Le 8 février 2007
MEXICO, Mexique
2007/5
SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS
NOTES POUR UNE ALLOCUTION
DU
MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
ET MINISTRE DE L’AGENCE DE PROMOTION ÉCONOMIQUE
DU CANADA ATLANTIQUE,
L’HONORABLE PETER MACKAY,
DEVANT LA CHAMBRE DE COMMERCE DU CANADA AU MEXIQUE
Je suis ravi d’être accueilli par la Chambre de commerce du Canada, et aussi d’être
entouré de tant d’amis du Canada à l’occasion de ce qui s’avère être ma première visite
officielle au Mexique. Il y a un an aujourd’hui le premier ministre M. Stephen Harper et
le nouveau gouvernement prêtaient serment dans la capitale, et deux mois se sont
écoulés depuis que le président M. Felipe Calderón a formé son gouvernement en
présence de notre premier ministre.
Le 25e anniversaire de la Chambre de commerce du Canada au Mexique, CanCham,
est une occasion propice de venir ici et de parler des relations diversifiées, dynamiques
et remarquablement fructueuses entre nos deux pays.
Quand on songe au moment où cette Chambre a été fondée en 1982, on réalise à quel
point le monde a changé. Il est instructif et utile de calibrer notre progrès dans la voie
de l’avenir dans les secteurs de coopération et de compétitivité de nos relations
économiques en croissance.
Sur le plan mondial, en 1982, nous vivions une récession massive. Les taux d’intérêt et
les dettes nationales atteignaient des sommets vertigineux, les devises dégringolaient
et les prix du pétrole commençaient à décliner. À l’époque, le Canada n’avait pas
encore joint le Mexique au rang des grandes puissances énergétiques mondiales.
Les démocraties en Amérique latine étaient en minorité. Le Canada, de son côté,
venait tout juste d’adopter, pour la première fois, une constitution nationale qu’il avait
lui-même rédigée. Et le MacKay qui siégeait à la Chambre des communes à ce moment-là était mon père!
Au début des années 1980, seulement 5 p. 100 environ des foyers canadiens
disposaient d’un ordinateur personnel, et le chiffre était encore moins élevé au
Mexique. L’idée de mener des affaires en temps réel par l’intermédiaire du sans-fil et
de réseaux satellitaires relevait carrément de la science-fiction.
Les relations entre le Canada et le Mexique étaient bonnes — cela est un fait établi —
mais elles manquaient de dynamisme, et négligeaient l’importance relative réelle de
chaque pays l’un pour l’autre. En 1982, le commerce entre nos deux pays oscillait
autour de 1,5 milliard de dollars par année, et les investissements culminaient à
225 millions de dollars.
Il n’y avait aucune perspective nord-américaine dans nos rapports, car l’ALENA
n’existait pas encore. Et aucune perspective latino-américaine non plus, puisque le
Canada n’était pas encore membre de l’Organisation des États américains [OEA]. Pour
sa part, le Mexique n’avait pas encore adhéré à l’OCDE [Organisation de coopération
et de développement économiques], ni au GATT [Accord général sur les tarifs
douaniers et le commerce], l’ancêtre de l’Organisation mondiale du commerce [OMC].
Et pourtant, ici même, les fondateurs de cette Chambre de commerce percevaient déjà
et saisissaient le potentiel de notre partenariat — ou « alianza » pour utiliser le mot
espagnol plus évocateur. Vous avez été l’incubateur de beaucoup de ce qui allait se
réaliser.
Il s’agissait d’une décision intéressante et courageuse, tournée vers l’avenir, et qui s’est
avérée très fructueuse. Si, en 1982, la croyance en ce partenariat s’était mesurée en
actions monnayables, il y aurait des gens très riches aujourd’hui! Et quand nous
revenons à 2007 nous pouvons constater les innombrables avantages de ces relations
entre nos deux pays.
