M. KILGOUR - ALLOCUTION DEVANT LE CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL DES NATIONS UNIES - GENÈVE, SUISSE
SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS
NOTES POUR UNE ALLOCUTION
DE
L'HONORABLE DAVID KILGOUR,
SECRÉTAIRE D'ÉTAT (AMÉRIQUE LATINE ET AFRIQUE),
AU CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL DES NATIONS UNIES
GENÈVE, Suisse
Le 17 juillet 2001
Tout d'abord, je souhaite féliciter le secrétaire général pour son rapport sur la contribution des Nations Unies
aux efforts de l'Afrique pour parvenir au développement durable. Hier, il a été très clair quant à ce que le
système des Nations Unies peut faire pour appuyer l'Afrique. Si notre destin collectif est lié à celui de l'Afrique,
alors, nous avons la responsabilité de voir à ce que ce système fonctionne efficacement et de manière
cohérente.
Le succès des Nations Unies à cet égard reste lié aux efforts des peuples africains eux-mêmes. C'est pourquoi
nous saluons l'initiative des leaders africains visant à créer un cadre de développement durable pour l'Afrique
qui soit vraiment le leur. Plusieurs amis de l'Afrique apprécient leur engagement à promouvoir la paix, la
démocratie, le respect des droits de la personne, et à mettre en place des systèmes de gouvernance
transparents et imputables, fondés sur le droit, et créant les conditions essentielles pour un développement
durable. La volonté des leaders africains de mettre en place ces conditions est la bienvenue.
Le Canada appuie depuis toujours le développement durable et la réduction de la pauvreté en Afrique. La
promotion des intérêts de l'Afrique dans les institutions comme la Francophonie, le Commonwealth et les
Nations Unies demeure une priorité pour les Canadiens. C'est donc en toute confiance et avec fierté que je
peux affirmer que le Canada demeure un partenaire engagé de l'Afrique à l'intérieur du système multilatéral.
Le Canada a été particulièrement actif dans trois domaines identifiés comme des priorités dans le rapport du
secrétaire général : la prévention des conflits, l'allégement de la dette et la lutte contre le VIH/sida.
En ce qui concerne la prévention des conflits, nos ressources collectives sont limitées; par conséquent, nous
sommes obligés de bien établir nos priorités. Il est en effet plus logique de prévenir un conflit que de
reconstruire par la suite. C'est pourquoi la coopération canadienne s'emploie à lutter contre les causes
potentielles de conflits, que sont la pauvreté, l'injustice, le non-respect des droits de la personne et des normes
démocratiques, la dégradation de l'environnement et la criminalité.
La nécessité d'une action intégrée est un des thèmes centraux du rapport Brahimi. Ce document examine avec
honnêteté les échecs de certaines missions des Nations Unies et offre un modèle pour rétablir et renforcer la
capacité des Nations Unies dans le domaine du maintien de la paix.
Le conflit violent qui fait rage en Sierra Leone, les brutalités dont sa population est victime et la destruction des
infrastructures de ce pays ont profondément bouleversé les Canadiens. Avec d'autres nations, nous nous
efforçons de trouver une solution à ce conflit et d'instaurer une paix durable dans cette région. Le Canada
fournit également un soutien militaire et civil à la mission des Nations Unies en Sierra Leone; il a débloqué près
de 30 millions de dollars pour le désarmement, la démobilisation et la réintégration dans la société des ex-combattants. En outre, des agents canadiens assurent une formation aux forces armées et policières de la
Sierra Leone. De plus, nous contribuons activement à la mise sur pied du tribunal spécial pour la Sierra Leone,
qui, nous l'espérons, jugera les principaux responsables des crimes contre l'humanité entraînés par cette
guerre.
Des progrès ont été réalisés, mais l'avenir reste incertain quant à l'établissement d'une paix durable en
Sierra Leone. Le conflit continue de déstabiliser l'ensemble de la sous-région de l'Afrique de l'Ouest.
Les Canadiens ont appuyé les efforts visant à instaurer une paix durable entre l'Éthiopie et l'Érythrée. Nous
avons été heureux de fournir une compagnie d'infanterie mécanisée de près de 500 hommes qui fera partie
pour six mois d'un bataillon de la MINUEE [mission des Nations Unies en Éthiopie-Érythrée] dirigé par la
Hollande. J'ai eu la chance de visiter nos troupes le mois dernier et j'ai été touché par le respect manifesté par
les gens, des deux côtés de la frontière, à l'égard des forces des Nations Unies.
Bien des choses ont été réalisées, mais la présence de la MINUEE n'est que temporaire, et il reste beaucoup à
faire. L'Éthiopie et l'Érythrée doivent commencer sérieusement à rétablir entre elles des relations politiques et
économiques mutuellement profitables. J'ai rencontré personnellement des représentants des deux parties et
je les ai encouragés à poursuivre leurs négociations de paix. Une paix durable permettrait à ces deux pays de
jouer à nouveau le rôle constructif que chacun peut assumer dans la région.
