NOTES POUR UNE ALLOCUTIONDE L'HONORABLE DAVID KILGOUR,SECRÉTAIRE D'ÉTAT (AMÉRIQUE LATINE ET AFRIQUE),AU SYMPOSIUM SUR LE MAINTIEN DE LA PAIXDANS LES AMÉRIQUES, DU CENTRE PEARSONPOUR LA FORMATION EN MAINTIEN DE LA PAIX
2001/3 SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS
NOTES POUR UNE ALLOCUTION
DE L'HONORABLE DAVID KILGOUR,
SECRÉTAIRE D'ÉTAT (AMÉRIQUE LATINE ET AFRIQUE),
AU SYMPOSIUM SUR LE MAINTIEN DE LA PAIX
DANS LES AMÉRIQUES, DU CENTRE PEARSON
POUR LA FORMATION EN MAINTIEN DE LA PAIX
BOGOTA (Colombie)
Le 19 février 2001
(10 h 30 HNE)
Introduction
Mesdames et messieurs, je suis ravi d'être de retour à Bogota et de me joindre à vous aujourd'hui pour écrire
un autre chapitre important de l'évolution des relations bilatérales entre le Canada et la Colombie.
Je me rappelle que lors de sa visite à Ottawa, en mai 1999, le président Pastrana a eu une conversation avec
le premier ministre Chrétien au sujet de la façon d'élargir nos échanges sur des questions qui intéressent nos
deux pays. Au cours de cette conversation, il a surtout été question des expériences canadiennes dans le
domaine de l'édification de la paix dans le monde. Les idées échangées par nos dirigeants prennent
aujourd'hui la forme bien réelle d'une discussion sur le maintien de la paix, un concept auquel les Canadiens et
les Canadiennes attachent une grande importance.
Le Conseil de sécurité
Permettez-moi d'abord de féliciter la population colombienne pour l'élection de son pays au Conseil de sécurité
des Nations Unies. Cette élection témoigne de l'appui dont jouit la Colombie à l'échelle internationale ainsi que
des contributions importantes que ses citoyens et citoyennes ont faites pour la paix et la sécurité.
Le 31 décembre 2000, le Canada a terminé un mandat de deux ans au Conseil de sécurité. Nous avons
travaillé fort pour faire en sorte que les questions de maintien de la paix et de sécurité humaine fassent partie
intégrante du programme d'action du Conseil, ce qui comprend des initiatives visant plus particulièrement à
assurer la protection des civils dans les conflits armés. Nous soulignons avec grand plaisir le fait que la
Colombie ait pris l'engagement de faire inscrire au programme d'action du Conseil de sécurité des questions
telles que les ventes d'armes illégales, car cela fera indubitablement progresser le travail de la communauté
internationale pour accroître la sécurité des citoyens de tous les pays du monde.
Je suis heureux de constater que des représentants de nombreux segments de la société colombienne
participent aujourd'hui à cet événement.
La présence simultanée de représentants du gouvernement national, de la société civile, du monde
universitaire, du milieu des affaires et des syndicats fait de ce forum une rencontre importante au cours de
laquelle nous pouvons tous ensemble examiner les éléments fondamentaux qui nous permettront de créer des
conditions plus favorables à la paix et à la sécurité.
Cette rencontre témoigne de l'évolution des efforts qui sont déployés à l'échelle internationale pour régler les
conflits : tous les secteurs de la société, et non pas seulement ceux qui sont directement touchés par les
conflits, doivent travailler ensemble afin de trouver des solutions appropriées et durables.
Le Canada et le maintien de la paix
Nous examinerons maintenant un dossier auquel la participation du Canada est bien connue. Le thème de ce
symposium, l'expérience du maintien de la paix dans l'hémisphère américain, est le fruit d'une très étroite
collaboration entre les représentants des deux pays et, en particulier, le Centre canadien international Lester B.
Pearson pour la formation en maintien de la paix, de renommée mondiale.
Au cours de la journée, vous aurez l'occasion de revoir le rôle qu'a joué le maintien de la paix dans le
règlement de conflits dans les Amériques et ailleurs. Des experts en provenance du Canada et de l'ensemble
de la région vous accompagneront dans vos délibérations et vous présenteront leurs points de vue sur les
origines de telles actions dans l'hémisphère.
