Au niveau stratégique du commandement
et de l’activité, les impératifs de
l’efficacité opérationnelle sont tels que
les leaders principaux et leurs états
majors sont seuls responsables du maintien
et du développement des systèmes et
des capacités dont ont besoin les FC pour
s’acquitter de leurs responsabilités en
matière de défense maintenant et dans
l’avenir, c’est-à-dire pour exploiter les
capacités nécessaires pour accomplir les
objectifs du gouvernement. C’est ce qu’on
entend par « diriger l’institution ».
CRÉER LES CONDITIONS NÉCESSAIRES
AU SUCCÈS DE LA MISSION
L’univers des leaders supérieurs est particulièrement
exigeant parce qu’il est extrêmement
complexe : responsabilités plus vastes, horizons
d’action plus longs, davantage d’incertitudes, un
réseau de relations interpersonnelles à gérer. Qui
plus est, en raison de leurs vastes responsabilités,
les leaders supérieurs évoluent dans un environnement
social peuplé de collaborateurs où les
intérêts et les points de vue contradictoires
abondent et où ils doivent exercer une influence
tous azimuts.
C’est aux leaders supérieurs qu’incombe la responsabilité
de voir à ce que les CF répondent aux
besoins de la politique de sécurité nationale du
gouvernement et à ce qu’elles soient prêtes à parer
à toute éventualité pouvant survenir dans un
environnement incertain. Les FC ne doivent pas
être prises au dépourvu. Par conséquent, les leaders
supérieurs n’ont pas d’autre choix que de jouer
le rôle d’agents de changement.Afin de maintenir
en tout temps la capacité opérationnelle,ils doiventavoir une excellente compréhension de l’environnement
dans lequel ils évoluent et de ce que cet
environnement sera dans cinq, dix et vingt ans. Ils
doivent évaluer de façon fiable et précise les
menaces à la sécurité. Ils doivent bien connaître la
nature et les causes des nombreux conflits sociaux
et militaires auxquels les FC sont susceptibles de
participer. Ils doivent connaître les rouages des
alliances internationales et se garder au fait
des avancées technologiques dans le domaine
militaire.Ils doivent avoir une connaissance approfondie
de la culture et des valeurs canadiennes et
maintenir des liens solides avec la société. Finalement,
ils doivent comprendre les politiques et les
priorités du Gouvernement et agir conformément
à ces dernières tout en tentant, dans la mesure du
possible, de les influencer.
Pour répondre aux nombreuses exigences du
monde de l’après-guerre froide, les FC ont adopté
une approche fondée sur les capacités, à titre de
principal outil de planification stratégique.Le sens
ordinairement donné au mot capacité dans les
dictionnaires est : habileté, aptitude à faire quelque
chose. Pour définir ce qu’est la capacité requise, on
doit se poser la question suivante : « Quelles
capacités devons-nous acquérir pour assurer notre
efficacité opérationnelle et le succès de notre
mission, compte tenu, entre autres, des nombreuses
tâches militaires réelles et potentielles, des
intérêts et des priorités en concurrence, des
ressources limitées dont nous disposons et des
inévitables risques liés à tout plan? » Développer
la capacité requise signifie mettre en place les
conditions nécessaires au succès dans une multitude
de circonstances connues et inconnues. Le
principal avantage de cette approche est qu’elle
nous permet d’être prêts à faire face à diverses
situations plausibles. Cet aspect du leadership
stratégique est un excellent exemple d’influence
indirecte : en jetant ainsi des ponts, les leaders
stratégiques façonnent des éléments habilitants et
influent sur ces derniers,mais ne les verront peutêtre
jamais à l’oeuvre pendant leur mandat.
