M. AXWORTHY - ALLOCUTION À L'OCCASION DE LA RÉUNION SPÉCIALE DU CONSEIL DE L'ATLANTIQUE NORD - BRUXELLES, BELGIQUE
97/9 TELLE QUE PRONONCÉE
ALLOCUTION
DE
L'HONORABLE LLOYD AXWORTHY,
MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,
À L'OCCASION DE LA RÉUNION SPÉCIALE
DU CONSEIL DE L'ATLANTIQUE NORD
BRUXELLES, Belgique
Le 18 février 1997
Ce document est également disponible au site Internet du Ministère : http://www.dfait-maeci.gc.ca
Merci, Monsieur le secrétaire général.
Je tiens tout d'abord à féliciter la secrétaire d'État, Mme Albright. Nous avons
suivi avec admiration son travail à l'ONU. Le fait de nous rencontrer ici à l'OTAN
avant son voyage en Russie nous paraît une étape positive. En notre qualité
d'autre allié nord-américain, nous aimerions insister sur le besoin de resserrer
les liens transatlantiques.
Cinq mois, ce n'est pas long pour relever les multiples défis qui se posent à
nous. Nous espérons que cette réunion nous insufflera l'énergie pour y parvenir.
Élargissement/Adaptation externe
Je dois dire, avant d'aller plus loin, que le Canada approuve sans réserve
l'élargissement de l'Alliance. Qui plus est, vu son importance pour l'OTAN comme
pour les pays candidats à l'adhésion, nous croyons que ce processus devrait être
mené aussi rapidement que possible.
Le Canada est en faveur d'une première vague de nouvelles adhésions de nature
générale : elle se conformerait au mandat de l'Alliance en matière de sécurité et
se fonderait sur les progrès réalisés individuellement par les candidats aux
chapitres de la démocratisation, de la transparence et du contrôle du pouvoir
civil sur le pouvoir militaire.
Au pays, nous avons évalué le cas de chaque candidat et désigné un ambassadeur
spécial pour mener des consultations nationales et internationales sur la question
de l'élargissement. Selon notre évaluation, il y aurait jusqu'à cinq pays qui
pourraient être admis dans la première vague.
Mais le Canada croit aussi que l'Alliance doit préciser clairement à Madrid que la
première vague de l'élargissement n'est pas la dernière.
Processus de sélection
Le processus utilisé pour choisir les nouveaux membres est très important.
Nous acceptons la proposition de la secrétaire d'État de décider si les
partenaires devraient être invités au Sommet de Madrid. Pour cela, nous devons
procéder aux trois étapes suivantes. Premièrement, il faut s'entendre sur un
processus de sélection pour recenser les pays invités à joindre l'Alliance, il
faut que les ministres des Affaires étrangères en discutent à Sintra et que les
résultats finals soient communiqués à tous les candidats en lice avant Madrid.
Nous ne voulons pas d'une cérémonie du type remise des oscars, où les candidats
retiennent leur souffle en attendant l'annonce des résultats. Deuxièmement,
l'Alliance doit examiner attentivement l'incidence de cette proposition sur les
relations entre l'OTAN et la Russie et convenir de la façon de gérer les contacts
politiques avec la Russie durant la période précédant le Sommet; et troisièmement,
nous devrons nous mettre d'accord sur le mode de gestion d'autres questions, comme
l'adaptation interne, qui auraient dû être discutées au Sommet par les seuls
dirigeants de l'OTAN.
Importance des négociations avec l'Ukraine
Il est essentiel d'établir une relation spéciale avec l'Ukraine; sa souveraineté
s'en trouvera nettement renforcée.
Nous appuyons sans réserve la conclusion d'un accord avec l'Ukraine avant Madrid.
Je suis très heureux, M. Solana, que vous rencontriez M. Udovenko le mois prochain
pour commencer à négocier l'établissement d'une relation spéciale entre l'OTAN et
l'Ukraine.
Nous accueillerons M. Udovenko au Canada dans quelques semaines et nous ne
manquerons pas de lui communiquer ce même message.
États baltes -- Conseil du partenariat atlantique
Je m'inquiète surtout du sort des États baltes qui ne feront probablement pas
partie de la première vague d'adhésions.
