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Le Canada dans le monde : Politique internationale du Canada
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Entrevue vidéo
David Held
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David Held discute des obstacles à une promotion efficace de la démocratie, ainsi que de la position particulière du Canada dans le domaine de la démocratisation.

 

David Held est titulaire de la chaire Graham-Wallace à la London School of Economics.

 

Filmé le 10 octobre 2006

 

Note: Les opinions exprimées ne sont pas nécessairement celles du gouvernement du Canada.

 Une approche canadienne pour promouvoir la démocratie


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Construire la démocratie - Durée: 2:50

 

 

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Transcription:

 

Je m’appelle David Held et je viens de la London School of Economics. Je suis professeur d’économie à la LES, titulaire de la chaire Graham-Wallace, et je suis aussi directeur d’une maison d’édition. J’ai donc deux vies : une comme universitaire et une comme éditeur. Je ne crois pas qu’il y ait une seule réponse à la question de savoir où vous devriez contribuer à soutenir la démocratie.

 

En premier lieu, je crois que c’est une noble ambition que d’aider à favoriser l’autodétermination dans le monde entier. L’idée d’un gouvernement représentatif, de la démocratie, de l’autodétermination, ces notions ne sont pas que des idées occidentales. Elles ont également des racines dans d’autres cultures et elles sont absolument essentielles pour prendre en compte quelque chose qui est pratiquement universel dans la nature, c’est-à-dire qu’il n’y a aucun pays au monde où l’on ne trouve pas une femme qui ne veut pas bénéficier du même respect et de la même dignité; il n’y a aucun pays au monde où l’on ne trouve pas d’hommes qui veulent également renoncer au droit d’exiger qu’on leur témoigne de la déférence; il n’y a pas aucun pays au monde dont les habitants ne veulent pas se soustraire aux épreuves qui accompagnent la pauvreté. Les concepts de l’autodétermination, de la démocratie, de l’agence démocratique sont donc absolument fondamentaux.

 

Cependant, je crois que nous pouvons voir que, ces dernières années, le fait de favoriser ces concepts sur la base d’une politique étrangère descendante peut être non seulement contreproductif, mais désastreux. L’administration des États Unis – l’administration Bush – fermement appuyée par mon premier ministre, Tony Blair, croyait possible de créer des démocraties en partant du sommet vers la base dans un pays comme l’Irak. Je crois que c’est une grossière incompréhension de la précarité historique et de la précarité culturelle de la démocratie, et cela a des conséquences négatives énormes. Les conséquences en Irak ne sont que trop évidentes. Outre le fait que l’Irak n’est pas une démocratie, elle est au bord d’une guerre civile. Il faut des générations pour veiller au développement de la démocratie, il faut des générations pour la bâtir. C’est ce qui s’est produit dans nos pays – et nous ne devons pas l’oublier – et par conséquent, il faudra des générations ailleurs.

 

Donc, si le Canada tient à favoriser l’édification d’États-nations démocratiques, en principe cela semble sensé et satisfaisant, mais la façon de s’y prendre passe par la promotion de sociétés civiles indépendantes, par la promotion de la liberté d’expression et d’association, par le renforcement de l’autonomie de la société civile et de ses agents, au lieu de simplement chercher un plan directeur universel, toujours le même, que tous les pays doivent suivre.

 

 

Les obstacles à une gouvernance démocratique globale  - Durée: 4:20

 

 

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Transcription:

 

Je crois que la crise d’efficacité est liée au défaut d’institutionnaliser les divisions du travail, au défaut de financer adéquatement les organes internationaux, à toutes sortes de choses en fait. C’est un scénario très complexe, mais globalement, je crois que notre gouvernance multilatérale est confrontée à quatre problèmes : le chevauchement et le manque de définitions claires des compétences entre les partenaires multilatéraux; le financement insuffisant des partenariats multilatéraux qui fait qu’ils ne peuvent livrer les biens publics même s’ils le voulaient; la responsabilité se situant entre deux chaises parce que personne ne sait exactement qui est responsable d’un enjeu – par exemple les changements climatiques ou les Objectifs du Millénaire pour le développement; et un manque de responsabilisation des représentants.

