Le 22 janvier 2007
HERZLIYA PITUAH, Israël
2007/3
SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS
NOTES POUR UNE ALLOCUTION
DU
MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
ET MINISTRE DE L’AGENCE DE PROMOTION ÉCONOMIQUE
DU CANADA ATLANTIQUE,
L’HONORABLE PETER MACKAY,
À L’OCCASION DE LA SEPTIÈME CONFÉRENCE ANNUELLE
D’HERZLIYA SUR L’IMPORTANCE À DONNER À LA
SÉCURITÉ NATIONALE D’ISRAËL
C'est pour moi un privilège d'être ici, à la fois à cette conférence prestigieuse et en
Israël. C'est ma première visite en Israël et dans la région. Depuis mon arrivée samedi,
j'ai vu, j'ai entendu et j'ai appris beaucoup de choses.
Je sais que c'est de cette tribune que le premier ministre Sharon a exprimé sa vision du
désengagement qui a été concrétisée depuis à Gaza. Nos pensées sont avec le
premier ministre Sharon et sa famille.
Si vous me le permettez, je vais vous présenter brièvement le nouveau gouvernement
du Canada. Nous comprenons que le Canada a l'obligation et la responsabilité de jouer
un rôle actif et constructif sur la scène mondiale. Comme gouvernement, nous avons
décidé que nous ferions en sorte que le Canada se prononce d'une voix forte et claire
sur les enjeux qui nous importent le plus.
Nous renforçons la sécurité des Canadiens au pays et à l'étranger. Nous offrons à
notre police et à nos services du renseignement les ressources et le soutien dont ils ont
besoin pour faire leur travail. Nous faisons de nouveaux investissements substantiels
dans nos forces armées, nous protégeons nos ports et nos frontières. Nous améliorons
l'efficacité de notre aide internationale et nous ciblons davantage nos activités
diplomatiques à l'étranger.
Par ailleurs, ce qui est plus pertinent à la discussion d'aujourd'hui : ma priorité absolue
quand je suis devenu ministre des Affaires étrangères il y a presque un an était de
revitaliser la relation du Canada avec ses amis et ses alliés et de mettre l'accent sur la
promotion de la liberté, de la démocratie, des droits de la personne et de la primauté du
droit dans la politique étrangère du Canada.
Plus tôt ce mois-ci, je me suis rendu en Afghanistan. Le Canada est présent dans la
province de Kandahar, à la demande du gouvernement élu démocratiquement de
l'Afghanistan et dans le cadre d'une mission sanctionnée par l'ONU pour aider à
assurer la sécurité et à bâtir une société stable, démocratique et autosuffisante.
Des diplomates, des travailleurs humanitaires et quelque 2 500 soldats canadiens sont
postés dans le sud de l'Afghanistan, près de la frontière pakistanaise, l'un des endroits
les plus instables et dangereux au monde. Les Forces canadiennes participent à une
opération militaire difficile, luttant contre des insurgés talibans déterminés.
L'environnement est rude. Le terrain, les terroristes, la région, la nature de la campagne
rendent cette mission non conventionnelle complexe et exigeante.
Nous avons déjà perdu 44 soldats et un diplomate.
Nous avons appris des leçons importantes : si une capacité militaire efficace est
capitale, c'est loin d'être le seul instrument pour aboutir à un changement à long terme.
L'approche pangouvernementale du Canada en Afghanistan commence à porter ses
fruits. La population afghane voit que des progrès sont possibles. Les Afghans
commencent à croire que leur gouvernement pourra peut-être leur apporter la sécurité
et la stabilité dont ils ont besoin pour rebâtir leur vie, leur famille, leurs collectivités et
leur pays.
Nous affaiblissons le fief des éléments extrémistes et terroristes qui ont privé la
population afghane de ses droits humains fondamentaux, soit de vivre dans la dignité,
la sécurité et la prospérité.
Le partage de nos valeurs est une priorité importante de la politique étrangère du
Canada.
Cependant, comme nous le savons tous, il ne s'agit pas de valeurs exclusivement
canadiennes ni de valeurs exclusivement occidentales. Elles n'appartiennent à
personne mais elles sont à la portée de tous ceux qui choisissent de les embrasser. La
démocratie et la liberté sont des valeurs qui apportent aux peuples du monde l'espoir
de rêver et le courage de se défendre.
La longue histoire du Canada comme pays ouvert, tolérant et diversifié offre une voix
caractéristique et, à mon avis, une voix bienvenue dans le discours démocratique.
En fait, ce sont les valeurs que nous partageons avec Israël qui rapprochent autant nos
deux pays.
