Politique d'utilisation du français dans les technologies de
l'information et des communications
LA POLITIQUE A ÉTÉ ADOPTÉE PAR LE CONSEIL DES MINISTRES LE 6
DÉCEMBRE 2006.
PRÉAMBULE
Le français est la langue officielle du Québec. Les technologies de
l'information et des communications, largement utilisées dans
l'Administration pour la gestion des programmes et pour les
communications avec les citoyens, les ministères et les organismes
ainsi qu'avec les entreprises, doivent permettre l'utilisation
intégrale du français1, notamment dans la désignation des
citoyens et du territoire québécois.
Les outils informatiques ont par le passé principalement été conçus
et développés en langue anglaise. De ce fait, l'anglais est devenu
pendant un certain temps la langue de traitement des données et des
textes. Les signes du français2 étaient alors mal pris en
compte, ce qui s'est manifesté au Québec, notamment par une
déficience dans la désignation des citoyens et des toponymes.
Même si l'offre commerciale des technologies de
l'information et des communications tend de plus en plus à s'adapter
aux diverses langues et cultures, pour que son marché puisse continuer
à croître, l'anglais y occupe toujours une grande place, ce qui
contribue encore souvent à déprécier l'usage du français, comme des
autres langues. L'informatique n'est pas une simple technique qui peut
faire abstraction de la langue et de la culture : elle traite des
données, elle produit et diffuse de l'information. Elle fait partie
intégrante du développement social, économique et culturel des
sociétés modernes. Il importe donc de prendre les moyens nécessaires
pour qu'elle s'adapte à la langue officielle du Québec et qu'elle
contribue même à soutenir et à promouvoir son développement.
La Politique d'utilisation du français dans les
technologies de l'information et des communications exige notamment que
les ministères et organismes utilisent intégralement le français dans
les technologies de l'information et des communications.
L'emploi intégral du français est un préalable
nécessaire pour que les objectifs découlant des lois suivantes soient
pleinement atteints :
-
la Charte de la langue française reconnaît le
français comme la langue de l'État et de la législation aussi
bien que la langue normale et habituelle du travail, de
l'enseignement, des communications, du commerce et des affaires.
Elle accorde à toute personne le droit d'exiger que les ministères
et les organismes communiquent avec elle en français;
-
la Loi sur l'administration publique affirme la
priorité accordée par l'Administration gouvernementale à la
qualité des services aux citoyens. Cette loi rend obligatoire la
publication d'une déclaration de services aux citoyens;
-
la Loi sur le ministère de la Culture et des
Communications confère notamment au ministre qui en est responsable
le mandat de contribuer au développement des entreprises de
communications au Québec et d'encourager l'implantation de
technologies reliées au secteur des communications en vue de
susciter des retombées positives aux plans culturel, social et
économique;
-
la Loi sur le ministère des Services
gouvernementaux confie au ministre des Services gouvernementaux la
responsabilité de l'initiative du gouvernement en ligne. C'est le
ministère des Services gouvernementaux qui a la responsabilité de
l'application de la Politique québécoise de l'autoroute de
l'information;
-
la Loi sur le Centre de services partagés du
Québec habilite le Centre de services partagés du Québec (CSPQ),
sous l'autorité du ministre des Services gouvernementaux, à offrir
des services de soutien administratif aux ministères et aux
organismes, tout en axant sa prestation sur les technologies de
l'information. Ainsi, le développement du gouvernement en ligne
constitue un levier d'intégration pour l'amélioration de la
qualité des services offerts à la population. En ce sens, le CSPQ
est appelé à jouer un rôle de premier plan auprès des autres
ministères et organismes en ce qui a trait à l'application de la
présente politique.
En se dotant d'une politique en matière de promotion
et d'utilisation intégrale du français dans les technologies de
l'information et des communications, l'État démontre sa volonté ferme
de jouer un rôle exemplaire et déterminant dans ce domaine. Le
gouvernement reconnaît ainsi, par le moyen des technologies de
l'information et des communications, toute la portée économique,
sociale et culturelle du français. Cette prise de position doit inciter
le secteur privé à emboîter le pas, notamment en stimulant l'offre de
produits informatiques en français.
