M. MANLEY - ALLOCUTION DEVANT LE CERCLE DE L'UNION INTERALLIÉE : « LE MULTILATÉRALISME POUR UN MONDE MODERNE : LE PARTENARIAT EUROPE-AMÉRIQUE DU NORD » - PARIS, FRANCE
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NOTES POUR UNE ALLOCUTION
DE
L'HONORABLE JOHN MANLEY,
MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,
DEVANT LE CERCLE DE L'UNION INTERALLIÉE
« LE MULTILATÉRALISME POUR UN MONDE MODERNE :
LE PARTENARIAT EUROPE-AMÉRIQUE DU NORD »
PARIS, France
Le 5 septembre 2001
C'est un grand plaisir que d'être à Paris -- ma première visite en France à titre de ministre des Affaires
étrangères. J'ai du reste peine à le croire, car je rencontre si souvent Hubert Védrine à diverses
réunions internationales que c'est comme si la France était toujours à mes côtés, ou en tout cas à
seulement deux fauteuils de moi!
J'attache beaucoup d'importance à inaugurer la nouvelle « saison diplomatique » en Europe ce mois-ci.
En cette année du 25e anniversaire de la coopération Canada-Europe, il est tout à fait opportun de
rappeler ce que nous savons tous -- à savoir, que le Canada et l'Europe sont des partenaires privilégiés
l'un pour l'autre. Dans tous les domaines, en effet -- commerce et investissement, sécurité européenne
et mondiale, progrès social, environnemental et scientifique, résolution des problèmes
transnationaux --, nos rapports sont toujours chaleureux, dynamiques et tournés vers l'avenir.
Cette « liaison » transatlantique revêt une importance décisive pour le Canada au moment où débute
cette année durant laquelle il présidera le G-8. D'immenses défis se dressent devant nous alors que
nous cheminons vers Kananaskis. Problèmes de fond, d'abord : les conflits régionaux, la croissance
de l'économie mondiale, la pauvreté, surtout en Afrique où les besoins sont criants. Problèmes de
gestion également : nous devons tirer les leçons de ce qui s'est passé à Gênes, à Göteborg et à
Québec, de la Conférence de Durban, des discussions qui entourent la question du Protocole de Kyoto
et de l'évolution récente du régime mondial de contrôle des armements. Comme l'a souligné le
président Chirac à Gênes, les gouvernements doivent voir au-delà de la violence qui se manifeste
sporadiquement dans la rue et être attentifs au message que leur adressent les protestataires.
Quelque opinion qu'on ait de ces événements, ce qui est évident, c'est que nous, la communauté
internationale, sommes actuellement confrontés à un défi de gouvernance majeur et que nous ne
pouvons pas nous y dérober.
Bien sûr, chaque génération croit que ses problèmes sont les plus graves, ses difficultés les plus
complexes et ses aspirations les moins bien comprises. Pourtant, l'avenir ne s'annonce pas menaçant;
le présent ne l'est pas non plus. Le monde actuel est le théâtre de transformations positives. La
prospérité se répand à travers le monde, grâce notamment à la nouvelle dynamique régionale. Les
exemples abondent : depuis l'Union européenne [UE] et l'Accord de libre-échange nord-américain
[ALENA] jusqu'à l'éventuelle Zone de libre-échange des Amériques [ZLEA], en passant par
l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est [ASEAN], le forum de la Coopération économique Asie-Pacifique [APEC] et les nouvelles initiatives qui voient jour en Afrique.
Nous avons fait de grand progrès avec la mise sur pied de la Cour pénale international, la comparution
en justice de despotes tels que Milosevic ou encore la création, d'ici la fin de l'année, du Fonds
mondial pour le sida et la santé. En même temps s'érige sous nos yeux une société mondiale du savoir.
Ce sont là des évolutions marquantes, qui apporteront d'immenses bienfaits à l'humanité.
Mais il est clair que nous sommes parvenus à un tournant décisif et qu'une distinction s'impose entre
la gouvernance mondiale au XXIe siècle et le système qui a vu le jour au lendemain de la Seconde
Guerre mondiale lors des conférences de Bretton Woods. Notre environnement s'est transformé, tout
comme nos besoins et nos objectifs. Le système multilatéral, qui remonte à plus de 50 ans, commence
peut-être à dater.