Le Canada croit que le niveau d'endettement actuel des pays les plus pauvres du monde est déraisonnable en
ce sens qu'il représente un fardeau pour ces nations déjà éprouvées par une misère évidente.
Cela dit, rien ne sert d'être émotif à l'égard de l'allégement de la dette. Après tout, comme le disait
Horst Koehler dans son allocution d'hier, l'allégement de la dette n'est pas une panacée. Le crédit est un
élément crucial, et les pays les moins avancés doivent donner l'assurance qu'ils rembourseront les sommes
qu'ils empruntent.
Les pays pauvres très endettés doivent au Canada environ 1,1 milliard de dollars. En décembre 2001, notre
gouvernement a annoncé un moratoire sur le remboursement de la dette des pays qui ont fait des progrès au
chapitre de la conduite des affaires publiques et de la réduction de la pauvreté. Le moratoire sur la dette vise à
rendre disponibles des ressources -- ressources que nous souhaitons voir affectées à des aspects sociaux
prioritaires comme les soins de santé, l'éducation et la réduction de la pauvreté. Nous exhortons les autres
pays créanciers à emboîter le pas et à examiner immédiatement la question sous l'angle pratique.
Le VIH/sida constitue l'un des principaux défis que doit relever le continent africain. Les statistiques à ce sujet
ont ébranlé le monde entier. Cependant, derrière les chiffres, se cachent un drame encore plus grand et une
réalité encore plus terrible : la souffrance inimaginable et les pertes vécues par des millions de personnes,
leurs familles et leurs amis à l'échelle de tout le continent. Il faut de toute urgence prendre des mesures
globales pour mettre un terme à cette tragédie humaine.
Le Canada s'est réjoui de la tenue de la séance extraordinaire des Nations Unies consacrée au VIH/sida, le
mois dernier. Une déclaration visant un engagement ferme a été élaborée, et nous espérons qu'elle sera mise
en oeuvre par toutes les nations. Je félicite les chefs de gouvernement africains, qui se sont attaqués de front à
cette pandémie. Tous ont pris des engagements fermes en ce sens au Sommet d'Abuja. Nous espérons que
l'intensification, au cours des derniers mois, du mouvement mondial de lutte contre le phénomène nous
permettra de renverser la vapeur et de gagner cette bataille.
Le Canada a récemment annoncé la mise en oeuvre de nouveaux programmes internationaux de lutte contre
le VIH/sida dont les budgets sont évalués à 50 millions de dollars. Nous quadruplerons cette somme au cours
des cinq prochaines années. À l'occasion du prochain sommet du G-8, nous annoncerons notre contribution au
fonds mondial pour la santé et la lutte contre le VIH/sida. Nous avons collaboré étroitement avec d'autres pays
et avec le système de l'ONU afin de mettre sur pied une structure pour gérer ce fonds; nous croyons qu'elle
sera en place en janvier 2002.
Le Canada entre dans le XXIe siècle pleinement conscient de la vitesse à laquelle des changements s'opèrent,
ceux-ci découlant principalement de la mondialisation, mais aussi de la nécessité de s'attaquer aux problèmes
de la pauvreté et des inégalités qui existent dans presque toutes les régions du globe. Les choses ont été pour
le mieux dans la plupart des cas, et la mondialisation a contribué à accroître les possibilités de milliers de
personnes. Certains indicateurs fiables du bien-être humain (espérance de vie, santé des enfants et éducation)
montrent une nette amélioration, et nous avons des raisons de croire que cette tendance se maintiendra durant
la prochaine décennie. Les progrès accomplis sont en majeure partie attribuables aux efforts déployés par les
habitants des pays en développement.
D'autre part, les avantages de la mondialisation ne sont pas répartis équitablement; bon nombre d'obstacles
subsistent. Selon le dernier rapport sur le développement humain, 1,2 milliard de nos semblables ne disposent
toujours que de moins d'un dollar par jour pour vivre. Aggravé par les violations des droits de la personne et
par une importante détérioration de l'environnement, l'écart grandissant entre les riches et les pauvres rend
tout progrès dérisoire, que ce soit en Afrique ou ailleurs dans le monde. Comme nous l'avons répété
constamment durant la séance d'ouverture d'hier, nous devons unir nos efforts pour réduire cet écart.
La sombre réalité à laquelle nous devons collectivement faire face montre qu'il faut une coopération
internationale plus efficace. Des réunions comme celle-ci -- qui permettent de préciser les défis -- aident à
mettre en place une telle coopération. Les solutions que nous proposons ici ne seront valables que si elles
débouchent sur des mesures concrètes et sur des changements réels et perceptibles dans la vie des
personnes qui vivent dans la pauvreté.
Le Canada participera aux efforts visant à ce qu'il en soit ainsi.
Je vous remercie.