M. AXWORTHY - ALLOCUTION À LA SÉANCE DE CLÔTURE DE LA CONFÉRENCE INTERNATIONALE DE STRATÉGIE« VERS L'INTERDICTION COMPLÈTE DES MINES ANTIPERSONNEL » - OTTAWA (ONTARIO)
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NOTES POUR UNE ALLOCUTION DE
L'HONORABLE LLOYD AXWORTHY,
MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,
À LA SÉANCE DE CLÔTURE DE LA CONFÉRENCE
INTERNATIONALE DE STRATÉGIE
« VERS L'INTERDICTION COMPLÈTE DES MINES ANTIPERSONNEL »
OTTAWA (Ontario)
Le 5 octobre 1996
Bon après-midi à tous. Je crois savoir que cette réunion a été très productive et je vous en félicite.
La Déclaration d'Ottawa lance un appel puissant et clair en faveur de l'adoption immédiate de mesures pour une interdiction complète de ces armes. Cet appel reflète
désormais la vision commune et l'engagement collectif de 50 pays, de nombreuses ONG et d'organismes internationaux, qui représentent un pourcentage élevé et
significatif de la population mondiale. Le Plan d'action que vous avez élaboré montre que nous désirons aller au-delà des grandes déclarations de principe et que nous
sommes prêts à prendre des mesures concrètes dès maintenant. Je suis particulièrement sensible au fait qu'il a une portée globale. Nous irons tous aux Nations unies
pour faire adopter une résolution qui, avec l'appui du plus grand nombre possible, viendra renforcer l'impulsion qui nous anime. Nous poursuivrons nos efforts de
déminage et d'aide aux victimes. Je tiens à mentionner encore la conférence qui se tiendra prochainement à Winnipeg, au Canada, sur le sujet, la réunion des experts en
déminage qui aura lieu en Allemagne, et la très importante conférence qu'organisera le Japon en mars. De plus, la réunion que la Belgique s'est engagée à tenir en
juin pour donner suite à nos travaux fera également date. L'Allemagne, la Norvège et la Suisse se sont aussi déclarées prêtes à prendre les devants pour faire avancer
nos travaux.
Ce que j'ai aussi retiré de cette conférence, c'est que nous avons maintenant l'impulsion nécessaire pour aller de l'avant. Vous avez défini un plan d'action, vous
avez discuté d'un processus d'interdiction clair. Et les États présents autour de cette table tout comme d'autres dans le monde entier qui souscrivent à notre objectif
peuvent faire de ce processus, s'ils sont prêts à l'orienter dans la bonne voie, un puissant outil de portée mondiale.
Le fait que vous considériez cette réunion comme une réussite, et même comme une réussite historique, ne peut que me réjouir. Je crois, comme beaucoup d'entre vous,
que le moment est venu d'aller plus loin.
À mon avis, nous ne pouvons attendre la ratification
d'un traité universel. Je suis persuadé que nous pouvons tout de suite mettre un traité sur les rails, même si dans un premier temps il ne rallie pas tous les États du
monde. Un traité de cette nature pourrait avoir assez de poids pour établir la norme morale; la production, l'utilisation, l'entreposage et le transfert des mines
antipersonnel doivent être interdits à tout jamais. Et je crois qu'il susciterait l'adhésion du plus grand nombre. Universaliser ce traité sera pour chacun de nous un
défi de tous les instants.
Ainsi, M. le président, je voudrais ajouter un point de plus à votre plan d'action. Il s'agit à la fois d'une invitation et d'un défi à relever. Le défi consiste à
amener les parties à signer un traité au plus tard à la fin de 1997. Dans les jours qui viennent, j'écrirai à vos ministres et à d'autres qui ne sont pas représentés
ici pour leur demander leur avis quant à la façon de progresser ensemble dans ce dossier. Je leur indiquerai que si la volonté est là, le Canada est prêt à convoquer
une réunion en décembre 1997 pour signer ce traité.
Les gouvernements rassemblés ici sont mis au défi de traduire votre discours en actions concrètes. En fait, nous savons que plusieurs d'entre vous, comme l'Autriche,
ont déjà jeté les bases d'un traité. Le Canada est prêt à travailler avec vous et à signer un traité avec les pays qui souscrivent véritablement à cette cause et ce,
qu'ils soient 50, 70 ou 100.
Le défi est aussi lancé à la campagne internationale dont le but est d'assurer que les gouvernements du monde entier sont prêts à collaborer avec nous pour qu'un
traité soit mis au point et signé l'an prochain. Cela n'est pas utopique. Vous êtes dans une large mesure à l'origine de notre présence ici aujourd'hui. Les mêmes
arguments convaincants que vous avez invoqués pour nous rassembler ici doivent maintenant servir à persuader les ministres des affaires étrangères de signer le traité.
Ainsi, je m'engage aujourd'hui au nom du Canada à atteindre cet objectif, à oeuvrer avec nos partenaires du monde entier à la préparation d'un traité qui puisse être
signé d'ici à décembre 1997 et mis en vigueur d'ici à l'an 2000. Je vous engage tous à vous joindre à moi pour parvenir à ce but.
Vous êtes nombreux à l'avoir remarqué, un traité de cette nature ne doit pas être complexe. Le fonds de la question est simple. Nous ne pouvons laisser les
négociations s'enliser dans les habitudes et les approches traditionnelles. Il ne s'agit pas ici d'armes offensives stratégiques. Les mines antipersonnel sont
essentiellement défensives. Il n'est donc pas question de négociations traditionnelles pour le contrôle des armements. La question qui nous occupe ici est d'ordre
humanitaire. Ces armes tuent tous les jours.
Nous rédigerons le texte du traité avec tous les pays de même opinion, quels qu'ils soient. Tous les événements et toutes les possibilités recensés dans le plan
d'action peuvent corroborer ces efforts. Nous sommes prêts à commencer dès maintenant de manière à pouvoir discuter du texte lors de notre prochaine rencontre en
Belgique et de le finaliser au Canada plus tard cette année. Le secrétaire général des Nations unies, M. Boutros Boutros-Ghali, a téléphoné ce matin. Lorsqu'il a été
informé des résultats de la Conférence et qu'il a pris connaissance de mon invitation à signer au Canada, en décembre 1997, un traité pour l'interdiction des mines
antipersonnel, il a exprimé son accord sans réserve.
Quant à moi, je suis convaincu que la possibilité réelle de signer un traité à une date fixe -- plutôt qu'un vague espoir d'accord dans un lointain futur -- redoublera
l'impulsion sans précédent qui nous anime aujourd'hui et aidera les pays à prendre les décisions qui les amèneront à venir élargir notre groupe. Notre mouvement en
sera renforcé et nos chances de succès se multiplieront.
Mesdames et Messieurs, le choix qui se pose à nous est clair. Nous pouvons, comme l'a déclaré le sénateur Leahy, retirer 100 millions de mines, « un bras et une jambe
à la fois ». Ou bien nous pouvons agir. Il y a une volonté d'action, il y a un engagement politique, et surtout, les populations du monde entier nous soutiennent dans
notre dessein.
Pour toutes ces raisons, nous croyons qu'une interdiction complète est à notre portée. Nous pouvons unir nos efforts pour, comme l'a dit M. Lewis, « civiliser la
condition humaine ». Il y a beaucoup à faire, mais mon pays fera son possible et collaborera avec vous tous pour que nous puissions revenir ici en 1997 faire de notre
but commun une réalité.