Le moment est venu de renouveler et de revitaliser ce système, de faire place à de nouvelles idées et à
de nouvelles formules qui nous aideront à poursuivre nos objectifs et à promouvoir et protéger nos
intérêts en tant qu'individus, en tant que pays et en tant que membres d'une communauté
véritablement mondiale.
Qu'il s'agisse de l'influence de la technologie, de l'élargissement des normes universelles de justice et
des droits fondamentaux ou -- et c'est là la face sombre de la mondialisation -- des menaces que
représentent le crime organisé et la dégradation environnementale parce qu'ils font fi des frontières, le
monde ne cesse de se rétrécir alors que les objectifs et les difficultés se multiplient. L'unilatéralisme ne
convient qu'à une infime minorité et se révèle bien trop coûteux pour tous. La seule façon rationnelle,
juste et démocratique de gérer notre avenir commun consiste donc à adopter un modèle de
gouvernance mondiale, fondé sur des règles transparentes et équitables.
Comment y parvenir? Comment faire pour que le système multilatéral soit accessible à tous et
fonctionne au bénéfice de tous, et qu'il puisse en même temps continuer de produire des résultats
concrets? Comment apporter de véritables réponses, et non pas seulement réagir, aux interrogations
et inquiétudes de nos citoyens sur l'avenir de la planète?
C'est un débat que nous devons amorcer dès maintenant, au sein de la communauté transatlantique,
au lieu de nous contenter de disserter sur les liens d'amitié qui unissent nos pays ou nos continents.
Nous connaissons bien notre histoire commune, les rapports cordiaux et d'admiration mutuelle qui
nous lient, les riches valeurs familiales et culturelles qui nous unissent et qui donnent chaleur et
dynamisme aux relations du Canada avec la France et avec l'Europe. Ces atouts ne sont pas menacés
et ne le seront jamais. Mais nous devons aussi être prêts à relever de nouveaux défis au profit mutuel
de l'Amérique du Nord et de l'Europe. Il faut notamment chercher à libéraliser bien davantage le
commerce transatlantique, accroître les échanges scientifiques et technologiques et établir un dialogue
favorisant la complémentarité et la coopération entre l'OTAN et la Politique européenne de sécurité et
de défense de l'UE.
La vitalité de ces relations -- la nécessité même du transatlantisme -- doit toutefois avoir une portée
mondiale, et non pas seulement régionale. Un leader européen observait récemment que « lorsque les
partenaires transatlantiques poursuivent des objectifs communs, cela a des effets bénéfiques sur le
monde entier ». Voilà une remarque bien perspicace. Le transatlantisme ne consiste pas, ne peut
consister, à pérenniser un club exclusif de pays européens et nord-américains privilégiés. Il doit plutôt
viser à jeter les bases de la stabilité, de l'innovation et des progrès qui profiteront au monde entier.
À l'inverse, lorsque l'Amérique du Nord et l'Europe s'avèrent incapables de faire preuve de leadership,
cela a souvent de graves conséquences pour les pays les plus pauvres et les populations les plus
vulnérables et, bien sûr, pour nos propres citoyens aussi. Or, nous avons de belles réalisations à notre
actif; nos efforts communs et soutenus en vue de ramener la paix dans les Balkans n'en sont qu'un
exemple. La tâche est difficile mais on a pu observer, à son meilleur, l'efficacité d'une action
transatlantique bien coordonnée. À l'échelle mondiale, nous pouvons ensemble encore faire mieux et
davantage.
De nombreuses possibilités s'offrent à nous sur ce plan.
La problématique mondiale repose à mon avis sur trois questions fondamentales :
• la question du « qui » : les personnes et les groupes qui doivent prendre part à un dialogue légitime
et utile sur la gouvernance mondiale;
• la question du « quoi » : les enjeux et les forces dynamiques qui caractérisent le monde d'aujourd'hui
et déterminent nos priorités internationales;
• la question du « comment » : les systèmes et les mesures qui permettent la meilleure gestion
possible de ces enjeux et forces dynamiques.
Première question donc, qui doit avoir un rôle à jouer dans la gouvernance mondiale au XXIe siècle?
Signe manifeste que nous sommes déjà entrés dans une nouvelle ère, les gouvernements ne sont plus
les seuls à pouvoir répondre à cette question. La croissance constante des réseaux réels et virtuels du
Web, la plus grande mobilité des citoyens, la progression continue de la démocratie et de la
participation du public partout dans le monde ont modifié de manière irrévocable la nature de la
gestion des affaires publiques.
