directs avec les patients devraient considérer qu'ils ont la responsabilité de fournir des soins de la plus grande qualité, ce qui inclut une vaccination antigrippale annuelle. En l'absence de contre-indications, leur refus de se faire vacciner contre la grippe peut être assimilé à un manquement à leur obligation de diligence envers leurs patients.
Pour protéger les patients vulnérables durant une éclosion, il est raisonnable d'empêcher qu'ils aient des contacts directs avec les TS qui développent une grippe confirmée ou présumée ainsi que ceux qui ne sont pas vaccinés ni ne suivent un traitement prophylactique antiviral. Les organisations dans le domaine de la santé devraient avoir en place des politiques à cet égard.
Nous traitons dans cette section de l'usage prophylactique des agents antiviraux pour lutter contre la grippe. Le traitement antiviral contre la grippe n'est pas abordé dans la présente déclaration.
La prophylaxie antivirale ne devrait pas remplacer la vaccination annuelle contre la grippe. La vaccination demeure le premier outil de prévention de l'infection et de la maladie grippales.
Le chlorhydrate d'amantadine est un agent antiviral qui inhibe la réplica -tion du virus grippal de type A en bloquant les canaux ioniques de la membrane cellulaire. Il n'est pas efficace contre le virus de type B.
La rimantadine est un agent antiviral à base d'adamantanamine qui n'est pas homologué au Canada. Nous n'en traiterons pas dans la présente déclaration.
Selon des essais randomisés effectués chez des adultes en santé, l'amanta-dine prévient 23 % des cas cliniques de grippe et 63 % des cas de grippe A confirmés par des tests sérologiques(70,71). Un essai randomisé ouvert comparant l'amantadine à un placebo durant une éclosion de grippe chez des garçons en santé de 13 à 19 ans qui fréquentaient un pensionnat a montré que l'amantadine avait un degré d'efficacité de 91 % contre la grippe à cul -ture positive et de 86 % contre la maladie clinique(72). Un essai non rando-misé chez des garçons de 12 à 18 ans a attribué un degré d'efficacité contre la maladie grippale de 70 % à l'amantadine, comparativement à un pla -cebo(73).
Dans des essais comparatifs non randomisés, la prophylaxie à l'amantadine administrée pendant des périodes variant de 9 jours à 16 semaines a réussi à stopper des éclosions de grippe A et à réduire la mortalité dans des popu lations courant un risque accru de complications grippales, y compris des enfants handicapés, des adultes hospitalisés, des résidents âgés de maison de soins et des détenus(74-76). La prophylaxie post-exposition à l'amantadine confère une protection (efficacité de 74 %) aux membres de la famille d'un cas index qui n'est pas soumis à un traitement antiviral (74,77). L'amantadine n'assure pas une protection contre la grippe A chez les contacts familiaux lorsqu'elle est également utilisée pour traiter le cas index, probablement à cause de la propagation d'une souche résistante à l'intérieur de la famille(74,78,79). La résistance à l'amantadine est plus susceptible de se pro -duire dans certaines populations comme les familles et les établissements semi-fermés, notamment les maisons de soins où le médicament est utilisé à la fois à des fins prophylactiques et thérapeutiques et non simplement à titre prophylactique. L'usage simultané de l'amantadine à des fins prophylactiques et thérapeutiques à l'intérieur d'une famille ou d'un établissement n'est pas recommandé en raison du risque accru d'apparition d'une résistance aux antiviraux. Le fait de ne pas isoler adéquatement les patients d'un établissement traités à l'amantadine augmente aussi le risque de transmission d'un éventuel virus résistant, ce qui peut contribuer à prolonger une épidémie ou entraîner la survenue d'une deuxième vague épidémique (80,81).