SECTION 1
OBJECTIFS DE LA POLITIQUE
La présente politique vise à généraliser
l'utilisation intégrale du français3 dans les technologies
de l'information et des communications comme langue de conception,
d'utilisation, de diffusion, de formation et d'identification des
personnes et des biens.
La politique vise à faire en sorte que les
ministères et les organismes, dans les communications échangées avec
les citoyens et les entreprises, respectent intégralement le français.
La politique vise toutes les communications des ministères et
organismes et une attention particulière, mais non exclusive, est
apportée aux communications destinées au public, notamment les
documents, imprimés ou électroniques, échangés avec les citoyens,
les ministères et les organismes, ainsi qu'avec les entreprises.
Elle veut assurer la généralisation de
l'utilisation intégrale du français dans les postes de travail
informatisés du personnel des ministères et des organismes
gouvernementaux, tant sur le plan du matériel, du logiciel que de la
documentation. Elle s'applique lors d'un développement de systèmes
automatisés et tout au long du renouvellement normal ou anticipé du
matériel, des banques de données, des systèmes d'information et des
logiciels. Elle vise à privilégier l'emploi de la terminologie
française exacte et elle rend obligatoire l'utilisation des termes et
expressions normalisés par l'Office québécois de la langue
française.
La présente politique veut aussi accroître
l'utilisation intégrale du français, partout où il y a des
déficiences notables, notamment pour les spécialistes des technologies
de l'information et des communications, ainsi que pour les utilisateurs
de logiciels spécialisés.
La politique vise à ce que chaque ministère et
chaque organisme corrige les écarts constatés au fil des ans
relativement au respect de l'emploi intégral du français, en faisant
notamment en sorte que les ministères et organismes rendent compte
annuellement de son application.
SECTION 2
CHAMP D'APPLICATION
La politique englobe l'ensemble des technologies de
l'information et des communications, définies comme suit :
tout logiciel ou matériel informatique, ou toute
combinaison des deux, utilisés pour recueillir, emmagasiner, traiter,
communiquer, protéger ou supprimer de l'information tant sous sa forme
textuelle, symbolique, sonore que visuelle.
De plus, l'application de ces technologies de
l'information et des communications ainsi que les contenus qu'elles
produisent sont également visés par la présente politique.
Cette politique s'applique aux ministères et aux
organismes gouvernementaux tels que définis aux paragraphes 1 et 2 du
point A de l'annexe de la Charte de la langue française.
SECTION 3
MOYENS PRÉCONISÉS
Les moyens prévus pour la mise en oeuvre de la
présente politique sont les suivants :
1) l'adoption par chaque ministère et chaque
organisme d'un plan d'action annuel de francisation des technologies de
l'information et des communications, et son dépôt à l'Office
québécois de la langue française;
2) l'obligation pour les ministères et organismes de
rendre compte annuellement à l'Office québécois de la langue
française des actions réalisées dans le cadre du plan d'action et, le
cas échéant, des mesures prises pour donner suite aux demandes de
l'Office;
3) le suivi par l'Office québécois de la langue
française du rapport annuel de francisation soumis par chaque
ministère et organisme et la mention par l'Office des lacunes à
corriger qui devront être prises en compte dans les plans d'action
annuels subséquents;
4) la désignation, dans chaque ministère et
organisme, d'une personne responsable d'appliquer la présente
politique, d'informer le personnel et les responsables des achats de
l'existence des produits informatiques en français et d'effectuer le
suivi des acquisitions des produits et services informatiques;
5) l'obligation, pour les ministères et organismes,
d'acquérir du matériel, des banques de données, des systèmes
d'information et des logiciels permettant l'utilisation intégrale du
français, en conformité avec les standards du gouvernement du Québec
sur les ressources informationnelles (SGQRI). À titre d'exemple, les
claviers, les jeux de caractères codés et leur classement doivent
être conformes à des standards spécifiques du gouvernement du
Québec. La notion d'acquisition s'applique également aux produits et
services accessibles par le Web, qu'ils soient gratuits ou non;
les logiciels de développement et les logiciels
spécialisés offerts sur le marché en français doivent être acquis
et mis à jour en version française. Si un tel logiciel n'est pas
offert en français, les ministères et organismes s'efforceront
d'acquérir un produit équivalent en français. Les ministères et
organismes doivent remplacer toute version précédemment acquise dans