Après cette période difficile du début des années 1980, chaque pays a pris ses propres
décisions pour libéraliser le commerce et s’ouvrir davantage à l’investissement
étranger. L’ALENA a été un tournant marquant dans cette démarche, et depuis 1993,
les échanges commerciaux entre nos deux pays ont bondi de 300 p. 100, et les
investissements bilatéraux, de presque 400 p. 100. Le Canada et le Mexique figurent
maintenant parmi les 10 principaux producteurs et exportateurs de pétrole au monde.
Pour ce qui est des statistiques sur les ordinateurs personnels, on peut dire, sans grand
risque de se tromper, qu’Internet est simplement devenu pour nous tous un élément
incontournable, tant dans notre vie privée qu’en affaires.
Nos deux pays pratiquent l’ouverture sur le monde en général, que ce soit comme
partenaires aux Nations Unies, à l’OEA ou au sein de la Coopération économique de la
zone Asie-Pacifique [APEC] et de l’OCDE, où, faut-il le souligner, un Mexicain a
récemment succédé à un Canadien au poste de secrétaire général.
Sur le continent, et pour la défense de nos intérêts les plus fondamentaux, nous avons
élaboré un nouveau cadre de coopération avec les États-Unis, le partenaire le plus
important de nos deux pays. Je veux parler ici du Partenariat nord-américain pour la
sécurité et la prospérité [PSP].
Complément à l’ALENA et à nos divers arrangements bilatéraux, le PSP permet aux
trois partenaires nord-américains de mieux gérer cet espace de plus en plus intégré et
interdépendant qu’ils partagent, tout en ayant pour objectifs communs l’accroissement
de la compétitivité, le resserrement de la sécurité ainsi que l’amélioration de la qualité
de vie de leur pays et de leurs citoyens. Le Canada se réjouit à la perspective
d’accueillir à la réunion ministérielle du PSP à Ottawa, plus tard en février, les ministres
mexicains et américains chargés du PSP, y compris Mme Patricia Espinosa, secrétaire
aux Affaires extérieures, M. Eduardo Sojo, secrétaire à l’Économie et M. Francisco
Javier Ramirez Acuna, secrétaire de l’Intérieur. Le premier ministre M. Stephen Harper
a également hâte d’accueillir le président Calderón, ainsi que le président Bush, à
l’occasion du Sommet des dirigeants nord-américains plus tard cette année.
L’élément le plus remarquable de l’évolution des relations sur cette partie du continent
est peut-être l’émergence d’une voix distinctement canado-mexicaine, une voix qui
gagne en maturité et vient s’ajouter aux engagements trilatéraux et dominants entre le
Canada et les États-Unis, et entre ces derniers et le Mexique.
Nous avons fini par reconnaître qu’il y a des choses que nous pouvons faire ensemble
— des idées et des initiatives à réaliser — et qui sont propres à ce nouveau
paradigme : compétitivité, systèmes et secteurs du commerce intégré, questions
frontalières, de santé et de capital humain, échanges d’étudiants et qualité de vie, pour
n’en nommer que quelques-unes.
En l’occurrence, le meilleur exemple est, bien sûr, le Partenariat Canada-Mexique, ou
PCM, qui a été créé pour stimuler la collaboration entre les secteurs public et privé en
matière d’économie et de développement du capital humain. Nous nous réjouissons de
l’occasion qui nous sera donnée de nous réunir ici, au Mexique, dans un mois, en
conjonction avec votre journée annuelle de la Chambre de commerce du Canada au
Mexique.
Le PCM fait certaines choses qui le rendent unique et efficace. D’abord, il réunit sur
une seule tribune les dirigeants des secteurs privé et public, et il pourrait même sous
peu accueillir des représentants provinciaux et étatiques. Deuxièmement, il nous
permet de cibler de manière concrète et constructive les secteurs ayant la plus grande
importance mutuelle — énergie, industrie agricole, construction domiciliaire, villes
durables, infrastructure, développement du capital humain et compétitivité globale. Et
troisièmement, il constitue par-dessus tout un mécanisme souple, reflétant la
profondeur de nos relations, et capable de prendre en compte les priorités nouvelles ou
changeantes et de mettre fin à des projets qui ne répondent plus à nos besoins
communs. À cet égard, les questions de la mobilité de la main-d’oeuvre et de la
collaboration sur les plans scientifique et technologique pourraient bientôt faire partie
des secteurs couverts par le PCM.