Les inhibiteurs de la neuraminidase préviennent la réplication des virus grippaux de type A et B en bloquant la neuraminidase du virus grippal. La neuraminidase stimule la libération des particules virales des cellules infectées en empêchant l'agrégation des virions entre eux et leur fixation à la surface des cellules infectées. L'oseltamivir est un inhibiteur de la neuraminidase qui a été homologué pour le traitement prophylactique pré-exposition et post-exposition contre la grippe A et/ou B chez les personnes de 13 ans(82-84).
Le zanamivir est un inhibiteur de la neuraminidase qui n'a pas été approuvé par Santé Canada pour un usage prophylactif que, bien qu'il ait été utilisé à cette fin pour d'autres indications que celles figurant sur l'étiquette. Nous ne nous attarderons pas davantage sur ce produit dans la présente déclaration.
Un examen des essais randomisés contrôlés contre placebo chez des adultes en santé indique que les inhibiteurs de la neuraminidase préviennent avec une efficacité de 74 % les cas naturels de grippe clinique et avec une efficacité de 60 % la grippe confirmée en laboratoire(85-87). On ne dispose pas de suffisamment de données pour évaluer l'efficacité des inhibiteurs de la neuraminidase utilisés à titre prophylactique chez les enfants en santé de < 13 ans, et ces substances ne sont pas homologuées pour cette indication dans ce groupe d'âge (88). L'oseltamivir prévenait dans 92 % des cas la maladie clinique confirmée en laboratoire dans un essai comparatif randomisé multicentrique de la prophylaxie chez les personnes âgées vivant dans des résidences; les résidents atteints d'une néphropathie importante, d'un trouble hépatique, d'insuffisance cardiaque, du cancer, d'une infection à VIH et ayant des antécédents d'alcoolisme ou de toxico-manie ont toutefois été exclus(82). On n'a pas établi dans quelle mesure l'oseltamivir prévient la grippe chez les personnes immunodéprimées. Ce médicament s'est avéré efficace comme moyen prophylactique jumelé à la vaccination et à des mesures de lutte contre l'infection pour circonscrire des épidémies de grippe dans des maisons de santé et des établissements de soins de longue durée(83,84). Dans un essai comparatif randomisé, l'oseltami -vir a protégé efficacement les contacts familiaux en santé de cas index de grippe qui n'étaient pas traités (89). Les ménages où l'on retrouve des femmes enceintes ou allaitantes ou des personnes atteintes du cancer, immunodé-primées, infectées par le VIH, souffrant d'une maladie chronique du foie ou du rein ont été exclus de cette étude.
On n'a pas encore observé l'émergence d'un virus résistant à l'oseltamivir durant ou après le traitement prophylactique par cet antiviral(87). De 0,33 % à 18 % des isolats grippaux se sont cependant révélés être résistants à l'oseltamivir durant le suivi d'enfants et d'adultes participant à des études de traitement(90-92).
Comme les agents antiviraux pris à titre prophylactique peuvent prévenir la maladie, mais non l'infection infraclinique, certaines des personnes ainsi traitées peuvent malgré tout produire des anticorps qui les protégeront lors d'une exposition ultérieure à des virus apparentés sur le plan antigénique. Toutefois, comme nous l'avons déjà indiqué, la prophylaxie antivirale ne devrait pas remplacer la vaccination annuelle contre la grippe.
L'amantadine et l'oseltamivir ne sont pas des agents prophylactiques efficaces contre d'autres infections respiratoires que la grippe. Il est donc indispensable que les décisions concernant leur usage à des fins prophylactiques se fondent sur des données épidémiologiques, cliniques et biologiques adéquates concernant l'étiologie des infections existantes.
Le CCNI recommande d'utiliser la prophylaxie antivirale contre la grippe (amantadine ou oseltamivir) dans les situations suivantes :
Une prophylaxie antivirale peut également être administrée aux personnes qui courent un grand risque durant une éclosion et qui ont déjà été vaccinées mais qui sont susceptibles de présenter une faible réponse immunitaire au vaccin. Il s'agit notamment des personnes atteintes d'une infection à VIH avancée et les personnes âgées de constitution frêle.
