M. KILGOUR - ALLOCUTION AU CONSEIL CANADIEN POUR LES AMÉRIQUES -CALGARY (ALBERTA)
2001/7 SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS
NOTES POUR UNE ALLOCUTION
DE
L'HONORABLE DAVID KILGOUR,
SECRÉTAIRE D'ÉTAT (AMÉRIQUE LATINE ET AFRIQUE),
AU CONSEIL CANADIEN POUR LES AMÉRIQUES
CALGARY (Alberta)
Le 7 mars 2001
(9 h 30 HNE)
Je vous remercie de m'avoir invité à partager avec vous quelques réflexions sur la place qu'occupe le
Canada dans un monde qui évolue à un rythme effréné.
À l'ère de l'information, les Canadiens évoluent dans un nouveau monde aux possibilités inégalées. Nous
n'avons plus aujourd'hui à composer avec les contraintes imposées par les frontières, ou par les distances.
Les progrès technologiques ont aidé à nouer des liens plus étroits entre les nations, et nulle part ce constat
est-il plus évident que dans nos relations avec nos voisins de l'hémisphère.
Le Canada est particulièrement bien positionné pour réussir dans cette communauté hémisphérique
émergente que le premier ministre appelle una gran familia, une grande famille élargie. Les Canadiens
sont tenus en haute estime partout dans le monde pour leur engagement indéfectible en faveur de la
démocratie, de l'équité, de l'état de droit et du respect des droits de la personne. Nous avons toujours tendu
la main aux nations dans le besoin, cherché à aider ces dernières à réaliser leurs aspirations sociales et
économiques, et contribué à bâtir de meilleures institutions démocratiques.
Le Sommet des Amériques de 2001
De l'avis de certains, le Sommet des Amériques qui se tiendra le mois prochain à Québec sera la plus
importante rencontre jamais tenue en sol canadien. Ce sera certes le forum du niveau le plus élevé que
nous ayons eu où discuter des questions cruciales touchant l'hémisphère, prendre des décisions à leur sujet
et convenir de mesures concrètes. Y sont conviés les 34 chefs de gouvernement démocratiquement élus
d'Amérique du Nord, d'Amérique centrale et d'Amérique du Sud, ainsi que des Antilles. L'objectif?
Échanger des idées tout particulièrement en ce qui concerne le renforcement de la coopération
hémisphérique au service de la démocratie et de la prospérité, et la réalisation du potentiel humain.
Le Canada et les Amériques vivent un moment privilégié. L'essor de la démocratie et l'expansion du
libre-échange ont contribué de façon vitale à transformer la vie de bien des gens. Le Canada s'est déjà
affirmé comme facilitateur de cette transformation et il continue de renforcer ses relations avec ses
partenaires de l'hémisphère. Nos avenirs sont imbriqués sur les plans géographique, économique et
politique. Ensemble, nous devons relever le défi de bâtir un avenir plus prospère, plus sûr et libre pour
tous les habitants des Amériques.
Comme nous avançons vers le Sommet de Québec en avril, le rôle du Canada dans les Amériques
s'appuie sur une décennie d'engagement et de succès :
• En 1990, nous avons adhéré à l'Organisation des États américains;
• Nous célébrerons bientôt le septième anniversaire de la signature de l'Accord de libre-échange
nord-américain, l'ALENA;
• En 1997, nous avons conclu avec le Chili un accord de libre-échange;
• En 1998, le premier ministre a dirigé deux missions commerciales d'Équipe Canada en Amérique latine
-- la plus grande entreprise du genre jamais entreprise par le gouvernement du Canada;
• À l'été de 1999, le Canada a accueilli les Jeux panaméricains;
• Nous avons terminé notre mandat à la présidence de la première phase de la Zone de libre-échange des
Amériques, la ZLEA, en accueillant la réunion des ministres du Commerce des Amériques à l'automne de
1999;
• En juin dernier, le Canada a été l'hôte de l'Assemblée générale de l'Organisation des États américains à
Windsor.