Nous avons également puisé dans des expériences parallèles vécues en Afrique et en ex-Yougoslavie; ces
expériences doivent aussi être prises en considération dans l'examen des méthodes modernes de maintien de
la paix.
Nous espérons que vous les trouverez valables. À mon avis, ces expériences vont contribuer, ne serait-ce que
modestement, aux principes de la paix et de la sécurité internationales ainsi que de règlement des conflits, qui
forment la base des efforts colombiens pour régler les conflits.
Dans mon pays, le maintien de la paix est une tradition nationale fondamentale. Notre première participation en
ce domaine remonte aux toutes premières initiatives de maintien de la paix mises sur pied par les Nations
Unies, en 1956, à l'époque de la crise du canal de Suez.
L'un de nos anciens premiers ministres, Lester B. Pearson, s'est vu décerner le Prix Nobel de la paix pour avoir
créé la force internationale qui a été déployée afin de séparer les combattants de la crise du canal de Suez. Le
Canada a participé à presque toutes les missions de maintien de la paix organisées depuis les années 1950,
contribuant à la fois aux aspects militaires et civils de ces missions.
Plus de 125 000 soldats et des milliers de civils canadiens ont été déployés dans différents pays, entre autres
en Éthiopie et en Érythrée, au Timor oriental, au Kosovo, en Bosnie, à Chypre, en Amérique centrale et dans
de nombreux autres « endroits problèmes » du monde.
La collaboration entre la Colombie et le Canada
Dans le cadre de nos engagements à l'égard des opérations de maintien de la paix au Sinaï et au El Salvador,
pas plus tard qu'au milieu des années 1980, nous avons collaboré étroitement avec le personnel colombien
affecté à ces missions. Les Canadiens et les Canadiennes sont tout à fait d'accord pour que le Canada joue un
rôle international actif dans les missions de maintien de la paix.
L'an dernier, un sondage d'opinion a révélé que 82 p. 100 des Canadiens et des Canadiennes étaient
favorables à de tels engagements, partout dans le monde. La participation aux missions de maintien de la paix
fait maintenant partie intégrante de notre identité nationale ou, si vous préférez, de notre ADN national.
Les Canadiens qui sont avec nous aujourd'hui sont ici parce qu'ils croient profondément à l'importance du
maintien de la paix. Nous sommes fiers de nos soldats et de nos civils qui contribuent à des initiatives visant à
rétablir la paix, tant à titre de chargé de mission qu'à titre de représentant d'organisations non
gouvernementales. Cette participation de nos citoyens a grandement contribué à la réputation du Canada en
tant que centre d'expérience et de connaissance du bien-fondé des activités de maintien de la paix.
La création du Centre Pearson pour la formation en maintien de la paix est une autre contribution canadienne.
Le Centre a préparé une bonne partie du contenu du présent symposium et offrira, ici à Bogota, à compter de
demain, un cours d'une durée de quatre jours sur le maintien de la paix.
Depuis 1995, le Centre effectue des recherches et offre des séances de formation sur le maintien de la paix,
depuis son campus situé en Nouvelle-Écosse. Les pays latino-américains font de plus en plus souvent appel à
ses services; c'est le cas notamment de la Colombie qui a récemment envoyé un groupe de fonctionnaires y
suivre un cours de formation en maintien de la paix.
La sécurité humaine
Le maintien de la paix s'inscrit dans le cadre d'une politique canadienne plus large sur la sécurité humaine, qui
s'intéresse d'abord et avant tout aux personnes, quel que soit leur pays de résidence. Cela marque un tournant
important dans les relations internationales, qui ont pendant longtemps insisté surtout sur la sécurité des États.
Pour le Canada, la sécurité humaine signifie l'absence de menaces graves aux droits, à la sécurité ou à la vie
des personnes, peu importe où elles se trouvent. Soucieux de faire progresser la sécurité humaine, le Canada
a mis de l'avant les cinq priorités suivantes en matière de politique étrangère.