Le diagnostic de grippe chez le cas index devrait être confirmé en laboratoire (p. ex., à l'aide d'un test rapide de diagnostic) ou être fondé sur des paramètres cliniques qui ont une forte valeur prédictive positive quant à la prévalence de l'infection dans la collectivité. Des études semblent indiquer que lorsque le virus grippal circule dans une collectivité, les patients souffrant d'un syndrome grippal qui commencent à tousser et à avoir de la fièvre dans les 48 heures suivant l'apparition des symptômes risquent d'être atteints de la grippe(96,97). Le mal de gorge évoque un autre diagnostic que la grippe.
Malgré l'accès à des agents antiviraux pour une prophylaxie post-exposition à l'intérieur des ménages, l'administration prophylactique du vaccin antigrippal avant l'exposition au début de la saison demeure la stratégie de protection recommandée.
Le vaccin antigrippal confère une protection plus durable contre la maladie pouvant résulter d'une exposition à l'intérieur de la famille et de la collectivité.
Il convient de noter que ces recommandations englobent l'usage de l'oselta -mivir pour des indications qui ne figurent pas sur l'étiquette (indications non homologuées). Lorsqu'un traitement prophylactique est indiqué, il faut tenir compte lorsqu'on choisit un agent antiviral du type de souche en circulation et de l'efficacité, de la toxicité potentielle, du coût et de la capacité d'administrer l'agent à une population donnée.
Certains facteurs comme l'épidémiologie locale, les effets secondaires potentiels, les craintes concernant l'émergence d'une résistance aux antiviraux, l'observance des traitements médicamenteux et le coût peuvent être pris en considération au moment de décider de la durée de la prophylaxie antivirale.
Le tableau 3 présente la posologie recommandée pour la prophylaxie de la grippe de type A par l'amantadine, mais pour en savoir davantage, il convient de consulter la notice qui accompagne le médicament. Tout ajustement visant à tenir compte de la fonction rénale doit être fait en plus des ajustements pour l'âge. Il faut porter une attention particulière aux posologies prescrites aux personnes âgées de > 65 ans, qui présentent souvent une certaine insuffisance rénale. La posologie peut être ajustée en fonction du taux de clairance de la créatinine calculé ou confirmé en laboratoire. Dans les établissements de soins pour personnes âgées, les taux de créatinine sérique mesurés jusqu'à 12 mois avant peuvent être utilisés en toute sécurité pour estimer la clairance de la créatinine(98,99). Il est à noter que malgré les recommandations posologiques du tableau 3 relatives à la prophylaxie à l'amantadine, quelques études donnent à penser qu'une dose prophylactique de 100 mg par jour peut être aussi efficace que la dose recommandée de 200 mg par jour chez les personnes âgées de 10 à 64 ans et chez les enfants pesant > 20 kg dont la fonction rénale est normale(74).
Bien que le recours à cette posologie, lorsque celle-ci est bien observée, ait réussi à juguler les éclosions de grippe de type A dans les établissements, la prise intermittente du médicament peut porter à confusion. Le tableau 4 présente une posologie de remplacement à dose quotidienne unique basée sur la fonction rénale qui a été proposée pour les personnes de > 65 ans(99). Cette nouvelle posologie repose sur une modélisation pharmacocinétique semblant indiquer qu'elle serait aussi efficace et sûre que la posologie habi-tuelle présentée au tableau 3. Les TS et les planificateurs des programmes de lutte contre la grippe devront évaluer les avantages et les inconvénients des deux schémas posologiques lors du choix d'un régime thérapeutique pour leurs patients.
Dans des études de la prophylaxie post-exposition chez les contacts familiaux de cas index de grippe, l'amantadine a été administrée pendant 10 jours(77). La durée d'administration a atteint 16 semaines dans des études sur la prophylaxie pré-exposition(74,75).
