M. KILGOUR - ALLOCUTION DEVANT LA NIGERIAN-CANADIAN ASSOCIATION DE CALGARY : « LE CANADA ET LE NIGÉRIA SONT UNIS » - CALGARY (ALBERTA)
SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS
NOTES POUR UNE ALLOCUTION
DE
L'HONORABLE DAVID KILGOUR,
SECRÉTAIRE D'ÉTAT (AMÉRIQUE LATINE ET AFRIQUE),
DEVANT LA NIGERIAN-CANADIAN ASSOCIATION DE CALGARY
« LE CANADA ET LE NIGÉRIA SONT UNIS »
CALGARY (Alberta)
Le 29 septembre 2001
Permettez-moi de commencer par adresser mes sincères remerciements à la Nigerian-Canadian
Association de Calgary pour m'avoir invité ici à prendre la parole devant vous ce soir, à l'occasion du
41e anniversaire du Nigéria. Le retour du Nigéria à un système démocratique renforcé se poursuit et,
comptant parmi les chefs de file des pays africains, le Nigéria assume son rôle avec une nouvelle
vigueur. Le résultat le plus important de ce rôle, et peut-être la meilleure raison de faire preuve
d'optimisme, est la signature de la Nouvelle Initiative africaine. De plus, les relations entre le Canada et
le Nigéria continuent de se développer tant sur le plan économique que politique.
Cependant, avant d'aborder les relations florissantes qu'entretiennent le Nigéria et le Canada, je ne
peux m'empêcher de parler brièvement des événements tragiques du 11 septembre. Le mépris complet
manifesté à l'égard de la vie humaine ce jour-là est sans doute impardonnable. Certes, ce n'est ni le
moment ni l'endroit pour discuter des conséquences. Néanmoins, il nous faut réfléchir sur la nature
des divisions ayant inspiré la malveillance qui s'est exprimée avec force. Ces divisions -- religieuses,
financières, politiques ou ethniques -- sont de celles que le Nigéria et son peuple ont trop bien
connues, et connaissent encore aujourd'hui. C'est dans ces moments-là que le monde a besoin
d'hommes et de femmes d'État et d'artisans de la paix à l'échelle internationale.
Heureusement, je peux dire avec confiance que le président du Nigéria, M. Olusegun Obasanjo, prend
ce rôle à cœur. Comme il a dit lui-même : « Les véritables croyants, qu'ils soient musulmans ou
chrétiens, savent que tous les humains sont créés par Dieu et qu'ils ne doivent pas se faire du mal,
mais s'aimer. »
Les relations entre le Nigéria et le Canada s'améliorent très rapidement depuis la reprise des relations
diplomatiques en septembre 1998. Le Canada a soutenu le peuple nigérian lorsqu'il s'est retiré en 1996
et, en rétablissant ces relations aujourd'hui, il continue de le soutenir. Un problème que nous n'avons
pas résolu aussi rapidement que nous l'aurions voulu, ou que quiconque ici l'aurait souhaité, concerne
la difficulté pour les Nigérians d'obtenir un visa canadien. Oui, les Nigérians devaient aller à Accra,
traverser deux pays, pour obtenir leur visa et oui, cette question a régulièrement été soulevée à tous
les niveaux, auprès des agents canadiens, des ministres et des députés. Comme le ministre nigérian
des Affaires étrangères, M. Lamido, me le signalait au début de l'été, pas tout à fait pour rire vous
savez, le gouvernement du Nigéria envisageait d'envoyer sa section consulaire à San José, au Costa
Rica, afin de rendre la monnaie de sa pièce aux Canadiens, en quelque sorte.
Cela dit, je suis très heureux d'annoncer le retour, prévu pour le mois prochain, d'un programme de
service des visas qui sera offert au haut-commissariat auxiliaire du Canada à Lagos. Un agent
d'immigration se trouve sur place et est en train d'embaucher et de former les membres de son équipe.
Si tout va bien, cette épine dans les relations entre le Canada et le Nigéria sera finalement retirée en
octobre.
Sur cette note positive, le Nigéria représente toujours une priorité absolue pour le Canada. Le président
nigérian Obasanjo continue de jouer un rôle actif très apprécié en faveur de la paix et de la stabilité
dans la région et sur le continent. Il a été l'instigateur des progrès réalisés récemment à Abuja
concernant la situation au Zimbabwe. Dans la région du fleuve Mano, il essaie activement de réunir les
présidents Taylor et Conté, du Libéria et de la Guinée respectivement. Plus tard en octobre, Abuja
accueillera la réunion des groupes de l'opposition du sud du Soudan, dans le cadre de la campagne
que mène le président pour tenter de régler par la médiation l'un des conflits les plus longs et les plus
violents de l'Afrique. Enfin, on ne peut passer outre à la précieuse contribution nigériane à la Nouvelle
Initiative africaine, dont je discuterai en détail dans quelques instants.
