M. GRAHAM - ALLOCUTION À L'OCCASION DE LA CONFÉRENCE DU CENTRE UNIVERSITAIRE CANADIEN : « VILLES, ÉTATS, CULTURES : PERSPECTIVES CANADIENNES ET ALLEMANDES » - BERLIN, ALLEMAGNE
SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS
NOTES POUR UNE ALLOCUTION
DE
L'HONORABLE BILL GRAHAM,
MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,
À L'OCCASION DE LA CONFÉRENCE
DU CENTRE UNIVERSITAIRE CANADIEN
« VILLES, ÉTATS, CULTURES :
PERSPECTIVES CANADIENNES ET ALLEMANDES »
BERLIN, Allemagne
Le 26 mai 2003
Je suis très heureux de me trouver ici à Berlin durant la Semaine du Canada et de pouvoir me joindre à
vous pour discuter du sujet de votre conférence : « Villes, États, cultures ». Ce thème ne recouvre sans
doute pas la totalité de l'expérience humaine moderne -- je suppose qu'on pourrait tenir une conférence
parallèle intitulée « Territoire, écosystèmes, nature » -- mais il me semble que les sujets que vous avez
choisis représentent une grande partie de ce qui façonne la vie des Canadiens comme celle des
Allemands. Le fait que mon alma mater, l'Université de Toronto, se joigne à l'Université du Québec à
Montréal pour aborder ces thèmes dans un des grands centres urbains du monde ne peut qu'ajouter au
plaisir que j'ai de vous entretenir aujourd'hui.
C'est devenu un cliché, tous les visiteurs soulignent à quel point Berlin se transforme rapidement. Or, je
l'ai constaté moi-même ce matin, le Canada n'est pas qu'observateur dans ce processus, il contribue à la
reconstruction de la ville. Par leur nouvelle ambassade qui prend forme sur la Leipziger Platz, les
Canadiens traitent concrètement les trois thèmes de la conférence, contribuant à reconstruire le centre
historique de la ville, donnant une forme matérielle à leur propre État ouvert et inclusif, et créant un
espace propice au dialogue et aux échanges entre cultures.
Votre conférencier d'honneur ce matin et mon ami de longue date, John Ralston Saul, trace souvent des
analogies semblables inspirées de l'architecture, en décrivant le Canada comme une politie créée sur le
plan intellectuel et réalisée délibérément. Et dans cette construction, lui aussi est plus qu'un observateur.
Dans un exposé de principe qu'il a rédigé pour l'examen de la politique étrangère en 1995, il a jeté les
bases de ce que nous appelons le troisième pilier de notre politique étrangère, qui consiste à faire
rayonner les valeurs et la culture canadiennes à l'étranger. De même que les deux autres piliers, sécurité
et prospérité, c'est un des grands principes directeurs du travail de notre gouvernement à l'étranger.
À mon avis, ce troisième pilier de la politique étrangère canadienne est particulièrement d'actualité par
les temps qui courent, et ce pour des raisons qui ont trait aux thèmes des villes, des États et des cultures.
On a beau répéter à la ronde que la mondialisation et la technologie des communications sont en train de
créer un « village planétaire », nous savons que ce nouveau monde n'a rien de commun avec un village
du passé, dont les habitants étaient unis par un tissu serré d'expériences et de croyances communes. En
fait, notre monde interdépendant ressemble davantage à une ville cosmopolite moderne, unie par des
éléments structurels communs, mais néanmoins composée de gens originaires du monde entier et divisés
par leur culture, leur histoire et leurs croyances. Un des plus grands défis de notre époque est de faire une
collectivité viable de cette ville mondiale diverse, où les conflits entre des gens différents sont ressentis
de plus en plus non seulement aux niveaux local et régional, mais mondial. Dans bien des cas, et c'est
certainement vrai au Canada, des conflits qui se passent au loin prennent une signification locale, les
populations immigrantes ayant apporté chez nous les préoccupations et même les hostilités qui
déchiraient leurs lieux d'origine.