• La protection des civils et le renforcement des normes et de la capacité afin de réduire les coûts humains des
conflits armés.
• Les opérations de maintien de la paix et le développement des capacités des Nations Unies de déployer du
personnel spécialisé, y compris des Canadiens, au cours de ces missions.
• La prévention des conflits et le renforcement de la capacité de la communauté internationale de prévenir ou
régler des conflits, ainsi que le développement de la capacité locale de gérer les conflits sans recourir à la
violence.
• La gestion des affaires publiques et l'obligation de rendre des comptes, ainsi que l'incitation à responsabiliser
davantage les institutions des secteurs public et privé en regard des normes établies concernant la démocratie
et les droits de la personne.
• La sécurité publique et l'amélioration des connaissances, des compétences et des instruments dont la
communauté internationale a besoin pour contrer la menace grandissante que pose la montée du crime
organisé transnational.
La politique du Canada en matière de sécurité humaine correspond à la compréhension qu'il a de la
dynamique changeante des conflits violents et du rôle de la communauté internationale dans le règlement de
ces conflits. Auparavant, les initiatives de maintien de la paix étaient des opérations militaires qui visaient à
séparer des gouvernements belliqueux. La communauté internationale exerçait une surveillance et procédait à
des vérifications, tout en s'assurant que les parties à une entente remplissaient leurs obligations.
À l'époque de l'après-Guerre froide, la nature des conflits armés est devenue plus complexe, nécessitant des
réactions différentes. Au cours des 25 dernières années, le nombre de conflits armés entre États a diminué,
tandis que le nombre de conflits nationaux a considérablement augmenté.
Sur les 108 conflits armés déclenchés depuis la fin de la Guerre froide en 1989, 101 ont fait rage à l'intérieur
des pays plutôt qu'entre les États. Les conflits armés sont devenus plus brutaux et plus meurtriers, et ils
prennent souvent racine dans un désaccord entre des groupes religieux ou ethniques.
Le Sommet des Amériques
J'aimerais vous dire quelques mots au sujet du troisième Sommet des Amériques dont le Canada sera l'hôte,
dans la ville de Québec, du 20 au 22 avril.
Le Canada et ses partenaires de l'hémisphère articulent l'ordre du jour de cette importante rencontre autour de
trois thèmes complémentaires qui s'appuient réciproquement, à savoir le renforcement de la démocratie,
l'accroissement de la prospérité et l'exploitation du potentiel humain.
Nous nous intéressons également à la façon dont les technologies de l'information et des communications
peuvent nous aider à atteindre bon nombre des objectifs de cet ordre du jour cohérent et équilibré.
Tous ensemble, nous déployons beaucoup d'efforts pour que le Sommet de Québec soit une étape importante
et significative dans la démarche cruciale que nous avons entreprise pour que les idées et les aspirations se
traduisent par une vie meilleure pour tous les citoyens de l'hémisphère.
Le Canada estime que les progrès aux chapitres du renforcement des institutions démocratiques et de
l'accroissement de la prospérité sur le territoire des Amériques, dans le contexte de la nouvelle économie
internationale, doivent s'accompagner de mesures favorisant l'inclusion sociale et l'accès aux services
essentiels, notamment à des services d'éducation et de santé de qualité.
Et nous devons atteindre ces objectifs d'une manière qui respecte la valeur des différentes réalités ethniques,
culturelles, linguistiques et religieuses qui forment toutes ensemble une riche mosaïque humaine, celle de la
communauté de l'hémisphère.
Nous devons donner priorité aux personnes et reconnaître que les citoyens et les citoyennes ne pourront
exploiter pleinement leurs capacités que si leur sécurité est garantie, leurs droits humains et démocratiques
entièrement respectés et leur accès égal aux possibilités économiques, sociales et culturelles assuré.
Les missions contemporaines de maintien de la paix
Les missions de maintien de la paix ont généralement lieu dans les cas où un conflit ne s'est pas soldé par la
proclamation d'un vainqueur et où la guerre semble sans issue. En plus de jouer leur rôle traditionnel habituel
de surveillance et de vérification, les missions sont alors confrontées à de multiples problématiques reliées aux
causes des conflits violents et à leurs conséquences pour la société en général. Les gardiens de la paix
doivent donc prendre part aux activités qui suivent.