L'année écoulée s'est révélée extrêmement féconde pour ce qui est des échanges commerciaux entre
le Canada et le Nigéria. Comme tout le monde ici le sait, le Canada est un pays commerçant, une
Phénicie moderne. Notre subsistance dépend d'un marché mondial dynamique. Pays le plus peuplé de
l'Afrique, le Nigéria représente un marché important pour les entreprises canadiennes, car il possède
un immense potentiel.
C'est en ayant cela à l'esprit que le Canada a accueilli la troisième session de la Commission
économique mixte Canada-Nigéria en mai. Il s'agissait de la première réunion de ce genre en 10 ans. À
cette occasion, nos invités nigérians ont pu montrer le potentiel et le talent qui existent au Nigéria.
Actuellement, 156 entreprises canadiennes, œuvrant dans 11 secteurs différents de l'économie
nigériane, sont inscrites auprès de la mission du Canada à Lagos. Jusqu'ici, 19 de ces entreprises, et
ce nombre continue d'augmenter, possèdent des investissements directs d'une valeur approximative
de 375 millions de dollars. Des entreprises canadiennes, notamment dans les secteurs de la production
d'électricité, du logement, des produits de canola et des télécommunications, ont fait appel à mon
bureau; elles souhaitaient faire des affaires au Nigéria, ainsi que profiter du potentiel et du talent qui
existent dans ce pays. De même, un grand nombre d'entreprises nigérianes se sont jointes à la
nouvelle Chambre de commerce Nigéria-Canada à Lagos. Fondée récemment, la section nigériane de
l'Association des femmes d'affaires canadiennes et africaines est également appréciée.
L'approfondissement des relations commerciales peut donner des moyens d'agir à la population du
Nigéria, engendrant ainsi la prospérité, des possibilités et la stabilité financière à long terme qui
permettra un véritable enracinement de la jeune démocratie nigériane.
Pour faire en sorte que la démocratie perdure, l'Agence canadienne de développement international
[ACDI] travaille fort en vue de rétablir son programme d'aide bilatérale au Nigéria, lequel sera axé sur la
santé et l'environnement. Une fois en place, ce sera l'un des plus importants programmes d'aide
publique au développement du Canada en Afrique. À l'heure actuelle, l'aide du Canada est acheminée
par des organismes multilatéraux, à hauteur d'environ 20 millions de dollars. Il est à noter que
6 millions de dollars ont été affectés au Programme d'éradication de la polio de l'Organisation mondiale
de la santé. Une autre contribution de 10 millions de dollars a été effectuée au Fonds des Nations Unies
pour la population en faveur de la santé génésique et de la lutte contre le VIH/sida.
Ces programmes seront maintenant gérés par l'agente principale de développement de l'ACDI à Abuja,
qui se joint à l'agent politique et au nouveau haut-commissaire du Canada, M. Howard Strauss. La
section de l'immigration ainsi que les sections consulaire et commerciale, toutes basées à Lagos,
viennent compléter ce bureau. Il n'y a pas de doute, la situation est différente d'il y a deux ans, lorsque
le Canada occupait une pièce dans l'ambassade des États-Unis. Cela témoigne de notre volonté
d'accompagner le Nigéria dans son long et périlleux voyage, afin qu'il réalise son énorme potentiel
comme moteur économique de l'Afrique occidentale et comme force de paix et de stabilité de l'Afrique.
La réalisation de ce potentiel, pas seulement au Nigéria mais dans toute l'Afrique, dépendra en partie
de la réponse du G-8 à la Nouvelle Initiative africaine. Ce document, signé par 53 pays africains à la
réunion des chefs d'État de l'OUA [Organisation de l'unité africaine], qui a eu lieu à Lusaka plus tôt cet
été et qui était animée en partie par le président Obasanjo, indique jusqu'où l'Afrique est prête à aller
pour s'intégrer dans l'économie mondiale.
Cette initiative, produit de la fusion du Programme d'action du millénaire pour l'Afrique et du Plan
OMEGA pour l'Afrique, corrobore les principes de la Renaissance africaine. Cette renaissance,
essentiellement, incitait les pays donateurs du monde entier à aider l'Afrique et les Africains à s'aider
eux-mêmes.