Au Canada, le gouvernement s'est engagé à faire preuve d'ouverture et de transparence dans ses
opérations et ses politiques. Les organisations non gouvernementales, les milieux universitaires et le
milieu des affaires exercent depuis longtemps une influence sensible sur l'orientation de la politique
étrangère et commerciale du Canada, notamment en participant aux grands événements internationaux
aux côtés des représentants de l'État. À New York, cet été, nous avons beaucoup de difficulté à
convaincre les principaux intéressés de déléguer des représentants à la Session extraordinaire des
Nations Unies consacrée au VIH et au sida. Par ailleurs, contrairement à qu'ont pu laisser croire les
images télévisées, le Sommet des Amériques à Québec était, et de loin, l'événement le plus transparent
et le plus accessible jamais tenu sur le continent américain. Il a notamment donné la possibilité à de
nombreux groupes de citoyens de dialoguer avec les ministres des affaires étrangères de tous les pays
des Amériques.
Nous devons élargir cette volonté de transparence à toutes les grandes questions qui revêtent une
priorité pour la communauté internationale.
Or, quelles sont ces priorités? J'aimerais aborder ici quelques éléments auxquels le Canada attachera
une grande importance lors du Sommet du G-8 de 2002, et à l'égard desquels la coopération avec
l'Europe et avec nos autres partenaires du G-8 permettra de réaliser de grands progrès.
Je ne placerai toutefois pas la mondialisation en tête de cette liste. La mondialisation, en effet, n'est
pas un choix politique qu'on peut accepter ou non, mais elle est une réalité, ni bonne ni mauvaise en
soi, qui influe sur tous les aspects de la vie au XXIe siècle. Le véritable enjeu est de savoir si nous
prendrons les moyens pour faire en sorte que la mondialisation favorise, au lieu d'entraver, la
réalisation de nos objectifs politiques, économiques et sociaux, et que tous reçoivent ses bienfaits --
c'est-à-dire les retombées positives de la nouvelle économie, des progrès technologiques et des règles
resserrées mises en place pour promouvoir la justice et les droits fondamentaux.
Le Canada et l'Europe doivent collaborer étroitement sur un certain nombre de grands dossiers. Ils
doivent notamment :
• veiller à ce que la prospérité ait une dimension sociale -- un thème qui tient beaucoup à coeur aussi
bien aux Canadiens qu'aux Européens;
• lutter contre la pauvreté et favoriser le développement, principalement en Afrique, une région du
monde où la majeure partie de la population vit avec un revenu de moins de un dollar américain par
jour et le seul continent où la pauvreté est à la hausse;
• bâtir un « pont numérique » mondial, c'est-à-dire étendre la connectivité à toutes les populations afin
de favoriser le développement humain, culturel et économique ainsi que le renforcement de la
démocratie;
• lutter contre les fléaux transnationaux, tels le changement climatique et le trafic de la drogue, d'êtres
humains et d'armes légères, pour ne citer que quelques exemples;
• continuer de prévenir et de résoudre les conflits, y compris les affrontements et les haines
chroniques et apparemment insolubles qui bloquent la paix et la prospérité au Moyen-Orient, dans les
Balkans et dans plusieurs autres régions du globe. Comme l'a reconnu l'UE à Göteborg, nous devons
nous concentrer davantage sur les causes premières des conflits, qui sont souvent d'ordre
économique et politique, et mettre en place des structures qui permettront de les résoudre sans
recourir à la violence.
De nombreuses démarches ont été entreprises sur le plan international dans le cadre des Nations
Unies et d'autres instances pour trouver des solutions à ces problèmes, mais les progrès réalisés
jusqu'à présent ne permettent pas d'affirmer que nous avons atteint nos objectifs dans l'un ou l'autre
de ces grands dossiers. Je disais tout à l'heure que le multilatéralisme doit être renouvelé.
L'innovation, mot d'ordre du développement commercial et technologique, s'applique tout aussi bien à
la gouvernance mondiale, qui vise le développement humain. Elle est précisément l'outil dont nous
avons besoin.
Fondamentalement, la gouvernance mondiale au XXIe siècle doit reposer sur quatre grands piliers : le
dialogue, la démocratie, un processus décisionnel efficace et une volonté commune d'obtenir des
résultats concrets.