Lorsque l'amantadine était administrée à des fins prophylactiques à de jeunes adultes en bonne santé, on signalait les symptômes suivants dans 5 % à 10 % des cas : troubles de la concentration, insomnie, vertiges et irritabilité. Ces effets secondaires sont généralement bénins et cessent peu de temps après l'arrêt de la médication; cependant, ils peuvent être plus fréquents chez les personnes âgées, à moins que des doses réduites ne soient administrées.
Des effets secondaires graves (p. ex., changements marqués du comportement, délire, hallucinations, agitation et convulsions) ont été associés à des concentrations plasmatiques élevées du médicament. Ces effets ont été observés le plus souvent chez des sujets qui souffrent d'insuf -fisance rénale, de troubles convulsifs ou de certains troubles psychiatriques ainsi que chez les personnes âgées qui ont reçu un traitement prophylac-tique à l'amantadine, à raison de 200 mg/jour. On peut atténuer la gravité de ces effets secondaires en réduisant la dose administrée.
L'amantadine n'est pas métabolisée par le foie, mais est éliminée complète -ment du plasma par sécrétion tubulaire et filtration glomérulaire. Par conséquent, les sujets souffrant d'insuffisance rénale, particulièrement les personnes âgées, peuvent présenter des concentrations toxiques si les doses ne sont pas réduites. La posologie recommandée pour la prophylaxie selon l'âge du sujet et la fonction rénale est indiquée aux tableaux 3 et 4. Chez les patients atteints d'insuffisance rénale qui sont en dialyse, la demi-vie de l'amantadine est de 200 36 heures(100). Dans le cas des patients non dialysés dont la clairance créatinique est de < 10 mL/min, une dose orale d'amantadine de 100 mg toutes les 3 semaines est recommandée [F. Aoki, communication personnelle, 14 septembre 2004](101).
Il convient de préciser que le calcul de la clairance de la créatinine est assez exact dans le cas de ceux dont le taux est de > 40 mL/min et de ceux dont la créatininémie et la masse musculaire sont stables. Cependant, le calcul est moins exact chez les patients qui ne satisfont pas à ces conditions. En particulier, les personnes âgées qui présentent une insuffisance rénale et une faible masse musculaire peuvent avoir une créatininémie qui se trouve dans la plage des valeurs normales et une clairance estimative de la créatinine qui est supérieure à la valeur réelle. Les médecins qui prescrivent de l'amantadine doivent être conscients des limites des formules utilisées pour estimer la clairance de la créatinine et doivent tenir compte de ces considérations au moment de prendre des décisions cliniques concernant l'ajustement de la posologie.
Pour éviter de faire grimper le risque de convulsions, il faut réduire la posologie chez les sujets atteints d'un trouble convulsif et observer de près ces patients.
Des interactions médicamenteuses ont été observées lors de l'administra-tion concomitante d'amantadine et de triamtérène et d'hydrochlorothia-zide, de triméthoprime-sulfaméthoxazole, de quinine et de quinidine. Il faut tenir compte de l'âge, du poids, de la fonction rénale, de la présence d'autres états morbides concomitants et de la prise simultanée d'autres médicaments ainsi que des indications de l'amantadine avant de mettre en route ce traitement. De plus, il faut surveiller étroitement les patients pour déceler les effets secondaires.
L'oseltamivir est vendu en capsules de 75 mg de même que sous forme de poudre pour suspension buvable qui peut être reconstituée à 12 mg/mL. La dose orale recommandée pour la prévention de la grippe chez les per-sonnes de 13 ans est de 75 mg une fois par jour. Pour une prophylaxie post-exposition, on devrait amorcer le traitement à l'oseltamivir dans les 48 heures suivant l'exposition. La durée de la prophylaxie post-exposition chez les membres du ménage dans un essai comparatif randomisé était de 7 jours(89). On peut envisager de porter la durée de la prophylaxie à 14 jours si le cas index de grippe est un enfant ou une personne âgée, car ces personnes peuvent continuer d'excréter le virus pendant une période pouvant atteindre 14 jours après le début de leur maladie.