 

La démocratie est une façon d’essayer de rendre les institutions plus responsables. À mon avis, le fondement géopolitique traditionnel des partenariats multilatéraux actuels n’a pas fait grand-chose pour les rendre efficaces. Nous devrions essayer quelque chose qui fonctionne bien dans nos propres pays, la démocratie, et l’essayer au niveau mondial. Pourquoi? La démocratie est une question d’information ouverte, de libre accès, de vérification, de rapport de responsabilisation, de reddition de comptes, de se débarrasser des gens que vous n’aimez pas. À tout le moins, elle établirait certains rapports de responsabilisation qui n’existent pas dans le club fermé de la politique géopolitique.

 

Nos partenariats multilatéraux sont gouvernés par le chaos, par des différents principes décisionnels, liés à différentes formes de principes politiques. À l’OMC, on fonctionne selon le principe « une personne, un vote ». Mais au FMI et à la Banque mondiale, les structures de scrutin sont complexes et elles sont fonction de leurs actionnaires – c’est-à-dire des intérêts économiques dominants qui les sous-tendent. L’ONU a une assemblée générale qui est essentiellement un lieu de délibérations, selon le principe « une personne, un vote », et le Conseil de sécurité est dirigé par le club, celui des grandes puissances.

 

En fait, sur le terrain, quelque part par là-bas pour ainsi dire, nous avons un éventail de procédures décisionnelles qui ont toutes évolué historiquement pour différentes raisons, pour différents compromis. Le principe « une personne, un vote » est en fait plus atypique que typique. Il est typique dans les structures d’assemblée générale sans pouvoir, mais le principe existe en fait à l’OMC. Les questions commerciales et les négociations sont devenues terriblement compliquées, et à l’OMC, vous vous retrouvez avec la position difficile faisant en sorte que certains des pays les plus puissants du monde ont le même pouvoir de voter que les pays les moins puissants.

 

Cependant, je ne crois pas que le principe « un pays, un vote » soit le problème à lui seul. Le problème avec ce principe à l’OMC – l’OMC en est l’exemple le plus clair, quoi qu’il en soit – ne tient pas au fait que la structure de votation a rendu l’OMC inefficace. Il est lié à la défense d’intérêts directs. Le monde a l’habitude de voir l’Occident rédiger les règles commerciales en fonction de ses propres intérêts, des intérêts de l’Occident. Soudainement, par suite du mouvement des plaques tectoniques politiques et des plaques tectoniques économiques sur toute la planète, nous avons l’essor de la Chine, de l’Inde, du Brésil et ainsi de suite, et ils disent : « Un instant, nous ne voulons plus de cet ensemble de règles! » Ces pays jouissent d’un solide pouvoir négatif de dire non, mais pas encore du pouvoir positif de remettre les choses à leur place. Nous sommes donc dans une impasse, et au moment où je vous parle aujourd’hui, le 18 octobre 2006, nous avons une impasse à l’OMC. Toutefois, je crois qu’en fait cela n’a rien à voir avec les procédures décisionnelles de l’OMC; cela a à voir avec la guerre entre des intérêts particuliers et le fait que l’Occident est désormais dans la position inconfortable de découvrir qu’il ne peut simplement plus faire ce qu’il avait l’habitude faire. Est-ce une bonne chose ou une mauvaise chose? Eh bien, cela dépend du dénouement, mais à court terme, c’est probablement une très bonne chose.

 

 

L'importance de la démocratie - Durée: 2:16

 

 

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Transcription:

 