Comme les citoyens d'autres pays, les Canadiens savent bien à quel point leur sécurité et leur prospérité
et celles du monde entier dépendent du succès de la coexistence ethnique et religieuse à l'échelle
planétaire. Des événements récents, au Moyen-Orient et ailleurs, n'ont que trop bien montré combien les
conflits interethniques peuvent se répercuter sur des pays situés aux antipodes; et dans un sens différent,
il est aussi apparent que la crédibilité des Nations Unies et des autres institutions internationales dépend
en grande partie de leur capacité à régler les terribles conflits ethniques de notre époque. Les objectifs de
la politique étrangère de chaque pays, en matière de sécurité et de prospérité, sont donc maintenant
subordonnés au défi collectif que représente la gestion de la diversité et de la coexistence dans le monde
et à l'intérieur des États-nations.
Ce qui donne à penser en fait que la promotion de la diversité et de la coexistence pacifique devrait être
ajoutée à la liste de ce qu'on a appelé les « biens publics mondiaux », des choses que tout le monde a
intérêt à assurer, mais qui ne peuvent pas être assurées par des particuliers, des entreprises privées ou des
gouvernements nationaux seuls. Un environnement sain, la santé publique et des marchés financiers
stables en sont des exemples. Il y a 50 ou 100 ans, ils ont pu relever exclusivement des gouvernements
nationaux; en raison de l'interdépendance croissante de notre monde, cependant, aucun État ne peut
maintenant fournir ces biens par ses seuls moyens; ils ne sont possibles que par la coopération
internationale. Et à une époque où les conflits ethniques ont des effets de plus en plus désastreux dans le
monde entier, la prévention des conflits mortels peut aussi être considérée comme un bien public
mondial à poursuivre par la coopération internationale.
En quoi pourrait consister la coopération internationale pour la prévention des conflits? Certaines de ses
dimensions se concrétisent déjà sous forme d'aide au développement et de programmes de reconstruction
après les conflits. Nous connaissons certaines caractéristiques des sociétés où les désaccords sérieux sont
presque toujours réglés par d'autres moyens que le recours à la force. Comme le faisaient remarquer en
1997 les auteurs du rapport de la commission Carnegie sur la prévention des conflits meurtriers, le
recours à la violence est réduit à son minimum dans les États jouissant d'un gouvernement représentatif,
de la primauté du droit, de sociétés civiles vigoureuses et d'économies ouvertes et dotées de filets de
sécurité sociale. Ces États arrivent à fournir à leurs citoyens les biens sociaux fondamentaux que sont la
sécurité, le bien-être et la justice, et par le fait même des raisons de régler leurs différends par des
moyens pacifiques.
Pourtant, bien que la sécurité, le bien-être et la justice puissent être indispensables à la coexistence
pacifique entre gens différents, un autre aspect de l'atteinte de ce bien public mondial consiste en un
effort concerté de la société pour développer des attitudes, des institutions et des pratiques publiques
propices au pluralisme. C'est pourquoi je crois que les Canadiens ont quelque chose de spécial à offrir au
monde : leur expérience du travail et de la vie en commun dans un vaste pays multiculturel, et de ce fait,
de la promotion du respect, de la compréhension et de la tolérance réciproques.
L'an dernier, au cours d'une entrevue qu'il donnait à un grand journal canadien, l'Aga Khan a fait
l'observation suivante au sujet de la contribution potentielle de mon pays à l'atteinte du bien public
mondial qu'est le pluralisme : « Le Canada est aujourd'hui la société pluraliste la plus réussie du globe,
sans aucun doute [...] C'est quelque chose que le Canada a d'unique. C'est une incroyable richesse
humaine mondiale. » Je ne cite pas ses propos pour vanter nos propres perfections; le pluralisme
canadien est en devenir, et nos aspirations sociales ne correspondent pas entièrement aux réalités que
vivent nos collectivités des Premières Nations et certains groupes d'immigrants récents. Quoi qu'il en
soit, je peux dire honnêtement que nos villes fortement multiculturelles sont, dans l'ensemble, des
expériences très réussies de diversité efficace.
Ma propre circonscription de Toronto en est un bel exemple. Elle inclut St. Jamestown, un des ensembles
domiciliaires les plus denses en Amérique du Nord où quelque 12 000 personnes parlent 57 langues.
Nous n'aurions pas la paix relative, l'harmonie, la justice sociale et la coopération mutuelle dans cette
circonscription si nous n'avions pas le respect les uns des autres et la volonté de travailler ensemble, et si
nous ne nous reconnaissions pas mutuellement comme compatriotes égaux.
J'ai été frappé de cela un jour l'an dernier, à l'inauguration dans ce secteur d'un Centre pour jeunes
immigrants francophones d'Afrique centrale. C'était peu après les tragiques événements du 11 septembre
à New York, et cette expérience était encore fraîche à la mémoire de toutes les personnes présentes.