Nous avons fait du bon travail jusqu'ici avec nos partenaires quant à la création
du Conseil de partenariat atlantique; nous devons faire de cet organisme un
élément vital de l'architecture de sécurité européenne afin d'assurer les États
baltes et les autres pays qui ne compteront pas parmi les adhérents de la première
vague que l'OTAN se préoccupe de leur sécurité.
Je tiens à rappeler l'argument du ministre norvégien des Affaires étrangères
voulant que ces pays doivent participer au développement du Conseil du partenariat
atlantique.
L'OTAN doit ouvrir des bureaux dans les pays partenaires, là où les circonstances
et l'ampleur des activités le justifient; selon le principe de
l'autodifférentiation parmi les partenaires, les pays baltes pourraient être parmi
les premiers à saisir une offre de ce type.
À l'évidence, des initiatives bilatérales directes des divers pays membres
contribueraient à créer un climat de sécurité parmi les États baltes.
La Russie -- Le rôle de négociateur du Secrétaire général
La gestion à 16 des dossiers cruciaux de l'Alliance revêt une importance toute
particulière dans notre relation avec la Russie.
Nous devons renouveler aujourd'hui, pour les relations entre l'OTAN et la Russie,
notre engagement à l'égard d'un processus qui vise tous les membres de l'Alliance.
Nous devons éviter tout sentiment de division au sein de l'Alliance; nous devons
aussi indiquer clairement qu'aucun groupe de pays ne peut se faire le porte-parole
de l'Alliance.
Je tiens à exprimer au Secrétaire général notre gratitude pour la somme de travail
qu'il a accomplie jusqu'ici. Nous devons après cette réunion appuyer fortement son
rôle de négociateur et souligner notre engagement à l'égard de consultations et de
décisions approfondies.
Il faut réagir aux préoccupations de la Russie
Bien que l'élargissement ne puisse être tributaire des négociations avec la
Russie, nous devrions déployer tous les efforts pour arriver à une entente. Nous
devrions être prêts à examiner attentivement les propositions russes, de façon
pragmatique et avec souplesse, pour répondre aux préoccupations légitimes de la
Russie.
J'aimerais accueillir favorablement les deux propositions de la secrétaire d'État,
Mme Albright, concernant la création d'un conseil mixte et d'une brigade mixte,
propositions qu'il serait bon d'examiner. Nous attendons avec intérêt de connaître
l'issue de ses entretiens avec les Russes.
Mais nous devons également faire savoir à la Russie que c'est une occasion
historique qui lui est offerte de se rapprocher de l'Alliance et de former une
nouvelle relation avec tous ses voisins européens et nord-américains.
Une relation plus étroite avec la Russie est une voie à double sens qui profite
aussi bien à l'OTAN qu'à la Russie.
Adaptation intérieure -- réforme
Nous devons aller de l'avant avec les réformes intérieures avant Madrid. Nous
devons le faire pour faire savoir sans équivoque à la Russie que nous sommes en
train de réduire la taille de la structure de commandement unifié et son budget.
Nous devons le faire pour qu'il soit clair dans l'esprit des nouveaux membres que
nous envisagerons d'établir un nouveau quartier général de commandement sur leur
territoire seulement si des motifs impérieux le justifient. Et nous devons le
faire pour préserver et démontrer la cohésion de l'Alliance.
Nous devons également prouver à nos législatures respectives que ces changements
permettront de réaliser des économies.
Criminels de guerre
Notre travail ensemble en Bosnie constitue le meilleur argument en faveur d'une
Alliance renouvelée et revitalisée. Pour qu'il y ait une réconciliation véritable
et durable, nous ne devons ménager aucun effort pour arrêter les personnes
inculpées de crimes de guerre. Le Canada a fait circuler un document dans lequel
sont formulées un certain nombre de suggestions pratiques, y compris quelques
propositions concernant l'appui que peut fournir la SFOR force de stabilisation.
Nous sommes disposés à examiner les propositions relatives à une force distincte.
Il est important que nous démontrions que justice peut être rendue.
Conclusion
En revoyant les leçons de l'histoire, j'aimerais rappeler les contributions de
l'ancien premier ministre canadien, M. Lester Pearson, qui, il y a 50 ans,
demandait qu'on incorpore l'article 2 au Traité de Washington. L'élaboration d'une
identité plus large pour l'OTAN se reflète dans nos discussions sur
l'élargissement et dans les relations améliorées que nous sommes en train de
forger avec la Russie et l'Ukraine, ainsi qu'avec les pays baltes.
Merci.