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Entrevue vidéo
Ishaq Nadiri
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Le Dr. M. Ishaq Nadiri discute du progrès qui a été fait en Afghanistan au cours des dernières années, du problème du terrorisme et des défis à venir.

Le Dr. Nadiri est professeur d'économie à NYU et conseiller économique auprès du Président de l'Afghanistan, Hamid Karzai.

 L'Afghanistan et la politique internationale du Canada

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Entrevue vidéo
  (en anglais avec transcriptions en français)

Note: Les opinions exprimées ne sont pas nécessairement celles du gouvernement du Canada.

 Le premier pays à souffrir des conséquences du terrorisme6 min 11 sec Windows Media | QuickTime   

 Stratégie de développement

4 min 01 sec
 

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 Une opération complexe

4 min 36 sec
 

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 Capacité de développement

5 min 19 sec
 

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(Les vidéolecteurs sont disponibles ici : QuickTimeWindows Media)


Transcription

Le premier pays à souffrir des conséquences du terrorisme

 
Je suis le professeur Nadiri. Je suis conseiller économique principal du président et aussi directeur du Conseil mixte de surveillance et de coordination qui assure le suivi du Pacte pour l’Afghanistan. Je dirige également l’élaboration et l’application de la Stratégie pour le développement national de l’Afghanistan. Enfin, je conseille différents ministères, au besoin. Alors ma vie est assez bien remplie. 

 

La société afghane a émergé d’une véritable destruction en 2001 – je ne parle pas d’un pays, mais bien d’une société. Et il importe de souligner que non seulement le capital humain et le capital physique ont été détruits, mais nous avons également perdu notre capital social et, en ce sens, le sort de l’Afghanistan est unique par rapport aux autres pays en développement. Le capital social lie un pays et lie les gens qui l’habitent; il est le produit de milliers d’années d’apprentissage, de coutumes, et ainsi de suite. Or, lorsque cela est perdu… L’ampleur de la destruction de l’Afghanistan n’est malheureusement pas bien comprise par les gens en général, mais ni par les Afghans eux-mêmes. Alors, si on tient compte des conditions de départ, cette société a fait des progrès extraordinaires au cours d’une courte période de quatre ou cinq ans. Par exemple, le pays a mis en place un système de gouvernement; il a envoyé six millions et demi d’enfants à l’école et il a construit une route en périphérie. Alors qu’il fallait autrefois des jours pour aller de Kandahar à Kaboul, il ne faut plus maintenant que quatre ou cinq heures pour parcourir cette distance.

 

Le retour au pays d’un grand nombre d’Afghans est une autre de nos grandes réalisations. Nous avons établi des liens avec le monde et nous participons aux affaires mondiales. Nous avons tenu deux élections, l’une pour le président et l’autre pour le Parlement. Une constitution a été adoptée et elle est remarquable. Elle prévoit notamment l’occupation de 25 p. 100 des sièges de la chambre basse par des femmes. Imaginez le contexte politique, économique et social dans lequel ces initiatives ont été prises. On ne voit même pas cela dans les démocraties occidentales. Ce sont là des initiatives très revitalisantes, mais on se demande comment faire le pont entre ces éléments – le capital social, le capital physique et le capital humain – pour aller de l’avant. Dans un même temps, nous avons remarqué des problèmes d’insécurité dont nous pouvons déterminer la provenance. Malgré tout, que le pays soit arrivé à faire tout cela et à assimiler tous ces changements est en soi un phénomène extraordinaire. Ce qui est intéressant, c’est que cela a été fait dans un esprit d’entraide et de camaraderie avec la communauté internationale. En fait, le combat des Afghans, actuellement, est le combat de la communauté internationale. Nous ne sommes pas différents, c’est simplement que nous avons été le premier pays à souffrir des conséquences du terrorisme et nous en souffrons encore. C’est ce qui nous rassemble. Lorsque l’Afghanistan faiblit, il s’y passe des choses. Tout s’accumule et finit par atteindre le monde extérieur. Ce phénomène nous soude les uns aux autres; c’est un message national et international.      

 

Je peux nommer bien d’autres projets qui ont été réalisés et d’autres initiatives qui ont été prises. Ainsi, nous avons élaboré une nouvelle stratégie pour l’Afghanistan, le Pacte pour l’Afghanistan. Ce pacte est devenu un modèle de développement… On m’a demandé si je pouvais implanter ce même modèle en Iraq. Mais j’ai dit que j’avais beaucoup à faire.

