Le taux de grossesse des adolescentes a connu une hausse de 57 % de 1980 à 1992, soit une hausse moyenne de 4 % par année. De 1992 à 1998, le taux de grossesse chez les jeunes filles âgées de 14 à 17 ans est resté stable – entre 19 et 20 pour mille adolescentes –, avant de diminuer pendant les cinq années suivantes pour s’établir à 16,6 pour mille adolescentes en 2003.
Naissances vivantes et mortinaissances : Fichiers
démographiques, M.S.S.S. et I.S.Q.2- Les services sociaux
et de santé pour prévenir les grossesses à l’adolescence
et leurs conséquences.
Avortements provoqués : R.A.M.Q., fichier R-12 et données
non publiées provenant de CLSC et d'établissements
où des avortements non rémunérés à
l'acte sont pratiqués, totalisations : MSSS.
Avortements spontanés (fausses couches) : R.A.M.Q., fichier
R-12 du MSSS.
Population : Statistique Canada.
Calculs : Madeleine Rochon, Direction des études et analyses,
MSSS.
Parmi les adolescentes qui poursuivent leur grossesse, une grande proportion d’entre elles viennent d’un milieu socioéconomique défavorisé ou dysfonctionnel. Elles sont de plus en plus jeunes et, dans bien des cas, elles sont elles-mêmes filles de mères adolescentes (Charbonneau et coll., 1989, dans Cardinal Remete, 1999 ; Morazin, 1991) . Elles occupent généralement des emplois peu rémunérés et peu valorisés (Charbonneau et coll., 1989, dans Cardinal Remete, 1999). Ces mères peuvent toutefois fort bien excercer leur rôle si elles reçoivent le soutien adéquat.
Selon Loignon (1996), les mères adolescentes doivent fréquemment faire face aux conséquences suivantes : isolement social, habitudes de vie déficientes, sous-scolarisation, mauvais traitements, stress et dépression. Dans le même sens, des études menées au Canada et aux États-Unis ont démontré que les jeunes mères courent plus de risques d’abandonner l’école ou d’atteindre un niveau de scolarisation moins élevé et, par conséquent, de plafonner professionnellement ou de rater des occasions d’emploi, autant de facteurs qui favorisent le recours aux prestations d’assistance-emploi (Tipper, 1997). Bien que certaines adolescentes puissent bénéficier du soutien de leur famille et de leurs proches, le tableau n’est pas particulièrement réjouissant.
Source: Ça sexprime Vol.1 No 2, Hiver 2005, page 2
Malheureusement, le peu de littérature existante sur la paternité adolescente trace aussi un portrait peu réjouissant des jeunes pères. Entre autres, Des Rosiers-Lampe et Frappier (1981) soulignent que l’adolescent s’investit peu dans un nouveau rôle de père qui lui semble trop lourd (Cardinal Remete, 1999). D’ailleurs, le jeune homme quittera souvent la mère de l’enfant pendant la grossesse ou dans les deux années qui suivent la naissance (Loignon, 1996).
Certaines adolescentes décident de garder l’enfant pour combler un déficit affectif et ne désirent pas la présence du père. Dans d’autres cas, le garçon doit faire face à l’hostilité de la famille de la jeune fille, même s’il désire s’investir auprès de l’enfant (Loignon, 1996). À l’opposé, des jeunes hommes ne veulent pas s’investir et reconnaître leur rôle de géniteur (Loignon, 1996). Mais en dépit de la rareté de données et d’études sur la paternité, il semble plausible que certains adolescents prennent leur rôle de père très sérieusement et qu’ils s’investissent pleinement dans leurs nouvelles responsabilités.
Source: Ça sexprime Vol.1 No 2, Hiver 2005, page 3
La plupart des auteurs s’accordent sur le fait qu’un des facteurs expliquant la grossesse à l’adolescence est la résistance à la contraception (Loignon, 1996 ; Dufort, Guilbert et St-Laurent, 2000 ; Cromer et coll., 1997). La résistance se reflète sur le comportement contraceptif de deux façons : soit qu’aucune méthode contraceptive n’est utilisée, soit que celle-ci est inadéquate.
L’utilisation inadéquate renvoie généralement à trois problèmes liés à l’utilisation d’une méthode contraceptive :
Source: Ça sexprime Vol.1 No 2, Hiver 2005, page 3
Loignon (1996) énumère 21 difficultés des adolescents quant à la contraception. Cependant, nous n’avons retenu que les principales, qui d’ailleurs se prêtent mieux aux activités d’apprentissage et de réflexion menées en groupe.
Toujours selon Loignon (1996), le manque d’estime et de confiance en soi favorise le consentement à une relation sexuelle non protégée. Ainsi, il est fréquent que la jeune fille craigne le rejet de son partenaire si elle refuse d’avoir des relations sexuelles ou si elle insiste pour utiliser le condom (Loignon, 1996).
Il ne faut toutefois pas oublier que dans certains cas, ce peut être le garçon qui craigne d’aborder le sujet de la contraception avec sa partenaire.
