M. MANLEY - ALLOCUTION AUX CONSULTATIONS 2001 DES ONGSUR LA CONSOLIDATION DE LA PAIX - « ÉVOLUTION DU PLAN D'ACTION POUR LA SÉCURITÉ HUMAINE : L'ENGAGEMENT DU CANADA » - OTTAWA (ONTARIO)
SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS
NOTES POUR UNE ALLOCUTION
DE
L'HONORABLE JOHN MANLEY,
MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,
AUX CONSULTATIONS 2001 DES ONG
SUR LA CONSOLIDATION DE LA PAIX
« ÉVOLUTION DU PLAN D'ACTION POUR LA SÉCURITÉ HUMAINE : L'ENGAGEMENT DU
CANADA »
OTTAWA (Ontario)
Le 4 mai 2001
Je me réjouis de pouvoir me joindre à vous à la session de clôture de la cinquième ronde de Consultations
annuelles sur la consolidation de la paix. Je tiens à féliciter les organisateurs du ministère des Affaires
étrangères et du Commerce international et du Comité coordonnateur canadien pour la consolidation de la paix
d'avoir travaillé inlassablement à gérer un processus de consultation fructueux pour tous les participants.
Je sais qu'au cours de ces deux derniers jours, vous avez étudié un vaste éventail de questions relatives à la
consolidation de la paix. Et je suis particulièrement intéressé à connaître le résultat de l'atelier sur le Moyen-Orient où je me rends sous peu pour assister à la réunion ministérielle du Réseau de la sécurité humaine.
Aujourd'hui, j'aimerais vous exposer mes idées sur ce que sont, d'après moi, les éléments déterminants pour la
sécurité humaine et la consolidation de la paix, thèmes étroitement associés à mon prédécesseur et qui, à mon
avis, ne peuvent être séparés du rôle du Canada dans les affaires mondiales. Ensuite, j'aimerais avoir vos
commentaires et vos questions.
Une politique étrangère axée sur les personnes
Le Canada défend, depuis plusieurs années, une politique étrangère axée sur les personnes, fondée sur les
trois piliers que sont le développement humain, les droits de la personne et la sécurité humaine.
Si nous examinons la politique de sécurité du point de vue des personnes, nous ne voyons pas que des
problèmes de sécurité individuelle, mais aussi de nouveaux remèdes, notamment réforme du secteur de la
sécurité, compréhension des liens entre le crime et la guerre, partenariats avec les ONG et autres acteurs non
étatiques.
La politique canadienne de sécurité humaine est une synthèse des priorités de longue date de notre société
ainsi qu'une réponse cohérente à des tendances internationales persistantes et incontournables, comme la
mondialisation.
La sécurité humaine implique, à tout le moins, que les besoins élémentaires sont satisfaits. Mais nous devons
aussi reconnaître qu'un développement économique soutenu, les droits de la personne, les libertés
fondamentales, la primauté du droit, la saine gestion publique, le développement durable et l'équité sociale
sont aussi importants pour la paix mondiale que le contrôle des armes et le désarmement.
Nous devons aussi comprendre les liens qui existent entre la dégradation environnementale, la croissance
démographique, les conflits ethniques et les migrations. Enfin, nous devons conclure qu'il n'y aura pas de
stabilité durable tant que la sécurité humaine ne sera pas garantie et les gens protégés contre les menaces
violentes.
Répondre aux tendances actuelles
Le plan d'action pour la sécurité humaine répond directement à deux tendances générales qui, sans être
totalement nouvelles, sont devenues plus évidentes ces 10 dernières années.
D'abord, la nature changeante des conflits armés est un des principaux facteurs qui déterminent l'approche de
notre gouvernement en ce qui a trait aux questions liées à la paix et à la sécurité.
Le nombre croissant de guerres qui éclatent au sein des pays plutôt qu'entre eux, l'augmentation du nombre de
groupes de combat irréguliers et mal organisés, le nombre croissant de victimes parmi les civils -- tous ces
changements existent depuis plusieurs décennies mais sont devenus plus visibles au cours de la dernière.
Si la nature de la guerre a changé, la nature de la paix doit, elle aussi, changer.
Notre action des dernières années en faveur de la consolidation de la paix, d'une politique de sanctions et de la
protection des civils dans les conflits armés est le prolongement logique de notre rôle largement reconnu dans
les nouvelles opérations de paix des Nations Unies et dans leur conception.
La mondialisation peut amener une plus grande prospérité et d'autres avantages, pour tous, mais elle apporte
aussi de nouveaux défis, dont nous devons prendre conscience et que nous devons relever, notamment le
crime organisé transnational, le trafic de personnes, le commerce illicite d'armes et de stupéfiants, l'écart de
plus en plus grand entre riches et pauvres et le fossé numérique.
Une des leçons du Sommet des Amériques qui a eu lieu à Québec est que nous devons tenir compte
davantage de la connectivité et de la manière dont tous ensemble -- gouvernement, société civile et secteur
privé -- nous pouvons faire en sorte que le processus de mondialisation profite réellement à tous et surtout aux
populations marginalisées et vulnérables.
Cela signifie que nous devons -- je veux dire tous ceux qui sont réunis dans cette salle aujourd'hui -- nous
engager encore plus dans ce monde interdépendant afin d'assurer, à tous, la sécurité et la prospérité.
Tenir compte davantage des dimensions économiques de la sécurité humaine
Un travail beaucoup plus important doit être fait sur l'action réciproque de la politique, de l'économie et des
conflits violents. Pour la plupart, nous tous ici présents, sommes très conscients des liens évidents qui existent
entre sécurité, stabilité et prévisibilité.