 

Le contexte de cette stratégie est important. Il est important de savoir qu’elle doit être envisagée en tenant compte des facteurs de sécurité, de bonne gouvernance et d’économie réunis. En ce sens, elle diffère de toutes les stratégies élaborées jusqu’à présent. Il est bon de rappeler que le Canada est impliqué dans toutes les phases de cette stratégie. Nous lui sommes reconnaissants de sa présence. 

 

Stratégie de développement


Le Pacte et la Stratégie intérimaire pour le développement de l’Afghanistan sont en quelque sorte les pages couvertures d’un même livre. En fait, le Pacte de l’Afghanistan est l’objectif le plus ambitieux de la Stratégie. Ce programme compte de 42 à 50 objectifs. Il s’agit de la réunion de trois grandes forces en interaction. L’une a trait à la sécurité, une autre aux réformes gouvernementales et la troisième est une série d’éléments touchant le développement économique et social.

 

Les objectifs de la Stratégie font en quelque sorte partie d’un système interactif. Vous ne pouvez en atteindre un sans tenir compte de l’autre. Donc, le cloisonnement que l’on observe habituellement ne serait pas approprié parce qu’il existe des liens entre les objectifs. De fait, vous ne pouvez faire de l’économie sans aborder les questions de sécurité et vous ne pouvez aborder les questions de sécurité sans tenir compte de l’économie. 

 

Le Pacte a été signé par l’Afghanistan et ratifié à la Conférence de Londres. Il s’agit d’un protocole d’entente entre le monde et le gouvernement afghan, donc le peuple afghan. Les Afghans lancent des initiatives et la communauté internationale y contribue de différentes manières. Par exemple, dans le domaine de la sécurité, nous voudrions avoir une armée très efficace et nous nous sommes entendus sur un effectif de 70 000 soldats. Toutefois, cela implique des coûts et de la formation. Nous apporterons des réformes dans nos institutions afin de modifier le processus de sélection des juges, notamment. Nous aimerions ensuite mettre sur pied des groupes consultatifs qui s’occuperont du recrutement.

 

Et ainsi de suite. Nous devons atteindre ces objectifs d’ici cinq ans. Des échéanciers ont été établis – certains objectifs doivent être atteints en six mois, d’autres en un an. Ils sont très précis. Ils exigent beaucoup des Afghans et j’espère que nous y arriverons.

 

La Stratégie établit certaines priorités, en économie, du moins, et dans bien d’autres secteurs. Le problème en Afghanistan à l’heure actuelle est que nous devons nous concentrer sur quatre ou cinq choses. L’énergie en est un exemple. 


 

Une opération complexe


Le terrorisme est un phénomène jamais vu auparavant dans le monde. Autrefois, nous avions des armées permanentes pour diverses raisons politiques et autres. Il y avait des batailles et il y avait les vainqueurs d’un côté, les perdants de l’autre, et le problème était en quelque sorte résolu. Le terrorisme s’infiltre comme un cancer. Il commence à un endroit et il se répand rapidement. En fait, si on fait un bref survol historique, à l’époque où l’on faisait abstraction de l’Afghanistan, la contamination suivait son cours, Al-Qaïda et bien d’autres groupes s’infiltraient dans le corps du pays qui était extrêmement affaibli par tout cela. Ensuite, que s’est-il produit ? Il y a eu le 11 septembre et tout ce qui a suivi. Si nous poursuivons notre analogie avec la médecine, nous en sommes à devoir procéder à une intervention chirurgicale. L’intervention est complexe. Elle exige beaucoup de temps, mais elle est absolument nécessaire. Seulement sur le plan économique, essayez de vous figurer à combien s’élèvent les coûts liés à la sécurité depuis le 11 septembre. Toute entreprise doit engager des gens pour assurer sa sécurité. Les gouvernements doivent en faire autant, même les institutions culturelles et d’enseignement prennent des mesures de sécurité. Nos vies tout entières ont changé. Si vous faites le calcul, le prix est énorme. Quelqu’un doit payer pour tout cela. Et les coûts ne sont pas seulement monétaires; il y a des impacts sur le plan émotif, psychologique, social, politique et bien d’autres. Le terrorisme nous affecte tous. Ce combat est un combat pour le monde entier. Il se trouve que les Afghans sont les premières victimes. 

