2004/2 SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS
NOTES POUR UNE ALLOCUTION
DE
L'HONORABLE BILL GRAHAM,
MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,
À L'OCCASION DES CONSULTATIONS DES ONG
SUR LES DROITS DE LA PERSONNE
OTTAWA (Ontario)
Le 2 février 2004
Je vous souhaite la bienvenue au ministère des Affaires étrangères. Ces consultations
constituent pour nous un événement annuel important, et je vous remercie de venir
partager avec nous vos idées et votre expertise. Nous qui sommes réunis ici
aujourd'hui savons que la réalisation de tant d'autres objectifs du Canada dans le
monde repose sur l'avancement des droits de la personne : sans ces droits il n'y a ni
sécurité, ni perspective de développement social, économique ou culturel pour les
individus et, finalement, il n'y a ni sécurité ni prospérité durables pour les collectivités et
les États. C'est pourquoi l'avancement des droits de la personne est un objectif
important de la politique étrangère canadienne, et votre présence ici aujourd'hui est
vitale, car elle aidera le Canada à poursuivre ses efforts dans tous ces domaines
pendant l'année qui vient.
Nous pouvons dire que l'année écoulée a été difficile pour la communauté des droits de
la personne. En Iraq, en Afghanistan et ailleurs, des travailleurs humanitaires et des
défenseurs des droits de la personne ont été attaqués, et ces attaques ont tué des
personnes, notamment plusieurs Canadiens, qui se dévouent pour améliorer le sort des
autres. L'attentat à la bombe contre le siège de l'ONU [Organisation des Nations Unies]
à Bagdad a tué Sergio de Mello, un homme remarquable dont nous avons tous
profondément pleuré la perte, en particulier ceux qui ont eu le privilège de le connaître
personnellement. Au nom de ceux qui sont tombés pour la cause des droits de la
personne l'année dernière, nous devons faire en sorte que ces attaques renforcent
notre détermination à poursuivre les idéaux qu'ils chérissaient, et ce même dans les
régions les plus dangereuses du monde.
À l'heure actuelle, la situation est difficile sur le plan de la promotion et de la protection
des droits de la personne. Les tensions internationales créées par l'Iraq ont accentué la
polarisation des points de vue sur la souveraineté et la non-intervention, parmi les
membres de l'ONU, entraînant ainsi, à l'échelle mondiale, un renforcement de
l'opposition à l'activisme en matière de droits de la personne et d'aide humanitaire.
Même si ces problèmes persisteront encore pendant un certain temps, nous ne
pouvons les laisser occulter le fait que les Iraquiens ont maintenant la chance de bâtir
une société respectueuse des droits des personnes qui la composent, et que la
communauté internationale, pour sa part, a la chance de collaborer avec eux afin
d'atteindre cet objectif.
En outre, nous devons nous pencher sur les réalisations marquantes de 2003. En effet,
malgré les défis considérables concernant les droits des femmes, particulièrement en
ce qui a trait à la violence fondée sur le sexe, aux droits de procréation et sexuels, ainsi
qu'au VIH/sida, ce dossier a quand même évolué l'an dernier. Parmi les réussites à cet
égard, il convient de mentionner le renouvellement du mandat du Rapporteur spécial
sur la violence faite aux femmes. En ce qui concerne les droits de la personne en Iran,
le Canada a pris l'initiative de présenter à l'Assemblée générale de l'ONU une
résolution qui fait état de la situation et encourage la mise en place de réformes. Par
ailleurs, en Afghanistan, la constitution démocratique adoptée récemment par le
gouvernement renferme des dispositions sans précédent qui garantissent l'égalité des
sexes et reconnaissent pour la première fois les droits des minorités.
Dans l'ensemble du système onusien et sur de nombreuses autres tribunes, nous
propageons l'idée que les États et, finalement, la communauté mondiale, ont la
responsabilité de protéger les civils contre les génocides et autres atrocités. Les efforts
soutenus que nous déployons pour faire avancer cette cause seront, nous l'espérons,
bien servis au cours de l'année à venir par le mouvement croissant en faveur de la
réforme de l'ONU, et par la commémoration du 10e anniversaire du génocide rwandais.
En ce qui concerne la lutte contre l'impunité, le Canada a continué de promouvoir
activement la ratification et la mise en œuvre du Statut de Rome de la Cour pénale
internationale. Nous avons contribué au fonctionnement efficace de la Cour, et nous
nous sommes réjouis de voir que son premier président est un Canadien. Enfin, il
faudra aussi retenir de 2003 le leadership manifesté par le Canada pour amener le
Réseau de la sécurité humaine à chercher à améliorer le fonctionnement de la
Commission des droits de l'homme de façon innovatrice.
Quand on examine les progrès substantiels à réaliser dans le domaine des droits de la
personne en 2004, on constate, et vous le savez bien, que tout semble axé sur la
réforme de l'ONU et de la Commission des droits de l'homme. Mais il faut être réaliste
et prévoir une autre session difficile cette année, compte tenu des problèmes
récurrents et des tensions internationales qui subsistent. Le Canada ne siégera pas à
la Commission cette année, mais je puis vous assurer que nous prendrons l'initiative de
certaines résolutions, et que nous participerons activement à la négociation de
nombreuses autres. À cet égard, je suis heureux d'annoncer que la délégation
canadienne à la Commission sera dirigée cette année par l'ambassadeur Paul Meyer.