Nous avons eu nos tout premiers pourparlers sur les questions politiques et militaires,
et misons sur le resserrement et l’accroissement soutenus de notre coopération dans
divers dossiers liés à la sécurité. Nous avons aussi répondu avec plaisir aux invitations
que nous a faites le Mexique d’enclencher un dialogue sur la politique publique, et de
partager nos expériences et nos pratiques exemplaires relativement à une variété de
domaines, notamment la modernisation de la gouvernance. Nous espérons poursuivre
cette coopération quand elle est dans l’intérêt des deux pays. J’ai hâte à ma rencontre
bilatérale avec ma collègue, la secrétaire Patricia Espinosa pour discuter franchement
de certaines questions telles que la sécurité, le commerce et le tourisme.
À travers tout cela, nous pouvons compter sur un engagement politique au plus haut
niveau — comme en ont témoigné la visite très attendue du président Calderón au
Canada en octobre dernier, avant son assermentation, et celle du premier ministre
Harper à Mexico le 1er décembre à l’occasion de la cérémonie du changement de
gouvernement dans votre pays.
Le moins qu’on puisse dire, c’est que les changements survenus ces 25 dernières
années sont tout simplement extraordinaires.
Cependant, rien ne dure bien longtemps dans le monde d’aujourd’hui.
Il y a toujours de nouveaux défis à relever, des ambitions qui changent, des menaces
imprévisibles et aussi des occasions imprévues qui nous obligent à prendre des
décisions et, plus encore, à faire preuve de leadership. En tant que membres de la
Chambre de commerce, vous jouez un rôle important auprès des leaders de la
communauté et du monde des affaires.
J’aimerais m’attarder sur certains thèmes qui, à mon sens, exigeront une action
commune dans la prochaine phase des relations auxquelles nous tenons beaucoup, et
qui sont d’une importance stratégique pour la réalisation des objectifs fondamentaux
que nous poursuivons ensemble, à savoir la prospérité, la sécurité et la qualité de vie
pour nous et pour tous.
Le premier de ces thèmes est la sécurité publique, une des grandes priorités du
président Calderón, et aussi un des engagements majeurs du gouvernement du
Canada lorsqu’il a assumé le pouvoir il y a un an. Notre capacité à garantir la sécurité
de nos communautés et à protéger nos citoyens, et cela dans le respect de la règle de
droit et des droits de la personne, est un véritable test de gouvernance, un test auquel
aucun d’entre nous ne peut se permettre d’échouer. La sécurité publique influe sur la
qualité de la vie, mais aussi sur la confiance de nos partenaires et de nos voisins. Je
sais qu’il s’agit d’une préoccupation majeure au Mexique, et je peux vous dire que le
gouvernement du Canada soutient la détermination du président Calderón à combattre
la violence criminelle et le commerce de la drogue dans ce pays et le long de ses
frontières. Vu le grand nombre d’entreprises canadiennes au Mexique et la multitude de
touristes canadiens qui viennent ici chaque année — au-delà de 1 million —, nous
avons en effet tout intérêt à ce que le Mexique réussisse à ce chapitre, et nous
sommes prêts à travailler étroitement avec lui pour créer un environnement plus sûr.
Sur demande, nous partagerons nos méthodes de formation et des techniques utiles
lors d’enquêtes criminelles et de médecine légale.