J'étais avec l'actrice française Jeanne Moreau, et nous avons tous deux été frappés de l'attitude de ces
jeunes issus de milieux extraordinairement divers et de leur affirmation de la nécessité de faire en sorte
que la haine et le mépris de la vie d'autrui qui avaient inspiré ces actes ne s'enracinent jamais dans notre
collectivité.
Notre succès, quel qu'il soit, n'est pas seulement un accident historique; ce n'est pas non plus un sous-produit de notre succès national comme fournisseurs des biens fondamentaux que sont la sécurité, la
prospérité et la justice à nos citoyens. Bien sûr, ces conditions ont un rôle à jouer. Les accidents de
l'histoire et de la géographie ont voulu que nous soyons un vaste pays relativement nouveau, qui se fait
une idée mobile et en constante évolution de ce que signifie être Canadien. Par ailleurs, nos politiques
socio-économiques visent à assurer à tous les Canadiens, y compris les immigrants, l'accès à toute la
gamme des ressources et des possibilités de la société. Mais au-delà, le Canada cherche délibérément à
réaliser le pluralisme dans ses institutions politiques, juridiques et sociales. Notre expérience de la
genèse d'un pays bilingue et biculturel, de la reconnaissance des revendications de nos Premières
Nations, et maintenant de l'adaptation aux nouvelles vagues d'immigrants de tous les coins du monde,
nous incite constamment à essayer de nouvelles façons de faire en sorte que la diversité soit viable.
Ces expériences sociales confèrent au Canada la capacité distinctive de contribuer au développement de
structures sociales au-delà de ses frontières. Il y a un an, j'étais en Israël, où j'ai eu le privilège de passer
quelques heures en compagnie du juge en chef Barak, un des grands juristes courageux du monde. Il
avait sur son bureau les arrêts de la Cour suprême du Canada relatifs à notre Charte des droits et libertés,
lesquels, m'a-t-il confié, inspirent la jurisprudence d'Israël et bien d'autres pays de common law aussi
divers que l'Inde et l'Afrique du Sud. À son avis, la Charte canadienne contribue beaucoup au
développement des systèmes juridiques des pays de common law, où les droits collectifs et individuels
sont équilibrés de manière à mettre en valeur aussi bien le potentiel de chaque être humain que la
stabilité sociale.
Aux niveaux local, provincial et fédéral au Canada, des expériences sont en cours pour promouvoir la
coexistence pacifique dans la diversité. J'ai le plaisir d'annoncer que ces efforts seront encouragés et
propagés au-delà de nos frontières à la suite de l'ouverture d'un centre unique en son genre pour l'étude
et la pratique du pluralisme humain, que le Réseau Aga Khan de développement a choisi de situer au
Canada. En partenariat avec le gouvernement canadien, le Réseau prépare les plans d'un centre
universitaire et professionnel conçu pour favoriser les sociétés pluralistes dans le monde, et
particulièrement dans les pays en développement. Bien que ce centre soit une source mondiale de
connaissances susceptibles d'aider les sociétés à instaurer le pluralisme dans leurs institutions, leurs lois
et leurs politiques, il est situé au Canada justement pour tirer parti de l'expérience canadienne. Ce centre
a le potentiel d'être extrêmement bénéfique comme ressource internationale pour la promotion des biens
publics mondiaux que sont la prévention des conflits et la coexistence pacifique, et nous espérons ajouter
bientôt son expérience au troisième pilier de la politique étrangère canadienne.
Notre pays a autant à gagner que n'importe quel autre si l'on s'intéresse de manière soutenue, au niveau
international, à l'étude et à la promotion du pluralisme social. Non seulement nous ressentons
intimement à l'intérieur de nos frontières les répercussions de conflits culturels extérieurs, mais nous
avons constamment de nouveaux défis à relever chez nous à mesure que les immigrants changent le
visage de notre population. Comme celles de l'Allemagne et d'autres pays européens, la composition
démographique du Canada a été sensiblement modifiée ces dernières années par l'arrivée d'immigrants
en provenance de pays non européens, et particulièrement d'Asie et du Moyen-Orient. Le recensement
canadien de 2001 montre que le nombre des musulmans canadiens a augmenté de 129 p. 100 depuis 10
ans, ce qui fait de l'islam la religion qui gagne le plus d'adeptes au Canada. Bien que les musulmans ne
constituent encore que 2 p. 100 de notre population, leur augmentation va sans doute provoquer des
changements en profondeur dans notre société. Comme l'Allemagne, la France, l'Angleterre et d'autres
pays, le Canada s'efforce de faire en sorte que ce type de changement renforce son tissu national, au
bénéfice des nouveaux Canadiens et des Canadiens de naissance.