Maintenant, laissez-moi passer en revue quelques-unes des questions prioritaires de
l'année en cours.
En ce qui concerne les droits des autochtones, nous allons collaborer avec les autres
États et les représentants des communautés intéressées afin de mener à bien les
négociations relatives au Projet de déclaration des Nations Unies sur les droits des
peuples autochtones. Plus tard ce mois-ci, nous consulterons les organisations
autochtones du Canada pour faciliter l'obtention d'un consensus et la négociation des
compromis nécessaires à l'atteinte de notre objectif commun.
En ce qui concerne les droits des femmes, une fois de plus, le Canada proposera une
résolution sur l'élimination de la violence contre les femmes. Nous avons l'intention de
collaborer avec les pays aux vues similaires afin de contrer la tendance à la polarisation
politique et culturelle à l'égard des droits des femmes, dont nous avons été témoins à
l'Assemblée générale de l'automne dernier, où seule une résolution sur la violence
familiale a pu être adoptée.
Une autre de nos grandes priorités sera la protection des civils en situation de conflit
armé. Comme vous le savez, l'accès des travailleurs humanitaires, le droit humanitaire
international, les violences sexuelles et celles fondées sur le sexe ainsi que le problème
des personnes déplacées à l'interne sont des dossiers qui soulèvent encore la
controverse parmi les États membres. En fait, l'opposition à cet égard est maintenant
mieux organisée à l'Assemblée générale et à la Commission des droits de l'homme.
Les progrès que nous réaliserons dans ces dossiers dépendront en grande partie de la
capacité des groupes de la société civile, comme les vôtres, à sensibiliser le public à la
situation et à faire pression sur les États indécis.
En outre, nous maintiendrons notre engagement à l'égard de la protection et de la
promotion des droits des enfants du monde entier, et à l'égard de la lutte contre toute
forme de discrimination. De plus, nous participerons activement aux négociations
relatives aux droits économiques, sociaux et culturels.
Au nom du gouvernement du Canada et du Ministère, je vous assure que nous ferons
notre part au cours de l'année à venir sur le plan de la promotion des droits de la
personne partout dans le monde, surtout en ce qui concerne le respect des normes en
vigueur. Et nos efforts seront largement inspirés des points de vue et des suggestions
que vous avez à nous offrir.
Nous nous inspirerons aussi du nouveau dynamisme et des nouvelles priorités du
premier ministre Martin, ainsi que de l'examen de la politique internationale qu'il m'a
chargé de mener. Je crois que nous entrons dans une période très dynamique et
productive en ce qui concerne l'image internationale du Canada et nos activités à
l'étranger. Le premier ministre est déterminé à voir le Canada jouer un rôle plus actif
sur la scène internationale -- à le voir devenir un catalyseur de l'effort mondial pour
renouveler le système multilatéral afin qu'il encourage plus efficacement le respect des
droits de la personne. Le premier ministre veut aussi que le Canada fasse en sorte que
les stratégies de développement mondial associent la croissance économique au
développement social et à la primauté du droit. À l'évidence, ce programme contribuera
pour beaucoup à l'avancement des droits de la personne dans les pays en
développement.
Nous savons que les Canadiens veulent nous voir participer davantage à l'amélioration
de l'ordre mondial et de la vie des personnes au-delà de nos frontières. C'est le
message que m'ont transmis les citoyens de tout le pays au cours du Dialogue sur la
politique étrangère, l'an dernier, et c'est certainement celui que j'ai perçu dans les
mémoires que bon nombre de vos organisations ont présentés à cette occasion. Au
cours des prochains mois, je vais procéder à un examen détaillé de notre politique
internationale afin de voir comment mieux définir nos priorités, et comment nous
organiser dans l'ensemble du gouvernement pour poursuivre nos objectifs et y
consacrer les ressources nécessaires. Je pense que, une fois cet exercice achevé, le
gouvernement sera plus à même d'aborder les préoccupations en matière de droits de
la personne dont vous discuterez ici aujourd'hui.
Évidemment, il ne faut pas s'attendre à des changements du jour au lendemain, ni au
Canada, ni au sein des organisations internationales, ni dans le monde en général.
Eleanor Roosevelt était une visionnaire à cet égard, comme à tant d'autres, quand elle
a dit que tous les grands changements dans l'histoire de l'humanité ont été le fruit
d'une longue maturation et de nombreux compromis.
Sachez, cependant, que le gouvernement fait totalement siennes les questions sur
lesquelles vous nous conseillerez aujourd'hui, et que celles-ci continueront d'être au
cœur de notre politique internationale. Nous comptons sur les groupes de la société
civile comme les vôtres pour devenir nos partenaires dans la défense et la promotion
des droits de la personne, et il nous tarde de connaître vos idées quant aux domaines
où le Canada pourrait mieux centrer ses activités, et au regard desquels nous pourrions
mieux collaborer. Il sera important de conjuguer nos efforts en 2004. Je me réjouis à la
perspective de travailler avec vous.
Je vous remercie.