une autre langue par la version française lorsqu'elle existe;
les ministères et organismes doivent s'assurer
d'obtenir de leurs fournisseurs le soutien technique en français. De
manière exceptionnelle, ils peuvent accorder au fournisseur un délai
pour se conformer à cette exigence;
les acquisitions de produits dans d'autres langues
doivent être justifiées auprès de la personne responsable de
l'application de la politique dans le ministère ou l'organisme; cette
personne doit signifier son approbation ou son refus d'approuver, avec
motifs à l'appui;
le ministère ou l'organisme qui n'a pu faire
autrement que d'acquérir une version de logiciel dans une autre langue
que le français doit éviter de développer des liens de dépendance
par rapport à cette version, de sorte que le passage à une version
française soit facilement possible. Dans le cas contraire, les
spécialistes de l'informatique doivent documenter ces liens de
dépendance et indiquer comment les rompre rapidement, de manière à ce
qu'une éventuelle transition soit peu coûteuse4;
6) l'obligation d'appliquer la présente politique
lors de toute acquisition ou de tout nouveau développement de systèmes
automatisés au sein du ministère ou de l'organisme; toute dérogation
doit être justifiée à l'aide d'une démonstration probante qu'il ne
peut être fait autrement; toute modification d'un système existant
doit être considérée dans le cadre de la présente politique comme un
nouveau développement;
7) l'élaboration par le ministère des Services
gouvernementaux, en collaboration avec les ministères et organismes,
des standards et infrastructures permettant de franciser les
technologies de l'information et des communications et l'obligation pour
les ministères et organismes de s'y conformer. Il est à noter que les
standards obligatoires ainsi déterminés sont adoptés par le Conseil
du trésor sur recommandation du ministère des Services
gouvernementaux;
8) la poursuite, par le ministère des Services
gouvernementaux, de la participation aux comités nationaux et
internationaux de normalisation, dans le cadre des travaux liés à
l'adaptabilité culturelle et linguistique des technologies de
l'information et des communications.
SECTION 4
PARTAGE DES RESPONSABILITÉS
Les ministères et organismes sont responsables
d'appliquer la présente politique. Ils doivent en respecter les
règles, notamment lors de l'impartition de services informatiques et
dans les ententes de partenariat entre eux ou avec le secteur
privé.
Le ministère des Services gouvernementaux, de par
ses responsabilités relatives à l'initiative du « gouvernement en
ligne » et à la gestion efficiente des ressources informationnelles,
assure un rôle d'orientation en établissant les standards en matière
de francisation des technologies de l'information et des communications.
Il oriente aussi les acquisitions relevant du domaine des technologies
de l'information et des communications pour qu'elles respectent la
présente politique, de concert avec le Centre de services partagés du
Québec. Bien que le Centre de services partagés du Québec, sous
l'autorité du ministre des Services gouvernementaux, soit le premier
fournisseur gouvernemental, il ne constitue pas un fournisseur exclusif.
Il va alors de soi que chaque ministère et chaque organisme est
responsable du respect de la présente politique pour son
approvisionnement.
Certains ministères et organismes ont en plus des
responsabilités particulières dans la francisation des technologies de
l'information et des communications à l'échelle gouvernementale. Ce
sont : l'Office québécois de la langue française, le ministère des
Services gouvernementaux, le Centre de services partagés du Québec, le
Secrétariat du Conseil du trésor, le ministère du Développement
économique, de l'Innovation et de l'Exportation et le ministère de la
Culture et des Communications.
L'Office québécois de la langue française doit
:
1) diffuser et promouvoir la présente politique dans
les ministères et organismes gouvernementaux, et exercer auprès d'eux
un rôle conseil à cet égard;
2) assurer un suivi global du plan d'action et du
rapport annuel de francisation des technologies déposé par chaque
ministère et chaque organisme;
3) développer et diffuser la terminologie française
reliée au domaine des technologies de l'information et des
communications;
4) assurer la diffusion de l'information sur
l'existence des produits informatiques en français;
5) effectuer l'évaluation technolinguistique des
produits des technologies de l'information et des communications et
entreprendre des actions auprès des fournisseurs du gouvernement pour
permettre une adaptation plus intégrale de ces produits au
français;
6) coordonner l'application de la présente politique
et en effectuer chaque année le suivi.