Nous avons un long passé commun, qui a commencé même avant la création de l'État
d'Israël. Le Canada a présidé le Comité spécial des Nations Unies sur la Palestine en
1947 qui a pavé la voie à la création d'Israël.
Malheureusement, notre dossier n'est pas sans taches. Nous sommes parmi ceux qui
ont tourné le dos aux Juifs qui ont fui l'Europe pendant l'Holocauste. C'était honteux,
mais nous avons compris notre erreur et notre dossier récent témoigne de cette
compréhension.
Six décennies de relations solides qui englobent la vie culturelle, politique et
économique illustrent l'étendue du lien qui nous unit. Cela va de guider le système de
justice d'Israël en partageant l'expérience que nous avons acquise lors de l’élaboration
de la Charte canadienne des droits et libertés, un élément important de notre
Constitution, à accroître et diversifier nos relations commerciales, ce qui a produit plus
d’un milliard de dollars d'échanges commerciaux l'an dernier. Nous avons même
implanté le hockey dans les points les plus éloignés du pays, au Canada Centre à
Metulla que j'ai visité aujourd'hui. Notre relation est vraiment profonde et résistante.
Six décennies se sont écoulées et l'appui du Canada à Israël est devenu encore plus
solide. Six décennies se sont écoulées et le Canada continue à comprendre le sens —
l'importance — d'Israël comme idée et comme État.
La sécurité et la prospérité d'Israël sont fondamentales. Pour garantir la sécurité et la
prospérité d'Israël, il faut créer un État palestinien pacifique et viable. En même temps,
Israël doit être accepté comme voisin légitime et partenaire dans la région.
Le nouveau gouvernement du Canada n'a pas fait qu'en parler. Nous avons agi. Nous
avons été le premier pays à suspendre nos rapports avec le gouvernement dirigé par le
Hamas. Lors de discussions au sein du G8 et à l'ONU sur le conflit au Liban, nous
avons fermement soutenu le droit d'Israël à se défendre. Nous avons également pris
des mesures à l'ONU, y compris au Conseil des droits de l'homme, à l'égard de
résolutions qui exprimaient un parti pris injuste contre Israël.
Le Canada travaille en faveur de l'équité, de la justice et de la dignité pour le peuple
d'Israël. Nous faisons de même pour les Palestiniens.
Le Canada croit en la solution des deux États, par principe et pour des raisons
pratiques : les Palestiniens ont besoin d'un État, Israël a besoin de sa sécurité. Les
deux sont liés.
Des cyniques diront, à juste titre, que nous avons déjà été à deux doigts de la paix et
que nous n'avons pas réussi à rallier la détermination nécessaire pour y parvenir.
Ils souligneront, une fois encore à juste titre, que les conditions semblaient beaucoup
plus favorables qu'en ce moment et que, malgré tout, nous avons échoué.
C'est vrai, mais il y a des défis nouveaux et importants, par exemple :
• l'essor de l'Iran et ses ambitions nucléaires;
• l'instabilité au Liban;
• le conflit qui perdure en Iraq;
• l'extrémisme religieux partout.
ll y a également des possibilités.
Je crois que les esprits de nombreux dirigeants arabes modérés, du Golfe au Maghreb,
se concentrent sur des moyens nouveaux et pragmatiques et certains de ces dirigeants
sont manifestement prêts à aider.
Les Israéliens et les Palestiniens, cette région et le monde en ont assez de ce conflit et
ils veulent le voir réglé. Sauf quelques folles exceptions, on convient universellement
qu'Israël est là pour rester et qu'il faut créer un État palestinien modéré, démocratique
et pacifique.
Avec l'élection du Hamas il y a un an, le défi de bâtir cet État palestinien modéré et
pacifique est devenu plus difficile, mais encore plus important.
Pas plus tard que ce matin, on a critiqué ma visite en disant qu'elle était une
" rebuffade " à l'endroit des dirigeants du Hamas, parce que j'ai refusé de les
rencontrer. Quand il s'agit de tenir tête au terrorisme, c'est le genre de critique que je
suis prêt à essuyer n'importe quand.
Ce qu'il y a d'extraordinaire chez les Palestiniens, c'est que même dans le contexte
difficile d'aujourd'hui, on trouve toujours une détermination aussi grande et de
nombreux acteurs qui partagent des objectifs de modération, de réforme et de paix.
Nous avons une véritable base sur laquelle construire. La possibilité pour les
Palestiniens de bâtir une société progressiste et dynamique existe bel et bien.
Toutefois, même si un État palestinien prospère, modéré et pacifique est une possibilité
réelle, nous devons être réalistes. L'échec est aussi une possibilité.
J'ai rencontré le président Abbas vendredi et nous avons eu une discussion franche et
tournée vers l'avenir.