Aucun rajustement de la dose n'est nécessaire si la clairance de la créatinine est supérieure à 30 mL/min. Il n'est pas nécessaire de disposer d'une mesure récente de la créatinine sérique ou de la clairance de la créatinine dans un prélèvement d'urine de 24 heures avant de démarrer la prophylaxie à l'oseltamivir, à moins qu'on ait des raisons de soupçonner une insuffisance rénale importante. Lorsque la clairance de la créatinine est de 10 à 30 mL/min, la dose de l'oseltamivir devrait être réduite à 75 mg tous les 2 jours ou à 30 mg de suspension orale tous les jours. Aucune recommandation poso-logique n'a été formulée pour les patients dont la clairance de la créatinine est de < 10 mL/min et ceux soumis à une hémodialyse et à une dialyse péritonéale.
L'oseltamivir est transformé en carboxylate d'oseltamivir par des estérases situées surtout dans le foie. L'innocuité et l'efficacité de l'oseltamivir chez les insuffisants hépatiques n'ont pas été établies.
L'oseltamivir ne devrait être utilisé durant la grossesse et l'allaitement que si les avantages potentiels justifient le risque possible pour le ftus ou le nourrisson. On ne dispose pas actuellement de données suffisantes concernant les effets toxiques possibles sur le ftus. On ignore de plus si l'oseltamivir ou son métabolite actif sont excrétés dans le lait humain.
L'oseltamivir ne devrait pas être administré aux enfants de < 1 an. Il est homologué par Santé Canada pour un usage prophylactique seulement chez les enfants de 13 ans.
L'oseltamivir est contre-indiqué chez les personnes hypersensibles à un des composants du produit.
L'administration concomitante de probénécide multiplie par deux l'expo -sition au carboxylate d'oseltamivir, le métabolite actif de l'oseltamivir, par suite de l'augmentation de la sécrétion tubulaire anionique active dans le foie.
Les effets secondaires les plus souvent signalés dans les études sur le traite-ment préventif à l'oseltamivir utilisant des doses quotidiennes de 75 mg sont les maux de tête, la fatigue, les nausées, la toux, la diarrhée, les vomissements, les douleurs abdominales, l'insomnie et le vertige. La différence entre l'oseltamivir et un placebo n'était cependant que de 1 % pour l'incidence des maux de tête, des nausées, des vomissements et des douleurs abdominales(90).
Remerciements
Le CCNI tient à remercier Samina Aziz, Karen Ellison, Theresa Tam, et Jill Sciberras pour leur aide dans la préparation du présent manuscrit.
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*Membres : Dre M. Naus (présidente), Dre T. Tam (secrétaire administrative), Dr I. Bowmer, Dr S. Dobson, Dr B. Duval, Dre J. Embree, Mme A, Hanrahan, Dre J. Langley, Dre A. McGeer, Dre P. Orr, Dre M-N Primeau, Dr B. Tan, Dr B. Warshawsky, A. Zierler.
Agents de liaison : S. Callery (CHICA), Dr J. Carsley (ACPS), Dr L. Chapman (CDC), Dre A. Gruslin (SOGC), A. Honish (CNCI), Dr B. Larke (CMHC), Dre B. Law (CCEC), Dr M. Salvadori (AMMI Canada), Dre S. Rechner (SCMI), Dr J. Salzman (CCMTMV), Dre L. Samson (SCP), Dr D. Scheifele (CAIRE).
Membres d'office : Dre S. Deeks (CPCMI), Dr H. Rode (CEPBR), Dr M. Lem (DGSPNI), Dr M. Tepper (MDN).
Cette déclaration a été rédigée par la Dre P. Orr et a été approuvée par l'Agence de santé publique du Canada.
[Relevé des maladies transmissibles au Canada]
Dernière mise à jour : 2005-09-23 |