Bien que l’on s’attende à ce que les officiers qui
occupent les postes les plus élevés des FC se
concentrent sur la capacité stratégique, il importe,
pour assurer un rendement maximal, que les
états-majors qui travaillent pour eux partagent
leur perception et leur vision du monde. Conformément
à l’intention et aux directives stratégiques
des leaders supérieurs,eux aussi dirigent,dans une
certaine mesure, l’institution et devront à l’occasion
exercer une influence sur leurs subordonnés,
leurs pairs et leurs supérieurs. Le leadership
institutionnel est lui aussi partagé jusqu’à un
certain point.
En plus de soutenir et de développer des capacités
fonctionnelles, les leaders supérieurs ont des
responsabilités particulières en ce qui concerne
le maintien des capacités professionnelles. Les
leaders supérieurs ne doivent pas seulement
incarner les qualités professionnelles, ils doivent
également assumer, de par leur statut, de vastes
responsabilités afin de favoriser et d’assurer le
maintien d’une culture fondée sur le professionnalisme
militaire. Cela signifie que, afin d’assumer la
responsabilité qu’a la profession envers la société, et
conformément à la primauté accordée au succès de
la mission dans le cadre d’efficacité des FC, les
leaders supérieurs doivent voir à ce que les FC
disposent des capacités appropriées et à ce que les
opérations se déroulent de façon professionnelle.
Dans le même ordre d’idées, afin de maintenir
l’expertise militaire, obligation découlant de notre
responsabilité envers la société et de notre statut
juridique privilégié, les leaders supérieurs doivent
constamment repousser les limites de la profession.
Le soutien des programmes d’histoire par les
leaders supérieurs, de même que leur présence aux
événements et aux cérémonies commémoratives,
font partie intégrante du processus d’affirmation de
l’identité professionnelle.Finalement,pour façonner
la culture, les leaders supérieurs doivent voir à ce
que les recrues soient sensibilisées efficacement et
adéquatement au système de valeurs de l’éthos des
FC et à ce que les systèmes de régulation juridique etéthique fonctionnent comme prévu. De façon plus
générale, ils doivent s’assurer que les politiques et
les méthodes administratives sont alignées sur les
valeurs véhiculées par l’éthos. De cette façon, la
légitimité des FC et la confiance des Canadiens
envers elles en tant qu’institution nationale sont
préservées.
En somme, les leaders supérieurs façonnent la
capacité requise et crée les conditions nécessaires
au succès opérationnel et professionnel de quatre
façons :
- en adaptant les systèmes et les FC au monde
extérieur, par le biais de la planification
stratégique et de l’instigation et de la mise en
oeuvre de changements stratégiques;
- en exerçant une influence sur le monde extérieur
par des avis directs, une influence directe, des
activités d’affaires publiques, des partenariats
stratégiques et des réseaux professionnels;
- en harmonisant les différents systèmes et soussystèmes
organisationnels par une constante
communication de l’objectif stratégique, l’officialisation
de la politique et de la doctrine, le
contrôle des activités et des ressources et la
gestion du rendement;
- en assurant la gérance de la profession par
la solidification de la culture et des capacités
professionnelles.
RESPONSABILITÉS DES LEADERS
Au niveau stratégique du commandement et des
activités d’état-major, l’influence qui est exercée
sur le rendement organisationnel est largement
indirecte. Les leaders stratégiques contribuent de
façon unique à l’efficacité des FC par l’intégration
interne et la gestion des systèmes organisationnels
et par le positionnement favorable des FC dans
leur environnement.
Quoique les leaders supérieurs des FC soient
responsables du développement et du maintien
des capacités nécessaires au succès aux niveaux
tactique et opérationnel du commandement, ils
sont eux aussi guidés par les mêmes valeurs que
les leaders des niveaux tactique et opérationnel.
Les leaders supérieurs ont des responsabilités
institutionnelles dans toutes les cinq dimensions
de l’efficacité militaire et professionnelle.
Succès de la mission.