La prospérité est porteuse
Pourquoi le Sommet des Amériques de 2001 est-il si important? Et pourquoi investir tant de temps et
d'énergie pour former ce partenariat hémisphérique? Comme deuxième économie en importance dans
l'hémisphère, nous avons tout intérêt à multiplier nos occasions de commerce et d'investissement à la
grandeur des Amériques. Un bon tiers des emplois au Canada sont liés au commerce international. Les 34
économies d'Amérique du Nord, d'Amérique centrale, d'Amérique du Sud et des Antilles comptent 800
millions d'habitants et elles génèrent plus du tiers des biens et des services de la planète. Au Sommet, les
leaders chercheront à parvenir à un accord sur la création de la plus grande zone de libre-échange au
monde -- avec un produit intérieur brut ou PIB combiné de 12 billions de dollars américains. Près de la
moitié de ce que produit le Canada est destiné à l'étranger, et 92 p. 100 de cette production est exporté à
nos partenaires, qui prendront place à la table du Sommet à Québec le mois prochain. Fondamentalement,
les autres pays des Amériques ne sont pas que nos voisins au Sud : ils sont aussi nos plus importants
clients. Les relations que nous entretenons avec eux ont un impact direct sur notre sécurité économique et
sur le niveau de vie de chaque homme, chaque femme et chaque enfant au Canada.
Notre capacité collective de créer la prospérité à la grandeur de l'hémisphère et notre recherche de façons
de distribuer plus équitablement la richesse dans les Amériques sont à la base de notre engagement envers
la ZLEA. Mais toute entente en ce sens ne saurait s'appuyer exclusivement sur des statistiques
commerciales et des prévisions économiques. La ZLEA vise à mettre en place un cadre de règles et de
règlements clairs et équitables que tous suivront.
Le commerce concerne d'abord et avant tout les gens -- des gens récompensés pour leurs efforts, qui
trouvent des débouchés pour leurs produits et qui ont une occasion réelle de bâtir un meilleur avenir pour
eux-mêmes et pour leurs familles. En deux mots, la libéralisation du commerce conduit à des gains
importants sur les plans social et économique. Elle montre notre détermination à ouvrir toutes grandes les
portes sociales et économiques trop longtemps fermées à un trop grand nombre. Elle réduit la pauvreté et
améliore la qualité de vie des gens. L'objectif ultime est l'inclusion -- le développement d'une
communauté hémisphérique où tous les résidants ont l'occasion et les moyens de prospérer. Libre et
équitable, le commerce ouvre la voie et nous aide à protéger les droits des employés, à préserver
l'environnement, à accroître la responsabilité sociale des entreprises et à relever les normes économiques,
sociales et démocratiques à la grandeur des Amériques.
Il y a quelques semaines à peine, M. Tony Blair, le premier ministre travailliste du Royaume-Uni, disait
aux parlementaires canadiens qu'il fallait embrasser sans réserve le libre-échange en raison de ses
avantages à la fois pour les pays dits « en développement » et pour les nations industrialisées. Il vous
intéressera peut-être de savoir qu'à la demande unanime de leurs gouvernements le Canada négocie
actuellement des accords de libre-échange avec la plupart des pays d'Amérique centrale et des Antilles
(parfois collectivement, parfois individuellement).
Nous avons le choix. Nous pouvons soit nous positionner sur la crête de cette grande vague porteuse du
changement, soit nous laisser ballotter dans son sillage, impuissants. Cela ne veut pas dire que tous ces
problèmes se régleront sur-le-champ, ou encore que les progrès ne se feront pas sans secousses. Nous
n'avons pas à craindre la mondialisation, mais nous ne devons pas non plus nous laisser aveugler par ses
promesses. Nous avons abattu beaucoup de travail en préparation du Sommet, et il en restera encore plus
à faire une fois la rencontre achevée. Mais cela signifie que, durant trois jours en avril à Québec, le
Sommet des Amériques mobilisera toute l'attention de nos dirigeants.
Renforcer la démocratie
Nous croyons que les initiatives du gouvernement ne sauraient obtenir l'acceptation et la légitimation du
public sans ouverture et transparence. Les Canadiens ne s'attendent à rien de moins. Le gouvernement du
Canada a rendu public son projet de ZLEA. Qui plus est, les résultats des négociations feront l'objet d'un
examen parlementaire et d'un débat public. La négociation est un processus intrinsèquement complexe qui
appelle une certaine marge de manoeuvre pour explorer une gamme d'options. Sans pour autant
compromettre le processus, nous avons choisi de partager notre position de négociation avec les
Canadiens et nous encourageons les autres gouvernements à faire de même.