À mon avis, l’importance de la démocratie est la suivante : la démocratie repose sur certains principes libéraux et démocratiques qui créent la possibilité d’un dialogue, la médiation de conflits d’intérêts et la participation minimale de tous les citoyens et de tous les intérêts à un processus politique non coercitif. Autrement dit, son opposé est la coercition : que ceux qui ont le pouvoir le garderont, que ceux qui ont le plus de pouvoir détermineront les règles. La démocratie vise à assurer l’égalité du statut moral de chaque être humain, le statut politique égal de chaque personne, l’importance de la responsabilité et de la responsabilisation politiques, l’importance du consentement, et ainsi de suite. Ces idées sont au cœur de la démocratie et non un simple processus universel qui avance la démocratie pour l’amour de la démocratie, mais l’une des raisons pour lesquelles la démocratie est importante, c’est parce qu’elle offre le véhicule pour canaliser et arbitrer des conflits. Elle crée une culture minimale qui reconnaît que les citoyens qui participent à la démocratie trouveront des moyens pacifiques de régler leurs différends, sans faire appel à l’intervention de forces coercitives. C’est ce que la démocratie apporte à notre table; c’est ce que la pacification d’États-nations au nom de la démocratie a effectivement réussi à faire.

 

Donc oui, la démocratie est un risque, c’est un problème. Cependant, elle est ouverte, elle est publique, nous pouvons tous y participer, nous pouvons la rendre publique, nous pouvons exiger des comptes de nos dirigeants. C’est un meilleur pari que le marché en soit, avec ses propres intérêts directs et ses considérations extérieures, soumis aux intérêts géopolitiques actuels qui vont – mon Dieu, c’est une chose que nous savons par-dessus toutes – qui vont veiller à leurs propres intérêts. Donc, quelle est la solution de rechange? La solution de rechange, ce sont en gros les États-nations, et son fonctionnement s’inscrit dans ces États-nations, même si bon nombre de démocraties sont bien entendu profondément viciées. Cela me donne à penser qu’un ordre multilatéral représentatif est peut-être un ordre plus stable que celui que nous avons.

 

 

La démocratie et la sécurité humaine - Durée: 2:38

 

 

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Transcription:

 

Je crois qu’en fait, dans bien des cas, le Canada a le cœur et la tête à la bonne place. Par exemple, vous vous êtes faits les champions d’un programme de sécurité humaine par opposition, disons, au programme de sécurité de Washington. Le déploiement de contingents dans des objectifs de sécurité humaine est le moyen efficace de désamorcer des situations de conflit, et je crois que le travail que le Canada a accompli dans ce domaine a été exemplaire et extrêmement important comme il le serait, à mon avis, dans beaucoup de domaines de la politique étrangère. Parce que vous n’êtes pas, pour ainsi dire, l’un des acteurs principaux, vous possédez la capacité d’intervenir de façon réfléchie; vous possédez la capacité de poursuivre des idées importantes.

 

La première chose que je dirais donc au Canada est la suivante : gardez le cap. Cependant, pour le faire de façon efficace, vous devez bâtir des coalitions avec des pays qui partagent votre point de vue et, bien sûr, vous y êtes parfois parvenus, par exemple avec les pays nordiques, ou avec l’Union européenne, avec le bureau de Javier Solana. Je crois que certaines des interventions les plus efficaces dans les pays en développement ou dans des situations de conflit ont eu lieu quand nous nous sommes mobilisés, quand nous avons bâti une coalition afin d’intervenir de cette façon.

 

Cependant, en ce qui concerne le développement de la démocratie… je suis un démocrate; j’ai écrit à propos de la politique démocratique et ainsi de suite. Bien entendu, je suis un ardent défenseur du suffrage universel et de l’émancipation de tous les groupes spéciaux. Je crois cependant que nous devons faire preuve d’un peu d’humilité et d’un peu de patience. L’humilité dont nous avons besoin doit découler de la connaissance de nous-mêmes, de la reconnaissance que nos cultures démocratiques ont évolué, comme je l’ai déjà dit, sur de très longues périodes. Dans bien des cas, nos pays ont d’abord été libéraux avant d’être démocratiques. Qu’est-ce que cela signifie? Cela signifie qu’ils étaient voués, au départ, à l’autonomie de l’individu, à la liberté de l’individu de se déplacer, à la liberté de l’individu de s’associer, à la liberté d’expression – tout un éventail de libertés civiles et économiques – avant que cela ne devienne, pour ainsi dire, une culture qui a engendré la liberté politique et les droits civils, et la démocratie.

 

(Les vidéolecteurs sont disponibles ici : QuickTime Windows Media)