En février, j'ai assisté à un discours prononcé par Dr Malgethu Makogba, médecin sud-africain et
penseur éminent sur la Renaissance africaine. Si vous me permettez de le citer :
Le projet de la Renaissance africaine serait incomplet et irréel si nous [les Africains] ne réglions pas
les questions importantes que sont la corruption, l'instabilité politique permanente, la justice et le
développement économique, la transformation économique, la trajectoire économique et le mauvais
leadership politique qui caractérisaient l'Afrique au lendemain de sa libération. Aucune de ces
questions n'est exclusive à l'Afrique, mais les Africains doivent les régler en fonction de leur contexte
et de leur perspective. Nous concevons le projet de la renaissance africaine comme [...] une petite
contribution au processus global [...] le projet vise à ce que les Africains soient les agents et les
maîtres de leur histoire et de leur destinée.
Pour établir le lien direct entre ces révélations saisissantes et la Nouvelle Initiative africaine, il suffit de
lire son premier paragraphe, et je cite :
La présente Nouvelle Initiative africaine est une promesse faite par les dirigeants africains, fondée sur
une vision commune ainsi qu'une conviction ferme et partagée qu'il leur incombe d'urgence
d'éradiquer la pauvreté, de placer leurs pays, individuellement et collectivement, sur la voie d'une
croissance et d'un développement durables tout en participant activement à l'économie et à la vie
politique mondiales. Elle est ancrée dans la détermination des Africains de s'extirper eux-mêmes, ainsi
que leur continent, du malaise du sous-développement et de l'exclusion d'une planète en cours de
mondialisation.
Comment y parvenir? En signant le document, les dirigeants africains ont promis d'exercer un
« leadership courageux et imaginatif » et de reconnaître ouvertement les nombreux « échecs des
leaderships politiques et économiques ». Les dirigeants africains ont pris en commun la responsabilité
de « promouvoir et protéger la démocratie et les droits de l'homme dans leur pays et leur région en
établissant des normes claires de responsabilité, de transparence et de démocratie directe aux niveaux
local et national ». Ces énoncés plutôt audacieux ont rarement, ou jamais, été prononcés par de
nombreux dirigeants africains, encore moins par tous les dirigeants de l'Afrique.
Soit, la rhétorique est forte mais, jusqu'ici, les résultats immédiats sont rares. Il est possible que le
changement le plus important, deux mois après la publication de ce document historique, soit dans la
pensée des dirigeants et des décideurs des pays hautement industrialisés. La balle est dans leur
camp, dans notre camp, et il nous incombe maintenant de répondre adéquatement à l'appel de l'Afrique
: aider les Africains à s'aider eux-mêmes.
C'est pour répondre à cette demande que le premier ministre Chrétien et ses collègues dirigeants ont
promis, au dernier Sommet du G-8 à Gênes, d'élaborer un Plan d'action pour l'Afrique, en réponse à
cette initiative. Le Canada est le principal responsable de ce plan d'action, et le premier ministre a
nommé M. Robert Fowler son représentant spécial pour le G-8 et l'Afrique. Plus tard cette semaine,
l'ambassadeur Fowler se rendra à Washington pour amorcer une longue série de consultations en
prévision du G-8 de l'an prochain. Au Canada, un processus de consultation sera bientôt entamé à
l'échelle nationale, auquel certains d'entre vous prendront peut-être part; nous demanderons aux
Canadiens intéressés de contribuer à l'élaboration de ce plan d'action. À l'échelle internationale, le
Canada travaillera en étroite collaboration avec le Nigéria, un des principaux partisans de la Nouvelle
Initiative africaine. Tout compte fait, dans neuf mois, peu après Kananaskis, nous pourrions bel et bien
parvenir à un autre accord innovateur, qui décrit seulement comment le G-8 prévoit aider l'Afrique et
les Africains à s'aider.
Je conclus en m'inspirant de l'une des observations du président Obasanjo, faite à l'occasion de sa
visite à Ottawa, il y a quelques années. En rappelant le rôle du Canada pendant le retour turbulent du
Nigéria à la démocratie, le président a déclaré avec fermeté : « Le Canada s'est fermement opposé aux
actes antidémocratiques et inhumains. »
Je peux vous assurer, mes amis, que le Canada continuera de soutenir le Nigéria et les Nigérians,
l'Afrique et les Africains, alors qu'ils bâtissent un avenir meilleur.
Je vous remercie.