Pour favoriser le succès de la mission, les leaders du
niveau supérieur doivent conjuguer les rôles de
visionnaires, d’entrepreneurs et de conseillers
politiques.À titre de visionnaires,ils doivent prévoir
l’avenir d’une manière à la fois réaliste et imaginative
et formuler une orientation stratégique globale
et à long terme pour les FC. Dans leur rôle d’entrepreneurs,
ils doivent fixer des objectifs réalisables,
allouer les ressources en fonction des buts et des
priorités et cultiver les capacités opérationnelles
défensives d’aujourd’hui et de demain, y compris
notamment la prochaine génération de leaders. En
tant que conseillers, ils doivent savoir gagner la confiance
des hauts dirigeants militaires et civils et leur
fournir des conseils judicieux sur le déploiement et
l’utilisation des ressources militaires, tout en tenant
compte des besoins et des capacités.
Intégration interne.
À l’appui de l’intégration interne, les leaders du
niveau supérieur doivent communiquer leur
intention stratégique et leurs directives au moyen
d’un corpus de politiques cohérentes et de doctrines
de pointe. Ils sont aussi des porte-parole et des
gestionnaires de systèmes.En tant que porte-parole,
ils doivent transmettre une image homogène de la
réalité en sachant bien utiliser les symboles à leur
disposition et les médias et ils doivent s’acquitter de
fonctions protocolaires et représenter les FC devant
le public. À titre de gestionnaires de systèmes, ils
assurent le fonctionnement coordonné et intégré
des divers systèmes habilitants des FC (matériel,
personnel et finances) et veillent à ce qu’on les
évalue périodiquement afin d’en déterminer
l’efficacité et l’utilité.
Bien-être et engagement des membres.
Sur le plan institutionnel, les leaders du niveau
supérieur doivent assurer le bien-être et l’engagement
de leurs subordonnés en se faisant leurs
champions. Pour cela, ils doivent comprendre
parfaitement les principes du contrat social,
s’efforcer de mettre en place des conditions de
service satisfaisantes et prévoir des mécanismes
équitables d’examen des préoccupations des membres
quant à la façon dont ils ont été traités. Ils
doivent gérer les attentes personnelles des membres
tout en les incitant à servir à l’aide de systèmes de
récompense et de reconnaissance. Les leaders
supérieurs doivent aussi tendre à un équilibre entre
les obligations du service militaire et les besoins
individuels.
Adaptation au monde extérieur.
Pour assurer l’adaptation au monde extérieur des
FC, ce qui constitue une responsabilité vitale sur le
plan stratégique, les chefs supérieurs doivent
assumer les rôles d’agent et de catalyseur du
changement. En tant qu’agent du changement, le
leader doit établir et gérer les relations externes avec
le gouvernement,les ministères (particulièrement le
MDN) et organismes centraux, avec d’autres forces
armées et avec des organismes privés et publics.
Pour renforcer l’influence des FC et leur capacité de
conclure des ententes de collaboration, les chefs
supérieurs doivent très bien comprendre la société
canadienne et ses institutions et être en mesure
d’expliquer la nature des FC au gouvernement, aux
organismes centraux et externes et au peuple
canadien. Les liens officiels ainsi que les réseaux
personnels sont tous deux très importants à cet
égard. En tant qu’agent du changement, le chef
supérieur développe et met à profit les capacités à
l’aide d’analyses à moyen et long termes et peut ainsi
anticiper les forces du changement et tirer des avantages
concurrentiels des projets de transformation.
Éthos militaire.
Parmi les nombreuses responsabilités qui leur
incombent en tant que gardiens de leur profession,
les leaders supérieurs ont celle de promouvoir des
politiques et des programmes qui contribuent à la
santé de la profession, particulièrement dans les
domaines du perfectionnement professionnel, de
l’histoire et du patrimoine, de la justice militaire et
de la discipline. Sur le plan de l’éthos militaire,
notamment, cette responsabilité repose à la fois sur
l’exemple personnel, l’instruction systématique et le
renforcement du point de vue de l’institution. En
d’autres mots, le leader doit donner l’exemple d’une
conduite professionnelle irréprochable; établir des
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