M. MARCHI - ALLOCUTION DEVANT LA CHAMBRE DE COMMERCE CANADA-BELGIQUE-LUXEMBOURG ET LA FÉDÉRATION DES ENTREPRISES DE BELGIQUE - BRUXELLES, BELGIQUE
99/42 SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS
NOTES POUR UNE ALLOCUTION DE
L'HONORABLE SERGIO MARCHI,
MINISTRE DU COMMERCE INTERNATIONAL,
DEVANT LA CHAMBRE DE COMMERCE
CANADA-BELGIQUE-LUXEMBOURG
ET LA FÉDÉRATION DES ENTREPRISES DE BELGIQUE
BRUXELLES, Belgique
Le 16 juin 1999
(8 h 30 HAE)
Je suis ravi de me trouver ici à Bruxelles, une ville fondée grâce au commerce, façonnée par des artisans et
imprégnée d'histoire, une ville qui depuis des centaines d'années figure parmi les grands centres commerciaux
d'Europe.
Comme vous le savez, la rencontre que je dois avoir avec sir Leon Brittan, le vice-président de la Commission
européenne, pour discuter des relations économiques du Canada avec l'Union européenne (UE) est l'une des
raisons de ma visite de ce côté-ci de l'Atlantique.
Or, un des éléments les plus positifs de l'attitude du Canada envers l'Union européenne tient au fait que nous
accordons autant d'importance à nos relations avec chacun des pays qui composent l'UE qu'avec l'Union elle-même.
Cela vaut certainement pour nos relations avec la Belgique et le Luxembourg. Vous qui êtes ici présents le savez
mieux que quiconque. Vous avez déployé des efforts exceptionnels pour promouvoir les échanges commerciaux et
les liens d'investissement entre le Canada, la Belgique et le Luxembourg. Et je tiens à ce que vous sachiez que
ces efforts sont vivement appréciés.
Les échanges bilatéraux entre le Canada et la Belgique atteignent 2,5 milliards de dollars par année, ce qui est un
chiffre très impressionnant. Quant à nos échanges avec le Luxembourg, qui s'établissent présentement à
209 millions de dollars, ils ont quadruplé en trois ans à peine.
Comme vous, nous sommes convaincus que les investissements profitent aux deux parties. Lorsque des
entreprises canadiennes comme GEAC Computers et Bombardier investissent en Belgique et au Luxembourg,
elles créent des emplois et des débouchés des deux côtés de l'Atlantique.
Et de même, lorsque des entreprises comme Tractebel ou On-ligne viennent s'établir au Canada, elles contribuent
à l'essor de l'économie canadienne tout en favorisant la croissance ici même.
C'est pourquoi nous sommes particulièrement enthousiasmés par les nouvelles perspectives d'accroissement des
investissements et des échanges commerciaux avec la Belgique et le Luxembourg.
Lorsque les gens du Canada se tournent vers la Belgique, le Luxembourg et les autres pays de l'Union
européenne, ils voient de nombreuses images familières. Nous avons de profondes racines en Europe, et nous
avons toujours accordé une grande importance à ce précieux patrimoine.
Je puis affirmer sans hésitation qu'aux yeux du Canada, l'Union européenne n'est pas seulement une destination
pour ses exportations ou une source d'investissement, mais aussi un partenaire dans la cause du libre-échange.
Peu de pays sont en mesure de montrer aux autres comment relever les défis que pose la libération des
échanges. Le Canada et les membres de l'Union européenne sont au nombre de ceux qui peuvent le faire.
Chacun de son côté, nos pays peuvent faire une contribution importante au prochain cycle de négociations
commerciales multilatérales. Mais en conjuguant nos efforts et en collaborant, nous pourrons avoir une influence
plus profonde, par exemple en formulant de nouvelles propositions en vue de renforcer les règles de l'Organisation
mondiale du commerce (OMC), d'abaisser davantage les droits de douane sur les produits, d'étendre la portée
des services et d'incorporer les vues de la société civile.
Dans le cadre de ces démarches, une de nos tâches les plus importantes consistera à encourager d'autres pays à
persévérer dans la voie du libre-échange, surtout lorsqu'ils pourraient être tentés de se retrancher derrière le mur
du protectionnisme en période de tourmente économique.
Le Canada et l'Union européenne doivent démontrer, en joignant le geste à la parole, leur engagement envers la
libération des échanges, qui est le meilleur moyen de favoriser la croissance et de créer des emplois.
Jusqu'à maintenant, nous y sommes assez bien parvenus tous les deux dans nos relations avec les pays tiers. Le
Canada, par exemple, a signé des accords de libre-échange avec les États-Unis, le Mexique, le Chili et Israël; il
poursuit ses efforts en vue de donné l'élan à la Zone de libre-échange des Amériques; il a entrepris des
négociations en vue d'un accord de libre-échange avec les pays membres de l'Association européenne de libre-échange (AELE); et il a également entrepris l'assouplissement accéléré de sa structure tarifaire au sein de l'APEC
[Asia Pacific Economic Cooperation].