Dans certains secteurs de l'opinion, il n'est pas rare de voir le système multilatéral remis en question
par ceux qui estiment que les engagements internationaux, pris librement et ouvertement, prennent un
caractère facultatif dès qu'ils sont la source de frictions ou de contraintes. C'est là ce que j'entends par
la volonté d'appliquer ces accords et de mettre en place ces systèmes, et d'assurer leur efficacité --
c'est-à-dire de ne pas nous dérober lorsque les choses se compliquent mais plutôt de reprendre la
barre vigoureusement.
Bien sûr, il y a plusieurs façons de mettre en place ce système international fondé sur des règles
acceptées de tous.
La notion de « coalition des intéressés » -- ce qu'on appelle parfois la « diplomatie catalytique » -- est
appelée à jouer un rôle grandissant dans la confection du système international. Cette notion s'est
manifestée tout particulièrement au cours du processus qui a mené à la signature de la Convention
d'Ottawa, qui interdit les mines antipersonnel. Dans ce cas particulier, la coalition réunissait non
seulement des États qui partageaient la même opinion à l'égard de cette question importante mais
aussi des acteurs non étatiques, militants et bien renseignés, qui en unissant leurs efforts ont pu
mobiliser de vastes appuis politiques et populaires à travers le monde. Les résultats de cette démarche
ont été impressionnants, et je crois que cette approche très fructueuse sera de nouveau utilisée dans
l'avenir à l'égard d'un large éventail de dossiers sociaux, politiques et environnementaux.
La « Nouvelle initiative africaine » est un autre exemple d'une mobilisation efficace des efforts en vue
d'exercer le leadership; cette fois-ci, ce sont des dirigeants africains qui vont collaborer à la mise au
point d'un plan ambitieux pour s'attaquer au problème de la pauvreté et favoriser l'avènement d'une
prospérité durable sur ce continent. Leur détermination n'est pas passée inaperçue au sein du G-8, et
le Premier ministre du Canada a promis de faire de l'Afrique la principale priorité au Sommet de 2002.
La France succédera au Canada à la présidence du G-8 et, compte tenu de son engagement profond et
durable envers l'Afrique, il va de soi que les liens étroits entre nos deux pays seront particulièrement
déterminants dans la réussite de la Nouvelle initiative africaine. Nous saluons également les efforts
qu'a faits la Belgique, lors de son passage à la présidence de l'UE, pour amener l'Europe à prendre part
au processus de paix en Afrique centrale et dans la région des Grands Lacs.
En examinant ces questions dans le contexte de la présidence canadienne du G-8 au cours de l'année
qui vient, je crois que le G-8 peut jouer un rôle des plus important dans la revitalisation du système
multilatéral. C'est en effet au sein du G-8 que se développe le véritable leadership sur les grands
dossiers mondiaux et c'est là que s'allient le pouvoir politique et le pouvoir économique pour
contribuer au bien général de la planète. Les réalisations du G-8 au cours des dernières années --
notamment l'allégement de la dette du tiers monde, les efforts déployés pour réduire le « fossé
numérique » par l'entremise du groupe de travail DOT.force [Digital Opportunities Task Force], le
versement d'une contribution de plus de 1,3 milliard de dollars américains au Fonds mondial pour le
sida et la santé -- sont des exemples importants de ce qui peut être accompli grâce aux partenariats
mondiaux proposés par le G-8. Les dirigeants du G-8 n'en ont pas moins convenu à Gênes qu'il fallait
repenser le processus des Sommets afin que ceux-ci offrent une possibilité réelle de débattre des
grandes questions stratégiques.
Le Premier ministre Chrétien, aujourd'hui le doyen des gouvernants qui se réunissent au sein du G-8, a
promis de recourir à une approche différente l'an prochain à Kananaskis. En choisissant Kananaskis,
dans le massif des Rocheuses, pour tenir le Sommet canadien du G-8, le Premier ministre espère que
les participants pourront rétablir un dialogue politique mieux centré, et tenir un Sommet plus modeste
et plus concret, plus près de l'esprit qui a présidé à la création du G-8 -- un sommet davantage axé sur
les problèmes de fond que sur les apparences. À Gênes, il est parvenu à rallier les partenaires du G-8 à
cette proposition; notre défi consiste maintenant à faire en sorte que le prochain Sommet soit centré
sur les idées et sur la discussion.
