2004/22 SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS
NOTES POUR UNE ALLOCUTION
DE
L'HONORABLE BILL GRAHAM,
MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,
À L'OCCASION DU DÎNER DU CANADIAN COUNCIL OF SOUTH
AFRICANS SOULIGNANT LE JOUR DE LA LIBERTÉ
TORONTO (Ontario)
Le 24 avril 2004
Les événements historiques que nous commémorons aujourd'hui ont eu lieu il y a
10 ans, certes, mais ils se sont aussi poursuivis tout au long d'une remarquable
décennie. En 10 ans, les Sud-Africains ont ouvert à leur pays des perspectives plus
prometteuses et lui ont donné une prospérité qu'on n'aurait pu concevoir en 1994.
Grâce à l'exceptionnelle transformation qui l'a fait passer d'un régime d'apartheid à une
démocratie multiraciale, l'Afrique du Sud est devenue pour le monde un modèle de
tolérance et d'adresse dans le règlement des conflits, un modèle aussi d'économie
africaine dynamique et transparente. Il est extraordinaire de savoir que, il y a à peine
une quinzaine de jours, l'Afrique du Sud a tenu ses troisièmes élections générales
démocratiques, qui ont été jugées équitables et se sont déroulées presque sans
violence. Et je dois dire que la stabilité du paysage politique sud-africain d'aujourd'hui
me semble particulièrement attrayante.
Sur une note plus sérieuse, je dirai que le Canada et l'Afrique du Sud se ressemblent
aujourd'hui plus que jamais. Ce sont des pays qui se caractérisent par la diversité et
l'innovation. Les dirigeants de la société civile, de l'entreprise et de l'appareil
gouvernemental sont animés de convictions profondes au sujet de leur société et du
village planétaire que nous partageons tous. Les Canadiens sont fermement attachés à
cette évolution et au potentiel de ces sociétés, tout comme ils se sont intéressés à
l'Afrique du Sud pendant les dizaines d'années de sa lutte pour la liberté et les
premières années de sa nouvelle démocratie.
Le soutien du Canada au mouvement contre l'apartheid a été important, car il reposait
sur un large consensus public et mobilisait des parlementaires de tous les partis
politiques. À cet égard, on doit beaucoup à la lutte acharnée qu'ont livrée à l'apartheid
le Comité inter-Églises sur les responsabilités des corporations, le Congrès du travail
du Canada et le mouvement syndical de l'ensemble du Canada, et les ONG
[organisations non gouvernementales] aux manifestations et aux campagnes de
désinvestissement aux niveaux universitaire et communautaire d'un bout à l'autre du
Canada.
Lorsque la violence s'est intensifiée en Afrique du Sud, pendant les années 1980, le
Canada a pris ses distances avec certains de ses alliés de toujours et est devenu un
fervent partisan des sanctions. Le Canada a présidé le Comité des ministres des
Affaires étrangères du Commonwealth pour l'Afrique australe. Sur le terrain, le
personnel diplomatique canadien a observé les procès et les manifestations, participé
aux ralliements et aux funérailles dans les townships. Le Fonds pour le dialogue de
notre ambassade a soutenu des projets d'envergure modeste pour appuyer le
mouvement en faveur de la démocratie. L'ACDI [Agence canadienne de
développement international] a établi pour l'Afrique du Sud un programme d'aide
publique au développement original qui était guidé par le souci des droits de la
personne et répondait directement aux demandes de la collectivité noire.
De grandes personnalités sud-africaines comme l'archevêque [Desmond] Tutu et le
président [Nelson] Mandela ont émergé de ces luttes, et j'ose dire que ces
personnalités sont aussi connues des Canadiens qu'un grand nombre de leurs propres
hommes et femmes politiques. Ce fut pour moi un grand moment que d'entendre
l'allocution que le président Mandela a prononcée devant la Chambre des communes
et le Sénat réunis, lorsqu'il a été fait citoyen honoraire du Canada. Ce fut un moment
encore plus remarquable que celui où il est venu dans l'école appelée [Nelson]
Mandela Park en son honneur, dans ma circonscription. J'ai pu lire l'amour, le respect
et l'affection dans le regard des élèves, lorsqu'il leur a expliqué l'importance de
l'éducation dans leur vie et leur a dit que le succès ne dépendait pas de la race ni du
rang social. Il les a poussés à réfléchir à la possibilité de se consacrer un jour au
service de leur pays comme députés.