L'Union européenne, aussi, s'est employée sans relâche à libérer les échanges, notamment en élargissant son
action à l'Europe centrale et orientale, en formant une union douanière avec la Turquie, en signant un accord de
libre-échange avec Israël et en établissant un régime commercial préférentiel avec l'Afrique, les Antilles et les pays
du Pacifique.
Mais il faut bien convenir que nous n'avons peut-être pas prêté autant d'attention à nos relations mutuelles. S'il est
vrai que le Canada et l'Union européenne ont signé des accords importants dans de nombreux domaines, depuis
la science et la technologie jusqu'à la recherche nucléaire et aux régimes douaniers, force est de constater que
nous avons peu fait pour améliorer les conditions d'accès à nos marchés respectifs.
En effet, le Canada est parmi les rares pays auxquels continue de s'appliquer intégralement le tarif douanier
commun de l'Union européenne.
Dès lors, même si l'UE est le deuxième partenaire du Canada au chapitre du commerce et de l'investissement, et
même si on peut à bon droit être impressionné par le volume de nos échanges bilatéraux, qui s'élève à 44
milliards de dollars annuellement, il nous reste encore beaucoup à faire et nous devons conjuguer nos efforts dans
ce sens.
Le Canada est disposé à élargir et à enrichir les liens qui nous unissent. Ainsi, à l'heure où l'Union européenne
étudie la possibilité de tisser de nouveaux liens transatlantiques avec les États-Unis, le Mexique et le Mercosur, il
importe que vous sachiez qu'il existe aussi outre-Atlantique un autre pays qui vous ouvre ses portes et offre un
grand nombre d'atouts.
Si la Belgique offre une porte d'entrée stratégique vers les pays de l'Union européenne, le Canada vous donne
accès au marché nord-américain. Grâce à notre participation à l'Accord de libre-échange nord-américain
(ALENA), les entreprises qui s'établissent au Canada jouissent d'un accès privilégié au marché le plus prospère
de la planète, où la valeur annuelle des échanges se monte à 500 milliards de dollars américains.
Le Canada, qui est également baigné par l'océan Pacifique, est aussi un pont vers l'Asie. De plus, nous sommes
associés intimement à l'Amérique latine à la fois dans nos rapports bilatéraux et du fait de notre présence à la
présidence des négociations sur la création de la Zone de libre-échange des Amériques. Cette ZLEA formera
éventuellement la zone de libre-échange la plus vaste au monde, comprenant un marché de 800 millions de
personnes et affichant un produit intérieur brut global de 9 billions de dollars.
À cette dimension internationale de notre action se joint une économie nationale vigoureuse et compétitive,
comme le démontrent les faits suivants.
Selon une étude de la firme de consultants internationale KPMG, le Canada est le pays du G-7 où les coûts
d'exploitation des entreprises sont les plus bas.
Le Canada offre aussi un net avantage en ce qui concerne le coût des activités de recherche et développement,
puisqu'il offre le meilleur régime de dégrèvement fiscal du G-7 dans ce domaine.
De plus, contrairement à un mythe répandu, selon lequel les impôts sont très élevés au Canada, l'étude de KPMG
révèle qu'il se situe au deuxième rang parmi les pays du G-7 en ce qui concerne les taux d'imposition des
entreprises les plus bas.
Bien entendu, les considérations économiques d'ordre général comptent tout autant que le coût d'exploitation
d'une entreprise. Dans ce domaine aussi, le Canada offre des conditions avantageuses. Notre économie connaît
une croissance soutenue, qui se traduit par le plus haut taux de création d'emplois des pays du G-7 ; nos taux
d'intérêt sont peu élevés et l'inflation est quasi-inexistante.
Nous avons mis de l'ordre dans nos finances, ramenant à zéro un déficit fédéral de plus de 40 milliards de dollars
en moins de six ans. Le magazine Newsweek n'a pas hésité à parler du « miracle de la feuille d'érable », tandis
que The Economist fait allusion au « virtuose des finances ».
Si les Européens ont parfois tendance à négliger les possibilités qu'offre le Canada, c'est peut-être parce qu'ils se
font une idée dépassée de l'économie canadienne. Nombreux sont ceux qui croient encore que le Canada n'est
qu'un pays couvert de lacs et de forêts, à l'économie axée sur les richesses naturelles, dirigé par la police montée
et peuplé de joueurs de hockey. L'image est plaisante, sans doute, mais elle est bien éloignée du Canada
d'aujourd'hui.