Dans le cadre de nos préparatifs pour le Sommet, nous avons mis à contribution des organisations de la
société civile, tant au Canada qu'ailleurs dans l'hémisphère, et nous avons favorisé les consultations avec
des groupes résolus à bâtir l'avenir avec nous. Au fil des ans, nous n'avons pas cessé de prôner un rôle
plus grand, au sein de l'Organisation des États américains [OEA], pour les membres de la société civile.
Le leadership dont a fait preuve le Canada dans l'élaboration de lignes directrices sur la participation de la
société civile a fini par conduire à la création d'un comité de l'OEA ayant pour mandat de rechercher une
plus grande implication de la société civile. Nous entendons continuer à favoriser ce genre de dialogue
dans l'ensemble des Amériques.
La démocratie n'est pas un concept abstrait, pas plus qu'elle n'est une destination finale. C'est un périple
que nous avons entrepris ensemble -- un périple qui cimente notre engagement collectif à
continuellement améliorer la vie de nos concitoyens. La démocratie, les droits de la personne et la
primauté du droit sont des valeurs qui sont au coeur de ce que le Canada espère réaliser au Sommet. Les
Canadiens affichent un bon bilan à cet égard. Nous sommes bien positionnés pour en aider d'autres à
établir des cadres institutionnels et des institutions des droits de la personne efficaces. Ces initiatives
peuvent grandement améliorer l'accessibilité, la transparence et la responsabilisation des démocraties dans
la région.
Réaliser le potentiel humain
Les progrès que peuvent accomplir les Amériques sont fonction de leur ressource la plus précieuse -- les
gens. Quand nous parlons de « réaliser le potentiel humain », nous parlons de la nécessité de fournir aux
hommes, aux femmes et aux enfants les outils dont ils ont besoin pour faire entendre leur voix sur les
plans social, économique et politique. À terme, des priorités comme la santé, l'éducation et l'acquisition de
compétences constituent des investissements vitaux. Dans cette optique, il faut cependant se demander qui
doit être le maître d'oeuvre? Appartient-il aux gouvernements d'intervenir activement pour amener les
milieux d'affaires à être des citoyens responsables? Ou cela incombe-t-il aux milieux d'affaires? Nous
sommes d'avis que les uns et les autres doivent collaborer à l'enracinement au sein des entreprises d'une
culture de responsabilité sociale partout dans les Amériques -- une culture qui reconnaît qu'une
participation active et responsable à la vie communautaire est tout aussi capitale pour le bilan 2001 que ne
le sont la satisfaction des clients, l'efficacité opérationnelle et le contrôle de la qualité. En d'autres mots,
les entreprises doivent s'intéresser activement à la vie des communautés dans lesquelles elles
fonctionnent, croissent et prospèrent, non pas par altruisme mais parce qu'il est rentable de le faire.
Connectivité signifie occasion
Dans un monde marqué par l'innovation technologique et la mondialisation du commerce, les rapports
entre nations qui partagent des intérêts communs prennent de plus en plus d'importance. Cela est tout
particulièrement vrai des Amériques. Au cours des 10 dernières années, les relations économiques et
commerciales du Canada se sont développées plus rapidement au sein de l'hémisphère que dans toute
autre région. Durant cette période, notre commerce en Amérique du Sud à lui seul a augmenté de plus de
200 p. 100 (les échanges totalisaient 7,3 milliards de dollars en 1990 et 20,6 milliards en 2000),
comparativement à 60 p. 100 en Europe et à 66 p. 100 en Asie. Le Mexique est le deuxième marché
d'exportation du Canada dans les Amériques (après les États-Unis et devant le Brésil). Le Brésil est aussi
le plus important partenaire commercial du Canada en Amérique du Sud. Pour ce qui est des
investissements étrangers directs, les pays sud-américains, notamment le Chili, le Brésil et l'Argentine,
sont devenus des destinations de plus en plus importantes.
Des entreprises canadiennes de tous les secteurs industriels exploitent les occasions qui s'offrent partout
en Amérique latine et des entreprises de l'Ouest canadien continuent de jouer un rôle central dans
l'expansion de ces relations. Les exportations clés de l'Alberta vers la région comprennent le blé, le bétail
et la viande de boeuf, le soufre, le colza, les appareils électriques, le charbon et les pièces d'aéronefs. En
2000, l'Alberta s'est classée au troisième rang parmi les provinces au chapitre des exportations de biens et
de services vers l'Amérique latine et les Antilles, avec des exportations dépassant tout juste un milliard de
dollars, soit une augmentation de 39 p. 100 comparativement aux exportations de 726 millions de dollars
enregistrées en 1999. En 2000, les échanges entre l'Alberta et la région se sont élevés à 1,5 milliard de
dollars.