Maintenant que la lutte contre l'apartheid est chose du passé, le Canada demeure lié à
l'Afrique du Sud par des valeurs communes, par une conception commune des intérêts
du monde. Nos deux pays accordent une place de choix à la culture et sont attachés à
la diversité dans leurs sociétés. Nous coopérons dans le cadre de dialogues sur la
politique relative à l'environnement et aux changements climatiques. Nous travaillons
ensemble dans le Réseau de la sécurité humaine à la promotion de la sécurité des
personnes, comme priorité centrale de notre politique étrangère nationale. Et, bien
entendu, nous tâchons d'épauler l'Afrique du Sud dans la lutte contre le VIH/sida, tant
par l'aide au développement dispensée par l'ACDI qu'au moyen du projet de loi C-9, qui
permettra à l'Afrique du Sud et à d'autres pays en développement d'obtenir des
traitements à faible coût pour lutter contre le VIH/sida et d'autres épidémies.
En outre, nos relations avec le gouvernement démocratiquement élu de l'Afrique du
Sud ont permis à la collaboration entre nos deux pays de dépasser le stade des liens
interpersonnels pour s'étendre à de nouveaux domaines d'intérêt commun. L'automne
dernier, nous avons eu l'honneur d'accueillir le président [Thabo] Mbeki au Canada. Au
cours de cette visite, le ministre des Affaires étrangères [d'Afrique du Sud] [Nkosazana
Dlamini] Zuma et moi avons signé la Déclaration commune d'intention pour renforcer la
coopération bilatérale, qui s'est traduite par le lancement d'un certain nombre
d'initiatives, dont une coopération accrue en sciences et technologie, un dialogue plus
intense dans les secteurs des transports et de l'environnement, et des plans ambitieux
pour stimuler les relations commerciales entre nos deux pays.
L'importance de l'Afrique du Sud pour le Canada à cet égard est bien réelle.
Aujourd'hui, l'économie sud-africaine est plus saine qu'elle ne l'a été ces 40 dernières
années, avec une classe moyenne noire en expansion, dans une société de plus en
plus urbaine. Les investissements canadiens s'y élèvent à 1 milliard de dollars. Les
Sud-Africains sont aussi en train de devenir des investisseurs importants au Canada :
238 millions de dollars en 2002. L'Afrique du Sud est notre partenaire commercial le
plus important en Afrique subsaharienne. Un important commerce de biens
manufacturés et de services complexes se fait dans les deux sens.
Sous la présidence de MM. Mandela et Mbeki, le partenariat avec le Canada est
maintenant ancré dans une vision commune de la prospérité et de la sécurité dans le
monde. Au centre de notre conception du monde se trouvent le multilatéralisme, dont
nous reconnaissons l'importance, et l'amélioration du fonctionnement de l'ONU
[Organisation des Nations Unies]. Nos deux pays engagent des ressources importantes
dans la prévention des conflits par le maintien de la paix et des efforts de médiation.
Par-dessus tout, nos deux pays tiennent à ce que la transformation historique de
l'Afrique du Sud serve de modèle à tout le continent. L'Afrique du Sud, à titre
d'architecte principal du NPDA, le Nouveau Partenariat pour le développement de
l'Afrique, et de moteur des réformes de l'Union africaine, a prêché l'exemple en faisant
la promotion de la réforme politique et économique du continent africain. Cette
démarche est essentielle aux yeux du Canada, comme nous l'avons montré par un
constant soutien politique de haut niveau et une aide financière non négligeable. Cet
engagement soutenu se retrouvera certainement dans les résultats de l'examen de la
politique étrangère que je dirige en ce moment. Je suis persuadé que l'importance de
l'Afrique du Sud comme partenaire de choix du Canada sera réaffirmée.
En 1960, l'auteur sud-africain Alan Paton a écrit : « Un jour, l'Afrique du Sud sera un
grand pays pacifique dont le monde sera fier, un pays où chacune des nombreuses
collectivités fera sa propre contribution originale. » Ce qu'il espérait a mis du temps à
se matérialiser, mais aujourd'hui, ce rêve se réalise plus rapidement et de façon plus
saisissante que personne n'aurait pu l'imaginer. En soulignant une décennie de
réalisations sud-africaines, les Canadiens souhaitent une autre décennie d'un
partenariat de plus en plus solide qui laisse entrevoir une plus grande prospérité, une
plus grande sécurité pour chacun de nos deux pays, pour le continent africain et pour le
monde entier.
Je vous remercie.