En effet, l'économie du Canada repose aujourd'hui sur la haute technologie et sur le savoir, et elle est bien placée
pour faire face à la concurrence et exploiter les nouveaux débouchés créés par l'ère de l'information.
La proportion des produits de base au sein des exportations, qui était de près de 60 % en 1980, atteignait à peine
35 % en 1997, soit 12 % seulement de notre produit intérieur brut ! Pas moins de 88 % de notre production
globale émane des secteurs économiques axés sur le savoir.
Aussi importe-t-il de ne pas se laisser tromper par des perceptions qui s'inspirent d'un passé bien révolu et de ne
pas laisser s'échapper des débouchés si prometteurs. Si vous envisagez d'établir une présence sur le vaste
marché nord-américain, il vous serait tout à fait avantageux de le faire au Canada.
Nous voulons faire connaître ces avantages à nos amis et partenaires européens, car le Canada est résolu à
favoriser la libération des échanges transatlantiques.
Comme je l'ai mentionné plus tôt, nous avons entrepris des négociations en vue d'un éventuel accord de
libre-échange avec les quatre pays de l'AELE. Nous espérons que ces négociations prendront fin cet automne.
Au dernier sommet Canada-UE, qui a eu lieu en décembre, nous avons convenu d'un certain nombre d'initiatives
propres à accroître la coopération commerciale et économique. Nous voyons déjà les premiers effets de cet
accord.
Demain, nous signerons un accord sur la politique de concurrence et, ce soir, je me joindrai à sir Leon Brittan lors
de la première réunion de la table ronde Canada-UE, qui permettra aux chefs d'entreprise européens d'émettre
leur avis au sujet des meilleurs moyens de favoriser les échanges commerciaux et les investissements entre nous.
Bref, l'Union européenne revêt une grande importance pour le Canada. Toutefois, je veux aussi que l'inverse soit
vrai. Le Canada ne peut tout simplement pas se permettre de rester dans la vision périphérique de l'Union.
Pour être franc, cela pose souvent un problème. Ces dernières années, en effet, l'UE a importé un pourcentage
plus faible de produits canadiens et le Canada reçoit une proportion inférieure de vos investissements directs à
l'étranger.
Qu'il s'agisse des mesures mise en place par l'Union au sujet de la réglementation des organismes
génétiquement modifiés, de l'administration de son industrie vinicole ou de sa Politique agricole commune, ce
sont souvent les exportateurs canadiens qui ont été pénalisés.
Bien sûr, les échanges commerciaux se font dans les deux sens, et les irritants commerciaux existent aussi de part
et d'autre. Nous savons que certains exportateurs européens sont frustrés à l'occasion par les politiques
canadiennes et nous sommes prêts à en discuter, préférablement dans le contexte d'entretiens visant à améliorer
l'accès au marché en faveur des deux parties.
Mais les chiffres sont clairs : la balance commerciale continue de favoriser l'UE et l'excédent continue de
s'accroître. À nos yeux, il est devenu évident qu'il faut modifier le jeu et transformer la situation actuelle.
J'estime, en effet, que le moment est venu de considérer les relations entre le Canada et l'UE sous un angle
nouveau, en se fondant sur une évaluation lucide des possibilités qui se présentent à nous.
Nous avons besoin, par exemple, de nous pencher sur les moyens d'animer et d'approfondir notre partenariat
économique. Est-il préférable de continuer à établir des plans d'action ou faut-il plutôt envisager un accord de
libre-échange direct entre le Canada et l'Union européenne qui faciliterait grandement et accroîtrait les flux
commerciaux et les investissements ?
Ou encore, pourquoi n'envisagerait-on pas l'établissement de relations commerciales entre les pays de l'ALENA
et l'UE qui permettraient à celle-ci de traiter avec un seul grand marché intégré plutôt que de négocier séparément
avec chaque pays d'Amérique du Nord? C'est là un projet préconisé depuis longtemps par notre Premier ministre,
qu'il a d'ailleurs réitéré hier à Dublin.
À mon avis, le moment est venu d'établir une nouvelle relation entre l'Europe et l'Amérique du Nord. Ce moment ne
pourrait d'ailleurs être mieux choisi. À l'aube du nouveau millénaire, l'Amérique du Nord et l'Europe sont en effet
les leaders économiques sur la planète.
Par ailleurs, l'UE vient de choisir un nouveau président et d'élire un nouveau parlement. Il importe de profiter de
cette période de renouvellement pour revitaliser nos relations.
Il importe aussi de veiller à ce que, lorsqu'on parle des liens entre le Canada et l'Europe, ce n'est pas seulement
pour se remémorer les gloires du passé, mais aussi pour prendre conscience des possibilités futures.
Il importe enfin que nous inspirions une nouvelle génération qui puisse croire que ces liens réaliseront tout leur
potentiel et permettent d'atteindre tous les objectif.
Merci.