 

Les Canadiens contribuent largement à cet exercice. Par exemple, ils comprennent que l’action militaire et les réalisations économiques sont étroitement liées. En fait, le général Hillier m’a parlé deux ou trois fois et il a clairement exprimé cette vision des choses. Et c’est sur cette vision que nous nous fondons pour intervenir dans le règlement des problèmes de terrorisme et de sécurité. Les interventions militaires et économiques vont de pair. On ne peut les réaliser isolément. 

 

Un autre grave problème nous touche tous – peut-être pas tant le Canada – c’est que la situation de nos agriculteurs est si désespérée qu’ils s’adonnent à la culture du pavot. Le problème se répercute en Angleterre, au Canada, aux États‑Unis et dans bien d’autres endroits. Nous devons nous rendre là où les problèmes existent et les régler. En parlant aux Canadiens des activités auxquelles ils s’adonnent ici, je constate qu’ils sont très bien informés. En outre, le Canada, en tant que pays aux normes élevées, s’est toujours impliqué dans des activités humanitaires comme le déminage, etc. Les Canadiens nous apportent tout un train de mesures et je pense qu’ils sont très compétents. Je leur souhaite de réussir dans leurs entreprises.

 

Capacité de développement


Les défis sont nombreux. Premièrement, l’un des importants défis auxquels nous devons faire face est d’accroître la capacité de l’économie et du gouvernement afghans. Accroître la capacité ne veut pas simplement dire augmenter le nombre d’experts pour qu’ils viennent nous dire quoi faire et s’en retournent rédiger un rapport de plus. Ce que nous voulons, c’est développer des talents de gestionnaires. Et ces gestionnaires doivent être afghans, parce que, peu importe ce que vous faites, il y aura toujours quelque chose à gérer, que ce soit dans le secteur militaire ou civil, peu importe. Or, nous devons essayer d’attirer les grands talents afghans de l’étranger. Les Afghans sont nombreux à l’étranger et ils réussissent bien. Je suis convaincu qu’ils réussissent bien au Canada. Je sais à tout le moins qu’aux États-Unis, ils travaillent fort et réalisent de grandes choses. Il y a de grands intellectuels, des médecins renommés, etc. Si nous réussissons à relever le défi de les attirer ici, ils seront au nombre des ingrédients nécessaires au renforcement de notre savoir et de nos capacités. Nous devons aller les chercher. Un assez grand nombre de jeunes Afghans très instruits ont également émigré au Pakistan et en Iran et nous pouvons les attirer. Nous avons besoin de gens dans toutes les professions, de l’enseignement à la construction de ponts. C’est là notre principal défi.

 

Deuxièmement, nous avons besoin de plans et d’idées pour régler le problème du chômage. Le développement des capacités prend du temps, règle générale, et ce sont dans bien des cas des projets futuristes. Le problème du chômage et de la pauvreté nécessite une attention immédiate – nous ne pouvons espérer que le problème se résorbe avec le temps. C’est là un autre problème majeur.

 

Enfin, le rôle que joue l’Afghanistan dans la région doit changer. Historiquement, l’Afghanistan a été forcé de jouer le rôle d’État-tampon. En fin de compte, cela s’est soldé par la division délibérée du continent asiatique. L’Afghanistan est situé au beau milieu de l’Asie. Nous avons d’immenses ressources pétrolières et gazières au nord, non pas en Afghanistan, mais surtout en Ouzbékistan, au Kazakhstan, et ailleurs. Et au sud, au Pakistan et plus particulièrement en Inde, nous avons un marché de 1,2 milliard d’habitants qui augmente de 8 p. 100 par année. Une classe moyenne de 300 millions d’habitants est actuellement en émergence en Inde. Pour cela, il faut de l’énergie, et cette énergie ne peut venir du nord sans passer par l’Afghanistan. Nous sommes au beau milieu de tout cela. Nous faciliterons donc les investissements et le commerce dans ce secteur. Nous prospérerons et ils prospéreront aussi. Cela modifiera le rôle que nous avons joué pendant si longtemps au cours de notre histoire. Ainsi, notre pays sera régional, tout en étant beaucoup plus tourné vers le monde. Et plus il y aura de l’énergie en provenance de cette région, moins grande sera la pression sur le marché de l’énergie dans le monde et le prix du pétrole ne grimpera peut-être pas tant que cela. Le temps est maintenant venu pour cette région du monde de sortir de l’ombre et l’Afghanistan peut jouer un rôle crucial à ce chapitre.