Comme ministre des Affaires étrangères, j'ai été particulièrement à l'écoute de ce phénomène en raison
de son effet sur la politique étrangère canadienne en ces temps de conflits et de tensions au Moyen-Orient et ailleurs dans le monde musulman. Avant et pendant la guerre en Iraq, je m'efforçais, dans des
documents et en personne, de faire valoir à tous les Canadiens que les conflits étrangers ne doivent pas
miner la tolérance et le respect de la diversité dans notre propre société. Les tensions existent
certainement à l'intérieur de certaines communautés culturelles et entre elles, mais la modération et la
civilité prévalent généralement. Je crois que la situation ne pourra que s'améliorer encore si on continue
de s'occuper explicitement de ces questions, et c'est pourquoi on ne peut que saluer des initiatives
comme la décision qu'a prise le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international
de notre Chambre des communes d'entreprendre une étude sur les relations du Canada avec les pays du
monde musulman.
Depuis quatre mois, le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international procède à des
consultations publiques sur la politique étrangère et, là encore, la promotion du pluralisme et de la
coexistence sont au coeur des préoccupations des Canadiens. Depuis janvier, je parcours le Canada pour
ces consultations qui doivent nous aider à mettre à jour la politique étrangère à la lumière des nouvelles
réalités mondiales et de l'évolution de la population canadienne. Cet exercice ne prend pas seulement la
forme d'assemblées publiques, mais aussi de consultations électroniques et écrites, et nous nous
efforçons en particulier de veiller à ce que les Canadiens de toutes les origines culturelles soient
entendus.
Ce que j'ai effectivement entendu au cours de ces consultations confirme que les Canadiens dans leur
ensemble croient que la gestion de la diversité est une force pour le Canada et devrait être un élément
central de notre approche des affaires mondiales. Voilà qui corrobore les conclusions d'une enquête
réalisée dans 44 pays, laquelle a révélé que plus des trois quarts des Canadiens estiment que les
immigrants ont une bonne influence sur le pays, ce qui est de loin la vision la plus positive de la diversité
qui a été constatée entre tous les pays visés par l'enquête. Et alors que certains Canadiens nous pressent
de travailler à réaliser davantage nos aspirations sociales chez nous, beaucoup d'autres nous exhortent à
trouver des moyens de partager notre succès avec d'autres pays qui ont besoin de modèles de pluralisme
démocratique et d'idées à ce sujet. Nous analysons encore les résultats de ces consultations et préparons
un rapport final sur ce que nous avons entendu, mais je puis dire déjà que le renforcement de la
contribution du Canada aux ressources mondiales pour le développement de la diversité et de la
coexistence pacifique va figurer en bonne place dans la liste de nos priorités pour l'avenir.
Ce qui m'amène à un dernier sujet, soit l'approche générale des affaires mondiales adoptée par les pays
qui, comme le Canada et l'Allemagne, sont préoccupés par les difficultés de bien gérer la diversité.
Menées dans le contexte des débats du Conseil de sécurité des Nations Unies, puis de la guerre et de
l'après-guerre en Iraq, nos consultations nationales sur la politique étrangère ont été marquées par une
forte insistance de la part des Canadiens sur la nécessité de considérer avant tout nos valeurs nationales
en matière de sécurité et de prospérité. Plus qu'aucun autre événement des dernières décennies, la crise
iraquienne a suscité un débat passionné sur les valeurs, et particulièrement le maintien d'une ONU
vigoureuse ainsi que de bonnes relations avec les États-Unis et l'Europe, que défend le Canada. La
majorité des voix que j'ai entendues ont affirmé qu'il est temps d'afficher nos convictions sur les
meilleures façons de mener les affaires mondiales.
Dans ce débat, nos relations avec notre voisin du sud, un voisin auquel nous sommes unis par la
géographie, par un souci commun de la sécurité de l'Amérique du Nord, par d'amples liens commerciaux
et économiques et par un vaste réseau de relations personnelles et institutionnelles, a naturellement
constitué une importante préoccupation. Et notre voisin ne se prive pas de nous faire savoir pourquoi il
croit que nous devrions suivre son exemple dans le choix de nos priorités en matière de sécurité et de
prospérité.