Source: Ça sexprime Vol.1 No 2, Hiver 2005, page 4
La maturité sexuelle est souvent atteinte bien avant la maturité psychosociale. De sorte que certains adolescents ont une vie sexuelle active avant d’avoir atteint leur maturité psychosociale (Tremblay, 2001). En effet, l’âge moyen de la première relation sexuelle est aujourd’hui de 15 ans, soit trois ou quatre ans plus tôt que la génération précédente (Bourque 2002). Ainsi les adolescents, initiés plus tôt à la sexualité, ne sont pas forcément outillés de façon adéquate, sur les plans cognitif, émotionnel et social, pour affronter les difficultés et négocier les risques liés à la sexualité (Nakkab, 1997, dans Tremblay, 2001 ; Turcotte, 1994, dans Tremblay, 2001 ; Peterson et coll., 1995, dans Tremblay, 2001).
Source: Ça sexprime Vol.1 No 2, Hiver 2005, page 4
Le « ici et maintenant » ne laisse pas le temps à l’adolescent de penser à la contraception et de s’organiser (Loignon, 1996), d’où l’importance d’encourager l’adoption préventive d’un comportement contraceptif.
Source: Ça sexprime Vol.1 No 2, Hiver 2005, page 4
Selon Loignon (1996), prendre la pilule tous les jours demande une grande discipline, surtout lorsque les relations sexuelles sont très sporadiques. Même si l’utilisation de la pilule est facile, l’oubli est courant chez les adolescentes. En effet, elles oublient en moyenne trois pilules par mois (Balassone, 1989, dans Dufort, Guilbert et St-Laurent, 2000). De plus, l’observance dépend de la motivation de la personne à adopter cette méthode contraceptive. Or, la motivation est entamée par la peur des effets secondaires et des conséquences pour la santé qui résultent d’une anxiété personnelle ou de facteurs environnementaux, notamment l’opinion des autres (Deijen et coll., 1997).
En ce qui concerne le préservatif, on constate un scénario récurrent. En effet, au début de la relation, le condom est souvent utilisé, mais cette méthode est abandonnée dès que les partenaires se considèrent dans une relation stable ; aussi l’intervention auprès des adolescents doit-elle tenir compte de cette réalité (De Visser et Smith, 2001).
Source: Ça sexprime Vol.1 No 2, Hiver 2005, page 4
Les mythes entretiennent l’ignorance par rapport aux risques de grossesse (Loignon, 1996).
Voici quelques-uns de ces mythes :
Source: Ça sexprime Vol.1 No 2, Hiver 2005, page 5
De nombreuses actions sont menées par le réseau de la santé et des services sociaux, tant au niveau provincial, régional que local, en collaboration avec des partenaires, dont ceux du réseau de l’éducation, pour :
Afin de mener ces actions, le ministère de la Santé et des Services sociaux a investi des sommes importantes.
Pour contribuer de façon efficace à la prévention des grossesses à l’adolescence, l’éducation à la sexualité à l’école, incluant la promotion de relations amoureuses égalitaires, est d’une importance primordiale car l’école est l’un des lieux principaux de socialisation des jeunes. La famille, la communauté et les amis ont également un rôle important à jouer en matière d’éducation à la sexualité.
L’éducation à la sexualité s’effectue, pour une bonne part, par l’intermédiaire de l’école, dans le contexte des interventions menées selon l’approche École en santé. Les actions de promotion de la santé et de prévention qui font partie d’École en santé, sont intégrées aux activités scolaires régulières et s’adressent à l’ensemble des jeunes qui fréquentent l’école, incluant les jeunes à risque. Elles permettent d’agir en amont sur les principaux facteurs individuels (dont l’estime de soi, la compétence sociale et les comportements en matière de sexualité) et environnementaux (environnement familial, scolaire et communautaire) qui ont un impact sur la réussite éducative, la santé et le bien-être des enfants et des adolescents. Ces actions permettent de prévenir divers problèmes observés chez les jeunes, dont les grossesses à l’adolescence.
À l’heure actuelle, l’approche École en santé est en voie d’implantation dans toutes les régions du Québec et sa mise en œuvre repose sur une collaboration étroite avec le réseau de l’éducation.
Pour 2004-2005, un investissement de 4 M$ a été consenti par le MSSS aux services préventifs qui s’adressent aux jeunes d’âge scolaire.
Un montant de 11 000 $ sert à produire et à diffuser le magazine Ça s’exprime, en collaboration avec le Département de sexologie de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) pour habiliter le personnel enseignant et les intervenants à mener des interventions d’éducation à la sexualité.
Le document L’éducation à la sexualité dans le contexte de la réforme de l’éducation issu d’une concertation entre le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport et le ministère de la Santé et des Services sociaux, propose une orientation mettant de l’avant une approche d’apprentissage qui s’inscrit dans le Programme de formation de l’école québécoise. On y aborde, notamment, le respect de soi, la vie affective et amoureuse, les relations égalitaires et la prévention de l'exploitation sexuelle. Des intervenants issus du milieu de l’éducation et des équipes jeunesse des CSSS ont d’ailleurs bénéficié d’une formation pour contribuer par une utilisation optimale de ce document d’orientation, à une éducation à la sexualité de qualité à l’école.