Le deuxième thème est la compétitivité — un vaste concept recouvrant de nombreuses
idées, la plus importante étant, comme vous le savez dans le milieu des affaires, que la
compétitivité est un objectif qui change de jour en jour. Avec l’émergence de nouveaux
marchés — et l’arrivée de nouveaux concurrents — en Asie, et devant l’importance
grandissante de l’intégration aux chaînes d’approvisionnement mondiales, il convient
aujourd’hui plus que jamais de chercher ensemble à assurer la croissance durable et la
qualité de vie pour tous nos citoyens. Pour notre économie nord-américaine intégrée,
cela signifie porter attention aux mesures susceptibles de nous procurer de plus grands
avantages encore sur les marchés mondiaux : des secteurs ouverts et efficaces en
matière d’énergie, de télécommunications et de transport; des infrastructures et des
systèmes commerciaux connectés; l’investissement dans le capital humain et la
souplesse de la population active. À cette liste, j’ajouterai qu’il faut aussi veiller à ce
que toutes les régions de nos pays respectifs non seulement profitent des avantages
de la croissance, mais disposent également des outils propices à cette croissance —
l’accès à l’éducation, aux capitaux et aux débouchés. Ce serait négligent de ma part si
je ne mentionnais pas les portes sur le monde que deviennent nos deux côtes : de
grands ports d’eau profonde en Colombie-Britannique et en Nouvelle-Écosse qui se
préparent à recevoir des porte-conteneurs post-Panamax.
J’en arrive au troisième des thèmes que j’ai évoqués, à savoir la consolidation de la
démocratie, des droits de la personne et de la primauté du droit dans les Amériques.
Nous avons fait beaucoup de chemin depuis le début des années 1980, mais il reste
encore des failles. La gouvernance démocratique et les processus électoraux
demeurent fragiles dans certaines parties du monde et peuvent encore être renforcés,
en prenant l’historique Charte démocratique interaméricaine comme guide. Le dialogue
et la coopération en matière de sécurité, y compris aux plans de la criminalité
transnationale et de la protection civile, peuvent être intensifiés. Il est possible aussi
d’élargir et de rendre plus équitable la croissance économique fondée sur le marché. À
cet égard d’ailleurs, le Canada est attentif aux efforts que déploie le Mexique pour
favoriser le développement économique et social dans le Sud du pays et en Amérique
centrale, grâce au Plan Puebla Panama. Et nos deux pays peuvent jouer un rôle
directeur permanent dans le renforcement de nos institutions hémisphériques vitales,
comme l’OEA et le Sommet des Amériques.
Enfin, il faut voir comment le Canada et le Mexique peuvent le mieux projeter — et
protéger — ces mêmes valeurs et principes dans le monde. Sous certains rapports, nos
traditions sont différentes — l’appartenance du Canada à l’OTAN, qui l’amène
aujourd’hui à jouer un rôle en Afghanistan, est un exemple parmi d’autres — mais il
nous est souvent arrivé de travailler ensemble à une cause commune dans des
domaines vitaux, comme le désarmement, la réforme de l’ONU et les droits de la
personne dans le monde. Sur ce dernier point, le Canada attache une grande
importance à l’étroitesse de ses contacts avec le Mexique, qui occupe la lourde fonction
de président du nouveau Conseil des droits de l’homme de l’ONU à un moment
d’importance critique. Nous pouvons aussi unir nos forces pour relancer les pourparlers
sur la libéralisation du commerce mondial à l’OMC.
Voilà un programme — et un avenir — bien exaltants. Quand nous nous réunirons de
nouveau pour célébrer un nouvel anniversaire dans 25 ans, je me demande quelles
réalisations et percées figureront alors à notre bilan.
Une bonne partie de ce qui nous apparaissait impossible, ou même utopique, en 1982
a déjà été réalisé et dépassé. Cette réussite, nous la devons à la volonté politique, au
sens de l’initiative, à l’ingénuité et au travail acharné dans presque toutes les branches
de nos gouvernements, de nos milieux d’affaires et de nos sociétés. Et ce sont ces
mêmes outils qui nous amènent maintenant à la prochaine et prometteuse phase des
relations entre nos deux pays. Ces efforts reposent solidement sur le partenariat que
nous avons construit ensemble, et qui rend toute chose possible.
En terminant, je voudrais féliciter très sincèrement la Chambre de commerce du
Canada au Mexique ainsi que tous ceux et celles, du Mexique comme du Canada, qui
s’y sont consacrés avec dévouement ces 25 dernières années. Par votre travail
collectif, vous avez contribué à propulser nos échanges et nos investissements
bilatéraux vers des sommets encore jamais atteints. Au nom du gouvernement du
Canada, je vous souhaite encore plus de succès au cours du prochain quart de siècle
qui s’amorce.
Je vous remercie.