Cela dit, les Canadiens s'attendent aussi à ce que leur gouvernement définisse une politique étrangère en
fonction de leur expérience et de leurs valeurs propres. Celles-ci procèdent de divers facteurs, dont nos
populations diversifiées qui entretiennent des liens avec toutes les régions du monde, d'où notre
perspective internationaliste, et le profond sentiment d'interdépendance que donne le fait d'avoir une des
économies les plus ouvertes du monde. À la lumière de tout cela, les Canadiens ont tendance à percevoir
leur propre sécurité et leur propre prospérité comme inextricablement liées à celles des autres peuples et
des autres nations du monde, et à considérer la coopération internationale et le multilatéralisme comme
les meilleurs moyens de progresser vers l'atteinte des biens publics mondiaux que nous voulons pour
nous et pour les autres.
Ces dernières considérations ont amené le Canada à décider de ne pas se joindre à la coalition de pays
qui sont entrés en guerre en Iraq. Cela n'a pas été une décision facile. Nous l'avons prise après avoir
longuement réfléchi à toutes les conséquences possibles de chaque alternative. Elle reflète une
perspectives que nous partageons avec beaucoup de nos amis, en Allemagne et ailleurs. Je suis fier de
dire à nos amis américains que cela fait de nous de meilleurs amis et alliés; les amis qui apportent dans
leurs relations une perspective indépendante sont toujours plus précieux que ceux qui suivent à seule fin
de préserver leurs relations.
Maintenant, dans l'après-guerre, nous suivons une approche pragmatique, inspirée par les besoins
fondamentaux de sécurité des Iraquiens et par la nécessité d'assurer à l'Iraq un avenir stable à long
terme. Nous croyons aussi que la légitimité internationale apportée par une participation significative de
l'ONU fera beaucoup pour créer les conditions favorables à l'établissement d'un Iraq pacifique, juste,
prospère et prêt à réintégrer la communauté des nations. Nous croyons que la résolution 1483, adoptée
par le Conseil de sécurité la semaine dernière, constitue un cadre de travail pratique pour l'ONU dans
cette reconstruction, et nous espérons pouvoir apporter une contribution réelle à cet important processus.
À plus long terme, un des défis que le Canada et l'Allemagne perçoivent clairement dans le monde de
l'après-guerre en Iraq est l'urgence de réformer nos institutions multilatérales comme l'ONU pour en
faire des outils plus légitimes et plus efficaces de coopération internationale. Au Conseil de sécurité, à la
Commission des droits de l'homme et ailleurs, des réformes sont essentielles pour donner à ces
organismes la capacité de jouer le rôle central et nécessaire de coordination qui leur revient dans la
poursuite des biens publics mondiaux dont nous avons tous besoin. J'ai signalé que le pluralisme
canadien est une richesse humaine mondiale que notre pays essaie de faire partager au monde, mais je
suis bien conscient du fait que ce volet de notre politique étrangère ne peut être couronné de succès que
dans le contexte mondial de sociétés qui assurent déjà assez bien à leurs citoyens la sécurité
fondamentale, le bien-être et la justice. Et pour que cela se réalise, nos institutions multilatérales sont
plus que jamais nécessaires dans le nouveau monde de l'après-guerre en Iraq que nous essayons de
reconstruire.
D'une certaine façon, les manifestations comme la conférence d'aujourd'hui sont essentielles pour
instaurer à terme un monde meilleur. Ces petites tribunes permettent à deux pays qui ont en commun de
nombreuses valeurs et aspirations de tirer les leçons de leurs expériences diverses et d'échanger des idées
sur les façons d'aborder les problèmes communs sur le plan national et sur la scène mondiale. Les
Canadiens, comme les Allemands, réalisent que la diversité des villes modernes ne peut que prendre de
l'importance tant comme métaphore de notre condition mondiale que comme ensemble très concret de
problèmes à résoudre individuellement et collectivement pour les États. Le thème de votre conférence ne
pourrait être plus pertinent compte tenu des défis qui nous sont lancés aujourd'hui.
Je vous remercie de m'avoir permis de vous faire part de ces réflexions, et vous souhaite une conférence
très fructueuse au cours des prochains jours.