Les exportations de la province ne se limitent pas aux secteurs que j'ai mentionnés. De plus en plus, des
entreprises albertaines trouvent des occasions intéressantes dans les secteurs de l'exploration et des
services pétroliers et gaziers, du bétail et de la génétique, des engrais, des herbicides et des pesticides, du
matériel et des services de télécommunications, des services de transport en commun urbains et du
matériel et des services environnementaux. Un certain nombre de sociétés albertaines ont connu du succès
en Amérique latine. Par exemple, Canadian Hunter Exploration Ltd. est très active dans le domaine de
l'exploration pétrolière dans le bassin de Neuquen en Argentine. Mentionnons aussi entre autres l'Alberta
Energy Company qui fait de l'exploration et de la production au Pérou, en Équateur, en Colombie et au
Brésil, Nexen qui a des concessions en Colombie et Precision Drilling et Propak Systems qui sont actives
partout dans la région.
Il y a lieu de remarquer qu'en raison de l'amélioration sensible de l'accès au marché résultant de l'Accord
de libre-échange conclu en 1997 entre le Canada et le Chili, les échanges entre les deux pays ont connu
une progression considérable, passant de 357 millions de dollars en 1992 à plus d'un milliard de dollars en
2000. Les exportations canadiennes de blé, de pâtes et papier, de machinerie, de matériel d'exploitation
minière et de télécommunications, de pièces automobiles et de produits de fer et d'acier se sont accrues de
plusieurs centaines de pour cent. Les technologies de l'information, les télécommunications, les produits
de construction et du bâtiment, le matériel d'exploitation minière, le matériel et les services
environnementaux, les infrastructures de transport et les matières plastiques continuent d'être des secteurs
très prometteurs.
La technologie de l'information et des communications transforme radicalement le monde dans lequel
nous vivons et son expansion aux quatre coins de la planète modifie profondément nos vies. Notre objectif
est d'aider à créer les conditions d'un meilleur accès aux nouvelles technologies qui établiront de
nouvelles interconnexions partout dans l'hémisphère. Le véritable objet de la connectivité est de nous
rapprocher ou d'éliminer les distances. Nous sommes les témoins d'une révolution du réseautage -- une
transition d'une économie industrielle à une économie basée sur le savoir. En réduisant les barrières et les
distances, la connectivité crée de nouvelles occasions. Au bout du compte, une meilleure interconnexion
nous donnera la possibilité de faire des choix qui ajouteront à la qualité de notre vie.
Conclusion
Il y a quelques années, M. Pat McGeer, un ex-député de l'assemblée législative de la
Colombie-Britannique, a déclaré que « dans le passé, il s'en est toujours trouvé pour ériger des murailles
afin de sécuriser et de protéger ce qu'ils ont acquis. Ces curiosités du passé parsèment le paysage
européen. Mais l'histoire n'a jamais été faite par ceux qui ont érigé des murailles derrière lesquelles ils ont
cherché à se réfugier. Elle a plutôt été faite par des aventuriers qui, au prix de leur sécurité, ont exploré et
ouvert de nouveaux territoires. Le Canada a été fondé et développé par de tels aventuriers. » Il avait
raison.
Il nous faut ici adhérer à un concept -- un concept qui déborde les frontières du Canada, qui embrasse un
monde émergent où aucun de nous ne peut se permettre d'être isolé. Un concept qui exige de s'engager à
aller de l'avant ensemble et à préparer la voie à une nouvelle ère de coopération et de prospérité sociales et
économiques.
J'invite chacun de vous à faire entendre sa voix à l'approche du Sommet des Amériques de 2001. Les
décisions prises par les leaders d'aujourd'hui auront un impact réel et durable sur notre avenir mais aussi
sur celui de nos enfants. Je suis encouragé par ce que je vois -- des Canadiens qui, dans chaque région,
sont prêts à profiter pleinement des occasions qu'offre ce nouvel hémisphère interconnecté.
Je vous remercie.