Outre l’importance de messages clairs, cohérents et adaptés aux jeunes concernant notamment une approche positive et respectueuse de la sexualité et des relations interpersonnelles, les comportements à risque et les moyens de protection, des interventions à composantes multiples impliquant les jeunes, l'école, les parents et la communauté en incluant la prestation de services cliniques sont aussi favorisées.
Les cliniques jeunesse comprennent des interventions pour prévenir les grossesses à l’adolescence, des services-conseils et des activités d’éducation à la sexualité, de prévention des infections transmissibles sexuellement et par le sang (ITSS) ainsi que des consultations en planification des naissances. Des services de cliniques jeunesse existent dans presque toutes les régions du Québec et ils sont mis en place par les centres de santé et de services sociaux, en collaboration étroite avec le milieu scolaire et les organismes du milieu.
Le MSSS a soutenu la production et la diffusion de différents outils de sensibilisation axés sur l’éducation à la sexualité des jeunes. Il en va ainsi des outils suivants :
Le MSSS a consenti un montant de près de 200 000 $ à la production et à la diffusion de ces outils.
Des services de première ligne sont disponibles dans les centres de santé et de services sociaux : le soutien au développement des adolescentes et adolescents, la consultation psychosociale et l’intervention en situation de crise font partie de ces services.
Au cours des deux dernières années, le MSSS a consacré environ 8,5 M $ en vue d’accroître les services sociaux à la jeunesse.
Par ailleurs, un programme d’accessibilité élargie à la contraception orale d’urgence (COU) a été mis en place par le Ministère. Il permet aux femmes d’obtenir les comprimés directement auprès du pharmacien, sans l’exigence d’une ordonnance médicale. Les services de consultation du pharmacien sont couverts par la Régie d’assurance maladie du Québec (RAMQ) et par conséquent sont gratuits pour toutes les femmes détentrices d’une carte d’assurance maladie.
Pour l’année 2003, les services reliés à la COU ont nécessité un investissement de 525 000 $ ; dans plus de 10 % des cas, ces services rejoignaient des adolescentes.
Notons également l’initiative du Collège des médecins en matière de prévention des grossesses non désirées par l’élaboration et la diffusion d’un protocole type d’ordonnances collectives sur la contraception hormonale destinée aux infirmières et aux pharmaciens. Ces ordonnances collectives sont en voie d'élaboration et visent l'amélioration de l'accès à la contraception.
D’autres interventions visent à livrer l’information et le soutien nécessaires pour que les adolescentes et leur partenaire puissent faire un choix éclairé en ce qui concerne l’issue de grossesse, et ce, dans le respect de leur intégrité physique et psychologique.
De plus, les adolescentes ont accès, comme toutes les femmes du Québec, aux services d’interruption volontaire de grossesse (IVG). Ces services sont offerts dans toutes les régions du Québec. Le taux d’IVG était de 12,6 pour 1 000 adolescentes en 2003 ce qui représente une baisse par rapport aux années antérieures (ce taux était de 12,8 en 2002, de 13, 8 en 2001 et 14,0 en 2000).
Depuis 2001, MSSS alloue un montant de 2,7 M $ récurrent pour améliorer l’accès à l’IVG.
Des services destinés spécifiquement aux jeunes parents sont disponibles dans l’ensemble des CSSS au Québec. Ce soutien aux jeunes parents vise notamment à :
Ce soutien aux jeunes parents est offert dès la 12e semaine de grossesse et se poursuit de façon intensive jusqu’à ce que l’enfant ait atteint l’âge de 5 ans. Il se traduit notamment par des visites à domicile effectuées par une intervenante de CSSS. Des initiatives issues de la concertation de l’ensemble des ressources de la communauté permettent également de soutenir de façon efficace les jeunes parents et leur enfant.
Dans le but d’offrir les meilleurs services possibles aux jeunes parents, un programme de formation continue et des guides d’intervention sont développés à l’intention des intervenants et des partenaires. De plus, une équipe de chercheurs évalue de façon rigoureuse l’implantation des services de soutien aux jeunes parents ainsi que les effets à court, moyen et long terme.
Le MSSS investit environ 26 M$ de façon récurrente afin de soutenir les jeunes parents.
Depuis le début de l’implantation du programme de soutien aux jeunes parents, plus de 4 000 jeunes familles reçoivent des services.
Le ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale, le ministère de la Santé et des Services sociaux et l’Association québécoise d’établissements de santé et de services sociaux ont uni leurs efforts afin d’offrir une aide financière aux adolescentes enceintes en situation de dénuement qui bénéficient des services de soutien aux jeunes parents mais qui ne peuvent compter sur aucune ressource financière pour répondre à leurs besoins.
Ces services sont disponibles afin d'apporter le soutien nécessaire
en ce qui concerne la grossesse planifiée ou non, la contraception
et la sexualité.
Sites Internet sur la sexualité :
*Tout signalement d'un site ou d'un lien Internet ne constitue d'aucune façon une reconnaissance officielle de la part du ministère de la Santé et des Services sociaux.