En acceptant la responsabilité de présider le G-8 en 2002, nous sommes pleinement conscients de la
nécessité de collaborer avec des pays autres que les membres du G-8, avec la société civile, avec les
organisations internationales et avec différents autres acteurs afin de veiller à ce que les dirigeants du
G-8 puissent profiter du dialogue qui s'engage sur la place publique au sujet des grands problèmes
mondiaux. Mais dans nos démarches en vue de réorganiser le Sommet, nous réaffirmons néanmoins
un principe de base : les dirigeants du G-8 ont le droit et le devoir de se réunir. À Gênes, le Premier
ministre Chrétien a parlé de « l'obligation de se réunir », ce qui signifie que les dirigeants
démocratiquement élus des économies les plus vastes au monde ont le devoir de se rencontrer pour
discuter des grandes questions internationales, qu'il s'agisse de la manière de partager les bienfaits de
la croissance économique ou des moyens à prendre pour régler les problèmes environnementaux.
Conclusion
L'alliance qui nous unit à la France et à l'UE, à l'OTAN et aux autres institutions transatlantiques, ainsi
qu'à nos amis de la communauté européenne au sens large, est enraciné dans la réalité. Ensemble,
nous pouvons tous contribuer aux grandes questions prioritaires de la communauté transatlantique et
de la communauté mondiale. Cet apport consiste notamment à renforcer les règles de la libéralisation
du commerce et de l'investissement, à protéger notre environnement et les écosystèmes mondiaux, à
accroître la sécurité et à prévenir les conflits, et à mettre en place de nouveaux mécanismes permettant
aux populations de participer davantage aux processus de la gouvernance mondiale.
Alors que nous nous préparons à assumer la présidence du G-8, sans jamais perdre de vue le fait que
passerons ensuite le flambeau à la France, nous souhaitons collaborer encore plus étroitement avec
nos partenaires européens. Nous voulons tirer parti du dynamisme et de la vision qui animent le grand
rêve euro-atlantique -- et de la réalisation de ce rêve -- pour nous attaquer aux grandes priorités
véritablement mondiales et multilatérales.
J'ai déjà mentionné l'initiative africaine du G-8, à l'égard de laquelle nos deux pays me semblent
particulièrement bien outillés et bien placés pour avoir un effet bénéfique sur la vie de millions de
personnes en Afrique et ailleurs.
En ce qui concerne la relation transatlantique, le Canada et la France peuvent faire plus pour établir un
« pont numérique » mondial. Un tel projet ne manquerait de stimuler les énergies créatrices de la
société civile dans les deux pays et de favoriser l'émergence de nouvelles formes de gouvernance. Je
voudrais aussi mentionner que je me propose de demander aux hauts fonctionnaires de mon ministère
de se pencher sur la question de la mise en place d'un processus favorisant le dialogue avec des
centres de recherches et d'autres partenaires européens influents au cours des prochains mois, et
d'examiner de quelle façon on pourrait accroître et améliorer la collaboration canado-européenne.
Le Canada et la France, deux chefs de file de la Francophonie, sont les principaux promoteurs de la
diversité culturelle. Ils sont idéalement placés pour collaborer à la réalisation d'une mondialisation au
visage humain. De plus, le Canada poursuit une politique de dualité linguistique et de diversité
culturelle à la fois pour affirmer sa propre identité et pour accroître sa compétitivité sur les marchés
mondiaux. La France, de son côté, mène une politique de rayonnement culturel et linguistique à travers
le monde. Le fait que nous poursuivions des buts semblables devrait nous inspirer de multiples projets
de collaboration et je crois que c'est là ce qui va se produire effectivement, en particulier dans le
contexte du Programme Canada-France 2004.
Ce matin, en faisant mon jogging le long de la Seine, je ne pouvais m'empêcher d'admirer la beauté et
la culture que la France offre au reste du monde. En passant près du Louvre, je me suis rappelé que
John Amagoalik, qui fut le « père » du Nunavut, avait insisté pour voir La Joconde. Inuit jusqu'au fond
de l'âme, il reconnaît que les rencontres avec d'autres cultures l'enrichissent. Puisque nous sommes
en voie de devenir des sociétés du savoir, ne devrions-nous pas ouvrir, et même ouvrir tout grand, nos
vastes réserves de culture et de connaissances et offrir de nouvelles et merveilleuses possibilités au
monde entier?