Je lui ai rappelé que la Feuille de route est très claire : le premier pas vers la paix pour
les Palestiniens est de mettre fin à la terreur et à la violence, et je lui ai dit que si les
Palestiniens n'assument pas la responsabilité de leur sécurité interne et par extension,
s'ils n'offrent pas la sécurité à leur voisin, Israël, les progrès seront impossibles.
La réforme du Fatah doit être une priorité absolue. Il doit offrir au peuple palestinien
une option, un choix réel pour une nouvelle forme de gouvernance.
Je lui ai dit de garder courage, son courage politique, et de persévérer dans la mise en
œuvre du processus pour le bien de son peuple. Il a indiqué qu'il était prêt et je suis
convaincu qu'il l'est.
Il a besoin d'appui, de nous tous, de ses " frères " arabes et bien sûr, d'Israël.
Pour sa part, le Canada est prêt à aider en tant que partenaire du changement et du
progrès.
Le Canada est prêt à travailler avec les parties et avec nos partenaires internationaux
sur les priorités pour la paix.
En outre, le Canada peut apporter une autre contribution, c'est-à-dire son savoir-faire et
son expérience. Tout au long de notre histoire, nous avons géré nos différences,
parfois de façon spectaculaire.
Nous avons appris qu'il faut gérer les crises, les différences et le conflit. À moins de
gérer ces trois éléments, il est impossible de les régler. Cela étant dit, nous savons que
nous sommes des plus chanceux en ce qui a trait aux conflits auxquels nous avons dû
faire face tout au long de notre histoire.
Nous soutenons déjà avec ferveur le travail du général Dayton et de son équipe, qui
compte plusieurs Canadiens. Je lui ai confirmé hier une contribution additionnelle de
1,2 million de dollars pour améliorer les installations frontalières de Karni.
Je sors d'une réunion avec le premier ministre Olmert à Jérusalem. Il est également
encourageant de voir que lui et le président Abbas se parlent et qu’il a décidé de
remettre 100 millions de dollars au président.
Le premier ministre a fait un pas dans la bonne direction en s'engageant à alléger les
restrictions visant le mouvement des personnes et des biens entre la Cisjordanie et
Gaza et à l'intérieur de ces territoires.
Le respect de ces engagements sera un pas important vers la gestion du conflit et le
début du processus pour rétablir la confiance qui a été perdue au cours de ces années
difficiles.
Israël peut aussi prendre d'autres mesures concrètes et simples. Aux postes
frontaliers : éliminer l'arbitraire du système et tout en maintenant la sécurité, traiter le
Palestinien moyen avec respect et dignité.
Délivrer des permis de travail. Trouver une façon d'autoriser le commerce et le transit
entre Gaza et la Cisjordanie. C'est de loin préférable pour l'avenir d'Israël de laisser des
légumes quitter Gaza que de les laisser pourrir à la frontière de Karni.
Le Canada reconnaît que le gouvernement d'Israël a l'obligation de protéger ses
citoyens. C'est la première tâche de tout gouvernement responsable.
Cependant, je lancerais l'idée que votre sécurité dépend également, à long terme, de la
capacité des Palestiniens de prospérer dans la dignité et la paix.
Par ailleurs, Israël doit se pencher sur des problèmes encore plus difficiles, mais sur
lesquels il doit se pencher néanmoins. La question des nouvelles colonies, ou de la
poursuite de la croissance des colonies tout en essayant de faire des progrès en
matière de paix, va à l’encontre du but recherché.
Enfin, et avant de conclure, il y a un point qui revêt une importance capitale et qui
mérite, à mon avis, une réflexion sérieuse et je sais qu'il en a déjà été question
abondamment ici : l'Iran.
La direction que l'Iran emprunte préoccupe profondément le Canada. On ne peut
permettre au régime de Téhéran d'acquérir des armes nucléaires. En même temps, le
Canada a pour position qu'il faut examiner toutes les options non militaires, y compris
des sanctions volontaires, et les examiner à fond.
Cela étant, et sans doute qu'Israël sera la première cible d'Ahmadinejad, il l'a dit
lui-même, nous devons commencer à parler sérieusement et de façon créative de ce
que, comme communauté internationale, nous pouvons faire maintenant — et des
ressources que nous pouvons mettre à contribution — avec Israël pour éviter la
nécessité d'agir par la voie militaire.
Le Canada a travaillé côte à côte avec Israël pendant six décennies et il continuera de
le faire. Nous parlerons, haut et fort, en faveur d'Israël pour qu'il soit traité comme une
nation égale au sein de la communauté internationale à l'ONU, à l'OTAN et dans
d'autres tribunes internationales où jusqu'à ce jour, sa voix de pays démocratique dont
nous partageons les valeurs est absente.
Je vous remercie.