Mais ces liens sont encore plus directs que bien des gens ici ne l'imaginent. Un exemple de ce genre de liens
serait la sécurité économique d'un travailleur de l'industrie canadienne du diamant qui vit à l'extérieur de
Yellowknife et la sécurité humaine d'une fille déplacée des régions productrices de diamants de la Sierra
Leone.
Il est de plus en plus clair que ce sont les intérêts économiques privés, comme le commerce illicite des
diamants, et non les intérêts politiques collectifs, qui deviennent les principales causes des conflits violents.
Nous devons donc comprendre les forces économiques qui sont à l'oeuvre derrière ces dynamiques et y réagir
efficacement, et, dans bien des cas, trouver de nouveaux outils économiques à cette fin.
Voici d'autres exemples :
• les ressources naturelles et les drogues illicites comme causes des conflits actuels;
• le passage à une reconstruction à très grande échelle après un conflit, comme dans les Balkans;
• la recrudescence des activités criminelles en période de guerre dont les effets persistent longtemps en temps
de paix;
• la responsabilité sociale des entreprises, comme élément de l'appui à des industries saines autant que
l'obligation morale.
Conclusion -- Défis à relever et orientations futures
L'influence internationale et le succès du Canada à l'étranger reposent sur sa capacité d'exploiter les idées
créatives qui germent dans tous les secteurs de la société canadienne, par le biais d'un processus transparent
de politique étrangère.
Nous devons continuer à apporter notre contribution au monde dans les domaines suivants :
• Élaborer de nouvelles normes pour la communauté internationale afin de faire face aux nouvelles réalités en
matière de sécurité et de réagir d'une manière efficace et raisonnée. Le concept de sécurité humaine est
révolutionnaire dans ses implications, dans la mesure où il fait de la sécurité des personnes une partie
intégrante et indispensable de la paix et de la sécurité mondiales.
• Renforcer notre capacité de protéger les personnes et réformer nos institutions mondiales, régionales et
nationales : nous devons investir dans un système onusien solide, qui a la volonté politique et les ressources
nécessaires pour agir, exploiter pleinement le potentiel des organisations régionales de sécurité et bâtir des
institutions nationales durables et démocratiques.
• Assurer la coordination et la cohérence des politiques entre les organisations multilatérales, les
gouvernements, le secteur privé et les groupes de la société civile. Les politiques de sécurité doivent s'intégrer
étroitement aux stratégies de promotion des droits de la personne et de développement humain afin de
produire les synergies nécessaires aux politiques et à l'action, notamment l'action préventive.
• Investir dans la connaissance afin de comprendre les liens entre les différentes menaces à la sécurité des
personnes, élaborer des solutions efficaces, globales et novatrices. Le plan d'action pour la sécurité humaine
fait appel à un fort coefficient de savoir. Pour formuler un nouveau cadre théorique, concevoir des politiques
saines et cerner les nouvelles menaces à la sécurité des personnes, il faut investir dans la recherche sur les
politiques et dans leur élaboration.
Voici quelques commentaires sur le travail entrepris par le ministère des Affaires étrangères et du Commerce
international :
Ce printemps, nous avons amorcé un processus de consultation dans le but de définir les priorités par région
en matière de sécurité humaine, de nous assurer de mettre en oeuvre un plan d'action qui tient compte des
intérêts bilatéraux et régionaux du Canada et de développer les liens établis par la société civile canadienne
avec certaines régions du monde.
L'hiver dernier, nous avons lancé un nouveau programme de bourses de recherche sur la sécurité humaine à
l'intention des membres de la société civile et des universitaires. Le prochain concours, qui remettra cinq
bourses, aura lieu cet été.
Nous continuons aussi à mettre l'accent sur la jeunesse, en agissant non seulement pour la protection des
populations vulnérables comme les enfants et les jeunes à l'étranger, mais aussi en faisant en sorte que les
jeunes canadiens participent davantage au plan d'action sur la sécurité humaine.
Dans cette optique, nous nous servons de divers mécanismes, notamment le Programme de stages
internationaux. Chaque année, quelque 175 stages contribuent au plan de la sécurité humaine. Le projet de
cette année comprend les placements de CANADEM [Banque canadienne de ressources pour la démocratie et
les droits de la personne] à l'OSCE [Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe] dans les
Balkans, les stages du Project Ploughshares, axés sur les questions de désarmement, et ceux de l'Institute for
Media, Policy Analysis and Civil Society [IMPACS], axés sur la liberté des médias et le développement
démocratique.
Pour terminer, j'aimerais dire quelques mots sur la réunion du Réseau de la sécurité humaine à laquelle je vais
bientôt participer, en Jordanie, et sur le travail que nous ferons dans ce réseau.
Ce sera la troisième rencontre ministérielle du groupe. La réflexion actuelle porte sur la manière dont nous
pouvons renforcer ce partenariat de 13 pays qui, bien qu'animés des mêmes sentiments, sont très différents, et
sur la manière dont cette approche centrée sur les personnes peut influer sur notre action aux Nations Unies et
dans d'autres organisations.
Plus concrètement, j'emporte, en Jordanie, deux déclarations : l'une sur les armes légères et l'autre sur les
enfants. Nous espérons que le Réseau les adoptera la semaine prochaine et acceptera qu'elles soient
présentées à la Conférence des Nations Unies sur le commerce illicite des armes légères qui aura lieu en juillet
ainsi qu'à la Session spéciale sur l'enfant de l'Assemblée générale des Nations Unies qui se tiendra en
septembre.
Ces deux déclarations doivent livrer un message puissant aux Nations Unies et affirmer une fois de plus notre
volonté que soit prise en compte la dimension de la sécurité humaine dans l'analyse des enjeux mondiaux.
Je vous remercie.