• Des activités de médiation et de négociation entre les parties à un conflit afin de le régler. L'objectif est
habituellement de mettre fin aux conflits violents et de jeter les bases d'une paix à long terme.
• Des opérations militaires et policières de maintien de la paix afin de s'assurer que les ententes sont mises en
œuvre dans un environnement sécurisé dans lequel il est possible de vérifier si les parties respectent les
termes des ententes.
• Différentes activités d'édification de la paix à long terme, reliées à la démobilisation et à la réinsertion sociale
des anciens combattants; aux réformes des institutions responsables de la gestion des affaires publiques et de
la sécurité; au renforcement de la primauté du droit et à la protection des droits de la personne; à l'assistance
technique au développement démocratique; et à la promotion de mécanismes de règlement des conflits et de
réconciliation. Toutes ces activités cherchent à s'attaquer aux causes profondes des conflits violents et à en
empêcher la reprise.
Accroître la capacité de maintien de la paix des Nations Unies
Le Canada est favorable à une forte capacité de maintien de la paix, permettant de relever de tels défis. Nous
appuyons le rapport Brahimi qui recommande l'accroissement de la capacité des Nations Unies de maintenir la
paix et nous pressons les Nations Unies de mettre les recommandations de ce rapport en application. Nous
soutenons en particulier :
• que les missions des Nations Unies doivent avoir des mandats clairs et réalisables;
• que les membres de la communauté internationale doivent prendre un engagement ferme, c'est-à-dire
s'engager à fournir des ressources et à déployer une énergie politique correspondant au mandat de la mission;
• qu'il faut assurer une meilleure coordination des activités de la police civile, des organisations humanitaires et
des autres civils qui participent aux opérations de maintien de la paix;
- que les Nations Unies doivent avoir une capacité de déploiement rapide qui leur permet de réagir en temps
utile;
• qu'il faut améliorer la coopération et la coordination entre tous les intervenants et permettre entre autres aux
acteurs nationaux de participer pleinement à la démarche.
Le symposium
Le présent symposium a été préparé en tenant compte des nouveaux principes et des nouveaux enjeux en
matière de maintien de la paix. Les séances de la matinée seront consacrées à l'étude du rôle de la
communauté internationale dans le règlement des conflits.
Le premier groupe d'experts comprend une délégation du Guatemala, composée de personnes qui ont
participé aux négociations qui ont conduit à la signature des accords de paix de 1996 dans ce pays. Le second
discutera de problématiques entourant le règlement des conflits dans l'optique des Nations Unies, de
l'Organisation des États américains [OEA] et du Centre Lester B. Pearson pour la formation en maintien de la
paix.
En après-midi, quatre groupes d'experts traiteront des différents aspects des missions de maintien de la paix à
la suite d'un conflit. Ils aborderont notamment les questions suivantes :
• le rôle de la police militaire et de la police civile;
• le désarmement, la démobilisation et la réinsertion sociale des anciens combattants;
- la réforme du secteur de la sécurité dans le contexte d'un processus de paix;
• l'examen des processus utilisés au Guatemala, en Afrique du Sud et ailleurs afin de favoriser la réconciliation
et de résoudre les problèmes reliés aux violations passées des droits de la personne.
Conclusion
Le symposium d'aujourd'hui n'a pas la prétention, en aucune façon, de tracer un portrait définitif des activités
de maintien de la paix ou de leurs complexités.
J'espère cependant que ces séances de travail vous donneront une idée des expériences très variées dont les
initiatives de maintien de la paix peuvent tirer le plus grand profit. Je souhaite que ces expériences suscitent de
nouveaux débats et de nouvelles analyses parmi les interlocuteurs colombiens et au sein de la société
colombienne.
Le Canada, un « Pais Amigo » qui a pris le ferme engagement de chercher à édifier la paix partout dans le
monde, est prêt à aider la Colombie, pays qui a la plus longue tradition démocratique en Amérique du Sud.
Je vous remercie. Thank you very much. Muchas Gracias.