Le ministère des Services gouvernementaux doit
:
1) élaborer les standards et outils qui permettent
la francisation des infrastructures utilisant les technologies de
l'information et des communications;
2) s'il y a lieu, fournir des avis techniques à
l'Office québécois de la langue française sur les rapports de
francisation soumis par les ministères et organismes;
3) en collaboration avec le ministère des Relations
internationales, veiller à ce que le Québec continue à participer
activement aux forums francophones en matière linguistique et de
francisation des inforoutes. De plus, veiller à ce que le Québec
continue à favoriser la création de contenus et de services
francophones sur l'inforoute;
4) veiller à ce que le Québec continue à
participer activement aux comités nationaux et internationaux traitant
de normalisation, pour les aspects qui concernent l'adaptabilité
culturelle et linguistique des technologies de l'information et des
communications;
5) collaborer avec l'Office québécois de la langue
française à la promotion, à l'application et au suivi de la présente
politique.
Le Centre de services partagés du Québec doit
:
1) intégrer les règles de la présente politique
dans tout document d'encadrement relatif à la gestion des portails et
des sites Web gouvernementaux, ainsi que faire état de la présente
politique dans les activités et les documents de soutien technique et
de formation nécessaires au développement et au maintien du portail du
gouvernement, des portails thématiques et des sites Web des ministères
et organismes gouvernementaux;
2) collaborer avec l'Office québécois de la langue
française à la promotion, à l'application et au suivi de la présente
politique.
Le Secrétariat du Conseil du trésor doit :
1) intégrer dans les processus administratifs
d'acquisition des biens et services en matière de technologies de
l'information et des communications les règles nécessaires au respect
de la présente politique, de concert avec le Centre de services
partagés du Québec pour l'application de ces processus;
2) collaborer avec l'Office québécois de la langue
française à la promotion, à l'application et au suivi de la présente
politique.
Le ministère du Développement économique, de
l'Innovation et de l'Exportation doit :
1) intégrer cette politique dans le processus de
développement économique du Québec;
2) faire la promotion de cette politique auprès des
entreprises;
3) collaborer, avec l'Office québécois de la langue
française et le ministère des Services gouvernementaux, à
l'application de la présente politique.
Le ministère de la Culture et des Communications
doit :
1) en collaboration avec l'Office québécois de la
langue française, le ministère des Services gouvernementaux et le
ministère des Relations internationales, mettre en évidence les
besoins des francophones en matière de technologies de l'information et
des communications;
2) collaborer avec l'Office québécois de la langue
française et le ministère des Services gouvernementaux à
l'application de la présente politique.
SECTION 5
ENTRÉE EN VIGUEUR
Cette politique entre en vigueur le jour de son
approbation par le Conseil des ministres.
L’utilisation
intégrale du français est définie à la section 1.
(2) Il s'agit des signes diacritiques, des ligatures, des conventions
typographiques françaises, et le cas échéant, des conventions
orthographiques.
(3) On entend par utilisation intégrale du français le soutien de tous
les signes du français (diacritiques, ligatures, conventions
typographiques françaises, et le cas échéant conventions
orthographiques), des conventions françaises de tri et des subtilités
de recherche propres au français, le respect des avis de l'OQLF et de
la terminologie normalisée (y compris les termes normalisés en
français par l'ISO) et de toute autre fonctionnalité linguistique ou
lexicale fournie autrement dans une autre version linguistique que le
français du même produit. Le ministère des Services gouvernementaux
met aussi à la disposition de l'Administration certains « standards du
gouvernement du Québec sur les ressources informationnelles » (SGQRI),
qui viennent préciser les aspects techniques de l'utilisation
intégrale du français.
(4) Par exemple, les liens de dépendance qui ne sont dus qu'à
l'utilisation de mots clefs dans une langue donnée [macros] devraient
être établis au départ de manière à être modifiés globalement
d'une seule opération dans toute une application, si c'est possible.
© Gouvernement du Québec, 2006
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