M. EGGLETON - ALLOCUTION SUR LE PROJET DE LOI HELMS/BURTON
96/7 TELLE QUE PRONONCÉE
UNE DÉCLARATION DE
L'HONORABLE ART EGGLETON,
MINISTRE DU COMMERCE INTERNATIONAL
SUR LE PROJET DE LOI HELMS/BURTON
Le 13 mars 1996
Étant donné les préoccupations du Canada concernant le projet de loi Helms/Burton,
le 12 mars j'ai communiqué par écrit avec le représentant au Commerce des États-Unis, M. Mickey Kantor, pour demander la tenue de consultations en vertu du
chapitre 20 de l'Accord de libre-échange nord-américain [ALENA].
Le Canada a condamné Cuba pour avoir abattu des avions civils. Mais il s'objecte
au projet de loi Helms/Burton, qui pourrait entraver les affaires légitimes des
sociétés et qui tente de faire une application extraterritoriale de la législation
américaine.
Le chapitre 20 de l'ALENA prévoit la tenue de consultations sur toute question
affectant l'Accord. Ces consultations serviront à déterminer dans un premier temps
s'il y a lieu de contester l'affaire dans le contexte de l'ALENA. L'Administration
américaine élabore actuellement son approche de la mise en application du projet
de loi, et le Canada tentera de faire clarifier les intentions des États-Unis. Le
Canada examinera les mesures à prendre après les consultations.
Le Canada fera aussi valoir ses préoccupations en rapport avec cette loi lors des
négociations engagées à l'OCDE [Organisation de coopération et de développement
économiques] sur un Accord multilatéral sur l'investissement.
Nous avons été en contact avec le gouvernement mexicain et nous croyons comprendre
que le Mexique entend lui aussi demander des consultations sur cette question dans
le contexte de l'ALENA.
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Document d'information sur le projet de loi américain Helms/Burton en annexe.
Document d'information
LE PROJET DE LOI AMÉRICAIN HELMS/BURTON
Le projet de loi Helms/Burton (ou Cuban Liberty and Democratic Solidarity
(LIBERTAD) Act de 1996) a été adopté par le Sénat américain le 5 mars et par la
Chambre des représentants le 6 mars. Le président Clinton lui a donné force de loi
le 12 mars.
Le Canada a exprimé ses vives préoccupations concernant la nouvelle loi. Le
premier ministre Chrétien a fait valoir les objections du Canada au président
Clinton. Le ministre du Commerce international, M. Art Eggleton, a mentionné les
préoccupations canadiennes au représentant au Commerce des États-Unis, M. Mickey
Kantor, lors de son passage à Washington le 4 mars. L'ambassadeur du Canada aux
États-Unis a envoyé une note diplomatique sur la question le 7 mars.
Le Canada est surtout préoccupé par les dispositions du Titre III sur les
réclamations, et par les restrictions provisoires à l'admission prévues au
Titre IV.
Titre III - Dispositions sur les réclamations
Les dispositions sur les réclamations permettraient de poursuivre devant les
tribunaux américains les sociétés étrangères qui ont des investissements ou des
activités d'affaires liés à des biens situés à Cuba, expropriés par le
gouvernement cubain et revendiqués par un ressortissant des États-Unis.
Ces dispositions seraient directement contraires aux pratiques largement
acceptées en droit international. Les réclamations pour expropriation doivent
normalement être réglées en utilisant d'abord les recours prévus par la
législation locale, puis en menant des négociations bilatérales de gouvernement à
gouvernement ou, si le différend ne peut être réglé ainsi, en recourant ensuite à
l'arbitrage de la Cour internationale de justice ou d'une commission de
réclamation spéciale établie par entente mutuelle.
Les dispositions Helms/Burton sur les réclamations visent à punir les sociétés
qui traitent avec Cuba. Ces sociétés ne font pourtant que mener des affaires
légitimes. Le droit international n'empêche pas des intérêts commerciaux
internationaux d'opérer dans des pays où des biens ont été expropriés par le
gouvernement. Tout au contraire, des investissements étrangers, et américains,
sont réalisés dans nombre de pays se trouvant dans cette situation.
Les dispositions Helms/Burton sur les réclamations n'entreront pas en vigueur
avant le 1er août 1996. Le président a le pouvoir discrétionnaire d'en retarder la
mise en application pour des périodes additionnelles de six mois s'il est constaté
qu'une telle mesure serait dans l'intérêt national et qu'elle accélérerait la
transition vers la démocratie à Cuba. Le Canada incite l'Administration à user de
ce pouvoir discrétionnaire.
Titre IV - Restrictions temporaires à l'admission
Les restrictions temporaires à l'admission interdiraient l'entrée aux États-Unis
aux cadres et aux actionnaires majoritaires de sociétés qui ont des
investissements ou des entreprises à Cuba incluant des biens expropriés par Cuba
et revendiqués par un ressortissant des États-Unis. Les restrictions
s'appliqueront aussi à la famille immédiate de ces personnes, soit à leurs
conjoints et enfants mineurs.
La nouvelle loi pourrait empêcher des dirigeants et des cadres basés à l'étranger
de mener une affaire en personne aux États-Unis avec des sociétés affiliées, des
clients ou des fournisseurs. Elle entraverait aussi les activités commerciales
légitimes des firmes américaines et canadiennes qui mènent des opérations
transfrontalières.
Les restrictions temporaires sur l'admission sont entrées en vigueur lorsque le
président Clinton a signé le projet de loi. On ne voit pas très bien quelles
mesures prendra le gouvernement américain pour faire appliquer ces restrictions.
Consultations dans le contexte de l'ALENA
L'article 2006 de l'ALENA dispose que toute Partie à l'Accord peut demander des
consultations « avec une autre Partie relativement à toute mesure adoptée ou
envisagée ou à toute autre question qui, selon elle, pourrait affecter le
fonctionnement » de l'ALENA.
Des consultations sont normalement tenues dans les 30 jours suivant la
présentation de la demande à l'autre Partie. Les Parties peuvent tenir d'autres
séances de consultation si elles le jugent utile. Si la troisième Partie à l'ALENA
demande aussi des consultations sur la même question, des consultations conjointes
peuvent être tenues.
Commerce Canada-Cuba
Le commerce bilatéral entre le Canada et Cuba s'est accru de 54 p. 100 entre 1994
et 1995. Les exportations canadiennes à Cuba ont totalisé 254,5 millions de
dollars en 1995 comparativement à 115 millions de dollars en 1994. Les
importations canadiennes depuis Cuba ont représenté 320,9 millions de dollars
contre 194 millions de dollars en 1994.